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Ayant siégé dans un conseil municipal comme au conseil des ministres, j’oserai, comme vous, madame la garde des sceaux, me prévaloir d’une certaine expérience dans ce domaine. Si les assemblées municipales et le conseil des ministres ne sont pas de même nature, ce n’est pas une raison suffisante pour écarter l’application de règles communes quand il s’agit de conflits d’intérêts.
M. Philippe Bas, rapporteur. Madame la garde des sceaux, je veux vous rappeler que la loi de 2013 fait injonction à l’exécutif de faire cesser les conflits d’intérêts et que le Conseil constitutionnel n’a rien trouvé à y redire. Dans ces conditions, je n’imagine pas qu’il puisse s’opposer à une mesure améliorant la transparence du fonctionnement du conseil des ministres !
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, une validation législative est un acte grave ! L’article XVI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose que « toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Le Conseil constitutionnel exige un motif impérieux d’intérêt général pour justifier une telle mesure. Le législateur doit donc agir de manière parfaitement réfléchie. C’est à la lumière de ces exigences que la commission des finances a examiné le texte qui nous est soumis Ce projet de loi constitue, oserai-je dire, un nouvel épisode dans le règlement du délicat problème des emprunts structurés dits « toxiques ». Il vise en effet à sécuriser les contrats d...
...n préservant la possibilité d’action en justice de chacune de ces personnes pour chaque cas d’espèce. Cette restriction permet d’atteindre l’objectif visé : éviter une perte de 17 milliards d’euros et prévenir le risque d’une mise en extinction de la SFIL et d’une perturbation du financement local. Quant à savoir si un risque équivalent à 0, 8 point de PIB peut être qualifié de « motif impérieux d’intérêt général », le Gouvernement en est convaincu, et moi aussi ; il reviendra au Conseil constitutionnel de trancher la question, ce qu’il n’a pas fait dans sa décision portant sur la loi de finances de 2014. Mes chers collègues, sous le bénéfice de l’ensemble des observations que je viens de formuler, la commission des finances vous propose d’adopter le présent projet de loi.
...idités étaient alors abondantes. Ces souscripteurs étaient intéressés par les taux réduits affichés, en tout cas pour les premières années, par le report de plusieurs années de la prise de risque – une prise de risque en réalité peu ou mal cernée – et par la longueur des délais de remboursement : vingt, voire trente ans. Puis survient la crise de 2008 : les décalages de taux de change et de taux d’intérêt, provoquant le déclenchement de seuils, hissent les taux à des niveaux prohibitifs. Avant que la crise ne commence à produire ses effets, aucun mécanisme d’alerte n’a été opérant : ni les autorités chargées de la comptabilité publique, ni les chambres régionales des comptes, ni le Trésor ni aucun autre organisme de contrôle n’ont décelé le risque qui grandissait. Jean-Pierre Gorges, dans le rapp...
...de ces institutions au cours desquels ceux-ci nous promettaient des solutions financières parfois très avantageuses de prime abord, mais rapidement opaques si l’on s’attachait à en observer le fonctionnement réel. Le rapport établi par M. Germain, au nom de la commission des finances, donne un bon aperçu de la complexité de ce type de produits. Les contrats structurés et les swaps de taux d’intérêt indexés sur des parités monétaires n’ont fait que masquer cette vérité : un important levier de financement suppose de prendre des risques importants. En réalité, la structuration et la désintermédiation des produits n’ont fait que donner l’illusion d’un accès facile et sans risque au financement de l’action publique locale par l’endettement. Cette période d’euphorie, au cours de laquelle de nom...
... les conditions d’emprunts des collectivités. Si le flux d’alimentation de l’encours semble traité, il reste à gérer le problème du stock de la dette toxique déjà constitué. Une première tentative de réponse figurait dans l’article 92 initial du projet de loi de finances pour 2014. Il s’agissait, en plus de la création du fonds de soutien, de procéder à la validation législative des stipulations d’intérêts des prêts contractés, afin de réduire le risque d’exposition de nos finances publiques. Cependant, cela a été souligné, le Conseil constitutionnel a estimé que cette dernière disposition était trop large et pas assez ciblée. C’est sur ce point, notamment, que revient le texte que nous examinons aujourd'hui. De nombreuses incertitudes règnent encore sur les conditions du financement de l’action ...
