L'ordre du jour de cet après-midi appelle l'audition de M. Pierre Bivas, président de Voltalis.
Monsieur Bivas, je tiens tout d'abord à vous préciser que vos propos seront enregistrés. Vous pourrez éventuellement nous communiquer des informations complémentaires par écrit, mais vous seul allez prêter serment et parler devant notre commission d'enquête.
Comme vous le savez, notre commission d'enquête a été créée sur l'initiative du groupe écologiste, qui a fait application du « droit de tirage annuel » dont dispose chacun des groupes politiques du Sénat sur des sujets forcément d'actualité. Le Bureau a accepté cette demande, raison pour laquelle vous êtes aujourd'hui entendu devant notre commission d'enquête dont l'objet est le coût réel de l'électricité afin d'en déterminer l'imputation aux différents agents économiques.
Je vous rappelle que toutes les informations relatives aux travaux non publics d'une commission d'enquête ne peuvent être divulguées ou publiées, et qu'un faux témoignage devant notre commission serait passible des peines prévues aux articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal.
En ce qui concerne la présente audition, la commission a souhaité qu'elle soit publique, et un compte rendu intégral en sera publié.
Je vais maintenant vous faire prêter serment, conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête.
Je vous demande donc de prêter serment, monsieur Bivas, de dire toute la vérité, rien que la vérité, et de lever la main droite et dire : « Je le jure. »
(M. Pierre Bivas prête serment.)
Je vous remercie.
Pour entrer plus rapidement dans le débat, M. le rapporteur vous a adressé un certain nombre de questions. Il va maintenant vous les rappeler, car il est important qu'elles figurent dans le compte rendu intégral de votre audition. Nous vous remercions de bien vouloir y répondre, soit dans l'ordre, soit dans le désordre, en fonction des nécessités de votre démonstration, nous vous en laissons la liberté.
Monsieur le rapporteur, vous avez la parole.
Monsieur Bivas, cette audition aura trait principalement à l'effacement, dont vous êtes un spécialiste.
Je rappelle les cinq questions que nous vous avons adressées.
Première question, de quelle manière concrète l'effacement est-il réalisé chez les particuliers et les professionnels, par exemple l'arrêt temporaire de certains équipements sur demande à distance ?
Quel est, selon vous, le potentiel que pourrait représenter l'effacement - la puissance totale en mégawattheure - chez les industriels - les gros effacements - ou les « petits consommateurs », professionnels ou particuliers - les effacements diffus ? À quelles conditions ? Par exemple, la mobilisation des acteurs, les évolutions réglementaires ou tarifaires...
Deuxième question, quels avantages ou inconvénients peut-on attendre, pour le consommateur et pour la collectivité, de la réalisation de ce potentiel d'effacement et, plus généralement, de la construction de « réseaux intelligents », ou smart grids ?
Vous voudrez bien préciser cet impact en regard notamment du montant des factures d'électricité pour le consommateur, de l'intégration des énergies renouvelables dans les réseaux et de la réduction des besoins en moyens de production de pointe ?
Troisième question, le modèle tarifaire classique étant conçu pour rémunérer une production et non un effacement, qui constitue une « non-consommation », quels sont les mécanismes envisageables, et souhaitables, pour rémunérer ceux qui contribuent à cet effacement, aussi bien le consommateur que l'opérateur qui agrège les effacements ?
Quatrième question, quel rôle le mécanisme de capacités, issu de la loi portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, ou loi NOME, pourra-t-il jouer pour promouvoir l'effacement ? Quel regard portez-vous sur le projet présenté à la fin de l'année 2011 par RTE, en cours de finalisation par l'administration ?
Cinquième et dernière question, quel sera selon vous l'impact du compteur Linky sur la réalisation du potentiel d'effacement ? Faudrait-il, par exemple, proposer aux clients, lors de l'installation du compteur, d'équiper leurs équipements fortement consommateurs - par exemple, le chauffage électrique - avec un système d'effacement à la demande ?
Monsieur le président, le mot « effacement » revient, me semble-t-il, souvent dans les questions.
Cela me semble assez normal.
Monsieur Bivas, avant d'avoir le plaisir de répondre à la dernière des questions, il vous faudra prendre le temps de répondre aux quatre précédentes ! (Sourires.)
Vous avez la parole.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, messieurs les sénateurs, mon propos portera plus particulièrement sur la production d'effacements diffus, qui concerne l'ensemble des petits consommateurs, résidentiels et professionnels. Votre première question me permettra de distinguer l'effacement diffus de l'effacement chez les industriels, sur lequel je ne m'attarderai pas, mais dont je dirai quelques mots à titre de comparaison.
Pour ce qui est des installations chez les petits consommateurs, dans les habitations, les bureaux et les petites surfaces commerciales, nous installons deux types de boîtiers (M. Bivas montre un boîtier blanc et un boîtier gris) : d'une part, un boîtier de communication nous permettant d'assurer un suivi en temps réel de ce qui se passe sur le site et, d'autre part, un boîtier électrique - le plus important -, qui s'installe sur le tableau à côté des disjoncteurs et autres dispositifs de sécurisation de l'installation électrique du local. Ce boîtier électrique, vous l'aurez compris tout de suite, se trouve donc en aval du compteur - pour l'amont, ce sera le sujet de votre cinquième question -, dans le domaine privé du particulier, dans le logement que nous équipons.
Un boîtier sert à communiquer, l'autre à mesurer et à agir. Le boîtier le plus important est équipé de plusieurs trous permettant de relier des câbles aux différents radiateurs et chauffe-eau du logement, de manière à mesurer distinctement la consommation de chaque appareil. En effet, chacun des départs de ce boîtier comporte un compteur permettant de mesurer la consommation. L'information relative à la mesure est envoyée à ce boîtier, puis est renvoyée en temps réel sur nos serveurs, ce qui nous permet aujourd'hui de suivre en temps réel la consommation de près de un million de radiateurs électriques raccordés et peut-être un jour de dix millions, j'y reviendrai.
L'effacement constitue la seconde fonction de ce boîtier, qui nous permet d'envoyer un ordre, d'ouvrir un relais situé à l'intérieur, c'est-à-dire d'interrompre l'alimentation d'un radiateur ou d'un chauffe-eau pendant dix minutes ou un quart d'heure. Cette opération est insensible pour le consommateur, mais très efficace en termes de régulation électrique, nous y reviendrons ultérieurement. L'arrêt d'un radiateur d'un kilowatt pendant cinq minutes dans un logement est imperceptible pour les habitants, mais si l'on efface simultanément 100 000 appareils, cela représente 100 000 fois un kilowatt, c'est-à-dire 100 mégawatts de puissance que le réseau n'a pas besoin de délivrer et qu'il n'est donc nécessaire ni de produire, ni de transporter.
Vous m'avez demandé de décrire concrètement la façon dont l'effacement est réalisé sur le site. La première phase de notre intervention consiste à installer ce boîtier, par exemple chez les particuliers.
Monsieur le président, puisque vous me permettez de répondre aux questions dans le désordre, je répondrai maintenant pour partie à votre cinquième question.
Notre boîtier, vous l'avez compris, est distinct et complémentaire d'un compteur, quel qu'il soit. Il est donc aussi distinct et complémentaire du compteur Linky, entre autres.
Le compteur se situe, bien sûr, à l'entrée du site, à l'endroit où arrive le câble unique qui alimente l'ensemble du site. Notre boîtier se trouve en aval du compteur, sur le tableau où l'on va au contraire distinguer les différents départs. Ils ne peuvent donc pas se substituer l'un à l'autre, puisqu'il faut avoir cette information détaillée.
