Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État chargée de la transition écologique et solidaire.
Madame la ministre, vous venez nous présenter les résultats de l'exécution en 2018 des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique ». Nous pourrons également aborder le compte d'affectation spéciale « Aide à l'acquisition de véhicules propres », qui retrace les crédits du bonus-malus automobile et de la prime à la conversion, compte qui disparaît en 2019 - vous pourrez d'ailleurs nous rappeler les raisons de sa suppression.
Les dépenses de la mission en 2018 s'élèvent à 13,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 13,5 milliards d'euros en crédits de paiement, ce qui représente des augmentations d'environ 13 % par rapport aux crédits exécutés en 2017. Si on laisse de côté les mesures de périmètre entre 2017 et 2018, il est incontestable que cette hausse témoigne de l'augmentation des moyens alloués aux politiques portées par la mission. L'année 2018 a ainsi emporté la généralisation du chèque énergie ainsi qu'un recalibrage de la prime à la conversion.
Alors que le Premier ministre a annoncé dans sa déclaration de politique générale que les « douze prochains mois seront ceux de l'accélération écologique », peut-être pourrez-vous nous en dire plus sur les mesures envisagées à ce stade par le Gouvernement, en particulier en matière fiscale ?
Notre collègue Jean-François Husson, rapporteur spécial des crédits de la mission et des comptes d'affectation spéciale, vous interrogera et nous passerons ensuite aux questions de l'ensemble des commissaires.
Le bilan de l'exécution pour l'exercice 2018 du budget du ministère de la transition écologique et solidaire comprend les crédits de la mission, les crédits rattachés de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) et le compte d'affectation spéciale « Transition énergétique ».
Le montant des autorisations d'engagement (AE) ouvertes en 2018 s'élève à 29,7 milliards d'euros, en augmentation de 2,6 milliards d'euros par rapport à 2017, soit une progression de 9,5 %. Le montant des crédits de paiement (CP) ouverts en 2018 s'élève à 29,2 milliards d'euros, en augmentation de 2 milliards d'euros par rapport 2017, soit une progression de 8,2 %.
Ces augmentations s'expliquent principalement par trois raisons : la budgétisation du financement de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), à hauteur de 600 millions d'euros, alors qu'elle était auparavant financée par une taxe affectée, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) ; la montée en puissance du chèque énergie avec l'augmentation de 500 millions d'euros des crédits du programme 345 pour accompagner la transition énergétique et la hausse du coût des énergies pour les plus modestes ; enfin, l'augmentation des dépenses de transition énergétique pour 200 millions d'euros environ, à la suite des nouvelles estimations de la Commission de régulation de l'énergie (CRE).
En loi de finances rectificative (LFR), assez peu de mouvements ont été opérés, eu égard au montant des crédits de budgétisation initiale.
Ainsi, 278,4 millions d'euros supplémentaires ont été ouverts sur les programmes suivants : 115,5 millions d'euros sur le programme 198 « Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres » ; 85,5 millions d'euros sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » ; 77,4 millions d'euros sur le programme 792 « Contribution au financement de l'attribution d'aides au retrait de véhicules polluants ».
Parallèlement, 784 millions d'euros ont été annulés sur les programmes suivants : 594,6 millions d'euros sur le programme 764 « Soutien à la transition énergétique » ; 89,9 millions d'euros sur le programme 203 « Infrastructures et services de transports » ; 50,1 millions d'euros sur le programme 345 « Service public de l'énergie » ; 16,4 millions d'euros sur le programme 181 « Prévention des risques » ; 14,3 millions d'euros sur le programme 190 « Recherche dans les domaines de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » ; 6,5 millions d'euros sur le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » ; 5,5 millions d'euros sur le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologique » ; 4,4 millions d'euros sur le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » ; 2,3 millions d'euros sur le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture ». C'est généralement le gel de la réserve de précaution qui mène à une annulation en fin d'année.
Le montant des AE consommées atteint 28,2 milliards d'euros, soit 95,1 % des crédits ouverts, tandis que celui des CP consommés atteint 28,5 milliards d'euros, soit 97,6 % des crédits ouverts. Le taux de consommation des crédits est légèrement supérieur à celui de 2017, qui était de 94,4 % en AE et de 96,7 % en CP.
