Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 8 janvier 2009 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • SNPE
  • militaire

La réunion

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La commission a procédé à l'audition de M. Hervé Morin, ministre de la défense, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

a indiqué que la teneur du projet de loi de programmation militaire déposé devant l'Assemblée nationale le 29 octobre dernier était déjà largement connue, dans la mesure où ce texte vise à mettre en oeuvre les conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale ainsi que les mesures de réorganisation du ministère de la défense qui avaient été évoquées à plusieurs reprises devant le Parlement au cours de ces derniers mois.

Il a relevé certaines particularités du projet de loi de programmation : celui-ci comporte un important volet législatif ; il couvre une période de six ans mais prévoit un point d'étape d'ensemble en 2010 ainsi qu'une révision de la loi au bout de quatre ans, avec l'adoption d'une nouvelle loi de programmation couvrant la période 2013-2018 ; enfin, l'intervention dès le début de cette année d'un collectif budgétaire aura un impact sur la programmation militaire.

a rappelé que le plan de relance en cours d'examen au Parlement prévoyait des financements conséquents pour le secteur de la défense, le principe retenu étant toutefois de privilégier l'anticipation d'investissements initialement programmés pour plus tard.

Il a souhaité que le ministre précise si le Gouvernement rectifierait ou amenderait le projet de loi de programmation pour tenir compte de l'incidence du plan de relance sur le profil financier des prochaines annuités. Il s'est également demandé si les différents programmes retenus étaient suffisamment avancés pour permettre la consommation intégrale des crédits prévus par le plan de relance, le projet de loi de finances rectificative précisant que les crédits non consommés fin 2010 seraient annulés.

a souligné que le projet de loi de programmation traduisait les orientations du Livre blanc, en prévoyant une augmentation très sensible des crédits d'équipement qui devra permettre le financement d'une nouvelle génération de matériels attendus depuis longtemps dans les trois armées. Il a estimé que la réussite de cette loi reposerait sur la capacité à mobiliser ce surcroît de financement indispensable à la modernisation de l'équipement militaire, en réalisant la réduction du format et les réorganisations permettant de dégager de nouvelles marges de manoeuvre, et en obtenant les ressources exceptionnelles attendues de cessions immobilières ou de ventes de fréquence.

Debut de section - Permalien
Hervé Morin, ministre de la défense

a tout d'abord indiqué que les propositions qu'il avait formulées en vue de contribuer au plan de relance avaient reçu un écho très positif auprès du Président de la République, si bien que près de la moitié des dépenses de l'Etat prévues dans le cadre de ce plan concerneraient le secteur de la défense. Ces propositions visaient notamment à accélérer des commandes d'équipements passées auprès d'entreprises ayant une activité duale, afin de compenser la baisse de leur plan de charge dans le domaine civil. Par ailleurs, les contrats concernant la défense présentent l'avantage d'induire une charge de travail intégralement située sur le territoire français. Enfin, les projets retenus ont trait à des contrats déjà passés ou en attente de passation, ce qui permettra l'engagement et la consommation rapide des crédits, conformément aux objectifs du plan de relance.

a précisé que le Gouvernement préparait les amendements nécessaires à la correction du projet de loi de programmation militaire pour prendre en compte le plan de relance. Le Parlement sera informé dans les meilleurs délais de ces amendements.

Il a ensuite effectué une présentation du projet de loi, en rappelant qu'il constituait la traduction législative de l'ensemble des travaux engagés depuis le printemps 2007, à savoir l'état des lieux financier, la revue des programmes d'armement, la réorganisation du ministère, le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale et les restructurations.