Vous l'avez compris, nous effaçons de façon ciblée certains usages. Nous arrêtons le radiateur de la chambre pendant cinq minutes et non pas toute l'électricité du logement. Par exemple, nous n'arrêtons pas la télévision ou l'ordinateur, qui sont si utiles pour suivre notre débat... (Sourires.)
Nous procédons à un effacement ponctuel, très ciblé à la fois dans le temps et sur les appareils les plus gros consommateurs d'électricité que l'on peut arrêter sans gêner les personnes.
Cela nous amène à une autre conséquence, qui est déjà implicite dans l'une de vos questions : nos dispositifs intéressent les foyers chauffés à l'électricité équipés d'appareils qui consomment beaucoup tels que les radiateurs et les chauffe-eau et non pas ceux qui n'ont, par exemple, que l'éclairage et la télévision, sur lesquels il n'y a pas de possibilités d'effacement. Mais leur facture d'électricité est bien moindre et il y a beaucoup moins d'économies à réaliser.
Nous parlons donc des locaux chauffés à l'électricité, soit, en France, 7 millions de logements. Dans le tertiaire, puisque nos boîtiers peuvent aussi équiper des locaux tertiaires - par exemple, des immeubles -, cela représente 40 % du chauffage dans les logements. Par conséquent, chaque fois que j'évoque les logements, vous pouvez multiplier par 1,4 si vous voulez obtenir le potentiel en termes de logement et tertiaire.
Si j'évoque le tertiaire, c'est parce qu'il peut y avoir un chauffage électrique dans un bureau de 100 mètres carrés, et l'on peut de la même façon arrêter le radiateur pendant dix minutes ou un quart d'heure. Ce n'est pas perceptible et cela procure une capacité d'effacement.
J'aborderai maintenant l'effacement dans l'industrie, car il faut bien faire la distinction.
On parle historiquement depuis longtemps d'effacement industriel en France, ce n'est pas un concept nouveau, car le fait d'arrêter une usine consommant plusieurs mégawatts par un simple coup de téléphone à l'opérateur, qui va interrompre le processus, libérera plusieurs mégawatts d'un seul coup. C'est ainsi que, depuis très longtemps, EDF - à l'époque, l'opérateur unique - demandait des effacements à des clients industriels, en particulier dans des périodes de forte tension, parce que 10 mégawatts, 20 mégawatts voire 30 mégawatts captés par-ci par-là sont très utiles pour la sécurité du système.
Ce fonctionnement a un avantage : il suffit d'un coup de téléphone pour arrêter plusieurs mégawatts, alors que, pour l'effacement diffus, il faut envoyer des instructions à des milliers de radiateurs pour qu'ils produisent tous ensemble cet effet.
L'inconvénient de l'effacement industriel est qu'il interrompt le processus industriel, car c'est ce qui consomme beaucoup d'électricité et va donc en libérer beaucoup. L'ennui, c'est qu'arrêter un procédé industriel a un coût considérable, puisque cela perturbe le fonctionnement de l'industrie considérée. Cela peut avoir un sens certains jours où la situation électrique est extrêmement tendue, cela peut même avoir un sens économique pour la collectivité. On demande à l'industriel de décaler sa production, mais il faut bien le dédommager, car tout décalage de production a un coût.
Cet exemple illustre le fait que, globalement, l'effacement industriel apportera peut-être de la valeur au système électrique, mais détruira à l'évidence de la valeur dans l'usine que l'on arrête.
Au contraire, dans le cas de l'effacement diffus, nous arrêtons des radiateurs : c'est insensible, cela produit quelques économies d'énergie chez chacun des consommateurs participant à cette opération, mais cela ne détruit pas de la valeur. C'est donc économiquement et techniquement très différent.
S'agissant des industriels, nous leur demandons s'ils veulent bien interrompre leur process, puisque cela entraînera des perturbations.
Quant aux particuliers, ils sont volontaires pour adhérer chez nous, pour se faire équiper, et ils vont nous laisser gérer sans les déranger ; c'est l'objectif. Nous allons produire des petites économies par-ci par-là en effaçant au moment où cela sert le système électrique.
Votre troisième question porte sur l'agrégateur d'effacement. Il convient, me semble-t-il, de distinguer trois catégories d'acteurs, sachant que nous appartenons à la troisième.
La première catégorie, c'est l'industriel qui s'efface. Il lui suffit d'un coup de téléphone à son fournisseur d'électricité et, moyennant un paiement, il va arrêter son process.
La deuxième catégorie, c'est l'agrégateur d'effacement qui intervient en fait comme un courtier entre des industriels qui acceptent d'arrêter leur processus industriel et le système électrique. Un courtier va passer, par exemple, trente coups de téléphone à trente industriels pour obtenir l'arrêt de la consommation ; il servira d'intermédiaire entre le marché électrique et ces industriels.
Nous appartenons à la troisième catégorie d'acteurs : nous sommes producteurs d'effacement diffus, au sens où nous effectuons les effacements après avoir réalisé les investissements qui consistent à équiper tous ces sites à nos frais et, ensuite, nous pilotons cet ensemble de sites mis en réseau de manière à produire les mégawatts d'effacement diffus.
C'est donc un modèle à la fois technique et économique différent, un modèle de création de valeur pour la société, puisque notre métier repose sur la production d'économies d'énergie. Il est plus sophistiqué de parler de « production d'effacement diffus », mais cette sophistication revient à masquer le premier effet qui est de produire des économies d'énergie et à le compléter par le fait que nous produisons ces économies d'énergie au moment où cela intéresse le réseau, bien sûr, car c'est une alternative à la production d'électricité et à son acheminement sur le réseau.
Votre première question porte sur le potentiel de l'effacement.
Je commencerai par l'historique : l'effacement industriel.
L'effacement industriel a été instauré dans le cadre des tarifs EJP, ou effacement jour de pointe, pour déranger le moins possible les industriels, et seulement sur quelques jours très tendus. Les chiffres enregistrés sont publics : 6 gigawatts de potentiel d'effacement en France tant chez les industriels que chez les particuliers. Ce potentiel s'est considérablement réduit, puisqu'il atteint aujourd'hui moins de 3 gigawatts pour les industriels : lorsque l'on déclenche le signal « jour de pointe », si vous consommez, cela vous coûte très cher : c'est le coup de massue ; et si vous vous effacez, ce que font les industriels, vous évitez ce tarif élevé, mais vous perturbez votre processus industriel.
L'ensemble des industriels qui pratiquent cet effacement permettent d'économiser aujourd'hui 3 gigawatts. C'est une mesure du potentiel de l'effacement industriel.
Une autre mesure peut être donnée par un dispositif plus récent engagé par RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, à la demande des industriels qui ont fait valoir qu'ils disposaient d'un potentiel d'effacement important, qu'ils pourraient apporter au réseau, demandant à RTE de s'y intéresser. Vous le savez, RTE a déjà lancé trois années de suite un appel d'offres pour des capacités d'effacement d'industriels mobilisables en fonction des besoins du réseau, et les capacités obtenues ont été, selon les années, de 200 mégawatts ou 300 mégawatts.
L'ordre de grandeur du potentiel d'effacement industriel est donc certainement de 200 mégawatts ou 300 mégawatts à 2 gigawatts ou 3 gigawatts, à condition de n'utiliser cet effacement que très rarement pour ne pas perturber l'industrie, l'industriel n'ayant pas pour métier de s'arrêter de consommer.