En CP, le montant des crédits non consommés diminue de 192 millions d'euros entre 2017 et 2018, passant de 903 millions d'euros à 711 millions d'euros. Cette baisse s'explique notamment par un schéma de fin de gestion moins contraignant que l'an dernier : les seules annulations de crédits ayant été opérées sur des crédits initialement mis en réserve, elles n'ont pas perturbé la programmation de la dépense. Par ailleurs, contrairement aux années précédentes, le programme 203 n'a pas été soumis à l'obligation de reporter une partie de ses fonds de concours, permettant d'améliorer la consommation de ce programme.
J'en viens aux faits marquants.
Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » a bénéficié du dégel de sa réserve et de l'ouverture de 85,5 millions d'euros en LFR en remboursement de l'avance qu'il avait dû consentir au CAS « bonus-malus » au titre de la prime à la conversion - 38 millions d'euros - et pour couvrir les besoins de l'enveloppe spéciale de transition énergétique (ESTE), à hauteur de 60 millions d'euros.
Le programme 205 « Affaires maritimes » a bénéficié d'une levée partielle de sa réserve pour régler, en toute fin de gestion, des arriérés de dette sociale.
Le programme 345 « Service public de l'énergie » a bénéficié d'une levée partielle de sa réserve en CP et d'une ouverture importante en AE pour résorber une partie du report des charges déterminées par la CRE pour les différents opérateurs, passant ainsi de 628,9 millions d'euros à 542 millions d'euros.
Les régimes sociaux ont nécessité un dégel intégral de leur mise en réserve et même, pour celui des transports terrestres, de l'ouverture de 115,5 millions d'euros supplémentaires en LFR.
Le taux de consommation des crédits des CAS dédiés aux trains d'équilibre et à la transition énergétique a fortement progressé, mais il conserve un niveau très bas pour le CAS relatif à l'électrification rurale, à 52,7 %.
S'agissant des dépenses de personnel, les crédits ouverts en 2018 s'élèvent à 2,86 milliards d'euros, en diminution de 13 millions d'euros par rapport à 2017, soit 0,4 %.
Le montant des crédits consommés atteint 2,82 milliards d'euros, soit 98,9 % des crédits ouverts. Le taux de consommation des crédits de personnel est donc légèrement supérieur à celui de 2017, qui s'élevait à 98 %.
Le schéma d'emplois assigné au ministère était de 828 équivalents temps plein (ETP) en loi de finances initiale et a été exécuté à hauteur de 801 ETP.
Le plafond d'autorisation d'emplois du ministère s'élevait à 40 328 équivalents temps plein travaillé (ETPT) et a été réalisé à hauteur de 40 008, dont 9 163 au titre du pôle ministériel de la cohésion des territoires, soit une sous-consommation de 320 ETPT, soit moins de 1 % du plafond d'emplois.
Le schéma d'emplois du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dit BACEA, assigné en loi de finances initiale était nul, avec un plafond d'autorisation d'emplois fixé à 10 536 ETPT et une exécution du plafond d'emplois à 10 431 ETPT.
Le schéma d'emplois assigné aux opérateurs du ministère était quant à lui de 504 ETP, soit un plafond d'autorisation d'emplois de 25 325 ETPT, pour une exécution établie à 24 937 fin 2018.
Enfin, le CAS « bonus-malus » n'a pas été supprimé, puisque seule la prime à la conversion a été budgétisée sur le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », en 2019. À la suite de cette rebudgétisation, le CAS a été réorganisé avec la création de deux programmes : le programme 797 « Aide à l'acquisition de véhicules propres pour les personnes physiques » et le programme 798 « Aide à l'acquisition de véhicules propres pour les personnes morales ».
Pouvez-vous faire le point sur le lancement des contrats de transition écologique (CTE) ? Comment le ministère a-t-il sélectionné les quarante nouveaux CTE lancés en juillet prochain ?
Quel bilan faites-vous de la généralisation du chèque énergie en 2018 ? Comment expliquez-vous que le taux d'usage du chèque énergie par les ménages ne soit que de 70 %, ce qui est inférieur aux prévisions ? Comment imaginez-vous l'extension du chèque énergie à deux millions de ménages supplémentaires cette année ?
La commission des finances du Sénat a plusieurs fois réclamé que le Parlement soit consulté sur le montant des charges de soutien au développement des énergies renouvelables, eu égard aux montants en jeu. Envisagez-vous d'agir en ce sens ?
Comment expliquez-vous la sous-estimation importante du rendement du malus automobile, mais également du nombre de demandes de primes à la conversion en 2018 ?
Enfin, pourquoi le coût total du protocole d'indemnisation d'EDF pour la fermeture anticipée de la centrale nucléaire de Fessenheim n'est-il pas encore connu ?
