La commission a procédé à l'audition de M. Philippe Josse, directeur du budget, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2009-2014 et portant diverses dispositions concernant la défense.
a rappelé que, comme toutes les lois de programmation, cette future loi constituerait un déterminant important pour l'évolution des finances publiques au cours des six prochaines années. C'est pourquoi il est très souhaitable de recueillir les éclairages du directeur du budget.
Il a précisé que M. Philippe Josse, membre de la Commission du Livre blanc, avait participé, très en amont, aux réflexions et à la préparation des arbitrages sur la base desquels ce projet de loi a été élaboré. De même, il participera au comité financier, dont la création est prévue par le Livre blanc, et qui sera chargé de procéder « à un examen contradictoire de la soutenabilité financière de la programmation et au suivi régulier de la politique d'engagements du ministère en matière d'investissements ».
Cette loi de programmation innove en institutionnalisant le dialogue entre le ministère de la défense et celui du budget, avec l'objectif de l'améliorer et de limiter les sources de blocage nuisibles à la mise en oeuvre de la loi.
Il a observé que, comme les précédentes, la LPM couvrirait une période de six ans, mais qu'un point d'étape d'ensemble doit être réalisé dès 2010, à l'occasion de l'élaboration du prochain budget triennal, et qu'une révision de la loi sera opérée au bout de quatre ans, avec l'adoption d'une nouvelle loi de programmation couvrant la période 2013-2018.
Il a souhaité des éclairages sur le cadrage financier retenu, qui doit permettre d'augmenter très sensiblement les crédits d'équipement, ainsi que sur les incidences du plan de relance, qui vient modifier le profil des annuités de la LPM.
Procédant tout d'abord à un bref bilan de la loi de programmation militaire (LPM) 2003-2008, M. Philippe Josse a porté les appréciations suivantes :
- la loi de programmation a été globalement satisfaisante sur le plan financier. Les crédits de la mission « Défense », qui atteignaient 25 milliards d'euros en 2002, ont été portés à 30 milliards d'euros en 2008, hors gendarmerie et hors pensions, soit une progression de quelque cinq milliards d'euros, permettant d'injecter chaque d'année dans la défense une somme presque équivalente au budget de la justice. La loi a été globalement respectée en construction et en exécution budgétaire (à l'exception de l'année 2004) ;
- la LPM 2003-2008 a été une loi de recapitalisation de l'outil de défense. Sur les cinq milliards d'augmentation, 3,5 ont ainsi été consacrés à l'équipement ;
- la période de programmation a permis le traitement de l'essentiel de la question du financement des surcoûts liés aux opérations extérieures dont le provisionnement en loi de finances initiale est passé de 24 millions d'euros en 2002 à 510 millions d'euros en 2009 ;
- le point noir de l'exécution de la loi est la mise à mal de la cohérence « physico-financière » par la dérive du coût des programmes et par des difficultés industrielles.
a considéré que les leçons du bilan de la précédente LPM avaient été tirées pour l'élaboration de la programmation 2009-2014, à la fois pour la méthode utilisée et les résultats obtenus.
La méthode a tout d'abord été marquée par une transparence accrue à l'égard de l'ensemble des acteurs. Un vrai travail d'équipe a été réalisé sur le bouclage « physico-financier » de la loi. Le choix de raisonner sur l'ensemble de la mission « Défense » au sens de la LOLF permet d'éviter les difficultés de périmètre et incite à réaliser des économies sur les dépenses courantes qui sont recyclées au profit des programmes d'équipement. Une concordance parfaite est ainsi organisée entre le périmètre de la loi de programmation militaire et celui des budgets qui lui succéderont. Cette articulation est également assurée entre la LPM et le budget triennal. Le ministère du budget est généralement considéré comme hostile aux lois de programmation au motif qu'elles sont sectorielles et trop ambitieuses, sans cadrage programmatique de l'ensemble du budget. Ce n'est plus le cas grâce au budget triennal. Dans le cas de la LPM, la concordance avec le budget triennal est ainsi une garantie de bonne exécution et elle est bénéfique pour la gestion publique en prenant mieux en compte le temps de mise en oeuvre de réformes qui excèdent l'annualité budgétaire, telles que la mise sur pied des bases de défense ou l'exécution des programmes d'armement.
En termes de résultats, le Livre blanc prévoit une enveloppe de 377 milliards d'euros sur douze ans, dont 185 milliards sur la période 2009-2014, qui est celle de l'actuelle LPM. Le principe de « zéro volume » s'applique en 2009, 2010 et 2011, le volume de crédits étant ainsi stabilisé au niveau élevé atteint en 2008. A partir de 2012, la progression des ressources est de 1 % par an en volume.
Évoquant la « bosse » de la programmation, M. Philippe Josse a indiqué qu'une telle augmentation des besoins en crédits de paiement pouvait s'analyser soit comme un écart entre les ressources disponibles et les crédits nécessaires pour atteindre le modèle de programmation, soit comme la nécessité d'honorer un volume important d'engagements juridiques passés. En l'occurrence la « bosse » de 6 milliards d'euros était surtout une bosse programmatique liée à un écart entre les ressources et le modèle.
Cet écart est résorbé selon quatre modalités :
- 2015 n'est plus l'échéance pour la réalisation du modèle, la programmation du Livre blanc allant jusqu'à 2020 ;
- le modèle a été révisé, avec des économies sur les programmes ;
- les économies réalisées sur les titres 2 et 3 sont recyclées sur l'effort d'équipement ;
- des ressources exceptionnelles tirées de cessions d'actifs viennent abonder les années 2009-2010-2011.