...des collectivités territoriales prévoit que, au rang des dépenses obligatoires, figurent « les intérêts de la dette et le remboursement de la dette en capital », ces dernières années, certains établissements de crédit se sont permis de proposer aux élus locaux des produits financiers dits « structurés », comportant une part de risque fondé sur les éléments indiciaires servant à calculer leur taux d’intérêt. Rappelons-nous : c’est en 1987 qu’Édouard Balladur, alors ministre de l’économie, des finances et de la privatisation, ouvrait aux marchés financiers le financement des prêts aux collectivités, et que la Caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales, la CAECL, était transformée en société anonyme ouvrant la porte à l’alliance-fusion avec le Crédit communal de Belgique aboutissant à la ...
Aujourd'hui, face aux emprunts structurés, à la montée des charges financières induites par les relèvements de taux d’intérêt, des élus locaux se retrouvent dans la plus parfaite incapacité de faire autre chose que d’expédier les affaires courantes. Après les difficultés majeures au moment de la tourmente financière des années 2008 et 2009 qui ont entraîné Dexia sur la pente de la liquidation et ont abouti à la constitution de la SFIL et de la CAFFIL, la Caisse française de financement local, pour gérer l’actif des emp...
... de ce qu’il faudra utiliser comme provision pour abandon de créances sera sans doute beaucoup moins important puisque, pour l’essentiel, rien ne semble remis en question quant au règlement du capital dû. Au demeurant, si tant est qu’une vaste opération de remboursement anticipé des emprunts eût lieu, son incidence sur les comptes des établissements de crédit ne concernera que les pertes de taux d’intérêt. La dramatisation de la situation pousse en fait le Parlement à voter le présent texte et à faire oublier la censure du Conseil constitutionnel du mois de décembre dernier. Pour reprendre une expression qui eut son heure de gloire voilà quelque temps, il s’agit de « mettre la poussière sous le tapis » et de ne rien changer de fondamental aux agissements des banques vis-à-vis des collectivités l...
...olution pérenne et globale au problème des emprunts toxiques contractés notamment par de nombreuses collectivités locales, ainsi que par leurs groupements, les établissements publics locaux et les services départementaux d’incendie et de secours. N’étions-nous pas alors conscients de la fragilité des dispositions d’une validation législative rendant impossible la remise en cause des stipulations d’intérêts figurant dans les contrats de prêt au motif que le taux effectif global n’aurait pas été indiqué ? Mais n’étions-nous pas placés, l’un et l’autre, devant un devoir impérieux, inflexible, celui de devoir protéger l’État contre un risque financier direct et indirect « terrible », selon le mot employé par notre rapporteur, pour nos finances publiques ? Si l’intention était bonne, la forme ne l’éta...
... Monsieur le secrétaire d’État, au terme de cette intervention, je veux vous remercier, ainsi que vos collaborateurs, de votre détermination à vouloir régler le problème auquel sont exposés tant les collectivités locales que l’État. Néanmoins, je ne saurais reconnaître, avec l’ensemble des membres du groupe auquel j’ai l’honneur d’appartenir, que la solution proposée répond à un impérieux motif d’intérêt général ni qu’elle apporte une pleine sécurité juridique. Nous ne saurions pas davantage admettre qu’elle mettra à terme Dexia et la SFIL à l’abri de la déflagration financière de plus en plus menaçante à laquelle ces organismes sont confrontés. Pour toutes ces raisons, et comme mes collègues et moi-même n’entendons pas pénaliser les collectivités locales dont on sait les difficultés financière...
...t, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet de loi était très attendu, car la situation est grave. De nombreuses collectivités ayant souscrit des contrats de prêts structurés se retrouvent dans une situation financière très délicate. Après avoir profité des taux alléchants pratiqués à court terme, elles sont désormais entrées dans la seconde période de ces prêts structurés. Les taux d’intérêt évolutifs de ces derniers reposant sur des produits dérivés ne leur permettent pas de mesurer l’ampleur globale des sommes devant être remboursées. Il faut également composer avec les niveaux d’endettement déjà très problématiques pour certaines collectivités. Nous en sommes tous d’accord, il faut agir pour mettre fin à cette situation dangereuse dans laquelle l’endettement guette les collectivi...
...es auteurs du rapport soulignaient à ce propos que l’« engagement des finances locales ne peut se faire qu’en poursuivant un intérêt général présentant un caractère local ». Par voie de conséquence, « les produits à effet de levier, classés parmi les produits les plus risqués, présentent donc un caractère spéculatif qui n’apparaît pas compatible avec une utilisation des deniers publics à des fins d’intérêt général. » Pour résumer, on ne peut donc engager impunément les ressources publiques pour mener des opérations à caractère spéculatif, lesquelles, au demeurant, ne risquent fort de servir que les établissements de crédit qui les auront « pilotées », promues et in fine vendues. Il convient donc que les évolutions de la législation permettent, dans les mois qui viennent, de définir un nouv...