La démarche qui sous-tend les CTE est simple : il s'agit d'accompagner les territoires souhaitant se doter d'un projet à dominante écologique, laquelle s'ajoute généralement à une composante économique et sociale. Quatre CTE visent des territoires touchés par la fermeture d'une centrale à charbon. Les autres, plus proactifs, portent sur des territoires souhaitant évoluer sur des sujets écologiques. L'initiative lancée par Sébastien Lecornu a abouti à la sélection d'une première cohorte d'une dizaine de CTE, dans une approche dite bottom-up, sans cadre préétabli. Les projets sont donc très variés : une communauté urbaine globale, une réindustrialisation, des mobilités, des liaisons entre énergies renouvelables et agriculture, la biodiversité. J'ajoute qu'il n'existe pas de financement dédié, mais que la contractualisation facilite la mobilisation de financements de droit commun, voire privés, et apporte un appui très apprécié en matière d'ingénierie.
Une dizaine de nouveaux projets devraient être finalisés à l'été et nous souhaitons en sélectionner une cinquantaine d'ici au 9 juillet prochain, sachant que nous avons reçu 127 candidatures. Pour assurer la cohérence de la démarche, nous travaillons à une coordination entre les différents dispositifs portés par l'État, notamment le programme Action coeur de ville, les territoires d'innovation, les appels à projets « French impact », les territoires d'industrie. À moyen terme, un contrat de développement devra forcément réaliser une synergie entre les dimensions écologique et économique. Nous recherchons également une cohérence territoriale avec le plan climat-air-énergie territorial (PCAET) et le schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT). Nous lancerons dès que possible de nouvelles cohortes, jusqu'à banaliser complètement la démarche.
Selon nos données, le taux de recours au chèque énergie est de 80 %, monsieur le rapporteur, situé plutôt dans la fourchette haute pour une prestation sociale. Le chèque énergie est un progrès récent. En 2019, pour sa deuxième année d'application à la France entière, les montants individuels devraient passer à 272 euros et le nombre de foyers éligibles à 5,6 millions.
Cette aide de l'État versée par l'Agence de services et de paiement (ASP) doit être mieux relayée par les services sociaux de proximité. Nous devons améliorer la coordination avec les collectivités territoriales, mairies et départements. C'est une marge de progrès pour l'année prochaine. Nous avons par ailleurs simplifié les modalités de mobilisation, mais nous devons parfaire la communication avec les usagers pour atteindre un taux de recours supérieur à 90 %. Nous prévoyons environ 850 millions d'euros de dépenses sur le chèque énergie en 2019.
Pour le compte d'affectation spéciale « Aide à l'acquisition de véhicules propres », 365 millions d'euros de crédits ont été ouverts. Pour ce qui est du rendement du malus écologique, la prévision en PLF était de 388 millions d'euros, pour une réalisation de 596 millions d'euros résultant d'une hausse de l'achat de véhicules neufs de type Sport Utility Vehicle (SUV).
Le conseil d'administration d'EDF a examiné une première version du protocole d'indemnisation relatif à la fermeture de Fessenheim, mais le décalage de la date de fermeture des réacteurs a conduit à le renégocier. Il est à présent pratiquement finalisé. Il devra, aux termes de la loi pour un État au service d'une société de confiance, passer par un comité interministériel de transaction qui vient d'être créé - le 25 avril dernier - au ministère de la transition écologique. La fermeture du premier réacteur est prévue pour mars 2020, celle du second à la fin de l'été 2020.
Merci, madame la ministre, pour ces premiers éclairages.
Nous avons bien noté que le rendement du malus automobile avait progressé, mais cela veut dire que l'objectif de conversion du parc n'est pas complètement atteint ; les gens achètent notamment plus de véhicules de type Sport Utility Vehicle (SUV) - nous les voyons circuler à Paris... Est-ce à dire que le barème n'est pas adapté ?
Le coût des dépenses fiscales et autres crédits d'impôt a connu une forte hausse, de plus d'un milliard d'euros, pour atteindre près de 4,7 milliards d'euros. C'est normal, me direz-vous, puisque cela dépend des tarifs de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Le commissariat général au développement durable et la Cour des comptes - saisie au titre de l'article 58 alinéa 2 de la LOLF - affirment que certaines exonérations de TICPE sont dommageables à l'environnement. Que répondez-vous ? Où en êtes-vous concernant la suppression du taux réduit sur le gazole non routier (GNR) ? Nous avions considéré l'an dernier qu'il fallait à tout le moins l'étaler dans le temps et épargner au maximum les PME. On est finalement allé au-delà en renonçant à la suppression de ce taux réduit en 2019.