Evoquant les questions posées pour l'avenir, M. Philippe Josse a estimé qu'un effort substantiel avait été accompli sur le financement des opérations extérieures. Cet effort sera poursuivi, la provision étant portée à 630 millions d'euros en 2011. C'est un bon niveau de provisions. Les montants atteints en 2008 sont certes supérieurs mais, outre qu'il s'agit de surcoûts bruts, hors remboursement des Nations unies, ces montants sont liés au choix européen de financer, via le mécanisme Athéna, les coûts de structure de l'opération EUFOR au prorata des hommes déployés sur le terrain, ce qui désavantage la France mais n'a pas vocation à durer.
Pour ce qui concerne les ressources exceptionnelles issues de cessions d'actifs, le mécanisme est vertueux tant du point de vue de l'effort de défense que du point de vue budgétaire puisque les cessions de l'immobilier parisien du ministère de la défense lui permettront de se doter d'installations plus modernes et plus efficaces. Le régime du compte d'affectation spéciale permet de sécuriser les ressources et si le régime juridique retenu permet à une société d'acheter en bloc les différents immeubles, la cession de gré à gré de certains lots reste possible. Le dispositif est opérationnel.
En matière de cohérence physico-financière, les objectifs sont de rendre plus sincère l'évaluation du coût des programmes d'armement, d'éviter la surspécification des programmes, de fiabiliser l'information financière des différents acteurs et de savoir mettre l'industrie sous tension. A cet effet, différents comités ont été installés ; le comité financier s'assurant de la soutenabilité des programmes et de la bonne cohérence entre le physique et le financier.
a ensuite évoqué le plan de relance, rappelant que ce plan faisait une place très importante à l'équipement militaire selon quatre modalités :
- 1,425 milliard d'euros est ouvert en autorisations d'engagement par la loi de finances rectificative pour 2009 pour l'équipement militaire stricto sensu. Les crédits de paiement correspondants seront ouverts en deux tranches ; la première, pour 2009, est de 725 millions d'euros ;
- 110 millions d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement sont ouverts pour le financement d'études amont de technologie de défense ;
- 220 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 150 millions d'euros de crédits de paiement sont inscrits au titre de l'immobilier de la défense.
Au total, ce sont 1,755 milliard d'euros d'autorisations d'engagement et 985 millions d'euros de crédits de paiement qui sont mobilisés en 2009.
Au-delà des crédits budgétaires nouveaux, le ministère de la défense a été autorisé à consommer 500 millions d'euros de crédits issus de reports des gestions précédentes. Pour 2009, il s'agit bien d'une augmentation nette qui permet d'accélérer des investissements.
Les crédits anticipés seront soustraits des annuités à venir sur l'ensemble de la période de programmation jusqu'en 2020. En net, la programmation 2009-2014 sera donc majorée dans la mesure où les augmentations de 2009-2010 ne seront pas intégralement compensées d'ici 2014.
A court terme, c'est une majoration nette de l'effort de défense même si la programmation reste identique sur douze années, à 377 millions d'euros.
a souligné que si la provision en loi de finances initiale pour le financement des opérations extérieures était portée à 630 millions d'euros, le surcoût à financer en 2008 avait atteint le milliard d'euros, ce qui laissait persister une impasse à financer. Il s'est interrogé sur le fonctionnement de la société de portage immobilier et sur les 600 millions d'euros inscrits au budget 2009 au titre de la vente de fréquences. Évoquant l'avenir de l'A400M, il s'est interrogé sur la capacité de l'entreprise à supporter l'ensemble des pertes liées à ce programme et sur leur impact éventuel sur le budget de la défense. Il a enfin souhaité savoir si les crédits prévus par la loi de programmation permettaient de répondre aux défis du maintien des capacités technologiques et industrielles françaises.
a apporté les précisions suivantes :
- le montant atteint par les surcoûts OPEX en 2008 est de 833 millions d'euros et constitue un pic historique. La tendance moyenne des années précédentes se situe plutôt autour des 630 millions d'euros atteints en 2007. En outre, ces 833 millions d'euros en 2008 constituent le surcoût brut, ramené à 770 millions d'euros après remboursement par les Nations unies et l'OTAN. Il est évident que si l'on reste à ce niveau en 2009, un besoin de financement demeure qui n'est pas insurmontable par rapport à la masse financière du ministère. Ces efforts ne dispensent pas d'une revue des différentes opérations pour bien optimiser l'effort de défense ;
- en matière immobilière, l'Etat s'est donné les moyens juridiques de constituer une société commune à la SOVAFIM et à la Caisse des dépôts. Cette formule n'est qu'une option, l'essentiel étant d'optimiser l'immobilier de l'État. Il est vrai que le contexte est moins favorable mais les investisseurs restent demandeurs de cessions occupées, ce qui est le cas pour les immeubles de la défense ;
- sans se prononcer sur le fond du dossier de l'A400M, on peut affirmer qu'il n'y a pas de porosité entre le capital social d'EADS et le budget d'équipement militaire ;
- sur les études amont de défense, il est compréhensible que les bureaux d'études aient demandé plus qu'ils n'ont obtenu. Aux 700 millions d'euros prévus par la LPM, soit un peu plus que la reconduction de l'existant, s'ajoutent 110 millions d'euros du plan de relance (hors nanotechnologies). Il faut veiller à ne pas développer des rentes de situation sur longue période.