En comparaison, le potentiel de l'effacement diffus peut s'apprécier simplement par rapport au chiffre de 7 millions de logements français chauffés à l'électricité. Si on multiplie ce chiffre par la consommation d'un foyer en hiver les jours de pointe, c'est-à-dire 3 kilowatts, cela fait 21 gigawatts, ou 28 gigawatts si vous multipliez 7 millions par 4 kilowatts.
Prenons le chiffre de 25 gigawatts, qui se situe entre les deux : si vous y ajoutez les 40 % de locaux tertiaires évoqués précédemment, vous dépasserez les 30 gigawatts.
Ce chiffre est certainement ambitieux : il s'agit du potentiel maximal. Retenons que le potentiel atteignable doit être entre 10 gigawatts et 20 gigawatts ; c'est le chiffre qui figure dans le rapport Poignant-Sido sur la maîtrise de la pointe électrique, présenté en avril 2010.
Ces 10 gigawatts à 20 gigawatts sont à comparer aux 200 mégawatts de l'effacement industriel. Ce n'est pas le même ordre de grandeur, l'enjeu est considérable, mais cela nécessite des technologies radicalement nouvelles pour pouvoir piloter simultanément des millions de sites. C'est cela que nous avons l'immodestie de considérer avoir apporté en France avec une technologie française, qui pourrait servir pour le consommateur français et aussi à l'international.
Votre première question porte sur les conditions de succès de l'effacement diffus. Comment mobiliser ce potentiel ?
La première condition est celle de la mobilisation locale et du volontariat de nos adhérents. Tous sont volontaires et sont équipés gratuitement ; c'est nous qui portons l'investissement et ils réalisent des économies d'énergie. On comprend qu'ils soient nombreux, mais il est très important pour nous que ce soient des volontaires qui participent à cette action, au service du système électrique, pour réaliser des économies d'énergie et réduire les factures.
S'agissant de la mobilisation locale, le Pacte électrique breton en est une magnifique illustration : l'État, la région, RTE et d'autres acteurs se sont mobilisés pour organiser une meilleure sécurisation de cette péninsule électrique qu'est la Bretagne. L'une des actions mises en place immédiatement, le jour même de la signature du Pacte électrique breton, a été une convention avec Voltalis pour déployer le plus rapidement possible l'effacement diffus.
L'organisation d'une telle mobilisation est très simple : la collectivité informe le public de l'existence de ce service et nous répondons à la demande. Nous constatons que les collectivités qui l'ont fait suscitent une demande considérable. Nous essayons de nous organiser pour y répondre, en Bretagne et dans d'autres territoires.
Quel est le sens de notre métier ?
Notre but initial était d'apporter une optimisation de la consommation d'électricité pour aider les foyers à réduire leur facture, en particulier les foyers modestes. Je réponds ici à votre deuxième question, sur le bénéfice pour le consommateur.
Le premier bénéfice immédiat de l'adhésion à l'effacement diffus, c'est la diminution de la facture. C'est très simple dans un contexte où, d'une part, il y a nombre de raisons pour lesquelles il faut absolument augmenter les tarifs de l'électricité et où, d'autre part, le pouvoir d'achat de nombreux ménages modestes est sous grande pression. Enfin, ce n'est pas l'État ou les collectivités qui vont combler le hiatus avec de la dépense publique. Proposer un système qui permet aux personnes de réaliser des économies d'électricité et de réduire leur facture nous paraissait intéressant pour la collectivité.
Pour donner un ordre de grandeur, nos boîtiers permettent aux consommateurs d'économiser de 10 % à 15 % de leur consommation, ce qui représente, pour un foyer chauffé à l'électricité, qui a une facture relativement élevée - par opposition à celui qui se chauffe à une autre énergie -, environ 1 500 euros à 2 500 euros par an. Si vous économisez 10 %, cela fait 200 euros d'économies par an, ce qui est déjà significatif pour les foyers modestes que nous équipons gratuitement. Cette économie d'électricité est donc accessible à tous les foyers.
On comprend donc la mobilisation des collectivités pour diffuser cette information et susciter des adhésions. Je voudrais à cette occasion remercier les collectivités avec lesquelles nous travaillons, certaines d'entre elles étant représentées au sein de votre commission. Nous travaillons avec des syndicats départementaux d'électricité, j'ai évoqué une région ; je pourrais également évoquer des villes.
Je prendrai l'exemple de ce que peut représenter l'effacement diffus pour une ville ou un département dont la population s'élèverait, raisonnons en chiffres ronds, à un million d'habitants et qui compterait 300 000 logements. Sur ces 300 000 logements, 100 000 sont chauffés à l'électricité. Imaginons que nous en équipions la moitié, c'est-à-dire 50 000, comme nous l'avons déjà fait. Cela fera d'abord 50 000 installations à réaliser dans ce territoire, soit 50 000 interventions d'électriciens que nous prendrons à notre charge, que nous paierons pour installer ces boîtiers chez les adhérents. Cela représente environ 5 millions d'euros de chiffre d'affaires pour ces électriciens, et c'est de l'emploi local.
En outre, chacun de ces 50 000 foyers économisera 200 euros par an. Au total, cela représente 10 millions d'euros d'économies par an dans ce territoire : c'est beaucoup d'argent !
Enfin, l'équipement de ces 50 000 logements nous permettra de constituer une capacité d'environ 200 mégawatts ; c'est l'équivalent d'une petite centrale, et cela revêt donc un certain intérêt pour le système électrique.
Je décrirai maintenant de manière plus détaillée l'utilisation de notre technique par le système électrique, afin d'essayer de caractériser son impact pour la collectivité.
À titre de transition, je rebondirai sur l'expression smart grids, que vous avez employée tout à l'heure, monsieur le rapporteur. Nous n'avons pas la prétention de créer des smart grids ; peut-être est-ce la préoccupation des opérateurs de réseau ou des sociétés de services en ingénierie informatique, les SSII, qui ont l'intention de développer leur facturation auprès de ces opérateurs de réseau. Notre but est de fabriquer des produits smart for the grids : nous essayons de rendre des services aux réseaux, en agissant sur la partie la plus susceptible d'optimisation, à savoir la consommation. Nos techniques d'optimisation bénéficient donc directement aux consommateurs.
Lorsque l'on efface 200 mégawatts - reprenons ce chiffre -, cela évite de les produire et de les transporter. Cela paraît tout simple, mais c'est ce qui donne toute sa valeur à notre production.
Vous avez soulevé la question du prix de la production à la pointe. De fait, les 200 mégawatts produits à la pointe sont particulièrement importants, car c'est la pointe qui dimensionne l'ensemble de l'infrastructure : c'est en fonction de cette pointe qu'on détermine le nombre de centrales et de réseaux à construire.
Comme vous le savez, en France, la pointe est extrêmement pointue, si je puis dire : 20 gigawatts de puissance appelée pendant seulement 3 % du temps. Cela signifie que l'on consomme les douze derniers gigawatts en treize jours. Ce sont les chiffres de l'année qui vient de s'écouler, au cours de laquelle il a fait très froid, notamment pendant ces quinze jours du mois de février dont tout le monde se souvient. Je dirais même que les sept derniers gigawatts ne sont utilisés que durant sept jours, de manière très ponctuelle, donc. En réalité, seules quelques heures de chacun de ces sept ou treize jours sont concernées : trois ou quatre le matin, une ou deux le soir.