Le coût du crédit d'impôt transition énergétique (CITE), lui aussi, est reparti à la hausse puisqu'il atteint 1,9 milliard d'euros en 2018, contre 1,7 milliards d'euros en 2017. Or, je le rappelle, le CITE devait prendre la forme d'une prime en 2019, avant que le Gouvernement annonce sa transformation en une aide de l'agence nationale de l'habitat (ANAH) pour partie et en crédit d'impôt pour une autre partie à compter de 2020. Qu'est-ce qui justifierait l'une et l'autre de ces hypothèses et où en est-on exactement ?
Lors de l'examen du projet de loi relatif à la restauration de Notre-Dame de Paris, nous nous sommes interrogés sur la création d'un éventuel crédit d'impôt pour les personnes modestes non assujetties à l'impôt sur le revenu, qui n'auraient donc pas bénéficié de la réduction fiscale sur les dons versés en vue de la restauration de la cathédrale. Il peut en aller de même en matière de transition énergétique, afin que celle-ci n'aggrave pas les inégalités sociales. Pour que cette transition réussisse, il est essentiel d'aider les ménages modestes à rénover leur logement, à utiliser de nouvelles sources d'énergie, à acheter un véhicule moins polluant. Notre commission a mesuré, grâce à l'appui de la Cour des comptes, les résultats positifs du programme Habiter mieux, qui aide les propriétaires modestes à réduire la consommation énergétique de leur logement. Toutes les dépenses fiscales ayant un objet de transition écologique et énergétique sont-elles à présent sous forme de crédit d'impôt ou de prime ? Certains publics modestes échappent-ils encore à de telles incitations ?
Les dépenses du CAS « Aide à l'acquisition de véhicules propres » représentaient 550 millions d'euros en 2018. Ce chiffre dissimule des mouvements contraires. La prime à la conversion, qui accompagne l'achat de tout type de véhicule, augmente fortement puisqu'elle a dépassé la prévision de 76 % et conduit à abonder le CAS de nouveau ; en revanche, les bonus versés sur les achats de véhicules électriques ont été inférieurs de 37 % au montant prévisionnel en raison de ventes plus faibles que prévu - même si 40 000 bonus ont été versés. Le mouvement de transition du parc est en définitive assez fort, mais il doit moins aux achats de véhicules électriques, dont l'offre ne sera massive et donc à plus bas coût que dans les mois à venir, qu'à la prime à la conversion, qui a fini à force d'ajustements par trouver son public. En 2018, 255 000 ménages l'ont réclamée, et nous estimons ce chiffre à 400 000 en 2019. Le Premier ministre a dit dans son discours de politique générale que nous visions désormais le million de primes à la conversion. Bref, le dispositif fonctionne et transforme effectivement le parc automobile, ce qui a un effet sur le climat.
Un mot sur les niches fiscales. Nous suivons les travaux de Bénédicte Peyrol sur le sujet. Une mission a été confiée à l'inspection générale des finances et au conseil général de l'environnement et du développement durable pour évaluer l'impact écologique de la fiscalité. Gérald Darmanin pilote les réflexions sur les niches fiscales. Le Gouvernement envisage de revenir sur celle relative au GNR de manière étalée dans le temps, afin de rendre le dispositif réellement incitatif.
Nous avons pris l'engagement de transformer le CITE en prime, afin d'accélérer le versement des aides. Le fait de devoir avancer de l'argent pendant une période relativement longue ralentit en effet l'engagement des travaux, et le prélèvement à la source n'y a rien changé. L'évolution du dispositif sera engagée à compter de l'exercice 2020. À terme, la prime sera fusionnée avec celles versées par l'Anah aux ménages les plus modestes. L'Anah n'étant toutefois pas capable d'absorber la transformation du dispositif d'un coup, nous procéderons par étapes. À moyen terme, la prime sera modulée selon les revenus du ménage.
La plupart des outils fiscaux sont désormais des aides directes : c'est le cas de la prime à la conversion, du bonus écologique, du chèque énergie - même si ces aides ne sont pas toutes versées selon les mêmes circuits -, du CITE bientôt. Ne retenir que des crédits d'impôt ou des primes est une exigence de justice sociale et permet de toucher tous nos concitoyens, qu'ils soient ou non assujettis à l'impôt sur le revenu.