s'est interrogée sur la crédibilité des hypothèses de cessions d'actifs et sur leur contribution à la résorption de la « bosse ».
s'est interrogé sur les modalités d'apurement de la dette des Nations unies et de l'Union européenne sur les OPEX. Évoquant l'évolution du titre 2, il a souhaité connaître les marges attendues de la réduction des effectifs alors que les dernières années ont été marquées par la consommation intégrale des crédits du titre 2 et que persistaient d'importants sous-effectifs.
a souhaité des précisions sur la vente de fréquences et sur les crédits du plan de relance.
a considéré que l'histoire des lois de programmation militaire incitait à beaucoup de modestie. Il a souhaité connaître le montant des crédits reportés et ce qu'il adviendrait de ceux qui ne s'intégraient pas dans le plan de relance. Il s'est interrogé sur la possibilité de mobiliser les ressources exceptionnelles dès l'année 2009.
s'est interrogé sur le financement des opérations extérieures et sur les systèmes d'armes concernés par le plan de relance. Il a souhaité être éclairé sur la cohérence entre les besoins opérationnels et les chaînes de montage prêtes à tourner.
a souhaité des précisions sur le projet de Pentagone à la française et sur le recours à un partenariat public-privé. Il s'est étonné que des travaux d'amélioration soient réalisés dans des établissements dont la fermeture a été annoncée. Il a souhaité connaître les conditions d'accueil par les collectivités locales des personnels de la défense et l'existence éventuelle d'aides spécifiques.
a apporté les précisions suivantes :
- s'il ne devait pas y avoir de réorganisations à l'appui des diminutions d'effectifs, ce serait dommageable mais du fait de ces réorganisations, les suppressions de postes ne sont pas des coupes, elles ne portent pas atteinte à la capacité opérationnelle des armées et concernent la fonction soutien pour près de 80 %. Elles résultent de la modification des contrats opérationnels, de la mise en place des bases de défense et de nouvelles applications informatiques qui permettront des gains de productivité ;
- l'évolution du titre 2 dépend d'un grand nombre de paramètres comme l'évolution de la valeur du point d'indice, le plan d'amélioration de la condition du personnel, le glissement vieillesse technicité qui joue en négatif du fait du renouvellement rapide des effectifs de la défense. Une clause de rendez-vous est néanmoins prévue et indispensable pour surveiller cette évolution globale. Dans l'immédiat, la dynamique implicite et sous-jacente du titre 2 paraît parfaitement soutenable ;
- le support juridique pour la réutilisation du produit de la cession de fréquences existe. Felin, la première fréquence cédée, devra l'être en même temps que les fréquences analogiques de télévision, dénommées dividende numérique. Il n'est pas nécessaire que les opérateurs soient effectivement en mesure d'utiliser les fréquences pour réaliser les opérations de cessions et, par suite, que l'Etat encaisse une recette. Le dossier est confié à l'ARCEP, dont le président est M. Jean-Claude Mallet. Même si le calendrier est extrêmement tendu, il n'y a pas de raison de ne pas le tenir. Les crédits d'un compte d'affectation spéciale peuvent être librement reportés ; l'important est de garantir l'équilibre emplois-ressources sur la période de programmation ;
- le calcul des coûts bruts des OPEX -et non pas des surcoûts- est particulièrement complexe dans la mesure où, lorsque les militaires perçoivent l'indemnité pour service à l'étranger, d'autres indemnités ne sont plus servies ;
- l'ONU rembourse un forfait de 1 100 dollars par homme et par mois (soit un peu moins de 900 euros), ce qui représente environ un quart du coût total. Elle verse aussi un forfait pour l'utilisation des matériels. Pour les chars Leclerc, ce forfait est de 6 000 euros, pour un coût réel de près de 300 000 euros. 52 millions d'euros de remboursement devraient être perçus au titre de l'année 2008 ;
- le coût des installations de Balard n'est pas encore précisément connu. Il ne concerne pas majoritairement l'actuelle LPM ;
- le plan de relance ne comprend pas uniquement l'autorisation de consommer des crédits de reports, il ouvre également des crédits nouveaux. Les 500 millions d'euros de crédits de reports proviennent des exercices précédents et ne sont pas dans le modèle des 377 milliards sur douze ans ; ils sont additionnels. La consommation des crédits de reports, au demeurant très anciens, n'est pas un droit ;
- la cohérence militaire de la relance existe à travers l'accélération de certains programmes d'armement mais l'objectif prioritaire est la relance économique. Les crédits anticipés seront repris par la suite mais, sur l'ensemble des douze années de programmation, la première loi de programmation bénéficiera donc de davantage de crédits qu'initialement prévu tandis que ce sera l'inverse pour la seconde.
La commission a ensuite entendu une communication de M. Josselin de Rohan, président, et de MM. André Vantomme et François Trucy, rapporteur spécial de la commission des finances, relative à leur déplacement au Tchad du 4 au 6 janvier 2009.
a rappelé que ce déplacement s'inscrivait dans un ensemble de missions entreprises par la commission sur les principaux théâtres d'opérations où des forces françaises sont déployées. L'objectif poursuivi par la mission était de procéder à une estimation du dispositif Epervier et d'établir un bilan de l'opération Eufor-Tchad-République Centrafricaine dont le mandat arrive à échéance le 15 mars 2009.