Le projet de loi prévoit l'affectation à la mission « défense » d'une enveloppe de 185 milliards d'euros sur la période 2009-2014 - enveloppe qui pourrait être portée à 186 milliards d'euros, une partie des moyens prévus par le plan de relance constituant des financements nouveaux, l'autre partie ne représentant que l'anticipation de dépenses déjà prévues sur la durée de la loi de programmation. Au sein de cette enveloppe, les financements consacrés à l'équipement des forces représentent 101 milliards d'euros, pouvant être portés à 102 milliards d'euros avec le plan de relance. Le montant annuel des dépenses d'équipement passerait ainsi de 15,5 milliards d'euros en 2008 à 18 milliards d'euros en 2014. Cette progression notable traduit les arbitrages favorables qui ont été rendus en faveur du ministère de la défense. D'une part, et à la différence des autres ministères, le ministère conservera le bénéfice de l'intégralité des économies réalisées sur les dépenses de structure. D'autre part, il a obtenu des ressources exceptionnelles provenant de cessions d'actifs pour financer le surcroît de besoins financiers liés aux programmes d'équipement sur le début de la période.

Le ministre de la défense a souligné que la première caractéristique du projet de loi était sa cohérence. Il traduit les nouveaux formats, les nouveaux contrats opérationnels ainsi que les priorités définies par le Livre blanc.

Le projet de loi de programmation se distingue aussi par sa sincérité. Il définit une trajectoire financière crédible, avec un maintien en volume des crédits, hors ressources exceptionnelles, sur les trois premières années, puis une progression en volume de 1 % par an. Le périmètre de la programmation exclut tout « bourrage » et les opérations extérieures bénéficieront d'un mode de financement nouveau, puisque la provision en loi de finances initiale sera majorée et que le complément éventuel sera couvert par la réserve interministérielle de précaution.

Le ministre de la défense a insisté sur la nécessité d'un effort partagé, au sein du ministère, en termes de réduction des coûts. Il a estimé que des gains substantiels étaient possibles grâce à une mutualisation beaucoup plus poussée des soutiens, et qu'à cet égard, la création des bases de défense constituerait une avancée majeure. Il a également rappelé que les réductions d'effectifs prévues auraient pour contrepartie des ressources supplémentaires pour l'équipement et aussi un effort sans précédent de revalorisation de la condition des personnels dans la lignée des recommandations du haut comité pour la condition militaire.

Enfin, le ministre a souligné qu'un effort significatif serait effectué en faveur de la recherche de défense. Il a précisé qu'il avait revu certaines propositions des armées afin de garantir la pérennité des compétences dans des domaines tels que l'aviation de combat ou les missiles.

a ensuite évoqué les dispositions de nature législative contenues dans le projet de loi. Elles concernent notamment la réorganisation des pouvoirs publics, au travers d'une modification de l'ordonnance de 1959 sur la défense nationale, avec notamment l'instauration d'un Conseil de défense et de sécurité nationale dont le Conseil national du renseignement constituera une formation spécialisée. Il a également exposé les dispositions relatives à la SNPE, qui sera inscrite sur la liste des entreprises privatisables, et à DCNS. La loi permettra aux ouvriers d'Etat de DCNS d'être employés, tout en conservant leur statut, dans des filiales dont l'entreprise ne détient qu'une part minoritaire, ce qui n'était pas possible avec la législation actuelle et constituait un handicap dans la perspective de futures alliances industrielles. Le carnet de commande de DCNS pour les quinze années à venir place en effet l'entreprise dans une situation favorable pour nouer de telles alliances.

a par ailleurs donné des précisions sur les mesures prévues par le plan de relance dans le domaine de la défense. Celles-ci représentent près de 1,5 milliard d'euros pour 2009 et 770 millions d'euros pour 2010. Les crédits d'équipement augmenteront ainsi de 20 % en 2009, par rapport à 2008.

a confirmé qu'un amendement gouvernemental intègrerait ces éléments nouveaux dans le projet de loi de programmation militaire. Il a estimé que, sur le total des moyens supplémentaires prévus, environ 1,3 milliard d'euros correspondait à une accélération de dépenses déjà prévues dans le projet de loi de programmation et environ 1 milliard d'euros à des dépenses supplémentaires. La réalisation d'un troisième bâtiment de projection et de commandement représente à elle seule 400 millions d'euros supplémentaires sur la période de la programmation. Parmi les moyens inscrits au plan de relance figurent également 220 millions d'euros pour des travaux d'infrastructures sur des opérations programmées en attente de notifications et 110 M€ pour les études en amont.