La lutte contre les passoires thermiques est un vrai sujet. Le taux de recours au chèque énergie reste faible, même à 80 %. Quelles sont les pistes de simplification pour rendre le dispositif plus lisible ? La partie rénovation du dispositif « Action coeur de ville » permet d'en faire la promotion. N'oublions pas que ce sont les questions énergétiques qui ont déclenché le mouvement des Gilets jaunes.
Des mesures de simplification ont été prises entre l'avant-dernière campagne et celle de cette année. D'une part, le chèque a été dématérialisé auprès des fournisseurs d'énergie - et une fois utilisé, le fournisseur d'énergie rappelle automatiquement au consommateur qu'il peut être utilisé à la bonne période. D'autre part, les résidents d'Ehpad et d'autres types de résidences collectives peuvent, depuis un décret récent, en bénéficier. Il faut en toute hypothèse un peu de temps pour qu'une prestation soit utilisée. Mais je vous rejoins : 80 % de recours, ce n'est pas entièrement satisfaisant. Nous avons identifié deux leviers pour améliorer cet indicateur : la mobilisation des services des collectivités, tels les CAF, et la promotion du dispositif auprès des Français.
Pouvez-vous nous apporter des précisions sur l'exécution des opérations retenues sur les territoires à énergie positive pour la croissance verte ? Les appels à projets avaient conduit à en lancer plusieurs vagues, à l'initiative des territoires, avec des financements spécifiques. Certains projets ont cependant été remis en question. Où en est-on à présent ?
Le marché mondial de démantèlement des centrales nucléaires est évalué à 220 milliards d'euros. À lui seul, le marché français représente environ 650 millions d'euros par an et l'on peut anticiper un fort développement dans les dix ans à venir. La France est en pointe dans ce secteur. Quelles sont les perspectives de développement de cette filière prometteuse en termes d'emplois ?
Merci, madame la ministre, pour vos informations. Quelles sont les relations qu'entretient votre ministère avec les agences de l'eau, et que pouvez-vous nous dire de la qualité de l'eau ? Dans quelles conditions articulez-vous vos interventions avec celles des agences de l'eau et du ministère de l'agriculture, en particulier en ce qui concerne le développement de l'agriculture biologique et le plan Ambition Bio ? Les agences sont appelées à contribuer de plus en plus largement en la matière, et leur doctrine diffère parfois de celle du ministère de l'agriculture.
Certes, le CITE coûte cher : 1,9 milliard d'euros. Le Premier ministre a aussi critiqué le fait que ses bénéficiaires n'étaient pas forcément les plus modestes. L'Anah, qui a connu des périodes difficiles en matière de financement, s'est vu fixer l'objectif de traiter 75 000 dossiers par an. La Cour des comptes, saisie dans le cadre de l'article 58 paragraphe 2 de la LOLF, a pointé le risque que l'exigence de quantité l'emporte sur celle de qualité des dossiers. Les sommes affectées au CITE seront-elles intégralement transférées sur un autre dispositif - que l'Anah ou un autre acteur pourrait prendre en charge ? Les annonces du Premier ministre sur ce sujet n'ont pas été très claires. S'oriente-t-on vers une autre logique, plus axée sur les résultats ?
Je reviendrai pour ma part sur le chèque énergie. Je ne retrouve nulle part les 80 % dont vous parlez. La note de la Cour des comptes sur l'analyse de l'exécution budgétaire pour l'année 2018 mentionne, page 55, le chiffre de 70 %, le nombre de chèques distribués et encaissés s'élevant respectivement à 3,6 millions et 2,5 millions. Vos partenaires sont en outre nombreux : vous avez parlé de la CAF, des CCAS, ou des départements via le fonds de solidarité pour le logement. On voit également poindre le revenu universel d'activité, le RSA, la prime d'activité, les APL... Ne peut-on se doter d'une vision globale, en mettant autour de la table tous les partenaires ?
Pour mettre en oeuvre les principes inscrits dans la loi de transition énergétique pour la croissance verte, une enveloppe spéciale transition énergétique a été mise en place. Ce fonds a été confié à la Caisse des dépôts et consignations. À ce jour, 3 000 conventions ont été conclues, pour un total de 626 millions d'euros - 606 millions pour les seuls territoires à énergie positive pour la croissance verte. Nous sommes en train de résorber les difficultés de suivi budgétaire de ces dépenses. Au 30 mai 2019, 300 millions d'euros ont été versés. Pour 2020, nous prévoyons 200 millions d'euros de paiements compte tenu des crédits disponibles à la Caisse des dépôts - sachant que nous avons alimenté ce fonds à hauteur de 535 millions d'euros. Le besoin de crédits de paiement devrait être de 58 millions pour 2020 et probablement de 72 millions d'euros pour 2021. Nous sommes à présent en mesure de suivre les paiements conformément aux conventions signées avec les collectivités concernées.