En somme, on construit des centrales ayant la capacité de produire des dizaines de gigawatts - dans mon exemple, 7, 12 ou 20 selon le seuil choisi - et des réseaux permettant de les transporter, alors que ces infrastructures ne sont utilisées complètement qu'une très petite partie du temps.
La solution retenue pour financer ces investissements a été d'en faire supporter le coût aux consommateurs le reste de l'année, d'autant que, dans un environnement de monopole, cela ne se voit pas trop... Pour autant, cela ne signifie pas que cela ne coûte pas très cher ! Construire des centrales de 20 gigawatts pour alimenter la pointe, cela coûte environ 20 milliards d'euros. Peu importe, me direz-vous, puisque ces centrales de pointe ont déjà été construites. Toutefois, ce raisonnement ne vaudrait que si la pointe n'augmentait pas. Or, comme vous le savez, notre pointe est de plus en plus pointue : elle augmente de manière très soutenue, bien plus rapidement que la consommation, puisqu'elle croît d'un peu plus de 3 % par an en rythme moyen sur cinq ans ; cela représente plus de 3 gigawatts d'augmentation par an.
Si nous répondons à ce besoin par la construction de nouvelles centrales et de nouveaux réseaux, il faudra dépenser 5 à 6 milliards d'euros par an, pour des investissements qui ne serviront que quelques heures...
Nous économiserions donc beaucoup d'argent en évitant ces investissements.
Comparons cette solution classique et la solution de l'effacement diffus, afin d'apprécier les bénéfices qu'apporte cette dernière.
La solution classique consiste à augmenter la puissance totale que peuvent produire les centrales disponibles et qui peut être transportée par le réseau de distribution et de transport, afin de disposer de 3 ou 4 gigawatts de plus chaque année ; cela nous coûtera 5 ou 6 milliards d'euros par an, sans aucune rentabilité, puisque les investissements consentis ne servent presque jamais.
La solution alternative consiste à développer notre capacité d'effacement diffus. Pour obtenir 3 gigawatts de plus chaque année, il faudrait équiper un million de foyers tous les ans, ce qui représenterait 400 millions d'euros d'investissements au lieu des 5 ou 6 milliards d'euros que je viens d'évoquer. Le coût pour la collectivité est donc nettement inférieur, et cela constitue un moyen de faire des économies sur les dépenses des opérateurs électriques, qui seront un jour ou l'autre payées par les consommateurs.
Je vous indiquais tout à l'heure que le potentiel était peut-être de 25 ou 30 gigawatts d'effacement diffus en France ; je vous suggérais de diviser ce potentiel maximum par deux, et de ne retenir que 10 ou 15 gigawatts. En s'en tenant là, on peut absorber plusieurs années de croissance de la pointe française. Il y a donc là pour la collectivité une décision d'investissement rationnelle à prendre dès aujourd'hui et pour les prochaines années.
Si vous me permettez d'intervertir à nouveau l'ordre de vos questions, je passerai à la quatrième. Celle-ci porte sur le mécanisme de capacité mis en place par la loi NOME, et les préconisations de RTE et de l'administration dans ce domaine.
Nous considérons qu'il s'agit d'une manière intéressante de traiter la question de la pointe, sujet sur lequel la France est d'ailleurs en avance par rapport à d'autres pays. Le Royaume-Uni nous court derrière, d'une certaine façon, et nos voisins européens font face, eux aussi, à des enjeux de capacité. La France développe un système qui me semble plutôt bien conçu. Nous avons été en avance dans différents domaines du système électrique ; nous pouvons l'être sur le marché de la capacité ; nous pourrions l'être également - j'y reviendrai tout à l'heure - sur celui de l'effacement diffus.
Je voudrais apporter deux réflexions complémentaires concernant le mécanisme de capacité.
Premièrement, la dimension « réseau » n'a pas été vraiment prise en compte dans ce mécanisme. Pour l'instant, on ne s'est intéressé qu'à une obligation de capacité de production. Or, comme je vous l'ai indiqué, il faut aussi dimensionner les réseaux en fonction de la pointe. De ce point de vue, notre capacité d'effacement permet d'éviter à la fois de produire et de transporter, et donc d'économiser des coûts d'investissement en centrales mais aussi en réseaux. Dans le système actuel, cette valeur n'est pas reconnue ; c'est le premier point que je voulais souligner.
Deuxièmement, compte tenu des aspects économiques, sociaux, écologiques et techniques que je viens de mentionner, il y aurait du sens à ce que, à conditions techniques et économiques équivalentes, l'effacement diffus soit systématiquement utilisé, pour la bonne raison qu'il est moins cher et plus propre, sans compter qu'il évite des dépenses aux consommateurs. Je dis bien « à conditions équivalentes », ce qui signifie qu'il ne s'agit que de traiter le besoin de pointe ; nous ne proposons pas d'assurer la base de la production des centrales nucléaires par l'effacement diffus : cela n'aurait aucun sens. Mais, pour ce qui est du besoin de pointe, très ponctuel - quelques jours par an, justement lorsqu'il y a de la réserve d'effacement diffus, puisque la consommation, notamment thermique, est très importante -, il me semble qu'il est dans l'intérêt de la collectivité de mobiliser autant que possible l'effacement diffus, et que ce constat devrait être traduit dans les mécanismes en cours de constitution sous l'égide de la loi NOME.
J'en viens maintenant à votre troisième question, qui porte sur la manière de réguler...
Il faut prévoir du temps pour les questions complémentaires ; mais poursuivez, je vous en prie.
Me laissez-vous encore cinq à sept minutes ?
Je vous remercie.
Quel est le contexte économique et régulatoire de l'effacement diffus ? Votre question porte d'abord sur les modèles tarifaires classiques. Cela me fait tout de suite penser aux consommateurs. Je souligne que, dans tous les modèles tarifaires, le consommateur participant à l'effacement diffus bénéficie de l'économie d'énergie : moins de kilowattheures consommés, cela signifie moins d'euros à payer, indépendamment du caractère réglementé ou non du tarif.
La question qui se pose est celle de la reconnaissance et de l'intégration de notre production dans l'ensemble du système électrique, puisque c'est là que celle-ci trouve sa rémunération. Deux questions majeures ont déjà leur réponse, mais une interrogation demeure en suspens. Les deux questions majeures ont trait à la façon dont nos mégawatts, nos capacités sont reconnus sur les marchés de l'énergie et de la capacité.
Je commencerai par la capacité, puisque nous venons d'en parler. La loi NOME que vous avez votée prévoit une symétrie entre l'effacement et la production classique, ce qui signifie très logiquement qu'un mégawatt effacé constitue une alternative à un mégawatt de capacité de production. Cela revient, je le répète, à oublier que le mégawatt effacé ne nécessite aucun réseau, mais c'est tout de même une première reconnaissance, au moins en tant que capacité de production : l'effacement diffus est une capacité de production comme une autre.
La reconnaissance de cette capacité de production par la loi NOME est très importante ; on peut la saluer, d'autant que ce n'est pas le cas dans tous les pays.
Le deuxième point, c'est le fait que notre production soit déjà reconnue. Nous valorisons déjà nos mégawattheures d'effacement, puisque nous participons continûment, régulièrement, au mécanisme d'ajustement qui permet à RTE d'acheter des mégawattheures, c'est-à-dire des mégawatts effacés ou produits pendant une heure, en mettant en concurrence les mégawattheures de production classique et les mégawattheures d'effacement.