Un débat a suivi l'exposé du ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

a indiqué que la commission examinerait avec soin le projet de loi de programmation militaire pour lequel elle avait déjà programmé un mois et demi d'auditions. Un débat en séance publique sur les opérations extérieures est prévu au Sénat le 28 janvier 2009. Il est évident que ces opérations auront un impact fort sur l'exécution de la loi de programmation. A la suite des déplacements sur les différents théâtres d'opérations, la commission conclut à la possibilité de réduire le volume des effectifs sur certains de ces théâtres.

Il a ensuite évoqué la situation des équipements dont la programmation doit faire l'objet d'arbitrages ultérieurs. C'est ainsi que l'avion de transport A400M, qui rencontre des difficultés industrielles et fait d'ailleurs l'objet d'une mission d'information parlementaire des rapporteurs Jean-Pierre Masseret et Jacques Gautier, le Rafale, les avions ravitailleurs, mais aussi les drones et les satellites de communication, ne sont pas encore totalement programmés. Il a souhaité connaître le moment retenu pour intégrer ces décisions d'arbitrages à la loi de programmation.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Pintat

évoquant les ressources exceptionnelles, a fait état des informations d'un quotidien économique selon lequel il serait impossible de réaliser en 2009 les ventes de fréquences militaires pour lesquelles 600 millions d'euros avaient été inscrits au budget. Il a souhaité savoir comment se présentait pour 2009 l'obtention des ressources exceptionnelles, tant pour les ventes de fréquences que pour les cessions immobilières, rappelant qu'au total 1,6 milliard d'euros, soit environ 10 % du budget d'équipement, est inscrit à ce titre dans la loi de programmation pour l'année 2009.

Evoquant ensuite la SNPE que l'article 11 du projet de loi prévoit d'inscrire sur la liste des entreprises privatisables, il a souhaité connaître l'analyse que l'État faisait de la situation de ce groupe et les conclusions qu'il en tirait pour ses perspectives d'évolutions. Rappelant que la SNPE intervenait dans le secteur stratégique de la propulsion solide, il s'est interrogé sur les garanties prévues pour conserver la maîtrise nationale de cette capacité technologique.

Debut de section - PermalienPhoto de André Dulait

a souhaité des informations sur la manière dont évoluerait le format des forces prépositionnées. Il s'est interrogé sur les crédits consacrés au nucléaire, et en particulier au laser mégajoule, au cours de la période de programmation.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

a tout d'abord observé que les personnels de DCNS ne semblaient pas adhérer complètement au schéma proposé par l'État pour l'évolution de l'entreprise. Il a déclaré partager les interrogations de M. Xavier Pintat sur la SNPE. Il a souhaité connaître l'évolution des crédits de maintien en condition opérationnelle, qui sont une difficulté récurrente, et sont absorbés, à 60 %, par sept régiments. Le coût de l'entretien du Tigre serait en outre beaucoup plus important que celui des hélicoptères actuellement en service. Il s'est interrogé, alors que la décision du Président de la République semble prise, sur le coût de la réintégration de la France dans le commandement intégré de l'OTAN. Evoquant le coût de 232 millions d'euros consacrés au second porte-avions, il a souhaité savoir si ce chiffre était confirmé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

a rappelé que la fixation des cadences pour les avions A400M et les avions ravitailleurs avait été reportée à 2010. Estimant que l'avion A400M, compte tenu des difficultés rencontrées, ne pèserait que marginalement sur la loi de programmation militaire, il a souhaité savoir si le programme d'avions ravitailleurs pourrait être accéléré.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

a souhaité des précisions sur les économies attendues de la mutualisation des soutiens et de l'externalisation. Il s'est interrogé sur les limites de cette démarche dans les opérations extérieures. Il a par ailleurs souligné qu'au vu des différents chiffrages figurant dans le projet de loi, l'évolution des effectifs était particulièrement difficile à apprécier.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

a souhaité des précisions sur les commandes d'acquisition de l'hélicoptère NH90.