Cette mission a permis d'avoir des entretiens politiques de haut niveau, en particulier avec le Premier ministre tchadien et le Président de l'Assemblée nationale. Ces entretiens ont notamment permis de constater l'importance que les autorités tchadiennes attachent à la présence française dans leur pays.
Le président a rappelé que la France avait un intérêt stratégique à la stabilité du Tchad situé en plein coeur de l'arc de crise, défini par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, qui s'étend de la Mauritanie au Pakistan. Il se situe également au sein d'une autre zone de crise : l'Afrique subsaharienne et, en particulier, aux frontières du Niger et de la zone sahélienne où des organisations islamistes proches d'Al-Qaïda s'installent. Par ailleurs, à l'est du Tchad, la République Centrafricaine et, bien évidemment, le Darfour constituent des zones d'instabilité majeures.
Dans ce contexte d'instabilité, M. Josselin de Rohan, président, a souligné que le président Idriss Deby Itno, au pouvoir depuis 1990, avait été réélu en 1996, 2001 et 2006. L'Assemblée nationale est, quant à elle, en place depuis 2002.
Le rétablissement de la paix intérieure grâce au dialogue politique inter-tchadien a considérablement progressé depuis l'accord du 13 août 2007. Cet accord, dont le président Deby s'est porté personnellement garant, et qui a été signé par 91 partis politiques, prévoit un recensement complet, démographique et électoral, en vue d'élections générales qui devraient se tenir, sous contrôle international, au cours du premier semestre 2010. Cet accord prévoit la création d'un comité de suivi qui fixe le cadre du dialogue politique interne et qui permet, via l'accord de Syrte d'octobre 2007 sur les négociations sur le Darfour, la réintégration des diverses rebellions dans le jeu politique.
Le vote, le 5 décembre 2008, de la loi instituant la Commission nationale électorale indépendante (CENI) est d'autant plus positif que sa présidence a été confiée à M. Lol Mahamat Choua, qui est l'un des principaux opposants au gouvernement. Outre la loi portant statut de l'opposition, les prochaines étapes seront la mise en place de cette commission et l'adoption du code électoral.
a indiqué que la France devait bien évidemment encourager cette évolution démocratique, qui ne pourrait néanmoins se consolider que par le développement économique. De ce point de vue, les ressources pétrolières découvertes depuis 2000 ont permis d'augmenter, d'environ un milliard de dollars par an, les ressources de l'un des pays les plus pauvres du monde. Une loi, unique en son genre en Afrique, prévoit d'affecter 65 % de ces ressources aux secteurs sociaux ou prioritaires en matière de développement durable.
Abordant la crise du Darfour, M. Josselin de Rohan, président, a indiqué qu'elle avait considérablement affaibli le Tchad, tant par l'existence d'une rébellion soutenue par Khartoum que par l'afflux de 300 000 réfugiés et de 200 000 déplacés dans l'Est du pays auxquels il faut ajouter les 45 000 déplacés et réfugiés de la République Centrafricaine. Trois processus de médiation sont en cours pour tenter de normaliser les relations entre les deux pays. L'accord de Dakar du 13 mars 2007 a pour but d'organiser un processus de dialogue au travers de réunions régulières d'un « groupe de contact ». Le rétablissement des relations diplomatiques entre les deux pays, favorisé par la Libye, facilite ce processus. Il est en particulier question d'organiser une « force de défense et de sécurité » régionale, comportant 1 000 soldats tchadiens et 1 000 soldats soudanais, répartis en dix postes d'observation, qui aurait pour but de sécuriser la frontière entre les deux pays.
Un second processus dit « de Doha » est promu par le Qatar en liaison avec le médiateur burkinabé, M. Djibril Bassolé, qui est mandaté conjointement par l'ONU et par l'Union africaine. Enfin, l'Union africaine a confié un mandat de médiation à la Libye et au Congo Brazzaville. Forte de ce mandat, la Libye, qui joue un rôle stabilisateur dans la région, essaye d'organiser une réunion entre les deux présidents.
Ces différentes tentatives de médiation, dont il faut se féliciter, n'ont pas, jusqu'à présent, empêché les attaques régulières des rebelles tchadiens soutenus par le Soudan. M. Josselin de Rohan, président, s'est interrogé sur la volonté du gouvernement soudanais de continuer à financer, à armer et à fédérer les différents mouvements de rébellion qu'il héberge sur son sol. La récente unification d'une majorité des rebelles au sein d'une « Union des forces pour la résistance » est inquiétante mais ne deviendrait dangereuse que si elle parvenait à se choisir un nouveau chef pour remplacer M. Nouri, chef du mouvement UFCD, qui reste soutenu par Khartoum mais dont l'autorité est contestée depuis l'échec de l'offensive de février 2008.
De son côté, le Tchad héberge le Mouvement pour la justice et l'égalité (MJE) installé au nord de la zone de l'opération Eufor.
Depuis l'offensive de février 2008, qui a conduit les rebelles jusqu'à N'Djamena, et celle de juin dernier dans la région d'Abéché, chaque partie au conflit réarme en vue d'un prochain affrontement. L'armée tchadienne, forte d'environ 49 000 hommes, dont 20 à 25 000 sont déployés dans l'Est du pays, a acquis de nouveaux matériels : blindés, canons, chars, hélicoptères, avions de combat Sukoï, et a entrepris une indiscutable professionnalisation qui se traduit par l'utilisation de méthodes coordonnées d'action sur le champ de bataille dans la profondeur. L'objectif du gouvernement est d'arrêter les colonnes d'assaillants, dans l'Est, en sécurisant les voies d'accès peu nombreuses qui permettent de pénétrer le territoire. La coopération militaire française joue un rôle important, conformément aux accords, pour former les forces tchadiennes. Le président a souligné que cette formation était naturellement un atout fondamental pour l'armée tchadienne face à une rébellion capable d'organiser des raids dans la tradition des rezzous, mais qui ne dispose ni de l'entraînement ni de la logistique d'une armée.
