Conjointement avec la commission des finances, la commission a entendu M. Carlos Ghosn, président-directeur général de Renault.
Le compte rendu de cette audition figure à la rubrique de la commission des finances.
Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président.
La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Jean-Marc Thomas, président d'Airbus France.
A titre liminaire, M. Jean-Paul Emorine, président, a remercié le président et rappelé le très bon accueil reçu par la délégation de la commission qui s'était rendue, en 2005, sur le site d'Airbus à Toulouse.
Abordant la présentation de l'entreprise Airbus, M. Jean-Marc Thomas, président d'Airbus France, a indiqué que le chiffre d'affaires et le résultat d'exploitation de l'entreprise s'étaient élevés respectivement, en 2005, à 22 et 2,3 milliards d'euros et que le budget consacré à la recherche et au développement se montait à 2,3 milliards d'euros également. Deux records ont été atteints cette même année, a-t-il poursuivi, avec 378 avions livrés, et 1.055 commandes nettes, celles-ci s'élevant ainsi, au total, à 6.307 dont 4.130 appareils en service : avec de tels résultats, Airbus apparaît, sur le marché, « 1er ex-aequo » avec Boeing. Rappelant qu'en 35 ans, Airbus avait développé une flotte de 14 types d'appareils et comptait désormais 230 clients, il a ensuite relevé qu'il s'agissait d'une société mondiale aux racines européennes, forte de 57.000 salariés, disposant de filiales nationales dans les quatre pays fondateurs, la France, l'Allemagne, l'Angleterre et l'Espagne, et ayant son siège à Blagnac. Axant ensuite son propos sur les résultats du secteur aéronautique mondial, il a qualifié 2005 d'année « exceptionnelle », avec 668 appareils livrés par Airbus et Boeing et 2.057 commandes nettes, dont 1.002 pour Boeing, cette dernière entreprise se plaçant toutefois en première position en termes de valeur, du fait de la taille plus importante de ses avions. Tous les indicateurs, a-t-il ajouté, y compris chez Boeing, montrent que les commandes pour l'année 2006 reviendront à un ordre de grandeur plus raisonnable. Indiquant ensuite que, sur le créneau des avions de 100 à 200 places, Airbus constituait une véritable référence, il a jugé la situation un peu moins favorable sur les 200-275 places, notamment du fait de l'effet d'annonce lié au lancement du Boeing 787, ainsi que sur les appareils de 275-375 places, l'arrivée de l'A350, annoncée, devant s'effectuer après celle du 787. Il a précisé également que les quadri moteurs étaient moins demandés par les compagnies et que, s'agissant de l'A380, il convenait d'attendre désormais la première livraison commerciale pour relancer le processus de commandes. Il a enfin souligné qu'en dix ans, depuis 1995, le carnet de commandes était passé de 615 appareils à plus de 2.000 et a ajouté que le « creux » enregistré en 2003 avait été absorbé par Boeing.
après avoir souligné que la forte progression du chiffre d'affaires en 2005 était liée à la hausse des livraisons, a jugé que les motifs de satisfaction étaient nombreux, mais qu'un certain nombre de défis devraient être relevés dans l'avenir. Après avoir rappelé qu'en 2004 et 2005, Airbus avait bénéficié de la très bonne couverture de change sur le dollar, il a insisté sur la nécessité d'accroître la productivité et d'investir dans la recherche et le développement, afin de faire face à la détérioration récente de cette couverture, ainsi qu'à « l'emballement des prix à la baisse » sur le marché.
Abordant la question de l'organisation de la production, M. Jean-Marc Thomas, a évoqué les spécialisations par pays : la voilure en Angleterre, le fuselage en Allemagne, l'empennage horizontal en Espagne, et la pointe avant en France. Il a également précisé que les tronçons d'Airbus étaient transportés par tous les modes de transport des seize sites de production en Europe vers les chaînes d'assemblage situées à Hambourg et à Toulouse. S'agissant des sites situés en France, il a précisé que celui de Méaulte était spécialisé dans les pièces en alliage léger et les technologies d'assemblage, celui de Nantes dans les composites, celui de Saint-Nazaire dans l'assemblage final des pointes avant et du fuselage central, et celui de Saint-Eloi, situé dans la région toulousaine, dans les mâts réacteurs. Rappelant qu'en 2004 et 2005, 320 et 378 appareils avaient été respectivement livrés, il a annoncé que plus de 400 livraisons d'appareils étaient prévues en 2006, 2007 et 2008. Qualifiant ensuite Airbus de « locomotive économique », il a expliqué que la filiale française comptait 17.500 employés, dont 11.500 à Toulouse, un emploi dans l'entreprise générant environ 2 emplois de sous-traitance. Un tiers de la production des avions, a-t-il précisé, est effectué directement par Airbus, les deux autres tiers étant sous-traités, la moitié avec des partenaires, responsables de la définition et de la production, et l'autre moitié avec des partenaires plus ponctuels.
Après avoir indiqué que la croissance moyenne du trafic depuis plus de 20 ans était d'environ 5 %, M. Jean-Marc Thomas, a relevé que plus de 800 appareils par an devraient, sur cette base, être livrés dans les 20 ans à venir, puisque l'on compterait trois fois plus de passagers et deux fois plus d'avions à livrer. Enfin, il a relevé qu'une réflexion était menée au sein de l'entreprise sur les éventuelles perspectives en cas de retournement dans les années à venir.