Les deux aspects essentiels de notre activité s'inscrivent donc déjà dans le cadre législatif et réglementaire français ; par conséquent, il n'existe pas d'aspect législatif à traiter particulièrement. Je reviendrai tout à l'heure sur ce qu'il y aurait à faire - ce sera la dernière partie de mon exposé -, mais, auparavant, je voudrais évoquer le point d'interrogation que j'ai mentionné.
Il ne vous a pas échappé que, lorsque nous baissons la consommation d'un consommateur, il consomme moins... Ce faisant, il réalise des économies, ce qui est très bon pour lui, mais c'est autant d'argent qu'il ne verse pas à son fournisseur d'électricité.
Plaçons-nous du point de vue du fournisseur : soit il achète un mégawattheure de production à une centrale allemande pour alimenter la consommation de ses clients, qui la lui paient, soit il achète, pour le même prix, un mégawattheure d'effacement de Voltalis, mais la conséquence est que les consommateurs ne consomment pas... C'est embêtant, non pas pour les consommateurs, certes, mais pour le fournisseur !
J'ai choisi de me placer du point de vue des fournisseurs pour vous montrer que nous comprenons tout à fait leur position. Il est exact que, lorsque les gens ne consomment pas, le chiffre d'affaires des fournisseurs diminue. Certains en ont conclu que cette perte de chiffre d'affaires devait être compensée, par le consommateur ou par Voltalis, ce qui revient à peu près au même, puisque nous agissons par délégation, par mandat du consommateur, en regroupant tous ses effacements.
Si nous comprenons le point de vue des fournisseurs, nous ne pensons pas que cette compensation soit conforme à l'intérêt général. Nous tenons à souligner que cela détruirait l'effacement diffus et annihilerait tout potentiel en France.
Je constate d'ailleurs que ce débat a également eu lieu aux États-Unis, ce qui est bien normal, puisque les enjeux ne dépendent pas d'un cadre réglementaire ou législatif particulier, mais sont d'une nature tout à fait concrète. Après une analyse économique détaillée, le régulateur américain a estimé qu'il n'y avait pas lieu d'apporter de compensation au fournisseur : le recours à l'effacement diffus permet d'économiser tellement d'argent, puisque moins d'investissements sont nécessaires, que ce n'est pas grave si le fournisseur y perd un peu ; j'y reviendrai.
En France, sur un plan purement juridique, le Conseil d'État a fait la même analyse, concluant qu'il n'existait aucune base pour une éventuelle compensation. Nous avons alors vu resurgir, y compris dans ces murs, des propositions audacieuses de changement de la loi pour donner raison aux fournisseurs, ce qui nous laisse extrêmement perplexes.
Revenons à l'analyse économique. Il faut reprendre les chiffres que je vous ai présentés : si on construit 1 gigawatt de capacité d'effacement diffus, cela coûtera 100 millions d'euros d'investissement, contre 1 à 2 milliards d'euros pour la même capacité obtenue par la construction de centrales et de réseaux. L'économie est donc d'emblée considérable pour la collectivité.
Il est vrai que, du point de vue du fournisseur, il y aura un manque à gagner de 20 ou 30 millions d'euros du fait de la moindre consommation de ses clients. Les consommateurs s'en réjouiront, mais le fournisseur demandera que cela soit pris en compte. Toutefois, si le fournisseur - EDF, par exemple, pour prendre un acteur sérieux - voulait répondre au besoin de consommation en construisant des centrales supplémentaires plutôt qu'en ayant recours à des centrales d'effacement, cela lui coûterait 1 ou 2 milliards d'euros d'investissement, et les frais financiers sur cette somme - 50 millions d'euros par an pour un emprunt à 5 % - seraient largement supérieurs aux 20 ou 30 millions d'euros d'économies d'énergie que les consommateurs pourront réaliser. Par conséquent, il y a un intérêt même pour EDF, l'opérateur le plus sérieux de notre pays.
Je signale également une différence entre les deux schémas : dans un cas, l'opérateur électrique paie 50 millions d'euros à des banquiers, tandis que, dans l'autre cas, ce sont 20 ou 30 millions d'euros que ne paient pas les consommateurs. Si je me réfère à l'objet même de votre commission d'enquête, la différence est assez sensible...
En résumé, il me semble que le principal enjeu n'est pas de modifier les textes mais d'arriver à une véritable coopération entre les acteurs sérieux, qui permette une réelle exploitation du potentiel de ce métier. Quand je parle d'opérateurs d'électricité sérieux, je pense à EDF, RTE et ERDF, qui ont tous à y gagner, ou encore à GDF-Suez, qui participe à la production. Je distingue ces opérateurs - vous l'avez compris - des fournisseurs alternatifs dont le métier n'est pas d'investir mais uniquement de produire des factures et peut-être, de temps en temps, des plus-values pour les actionnaires qui aiment bien jouer à ce jeu...
Nous aimerions nous placer dans une logique de coopération avec les producteurs sérieux, afin de développer le maximum du potentiel de l'effacement diffus au bénéfice de la collectivité, des consommateurs français et du système électrique. Il y a - je crois vous l'avoir décrit - plusieurs milliards d'euros par an d'investissements à éviter ; cela représente autant de ressources financières que les opérateurs, notamment EDF, pourront consacrer à des priorités plus importantes, comme la sûreté du système électrique, et en particulier des centrales nucléaires, plutôt que de les gâcher pour construire des centrales de pointe que l'on peut remplacer par un mécanisme bien moins onéreux, quitte, je le reconnais, à faire faire quelques économies d'énergie à des consommateurs, en particulier modestes.
Je pense qu'il est assez satisfaisant de mettre en place un système permettant à des consommateurs modestes de réaliser des économies, dans un contexte où il sera indispensable, pour l'équilibre du système électrique à moyen terme, d'augmenter les prix de l'électricité.
Telle est la contribution que nous espérons pouvoir apporter au système électrique et aux travaux de votre commission d'enquête.
Je vous remercie, monsieur Bivas.
Je déduis de vos propos la réponse à notre cinquième question, qui pourrait être résumée en une phrase : il serait très intéressant que le boîtier Voltalis soit installé en complément de tous les compteurs Linky !
Avant que je donne la parole à mes collègues, j'aimerais que vous nous éclairiez sur deux points précis.
Premièrement, combien avez-vous de clients aujourd'hui, et qui sont-ils ? Sont-ils répartis de manière diffuse ou concentrés dans certains lieux ? Vous avez pris l'exemple d'une ville dans laquelle 50 000 foyers seraient équipés de votre système, mais vous n'avez installé 50 000 boîtiers dans aucune ville.
Deuxièmement, il me paraît important, afin que nous comprenions bien l'intérêt du boîtier Voltalis, que vous nous indiquiez comment votre entreprise est rémunérée.
Vous avez décrit de manière très claire le litige avec non pas les fournisseurs d'électricité mais le principal fournisseur français - je connais bien ce débat -, mais expliquez-nous comment vous vous faites rémunérer, puisque vous installez gratuitement vos boîtiers, et comment vous avez réussi, malgré les difficultés que vous avez rencontrées dans vos discussions avec EDF, à trouver tout de même un certain équilibre.
Votre démonstration correspond à une situation idéale, dans laquelle il y aurait des boîtiers Voltalis partout. Mais, concrètement, où en êtes-vous aujourd'hui ?
M. Bivas a fait la démonstration de l'intérêt de l'effacement diffus en période de pointe, mais j'estime que les compteurs Voltalis peuvent être intéressants en permanence.