Les indications disponibles sur les forces de la rébellion sont moins précises, mais on estime qu'elles disposent de 6 000 à 10 000 hommes. Leur armement pourrait être fourni par le gouvernement soudanais qui a lui aussi acquis, en 2008, des matériels comparables à ceux dont dispose l'armée régulière tchadienne.
a souligné qu'il ne pouvait y avoir d'évolution de la situation sans que les deux gouvernements mettent fin au soutien que chacun apporte aux rébellions. Cette décision ouvrirait la voie à une normalisation des relations entre les deux pays. Il est également nécessaire que des négociations directes aient lieu entre le gouvernement soudanais et le MJE.
Dans ce contexte très fragile, il a indiqué que la mise en accusation du président Al Béchir par la cour pénale internationale introduisait de lourdes incertitudes jusqu'au verdict de la cour attendu à la mi-février. Le remplacement du président Al Béchir par M. Salva Kiir, premier vice-président, permettrait vraisemblablement d'entamer des pourparlers avec la rébellion soudanaise.
Par ailleurs, le risque de partition du Soudan en trois entités -au Sud, qui se déterminera vraisemblablement dans ce sens par référendum, au Darfour et au Nord- serait le premier exemple de remise en cause des frontières issues de la colonisation en Afrique. Cet éclatement possible du Soudan ne manquerait pas d'entraîner une profonde déstabilisation remettant en cause les différents efforts de paix dans la région.
Abordant ensuite le volet plus spécifiquement militaire de la mission, M. Josselin de Rohan, président, a entrepris de décrire le dispositif Epervier et celui de l'opération Eufor-Tchad-RCA.
Il a rappelé que les Eléments français au Tchad (EFT) sont présents sans interruption sur le territoire tchadien depuis le 10 février 1986, date du début de l'opération Epervier, déclenchée sur la base de l'article 51 de la charte des Nations unies dans le cadre du conflit tchado-libyen de la bande d'Aouzou.
La base juridique de la présence militaire française est constituée par l'accord de coopération militaire du 6 mars 1976 et son protocole additionnel du 7 avril 1990 modifié le 10 juin 1998 qui prévoit l'accord des deux gouvernements sur le stationnement des forces pour une durée indéterminée.
Les Eléments français au Tchad ont principalement pour vocation :
- d'assurer la sécurité des ressortissants français. Pour cette mission, les EFT ont montré leur efficacité lors de l'opération d'évacuation en février 2008 ;
- d'apporter un soutien à l'armée nationale tchadienne en contribuant à l'instruction et en apportant une aide matérielle aux différentes armées (logistique et renseignement, santé) ainsi que le maintien d'une capacité d'intervention extérieure (appui aérien et renseignement) ;
- de venir en aide à la population civile, sans se substituer aux administrations ou organisations gouvernementales compétentes, en apportant notamment une aide médicale gratuite à tous ceux qui en expriment le besoin ;
- de fournir un soutien logistique aux organisations internationales (ONU et Union européenne) impliquées dans la gestion de la crise humanitaire dans l'Est du pays et au Darfour (MINURCAT 1 et Eufor-Tchad-RCA).
L'opération Epervier met en oeuvre un détachement de 1 150 personnes dont 751 pour le groupement terre et 392 pour le groupement air. Les EFT sont articulés autour d'un état-major interarmées directement subordonné à l'état-major des armées à Paris.
Les Eléments français au Tchad sont implantés sur trois sites : à N'Djamena, la base « sergent-chef Adji Kosseï », à Abéché le camp Croci et à Faya Largeau.
S'agissant de l'opération Eufor Tchad RCA, le président a rappelé que la commission avait préparé cette mission lors d'un déplacement effectué le 19 février 2008 auprès de l'état-major de la force installé au Mont Valérien sous le commandement du général irlandais Nash.
a rappelé que le Conseil de sécurité des Nations unies avait adopté, le 25 septembre 2007, la résolution 1778, qui approuve le lancement de la mission des Nations unies en République Centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) et autorise le déploiement d'une force multidimensionnelle dans l'est du Tchad et le nord-est de la République Centrafricaine (EUFOR-Tchad-RCA). Cette résolution s'inscrit sous le chapitre VII de la charte des Nations unies qui autorise l'usage de la force.
La MINURCAT a pour mission de sélectionner et de former des policiers tchadiens afin d'assurer la protection humanitaire, la surveillance et la protection des droits de l'homme dans les zones considérées. Cette police tchadienne, le détachement intégré de sécurité (DIS), sera en charge du maintien de l'ordre et du respect de la loi dans les camps de réfugiés.
Par ailleurs, le Conseil du 28 janvier 2008 a approuvé le plan d'opération et les règles d'engagement de l'opération Eufor-Tchad-RCA qui s'inscrit dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD). Les objectifs qui lui sont assignés consistent à faciliter la fourniture de l'assistance humanitaire, à améliorer la sécurité des populations réfugiées et déplacées et à créer les conditions d'un retour volontaire dans leur région d'origine de ces populations. Ces différentes actions doivent s'accompagner d'un effort de reconstruction et de développement dans l'est du Tchad et le nord-est de la République Centrafricaine.