Rappelant qu'Airbus avait toujours été leader pour les innovations technologiques, notamment avec l'A 320, qui a introduit de nombreux standards mondiaux, mais que l'entreprise avait dû mener un développement rapide pour conquérir 50 % de parts de marché, il a relevé que, parallèlement, Boeing avait lancé moins d'appareils mais que les Etats-Unis avaient très fortement investi dans la recherche et le développement, particulièrement les laboratoires américains, notamment la NASA (national aeronautics and space administration), qui a annoncé, pour 2006-2010 une enveloppe de 4 milliards de dollars, soit un doublement des investissements. Celle-ci, a-t-il précisé, a reçu, pendant dix ans, 500 millions de dollars pour le développement du fuselage et des ailes en composite. Il a ensuite insisté sur l'impérieuse nécessité d'accroître l'investissement d'Airbus dans la recherche et le développement, et précisé qu'un doublement de l'effort était envisagé dans les années à venir.
Regrettant fortement l'insuffisance de transparence des aides publiques américaines, s'agissant, notamment, des subventions directes accordées à la NASA, des abandons de brevets, des contrats passés entre la NASA et Boeing ou des incitations fiscales, M. Jean-Marc Thomas, président d'Airbus France, a souligné que, depuis 1992, Airbus avait remboursé 5,36 milliards d'euros, soit 40 % de plus que la somme reçue. Il s'est également félicité de la transparence du système des avances remboursables.
En réponse à M. Jean-Paul Emorine, président, qui l'interrogeait sur la réaction de l'Union européenne face au constat de l'insuffisance de l'investissement dans la recherche et le développement, M. Jean-Marc Thomas, a relevé qu'on était passé, aux Etats-Unis, d'une production majoritairement civile à une production majoritairement axée sur la défense, cette orientation facilitant le financement de la recherche et la réduction des prix.
s'est interrogé sur la réduction, en 2005, du budget d'Airbus en matière de recherche et de développement et sur les moyens de transformer les « royalties » en aides à la recherche.
après avoir félicité le président d'Airbus France pour la lucidité de sa présentation, s'est interrogé sur les futures caractéristiques du marché mondial, et sur les conséquences, en matière de transfert de technologie, de la décision de créer un site d'assemblage en Chine.
Après s'être interrogé sur l'opportunité d'élargir le marché à d'autres intervenants que Boeing et Airbus, M. Daniel Reiner a interrogé les intervenants sur les raisons du moins bon positionnement d'Airbus sur les avions moyens, par rapport aux petits appareils et aux très gros.
En réponse à M. Christian Gaudin, M. Jean-Marc Thomas, président d'Airbus France, a relevé que la part du budget consacrée au développement ne baissait pas à méthode comptable constante, et que celle en faveur de la recherche et technologies, augmentait. S'agissant des perspectives du marché mondial, il a indiqué que, dans les vingt ans à venir, la croissance du trafic aérien serait supérieure à celle de l'Europe ou des Etats-Unis, et expliqué que des discussions avec la Chine étaient en cours, s'agissant du développement de la production d'avions dans ce pays, qui devraient aboutir à la fin de l'été 2006, pour un démarrage en 2008.
a précisé que, sur 1.055 appareils commandés en 2005, près de 220 émanaient de la Chine, et 260 de l'Inde, les commandes de ces deux pays représentant un total de 40 %.
Après avoir développé les perspectives stratégiques, commerciales et industrielles d'Airbus, M. Jean-Marc Thomas a répondu à M. Christian Gaudin, qui l'interrogeait sur les problèmes de recrutement et sur l'utilité des pôles de compétitivité, qu'en 2005, 1.600 personnes avaient été recrutées sur les quatre sites français, essentiellement dans deux filières : les études et la production. S'agissant des pôles de compétitivité, il a insisté sur l'importance du triangle industrie/recherche/formation et sur la mise en place d'une dynamique entre petites et moyennes entreprises et laboratoires pour définir des formations communes.
s'est ensuite interrogé sur les éventuelles difficultés de l'A 380 en Chine, et sur les conséquences du désengagement de BAE, de Largardère et de Daimler Chrysler. M. Jean-Marc Thomas, président d'Airbus France, a précisé, s'agissant de l'A 380, qu'après la première vague de commandes, effectuées par des compagnies attirées par la nouveauté de l'appareil, la deuxième vague interviendrait seulement après la commercialisation des premiers avions commandés. Indiquant que la certification était prévue en novembre, il a relevé que les essais statiques et d'évacuation avaient été très concluants, et annoncé la livraison des premiers appareils à Singapour avant la fin de l'année 2006. Il a ensuite souligné que les retraits de Lagardère et Daimler avaient été annoncés à l'avance, et que le marché financier avait bien réagi.
A M. Paul Raoult qui l'interrogeait sur les réactions aux choix de développement industriel en Espagne, et qui regrettait que le nom du constructeur de l'avion n'apparaisse pas plus clairement sur les appareils, M. Jean-Marc Thomas a, d'une part, rappelé que l'Espagne avait souhaité, historiquement, avoir une position de leader dans le domaine des composites et qu'elle se caractérisait par un dynamisme très important et, d'autre part, confirmé que les compagnies aériennes personnalisaient l'aménagement intérieur des appareils, et souhaitaient disposer d'une bonne visibilité.