...r la mobilisation de l’épargne de ladite collectivité ou par l’augmentation des impositions locales. Un projet de décret, pris en application de l’article 32 de la loi de séparation bancaire, vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, a été récemment soumis au Comité des finances locales. Entre autres dispositions, ce décret prévoit de mettre en œuvre des modalités de plafonnement des taux d’intérêt associés aux prêts à taux variable, qui figuraient, entre autres propositions, dans le rapport de la commission Bartolone-Gorges. Sur le fond, d’ailleurs, le projet de décret représente un certain nombre d’avancées, et il revient quelque peu sur la « banalisation » du financement de l’investissement local qui était la marque des années de déréglementation financière et, singulièrement, de privat...
...77 de la décision. « Considérant qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ; que, si le législateur peut modifier rétroactivement une règle de droit ou valider un acte administratif ou de droit privé, c’est à la condition de poursuivre un but d’intérêt général suffisant et de respecter tant les décisions de justice ayant force de chose jugée que le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions ; qu’en outre, l’acte modifié ou validé ne doit méconnaître aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle, sauf à ce que le but d’intérêt général visé soit lui-même de valeur constitutionnelle ; qu’enfin, la portée de la modificat...
...ongtemps. Il n’entame pas le principe de la séparation entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif. Mais il y a bien sûr des bornes – vous les avez rappelées, madame Beaufils – : le contrôle du juge constitutionnel ainsi que celui de la Cour européenne des droits de l’homme. Et, il y a trois mois, le juge constitutionnel a durci les conditions de cette rétroactivité en exigeant un motif d’intérêt général impérieux, et non plus seulement un juste intérêt général. Je l’ai dit tout à l’heure, la commission considère que 17 milliards d’euros de risque est un intérêt général impérieux. Je ne suis donc pas d’accord avec la présentation qui vient d'être faite. Par ailleurs, je pense que les collectivités territoriales conservent, après cette validation législative, la possibilité d’introduire ...
...écembre. On a également évoqué le principe d’antériorité, qui, d’une façon plus générale, pose tout de même un problème délicat – vous en avez parlé tout à l'heure, monsieur le secrétaire d’État, au sujet de l’intervention de Mme Beaufils, qui revenait beaucoup sur l’histoire. S'il est remis en question, cela ne doit pas faire oublier l’histoire, lorsqu’elle peut être intéressante… Quant au motif d’intérêt général, dont on a aussi parlé, il reviendra au Conseil constitutionnel de se prononcer. Un but d’intérêt général – comme vous le soutenez depuis le début, monsieur le secrétaire d’État – justifie-t-il la mesure ? Vous estimez le risque aux alentours de 17 milliards d’euros – c’est peut-être plus, ou peut-être moins. L’avenir le dira. Mais il est un peu facile, aujourd'hui, de nous annoncer une ...
À travers cet article de validation législative, il s’agit, dans les faits, d’éviter la prolifération de ce que l’on pourrait appeler « la jurisprudence Saint-Maur-des-Fossés », puisque le motif retenu pour la constituer fut celui du taux effectif global erroné et, par voie de conséquence, la stricte application du taux d’intérêt légal. Ainsi donc, l’intérêt général serait, dans le cas précis, après avoir tenté de priver les collectivités locales du droit d’ester en justice – c’est le fondement du fonds de soutien, qui ne peut être mobilisé qu’à raison du renoncement à toute poursuite à l’encontre du créancier présumé fautif –, de limiter les cas dans lesquels le bon droit des mêmes collectivités serait respecté. L’impo...
Toutefois, j’aime bien que les choses soient dites et c’est bien d’amnistie pour des contractants n’ayant pas satisfait aux règles dont il est question ici. Je pense que c’est plus clair en le disant. On nous a expliqué qu’il y a des raisons d’intérêt général à cela, nous avons assisté à des plaidoiries brillantes aujourd’hui et je ne me fais pas de souci pour l’issue du vote. Néanmoins, il ne faudra pas non plus trop s’étonner si nos électeurs ont de plus en plus de mal à comprendre. Dès lors, disons les choses comme elles sont ! Je propose de dire la vérité et d’expliquer pourquoi nous ne pouvons faire autrement – ce dont je ne suis pas per...