Cette opération a été autorisée pour une durée d'une année à compter de la déclaration de capacité opérationnelle initiale, le 15 mars 2008. Elle doit donc s'achever le 15 mars prochain et être relevée par une force de l'ONU, la MINURCAT 2. La résolution 1834, adoptée par le Conseil de sécurité le 24 septembre 2008, demande au département des opérations de maintien de la paix de l'ONU (DOMP) d'initier la génération de force de la « Follow on force » (FoF) onusienne.
L'opération Eufor-Tchad-RCA est le cinquième déploiement militaire de l'Union européenne en cinq ans, après Artémis au Congo (2003), Concordia en Macédoine (2003), Althea en Bosnie-Herzégovine (2004) et Eufor RD Congo (2006). M. Josselin de Rohan, président, a toutefois précisé que cette opération était sans doute la plus complexe que l'Union européenne ait entreprise et qu'elle constituait indiscutablement un test de crédibilité réussi pour la PESD.
Ce résultat positif a été obtenu en dépit de difficultés extrêmes :
- en premier lieu, l'opération a été confrontée aux problèmes habituels de génération de forces, tant au niveau des contributions nationales en hommes qu'en matériels. C'est, en effet, en mai 2007 que le COPS a pris sa décision initiale et ce n'est qu'en novembre suivant qu'a eu lieu la première réunion de génération de forces. Cette situation a conduit la France à prendre une part prépondérante dans l'opération alors qu'elle ne le souhaitait pas compte tenu de notre engagement bilatéral. Du fait de ces difficultés, le contingent français de l'Eufor représente 51 % des effectifs totaux. Par ailleurs, le dispositif Epervier intervient en soutien. S'agissant des matériels, le manque le plus flagrant se situe, comme pour d'autres opérations, au niveau de la mobilité et des moyens aéroportés, notamment des hélicoptères. Cela explique que la pleine capacité opérationnelle n'ait été déclarée que le 15 septembre 2008 ;
- par ailleurs, l'activation de l'état-major d'opération au Mont Valérien a connu un certain nombre de vicissitudes et une trop lente montée en puissance avant la nomination du général Nash en octobre 2007. De plus, lors de l'entretien avec le Premier ministre tchadien, des interrogations sur les difficultés de commandement du fait de son absence d'unification sont apparues ;
- sur place, le déploiement des troupes s'est ressenti de ces différents retards, aggravés par l'interruption rendue nécessaire par l'offensive rebelle de février, alors même que la décision de déploiement avait été prise le 28 janvier 2008.
Ces différents éléments soulignent la difficulté, en matière de défense, des prises de décision à l'unanimité :
- en matière de logistique, l'UEO a constaté qu'il y avait eu « un grand vide logistique avant la prise en charge française sur le terrain » ;
- enfin, le président a souligné les limites du mécanisme Athéna, qui limite la contribution de l'Union européenne aux coûts communs et qui renvoie aux différents Etats nationaux le soin de financer la participation de leur contingent. La contribution européenne a été de 119 millions d'euros pour un an. Sur ce total, la France prend en charge 15,57 %, soit 18,5 millions, auxquels s'ajoutent, pour l'année 2008, 130 millions d'euros imputés sur le budget national. Ces coûts s'alourdiront encore jusqu'à la fin de l'opération, en 2009. M. Josselin de Rohan, président, a relevé que, les décisions concernant la PESD étant prises à l'unanimité, l'on pouvait légitimement s'interroger sur le fait de faire porter sur les seuls Etats participants la majeure partie des coûts. Une mutualisation à 27, selon une clé de répartition à déterminer qui tienne compte de l'importance relative de chaque pays mais aussi de l'importance de l'effort consenti en matière militaire, devrait être envisagée.
Certes, cette opération a également été exceptionnelle en raison des difficultés qu'elle a rencontrées. Il s'agissait de déployer 3 403 hommes appartenant à 26 nations différentes. La France fournissait 1 758 soldats, l'Irlande 447, la Pologne 421, l'Autriche 169, l'Espagne 112 et l'Italie 104. Le reste des contingents était de nature plus anecdotique. Il convient toutefois de remarquer qu'à ces forces vient de se joindre un contingent russe composé de 120 personnes et surtout de quatre hélicoptères MI8.
Mais c'est surtout la géographie qui explique la complexité de l'opération. Le Tchad est un pays enclavé en plein coeur de l'Afrique. Quelques éléments permettent d'illustrer les difficultés logistiques auxquelles cette opération a été confrontée :
- le transport de containers par bateau entre Le Havre et le port de Douala au Cameroun prend deux semaines ;
- la liaison ferroviaire n'existe qu'au Cameroun. Le transport en camion du port de Douala à N'Djamena prend environ 15 jours pour parcourir les 1 900 km. Il faut compter quatre jours supplémentaires pour parcourir les 770 km jusqu'à Abéché, sur des pistes, et trois jours de plus pour acheminer les matériels jusqu'à Iriba, au nord de la zone de responsabilité de l'Eufor ;
- à partir d'Abéché, la desserte de Birao, en République Centrafricaine ne peut se faire qu'en avion ;
- au total, le temps de transport d'un container d'Europe à Abéché est égal ou supérieur à un mois et demi et un camion met trois à quatre semaines, en fonction des conditions climatiques, de Douala à Iriba.