Debut de section - Permalien
Hervé Morin, ministre de la défense

a apporté les éléments de réponse suivants :

- les cadences de production n'ont pas été définies pour certains programmes pour lesquels le Gouvernement attend de disposer de données industrielles et financières plus précises ; pour l'A400M, il s'agit d'attendre le résultat des évaluations en cours sur les conditions de poursuite du programme ; le cadencement du programme Rafale pourrait être redéfini au vu des perspectives à l'exportation ; en ce qui concerne les drones, le choix entre le lancement d'un programme européen et des solutions d'achat sur étagères sera effectué après l'étude de levée de risques sur le programme Advanced UAV dont les résultats sont attendus pour la fin du printemps prochain ;

- le processus de mise en vente des fréquences par le ministère de l'économie progresse lentement mais les 600 millions d'euros de ressources exceptionnelles ont été confirmés par le Président de la République ; les cessions immobilières ne suscitent en revanche aucune inquiétude puisqu'elles sont confiées à une société de portage ;

- pour ce qui concerne la SNPE, il faut rappeler que des entreprises privées ou européennes concourent déjà largement à la dissuasion française, ce qui démontre que le caractère stratégique des activités de l'entreprise n'implique pas obligatoirement le maintien de son statut public ; l'Etat souhaite bien entendu pérenniser l'activité « propulsion » de la SNPE ; en cas de privatisation, des procédures de type golden share seraient prévues pour permettre à l'Etat de faire prévaloir les intérêts stratégiques nationaux ;

- les discussions sont en cours avec les gouvernements concernés sur l'évolution du format des forces prépositionnées ; Djibouti, un seul point d'appui sur la façade atlantique ainsi que le Tchad devraient être préservés ; la base d'Abu Dhabi, conséquence d'un accord de défense, s'ajoutant à ce dispositif ;

- le coût global du programme de simulation, dont le laser mégajoule, représente 6,5 milliards d'euros. Au-delà de sa fonction de défense, le laser mégajoule constitue un pôle de recherche très attractif pour la recherche civile. Au cours de la prochaine période de programmation militaire, la modernisation des SNLE (sous-marins nucléaires lanceurs d'engins) sera poursuivie et le missile balistique M51 entrera en service ;

- l'équilibre de la programmation dépend très largement de l'évolution des ressources humaines et des diminutions d'effectifs de 26 000 postes pour l'armée de terre, 16 000 pour l'armée de l'air et 6 000 pour la marine ;

- la mutualisation des soutiens n'a aucune conséquence sur le soutien en opération extérieure. Il faut noter que les drones britanniques sont soutenus par des entreprises privées en Afghanistan. Pour ce qui concerne l'externalisation, il faut qu'elle soit la garantie de véritables économies sans atteinte à la capacité opérationnelle des armées. Des évolutions sont envisageables sur l'habillement et l'alimentation au terme d'un bilan coûts/avantages ;

- le maintien en condition opérationnelle du Tigre est effectivement plus coûteux, s'agissant de matériels récemment entrés en service. Le coût d'une heure de vol de l'hélicoptère Tigre est ainsi dix fois supérieur à celui de la Gazelle. Avec l'augmentation des volumes, ce coût devrait évoluer à la baisse. Dans le budget 2009, les crédits du maintien en condition opérationnelle augmentent de 8 %, même s'il faut rappeler que les résultats ne dépendent pas seulement des crédits mais surtout de l'organisation comme en attestent les résultats remarquables obtenus par le service de soutien de la flotte ;

- il n'est pas certain que le second porte-avions, auquel ont effectivement été consacrés 232 millions d'euros, essentiellement pour des études, ne se fasse pas. La question de la propulsion fait l'objet d'un nouvel examen ;

- pour ce qui concerne l'OTAN, le ministère n'en est pas encore au stade du chiffrage d'un renforcement de la participation française à la structure de commandement alors que l'organisation est elle-même en pleine transformation ;

- le ministère vient de notifier à Eurocopter la commande de 22 hélicoptères de transport NH 90, s'ajoutant à la commande de 12 hélicoptères déjà intervenue en 2007 ; l'échéance des premières livraisons reste fixée à 2011.