Ce sont effectivement des questions clés. Je répondrai d'abord à votre boutade sur la cinquième question. On pourrait en effet installer un boîtier Voltalis en aval de chaque compteur, Linky ou autre, et, plus précisément, dans chaque local chauffé à l'électricité, soit dans un petit tiers des logements. La manière d'organiser cette installation du point de vue juridique et technique, par rapport au plan de déploiement des compteurs Linky, soulève de nombreuses questions, mais il n'y a aucun doute quant à l'opportunité de s'organiser pour équiper plusieurs millions de foyers en France dans les années à venir.
Vous m'avez également demandé où nous en étions aujourd'hui. Nous avons raccordé un petit million de radiateurs, c'est-à-dire, pour simplifier, 1 gigawatt de capacité installée, compte tenu du foisonnement, cela nous permet d'avoir jusqu'à 300 mégawatts de capacité à offrir au système électrique. Cela représente un peu moins de 100 000 logements ou équivalents équipés.
Bien entendu, vous pourriez sourire devant mon optimisme et considérer qu'il ne s'agit encore que d'une petite chose. De fait, nous sommes une petite entreprise de deux cents personnes, et le nombre de nos installations est encore bien loin des millions dont je vous ai parlé ; votre question est donc tout à fait légitime, monsieur le président. Si nous voulons que la collectivité française bénéficie de notre système, la réflexion doit largement déborder les murs de Voltalis : il faut que des acteurs beaucoup plus importants se mobilisent afin que les effets se déploient à très grande échelle.
Vous avez mentionné notre litige avec le principal fournisseur français d'électricité. Je voudrais apporter un codicille très important à nos yeux. Nous avons eu un litige avec des fournisseurs alternatifs - avec presque un seul d'entre eux, maintenant -, qui considéraient que moins nous existions, mieux cela était. Ce n'était pas le cas d'EDF : même aux périodes les plus tendues de notre dialogue, nous avons toujours été animés, de part et d'autre, par le souci de l'intérêt général, des moyens de faire évoluer cette technologie nouvelle afin de la déployer au mieux des intérêts la collectivité ainsi que - cela ne me semble pas contradictoire - de ceux de nos deux entreprises.
J'estime qu'il s'agit d'une attitude sérieuse, raisonnable, réaliste. Je comprends très bien que, à une époque, EDF ait pu considérer que nos mille adhérents n'étaient pas très significatifs, que l'effacement diffus n'avait aucun rapport avec les problèmes de sécurité du pays. Peut-être que, aujourd'hui, compte tenu des chiffres que j'ai annoncés, la question de l'intérêt de notre système pour la collectivité - pour des millions et non plus des milliers ou des centaines de milliers de foyers - peut être posée ; je vous remercie d'ailleurs de m'avoir invité à en parler.
J'en viens à la question de notre rémunération. Ne sommes-nous payés qu'en février, notre système ne présente-t-il un intérêt qu'en période de pointe ? Vous avez déclaré, monsieur le président, que notre système vous paraissait intéressant en permanence. Je commencerai donc par répondre sur ce point, que je n'avais pas assez développé.
Effectivement, nous réalisons en permanence des économies d'énergie chez nos adhérents ; c'est ce qui distingue notre offre d'un simple dispositif de pointe. Nous aidons les gens à faire des économies toute l'année, et plus particulièrement au cours de la saison de chauffe ; nous y parvenons de deux façons.
Premièrement, lorsque nous arrêtons un radiateur pendant cinq à dix minutes, cela diminue la consommation. Vous avez sans doute entendu parler de la problématique du rebond, que Michèle Bellon, notamment, a évoquée. Nous constatons que, s'agissant du chauffage électrique de nos adhérents, l'essentiel de la consommation que nous effaçons - cinq à dix minutes multipliées par un kilowatt - est définitivement économisée. Nous sommes d'ailleurs en train de réaliser une étude très détaillée de cette question avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, et le Centre scientifique et technique du bâtiment, le CSTB, afin de pouvoir vous présenter des chiffres incontestables illustrant ce potentiel d'économies d'énergie.
Pour citer à nouveau un chiffre très grossier, ces économies d'énergie atteignent plus de 10 % chez nos adhérents.
Deuxièmement, nous fournissons gratuitement à nos adhérents une information détaillée sur leur consommation d'électricité. Je vous ai indiqué que notre boîtier contenait cinq compteurs qui mesurent de manière spécifique la consommation de chaque type d'usage de l'électricité dans le foyer. Cette information est ensuite envoyée sur nos serveurs et mise à la disposition de nos adhérents en temps réel et, je le répète, gratuitement : il leur suffit de se connecter sur Internet pour obtenir en temps réel le détail de leur consommation et son historique en kilowattheures, en euros, etc., ce qui leur permet de comprendre où part leur argent et donc de prendre des décisions plus éclairées en matière d'économies d'énergie.
Par exemple, nos adhérents peuvent savoir combien ils économiseraient en mettant un pull au lieu d'augmenter la température de deux degrés, ou en chauffant moins lorsqu'ils sont absents, ou encore, le cas échéant, en réparant la fuite qui oblige leur chauffe-eau à redémarrer en permanence pour chauffer l'eau. Notre boîtier fournit gratuitement ce type d'informations pragmatiques, toutes bêtes. Or plusieurs études internationales, recensées par l'ADEME, montrent qu'une telle information en temps réel aide les usagers à économiser jusqu'à 12 % de leur consommation d'énergie ; ce sont non pas nos chiffres, mais des chiffres internationaux.
Si j'ai bien compris, votre boîtier comporte cinq compteurs ; chaque adhérent peut se connecter sur Internet pour consulter sa consommation ; il peut aussi savoir s'il existe une fuite dans son ballon d'eau chaude.
La fuite ne passe pas à travers l'ordinateur, et heureusement, car ce serait gênant pour ce dernier... Mais l'adhérent peut voir sur l'ordinateur la courbe de consommation de son chauffe-eau, et ainsi se rendre compte que celui-ci se remet à chauffer plusieurs fois pendant la nuit, ce qui ne peut s'expliquer que par une fuite.
L'adhérent peut donc consulter sa consommation des dernières vingt-quatre heures.
Oui, et il a également accès à un historique de plusieurs semaines.
Je précise que les différents compteurs mesurent l'un le chauffage du salon, un autre celui d'une chambre, un autre encore la consommation du chauffe-eau, ce qui permet de distinguer les différents usages de l'électricité. Le reste de la consommation est mesuré par le compteur du gestionnaire de réseau de distribution, ERDF en général ; si le compteur est électronique, nous relevons cette information et la mettons en temps réel à la disposition de nos adhérents.
Voici les deux petits trous (M. Pierre Bivas désigne deux orifices dans le boîtier.) qui nous permettent de relier par un fil le compteur électronique à notre boîtier afin d'effectuer une relève en temps réel - toutes les cinq minutes - de la consommation. Ce système fonctionne avec le compteur bleu électronique actuel, dont est équipée une petite moitié des foyers, et fonctionnera également avec le compteur Linky. Il permet, je le répète, d'avoir un relevé de consommation non pas hebdomadaire mais en temps réel, et avec le détail des différents usages de l'électricité.
J'ai décrit les bénéfices que le consommateur tirait de notre système.