- par ailleurs, les différents camps (« Europa » à N'Djamena, « Les étoiles » à Abéché, et les implantations d'Iriba, de Forchana, de Goz-Beida et de Birao) ont dû être érigés en un temps très court.
Enfin, la zone de contrôle confiée à l'Eufor correspond à une surface de 1 000 km² sur 450 km. Dans ces conditions, les 25 sections dont dispose l'Eufor ont chacune un terrain d'action de plus de 18 000 km².
Le président a ensuite souligné qu'en dépit de ces obstacles l'opération menée par l'Union européenne au Tchad et en République Centrafricaine avait atteint les objectifs qui lui avaient été fixés. L'insécurité a nettement diminué et cette amélioration a, du reste, été saluée par des O.N.G. comme Oxfam. Le récent rapport du Secrétaire général des Nations unies indique que l'Eufor a « facilité les conditions dans lesquelles l'aide humanitaire est distribuée ». S'agissant de la formation et du déploiement du détachement intégré de sécurité, le DIS, 418 policiers tchadiens ont été formés et déployés dans quatre villes de l'est du pays et l'objectif de 850 policiers formés devrait être atteint prochainement. De plus, l'Eufor a su respecter le principe de neutralité qui s'imposait à une opération de ce type.
a souligné que les difficultés rencontrées sur la génération de forces et sur la mise en place des structures de planification et de commandement justifiaient pleinement que l'Europe se dote d'une structure de commandement intégrée permanente, aujourd'hui bloquée par le Royaume-Uni.
Toutefois, il est évident que cette opération n'aurait pu connaître le succès sans la pleine implication française, tant au niveau européen qu'à celui du support apporté par Epervier. Si l'on doit saluer la performance technique et humaine qu'a constituée l'organisation logistique de l'opération, il est vraisemblable que les objectifs fixés n'auraient pas été atteints en cas d'incidents sérieux.
La délégation de la commission a pu également constater un niveau de MCO (maintien en condition opérationnelle) des matériels extrêmement préoccupant, qui ne s'explique qu'en partie par la dureté des conditions de terrain.
Enfin, le président a abordé la question de la relève de l'opération Eufor-Tchad-RCA par la MINURCAT. Cette relève devrait avoir juridiquement lieu le 15 mars prochain, mais il est évident qu'un calendrier glissant sera adopté pour permettre à la force de l'ONU de se substituer progressivement aux troupes européennes. La pleine capacité opérationnelle de l'opération sous pavillon ONU ne sera pas atteinte avant octobre 2009 et certains des 16 Etats qui envisagent d'y participer ont subordonné leur offre à la disponibilité de certaines capacités critiques, notamment en matière de mobilité.
La résolution 1834 du 24 septembre 2008 prévoit une force de 4 900 hommes et un contingent en République Centrafricaine dont le nombre est encore soumis à discussion. M. Josselin de Rohan, président, a souligné l'importance de maintenir une présence permanente et significative en République Centrafricaine, c'est-à-dire entre 300 et 500 hommes. Faute de quoi cette zone redeviendra, dans des délais très brefs, une zone d'insécurité, laquelle se répercutera à la fois sur le Tchad mais aussi en Centrafrique elle-même.
L'augmentation des effectifs devrait permettre un déploiement sur six sites au lieu de trois actuellement et de disposer d'une réserve de théâtre du volume d'un bataillon.
Il est prévu une absence de caveats des pays contributeurs en troupes, mais un « engagement de soutien in extremis » devrait être pris par un Etat membre sur une base bilatérale, en vue d'assurer la sécurité du personnel et des biens des Nations unies en cas de débordement de la force onusienne. C'est bien évidemment la France à laquelle tout le monde pense pour cet engagement.
En l'état actuel des choses et compte tenu de l'importance des engagements de la France en matière d'opérations extérieures et de son implication au Tchad au travers de l'opération Epervier, les réticences initiales à participer à une opération internationale de grande ampleur en parallèle à une opération bilatérale demeurent toujours valables.
a indiqué que la solution la plus convenable pourrait être un maintien temporaire de la fonction logistique pour une durée la plus courte possible au-delà du 15 mars 2009. Par ailleurs, les engagements en matière de renseignement et d'observation à l'aide de nos moyens aériens pourraient également perdurer. Il s'est interrogé par ailleurs sur le point de savoir s'il était souhaitable d'envisager une participation importante de troupes françaises à cette opération de l'ONU. Il s'est plutôt prononcé pour un renforcement en hommes et en matériels de la force Epervier, qui joue un rôle majeur dans la stabilisation de la région et de l'arc de crise dans son ensemble.
Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté, le 14 janvier 2009, la résolution 1861 présentée par la France. Cette résolution décide de proroger, pour une période de douze mois, « la présence multidimensionnelle au Tchad et la présence militaire en République Centrafricaine destinées à aider à créer les conditions favorables au retour volontaire, sécurisé et durable des réfugiés et des personnes déplacées, y compris en contribuant à la protection des réfugiés, des personnes déplacées et des populations civiles en danger, en facilitant la fourniture de l'assistance humanitaire dans l'est du Tchad et le nord-est de la République Centrafricaine, et en créant les conditions en faveur d'un effort de reconstruction et de développement économique et social de ces zones ».
Cette décision signifie que le mandat de la MINURCAT est prolongé jusqu'au 15 mars 2010. Elle autorise le déploiement d'une composante militaire qui succédera à l'Eufor.