Je vous rejoins sur le démantèlement des centrales nucléaires, qui peut constituer un domaine d'excellence française. Un comité de filière nucléaire, sous l'égide du ministre de l'économie et des finances et du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, travaille aussi sur la question du démantèlement - posée dans le projet de territoire de Fessenheim. Nous pouvons sans doute développer une filière et des emplois. S'agissant de Fessenheim, la difficulté est de convaincre nos partenaires de l'autre côté du Rhin de la pertinence du technocentre, qui pourrait être un point d'appui pour la filière française du démantèlement et recevoir les déchets en provenance de centrales démantelées en Allemagne.
Les six agences de l'eau, dont le budget global représente 2,1 milliards d'euros, sont des opérateurs très importants du ministère. Elles sont compétentes à la fois pour le petit cycle - qualité de l'eau au sens strict et assainissement - et pour le grand cycle - respect des masses d'eau et équilibre de nos écosystèmes. La fin de de la première phase des assises de l'eau a donné lieu à la mise en place d'une enveloppe de prêt à la Caisse des dépôts et consignations pour financer l'assainissement et le repositionnement de ces agences. Le ministre d'État et moi-même annoncerons les conclusions de la deuxième phase des assises le 1er juillet prochain.
La qualité de l'eau reste très bonne en France puisque plus de 98 % des Français ont accès à une eau de qualité, ce qui est très supérieur aux standards. Toutefois, des tensions saisonnières subsistent. Le comité de suivi de la situation hydrique que j'ai présidé il y a quelques semaines a révélé que ni les nappes ni les cours d'eau n'avaient totalement reconstitué des niveaux satisfaisants. Aussi le ministère de l'agriculture et le mien ont-ils souhaité avancer sur les retenues d'eau pour les agriculteurs, dans des conditions maîtrisées. Une circulaire a été cosignée à cet effet par nos deux ministères en avril dernier.
Les agences de l'eau sont bien sûr des acteurs importants pour l'agriculture, ne serait-ce que parce qu'elles collectent la redevance pour pollution diffuse, affectée à la transition vers l'agriculture biologique. Nous sommes en outre en train de configurer les paiements pour services environnementaux, soit 150 millions d'euros, qui serviront aux agences d'appui pour la transition bio et agroécologique, avec une priorité sur la protection des captages. Je n'ai pas connaissance de doctrines spécifiques, mais il est vrai que les comités de bassin sont présidés par les élus et peuvent se doter d'une doctrine légèrement différente, sous le contrôle toutefois de toutes les parties prenantes - agriculteurs, usagers, etc.
L'enjeu de la rénovation thermique des bâtiments est de trouver le bon équilibre entre quantité et qualité. Le Premier ministre entend s'assurer que les rénovations sont concentrées sur les rénovations les plus efficaces d'une part, les ménages qui en ont le plus besoin d'autre part. La refonte du barème des aides ANAH et du CITE améliorera l'efficacité du dispositif : les aides seront en quelque sorte proportionnelles à la quantité de carbone évitée, suivant les recommandations de France Stratégie et du rapport Quinet, et ainsi plus cohérentes avec les programmes « Habiter mieux agilité » et « Habiter mieux sérénité » de l'ANAH. Les arbitrages relatifs au nombre et aux types de ménages aidés n'ont pas encore été rendus, mais la philosophie reste de concentrer les aides sur ceux qui en ont le plus besoin, afin de rendre les rénovations possibles dans toutes les couches de la population. Nous souhaitons même étendre le bénéfice de ces aides aux propriétaires bailleurs, ce qui est indispensable pour rénover les copropriétés.
Le taux d'usage du chèque énergie que j'ai indiqué est le plus récent fourni par la direction générale de l'énergie et du climat concernant la campagne 2018 : il s'élève à 78 %, soit 424 millions d'euros consommés rapportés à 539 millions d'euros émis. La trajectoire de la campagne 2019 étant un peu meilleure, nous espérons passer la barre des 80 %.
Il nous reste à vous remercier.
La réunion est close à 17 h 30.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.