S'agissant maintenant de notre rémunération par le système électrique, notre capacité d'effacement est d'abord, je vous l'ai dit, une alternative à une capacité de production ; elle est reconnue comme telle dans le cadre de l'obligation de capacité. De ce fait, si nous avons des mégawatts d'effacement disponibles à la pointe, nous recevons, comme n'importe quel producteur d'électricité, un certificat délivré par RTE et indiquant la quantité d'électricité que nous avançons avec notre centrale d'effacement. Ce certificat nous procurera le revenu que le mécanisme de capacité est censé apporter.
C'est un certificat de disponibilité de mégawatts à la pointe. Si vous possédez une centrale à gaz, vous pouvez indiquer que vous pourrez la faire fonctionner à la pointe ; comme il est peu probable qu'elle soit alors en panne, on comptera 95 % de sa puissance nominale dans le certificat de disponibilité de mégawatts à la pointe. Le système est le même pour nous : nous précisons la quantité de mégawatts dont nous disposerons à la pointe, et nous obtenons un certificat que nous pourrons vendre comme les autres producteurs.
C'est donc de la revente de certificats d'économies d'énergie que provient votre rémunération ?
Il s'agit de certificats de capacité.
Excellente remarque ; je vous en remercie.
Cela nous a amenés à nous intéresser aussi, en premier lieu, à la rémunération de notre production. Un mégawatt effacé pendant une heure, c'est un mégawattheure en moins à produire. Ce mégawattheure est acheté par RTE dans le cadre du mécanisme d'ajustement. Vous connaissez ce système, qui permet à RTE d'équilibrer au dernier moment la production et la consommation. Lorsque la consommation dépasse la production, RTE peut acheter soit un peu plus de production, soit un peu de notre effacement ; dans les deux cas, l'équilibre est rétabli.
Vous me direz que l'équilibre ne se réalise pas exactement au même niveau, entre la diminution de la consommation et l'augmentation de la production. Certains en déduiront qu'il vaut beaucoup mieux baisser la consommation, d'autres qu'il est préférable que la consommation soit la plus élevée possible afin de vendre le plus possible d'électricité aux consommateurs. Je ne veux pas départager ces points de vue. Je comprends celui d'EDF, qui fait remarquer que, quand RTE achète davantage de production, ses consommateurs consomment plus, tandis que, quand RTE achète de l'effacement à Voltalis, ses consommateurs consomment moins. Faut-il pour autant compenser le manque à gagner pour le fournisseur d'électricité ?
J'y viens.
Notre centrale à effacement diffus est rémunérée comme une centrale de production, aussi bien pour le mécanisme de capacité que pour la vente d'énergie. Ce que je vous ai décrit en ce qui concerne le mécanisme d'ajustement est en discussion pour être étendu à tous les marchés de l'énergie. Nous pouvons espérer que tel sera bien le cas, car, au fond, ne pas consommer un mégawattheure est bien une alternative à la production et à la consommation d'un mégawattheure.
Pour ce qui est de nos revenus, il n'y a jamais eu de discussion ; cela a été reconnu d'emblée, y compris pour ce nouveau mécanisme de capacité.
Deux questions restent en revanche en suspens. Premièrement, devons-nous compenser le fournisseur ? Deuxièmement, la part « réseaux » peut-elle être également reconnue ?
Nous avons bien compris vos explications sur ces points, monsieur Bivas.
En effet, nous avons compris que vous contribuiez à réduire la production, particulièrement à la pointe, et que vous étiez un facteur d'économies. À cet égard, nous avons parfaitement assimilé tout le bien-fondé de Voltalis.
Nous avons aussi compris que vous étiez aussi sur la capacité : vous ne produisez pas, mais vous permettez d'économiser.
Nous avons bien compris également votre interrogation sur une éventuelle compensation par le fournisseur. En effet, les économies que vous faites réaliser correspondent aussi pour le fournisseur à de l'électricité qu'il ne vend pas. Vous précisez que les États-Unis ont choisi de ne pas apporter de compensation au fournisseur, et que le Conseil d'État français a fait la même analyse. Mais vous dites aussi qu'il existe dans notre pays des demandes pour changer de cadre législatif, ce que vous ne souhaitez pas, et vous vous en êtes expliqué.
Enfin, vous avez bien souligné que vous permettiez non seulement d'éviter les pointes, mais aussi les investissements « réseaux », et vous voudriez que ce rôle soit mieux reconnu.
En revanche, nous n'avons pas très bien compris à quel moment vous étiez rémunéré. Certes, nous avons compris que, le 8 février dernier, à dix-huit heures, lorsque l'on a fait appel à vous pour baisser le chauffage dans 100 000 logements pendant dix minutes, vous faisiez bénéficier d'une baisse de pointe, et que cette économie vous était directement réglée par RTE, me semble-t-il.
En revanche, quand il fait beau, quand l'éolien produit beaucoup, quand il n'y a pas de pointe, quand les centrales tournent à plein régime, comment êtes-vous rémunéré ?
Je vous serais reconnaissant, monsieur Bivas, d'être plus bref dans votre réponse que M. le rapporteur dans sa question... (Sourires.)
La nuit passée, nous avons produit des effacements, disons de 20 mégawatts - je ne me souviens pas du chiffre exact - pendant une demi-heure, soit 10 mégawattheures, que nous avons vendus à RTE pour contribuer à l'équilibre offre-demande. Ainsi, à tout instant, et pas seulement en pointe, il y a besoin d'équilibrer la production et la consommation, et à tout instant le fait de réduire la consommation représente une alternative à la production.
Oui, RTE nous rémunère pour ces effacements.
Bien sûr, s'il s'agit d'effacer du chauffage électrique, ce sera essentiellement en hiver, là où se concentre l'essentiel de la demande. Durant tout l'hiver, nous avons donc cette capacité de production.
Je comprends votre question insistante, mais nous travaillons exactement comme un producteur. Lorsque nous produisons un mégawatt pendant une heure, nous nous faisons payer ce mégawattheure.
Je voudrais faire une observation et, dans le prolongement, vous poser une question, monsieur Bivas.
Tout à l'heure, vous avez opposé l'effacement diffus à l'effacement industriel. La description que vous faites de l'effacement industriel n'engage que vous...
M. Bivas l'a lui-même évoqué tout à l'heure, en précisant que ses propos n'engageaient que lui.
En ce qui concerne l'effacement diffus, vous parlez à la fois d'effacement de pointe et d'économie.
Je reviens donc au problème de la rémunération : soit vous faites faire une économie permanente, qui peut constituer la vertu du compteur, et il s'agit alors d'une rémunération par une « moindre consommation », soit vous mettez à disposition des mégawatts en période de pointe, et il s'agit alors, pour faire court, d'une rémunération sur le marché capacitaire. Mais on ne peut pas faire les deux à la fois avec la même énergie.
Comment se répartit l'énergie économisée « sur le ruban », si je puis dire, et la rémunération en période de pointe ?
Permettez-moi tout d'abord de lever une ambiguïté : je trouve l'effacement industriel très utile ; simplement, ce n'est pas mon métier.
Vous me posez ensuite la question des ordres de grandeur, monsieur le sénateur. Comme je vous le disais précédemment, nous effaçons y compris à des moments qui ne correspondent pas à une pointe. Nous effaçons tout le temps, ce qui permet de réaliser des économies d'énergie et de réduire de 10 % la facture annuelle du consommateur.
Au-delà, vous me demandez si, en plus de vendre cette économie d'énergie - ou plutôt ces mégawatts effacés, d'ailleurs -, je me fais également payer pour ma capacité disponible à la pointe.