La MINURCAT comprendra au maximum 300 policiers, 25 officiers de liaison, 5 200 militaires, ainsi qu'un effectif approprié de personnel civil. Cette décision donne satisfaction à la France puisqu'elle prévoit le déploiement de 4 900 militaires au Tchad et de 300 en République Centrafricaine.
La résolution 1861 rappelle les objectifs relatifs à la montée en puissance du détachement intégré de sécurité (DIS). Le mandat de la MINURCAT 2 reprend celui qui avait été confié à l'Eufor. Il concerne la sécurité et la protection des civils, les droits de l'homme et l'État de droit et le soutien de la paix au niveau régional. Il réitère le fait que la MINURCAT est placée sous l'autorité du chapitre VII de la charte des Nations unies qui autorise l'emploi de la force.
À la suite de cette présentation, M. André Vantomme est intervenu pour remarquer que la brièveté du séjour de la délégation de la commission n'avait pas permis de prendre des contacts politiques en dehors des autorités officielles. Il a par ailleurs souligné l'intérêt de suivre attentivement l'évolution du Soudan, pays dont l'unité est menacée, mais aussi pour le rôle qu'il joue en soutien du mouvement d'unification de la rébellion tchadienne. Aux facteurs de fragilité propres au Soudan s'ajoute l'extrême déliquescence de l'Etat en République centrafricaine. Il s'est également inquiété de la persistance des atteintes aux droits de l'homme au Tchad, comme en témoigne un récent rapport d'Amnesty international.
a souligné que le rapatriement en France des matériels, suite à l'arrêt de l'opération Eufor, allait poser d'énormes problèmes de logistique et de coûts. Il s'est interrogé sur le point de savoir s'il ne serait pas plus efficace de laisser ces matériels au Tchad dans le cadre d'un renforcement de la force Epervier.
En conclusion, il a salué la qualité et la disponibilité de l'ensemble des responsables militaires et diplomatiques qui ont accueilli la délégation de la commission au Tchad.
a fait remarquer que l'opération Eufor-Tchad-RCA était indispensable d'un point de vue humanitaire, mais qu'elle n'aurait sans doute pas connu le succès sans l'engagement considérable de la France. Toutefois, la question du retour des réfugiés dans leur village pose de nombreux problèmes. Ainsi que le faisait remarquer le Premier ministre tchadien, les services qu'ils reçoivent dans les camps, en matière de santé et d'éducation notamment, sont très supérieurs à ceux qu'ils pourront connaître dans leur environnement initial.
Comme M. Josselin de Rohan, président, il a constaté que l'ensemble des autorités tchadiennes souhaitaient le maintien de la France dans toutes ses dimensions d'aide au développement, de défense ou de culture. Il a enfin fait remarquer que les Tchadiens sont un peuple de guerriers pour lesquels la rébellion est un fait culturel et que si la manne pétrolière permettait un meilleur partage des richesses au profit du développement, elle était également une incitation supplémentaire à la prise du pouvoir. Il a souligné le rôle extrêmement important des antennes médicales très largement mises au service de la santé de la population locale.
a souligné l'importance, pour les Français établis dans ce pays, de la présence des forces françaises rassemblées au sein des Eléments français au Tchad (EFT), sans la protection desquelles ils ne resteraient sans doute pas au Tchad.
s'est interrogé sur la nature des rapports que l'opération Eufor avait eus avec les O.N.G..
a souligné le caractère ambigu de ce rapport qui conduit les O.N.G., en particulier les plus petites d'entre elles, à dénoncer les risques de confusion d'image entre les militaires et les humanitaires et à se satisfaire cependant de la protection des troupes quand les dangers se rapprochent.
a rappelé que le Sénat allait prochainement débattre, le 28 janvier prochain, des opérations extérieures françaises et de leur prolongation, notamment au Tchad. Elle a fait remarquer que la question de la rébellion était au coeur de beaucoup de ces opérations de maintien de la paix. Elle s'est interrogée sur les circuits qui permettaient l'acquisition d'armes.
A M. André Trillard qui s'interrogeait sur les séquelles de l'affaire de l'Arche de Zoé, M. François Trucy a indiqué que ce scandale, initialement très médiatisé, avait complètement disparu de l'actualité tchadienne.
A M. Jacques Berthou, le président a indiqué qu'il n'y avait pas, à sa connaissance, d'opérations de coopération décentralisée au Tchad, mais qu'il avait proposé à M. Robert Hue de travailler sur cette question au nom de la commission.
A M. Jean-Pierre Chevènement, qui s'interrogeait sur le bilan politique de l'opération Eufor, M. Josselin de Rohan, président, a fait remarquer que les objectifs fixés étaient de sécuriser l'est du Tchad, dans un but humanitaire, en protégeant les O.N.G. afin qu'elles puissent secourir les populations réfugiées et déplacées. Par rapport à ces objectifs, l'Union européenne a atteint ses buts. Cette opération permet de constater l'intérêt qu'il y a à multinationaliser les opérations de maintien de la paix. Cela étant, la présence française reste fondamentale car, sans elle, le Tchad, qui présente un intérêt stratégique pour notre pays, serait soit dépecé, soit satellisé.
a abondé dans le même sens en faisant remarquer que la sécurisation apportée par les opérations Epervier et Eufor permettait au Tchad de maîtriser sa sécurité au nord, vers le Sahel, où s'installent des milices djihadistes qui se réclament d'Al-Qaïda.
La commission a décidé de confier à M. Jean-Pierre Chevènement la préparation d'un rapport d'information sur le thème « prolifération, désarmement et sécurité de la France ».