Je vous réponds que le mécanisme que vous avez mis en place dans la loi NOME prévoit de distinguer deux paiements.
D'une part, il existe un marché de l'énergie sur lequel se négocient les mégawattheures produits. Ainsi, à chaque fois que l'on efface un mégawattheure, on se fait payer comme une centrale lorsqu'elle produit un mégawattheure. Nous représentons une alternative, mais nous vendons pour l'instant notre production au même prix, en concurrence exacte, même si nous estimons que notre mégawattheure est plus propre, plus social que celui de la centrale, et qu'il contribue de surcroît à éviter les pertes sur le réseau.
D'autre part, vous avez créé un mécanisme de capacité qui porte sur les mégawatts disponibles à la pointe, ces derniers étant rémunérés par un certificat.
Toute centrale se fait rémunérer pour les deux ; nous aussi !
Il me semble toutefois que votre question a un second sens, plus profond. Vous vous demandez finalement quels sont les bénéfices respectifs. Je vous répondrai que le consommateur bénéficie du fait que l'on efface tout le temps et que le système électrique bénéficie surtout du fait que l'on efface à la pointe. En effet, dans ce cas, non seulement on économise le gaz qu'il faut brûler dans la centrale, mais on évite même de construire la centrale. Le bénéfice est alors énorme pour la collectivité.
On pourrait toutefois craindre que vous ne poussiez à la consommation à certaines périodes, puisque vous contrôlez tout, le chauffage, les compteurs. Vous pourriez être tenté d'augmenter un peu la puissance utilisée dans les appartements par le chauffage pour pouvoir ensuite plus facilement la réduire lors des pointes. Si l'on était un peu pervers, on pourrait vous soupçonner de participer à la création d'une consommation importante pour mieux conserver votre capacité de réduction à la pointe.
Votre idée, loin d'être perverse, est très intelligente, mais trop pour nous ! Notez que, depuis longtemps déjà, la différenciation des tarifs entre les heures pleines et les heures creuses incite les gens à consommer en dehors des périodes de forte consommation.
De notre côté, nous ne faisons rien de tel ; nous nous contentons d'arrêter. Nous n'avons pas techniquement organisé notre système pour permettre de forcer les chauffages, mais seulement pour permettre de réduire, d'effacer. C'est la seule chose que nous faisons. Cela étant, je ne dis pas qu'il ne faudra pas un jour aller plus loin, et piloter les installations de façon intelligente. Ces réflexions intéressent notamment EDF, le principal fournisseur, et nous rejoignons ici la question des smart grids.
Notre technique est très simple, un peu rustique, un peu bête : nous faisons de l'effacement, de la réduction de consommation.
Vous êtes une entreprise privée ; vous avez trouvé un boîtier intelligent et vous développez des arguments pour inciter le plus de monde possible à s'en équiper.
Toutefois, et même si cela fait partie des arguments que vous employez, vous n'avez pas une mission de service public ; ce n'est pas votre vocation.
Vous avez posé la question juste, qui pourrait fournir une conclusion. Ce que nous apportons, c'est bien un service au public, et je suis quelquefois assez perplexe quand je me demande comment nous pourrions en faire un véritable service public, un service au public à grande échelle. Je comprends bien que cet enjeu dépasse largement la société Voltalis et les deux cents personnes qu'elle emploie aujourd'hui.
Toutefois, vous connaissez mon parcours, monsieur le président : chez moi, comme d'ailleurs chez les autres fondateurs de cette société, il y a cette fibre du service public qui vibre. Je ne m'en cache pas. Dès lors, nous nous demandons aussi ce que nous pourrions apporter à la collectivité, en France comme au-delà de nos frontières. Si jamais une véritable filière industrielle de l'effacement diffus se développait largement, cela bénéficierait à de nombreux pays, à commencer par le Japon, où nous avons déjà des discussions, bien entendu.
Dans le prolongement de la question précédente, n'avez-vous pas le sentiment d'un système finalement assez aberrant ? Le métier que vous faites est plutôt un métier de service public, puisqu'il est effectivement dans l'intérêt général de réduire la consommation.
Pourtant, c'est bien un deuxième compteur entièrement privé que vous installez derrière le premier. Et vous gérez l'ensemble de vos compteurs de manière privée.
La logique ne voudrait-elle pas que, demain, RTE - probablement - reprenne tout cela en main, équipe tout le monde et gère sa pointe ?
Vous avez effectivement un rôle pionnier, mais la logique ne commanderait-elle pas que vous soyez réintégré au sein d'un système plus large porté par la puissance publique ?
En conclusion, il faudrait nationaliser Voltalis... (Sourires.)
À titre personnel, et compte tenu de ce que j'ai dit précédemment, je pense en effet qu'il est plus important d'équiper 5 millions de foyers dans les cinq ans qui viennent que de se demander ce qu'il adviendra de Pierre Bivas... De surcroît, le problème dépasse largement les frontières françaises.
Il y a toutefois quelques petites limites juridiques à ce schéma, qui n'est pas vraiment à la mode. Par définition, vous êtes plus juristes que moi, messieurs les sénateurs, mais il me semble qu'il faudrait trouver un système compatible avec les directives européennes et des principes de concordance, même si, en pratique, c'est bien de « service public » qu'il s'agit. L'expression n'étant pas très « bruxelloise »... Comment faire pour articuler tout cela ?
Ce n'est donc pas un hasard si je tends la main à ces différents acteurs que sont EDF, RTE et ERDF que j'ai cités. Au-delà des contingences juridiques, nous pouvons essayer de travailler dans cet esprit de service d'intérêt général et, au fond, de service public.
Comme je l'ai déjà indiqué, nous travaillons localement avec les maires et les bailleurs sociaux, nous équipons les bâtiments des collectivités locales et les HLM. Au fond, nous offrons un service public d'économies d'énergie. Et, puisque les mots « service public » ou « nationalisation » ne sont pas à la mode, trouvons donc un autre schéma coopératif qui permettrait au service public, dans le sens noble que nous lui attribuons en France, d'intégrer cette petite solution nouvelle qu'est l'effacement diffus.
Avec combien de syndicats départementaux d'électricité travaillez-vous ?
Ces syndicats ont en effet comme particularité d'essayer d'aider les communes à réaliser des économies d'énergie, notamment dans leurs bâtiments. Ils ont essentiellement une mission de conseil, et votre société fournit en effet un instrument potentiel d'économies d'énergie.
Il me reste à vous remercier, monsieur Bivas. Vous avez expliqué avec précision vos positions, en même temps que vous nous avez aidés à avancer dans nos travaux. Plusieurs des personnes et organismes auditionnés ont contribué à nous éclairer sur le volet « économies d'énergie », et l'instrument que vous proposez en la matière est très intéressant.
Comptez-vous nous laisser une trace écrite de votre audition ?
Je pourrai sans problème vous transmettre un document.
Volontiers.
Dernière question : combien votre société compte-t-elle d'employés ?
Nous employons près de deux cents personnes et nous avons déjà formé trois cents électriciens à l'extérieur de la société. De plus en plus, ce sont des électriciens locaux qui réalisent nos installations.
Si je comprends bien, les salariés de votre entreprise prennent principalement leurs vacances pendant la période d'été ! (Sourires.)
S'il est vrai qu'il y a des fourmis et des cigales et que, l'été venu, les unes chantent quand les autres triment, croyez-moi, chez Voltalis, nous travaillons l'été, et nous faisons un véritable travail de fourmi !