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...inistre, mes chers collègues, la proposition de loi de nos collègues Éliane Assassi et Arnaud Bazin est ambitieuse et profondément novatrice. Elle a été nourrie par les travaux que la commission d’enquête a conduits pendant plusieurs mois sur l’influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques. Ces travaux ont suscité de nombreuses réactions de la part du Gouvernement, de l’administration et des consultants : circulaire de la Première ministre ; refonte de l’accord-cadre de la direction interministérielle de la transformation publique, dont l’équipe de conseil interne doit être renforcée ; rédaction par l’organisation professionnelle Syntec Conseil d’une charte de déontologie spécifique pour « les interventions de conseil auprès du secteur public » ; et, très récemment, publicatio...
...te a mis en lumière trois risques : les conflits d’intérêts, les cabinets de conseil conseillant simultanément plusieurs clients dont les intérêts peuvent diverger ; la porosité, lorsque les cabinets recrutent d’anciens responsables publics – c’est ce que l’on appelle le « pantouflage » – ; enfin, le « pied dans la porte », lorsque les consultants interviennent gratuitement, pro bono, pour l’administration. Ce sont par exemple les cabinets McKinsey et Boston Consulting Group qui ont organisé les sommets Tech for Good et Choose France à l’Élysée. Ces prestations étaient même devenues banales, alors qu’elles servaient en réalité la stratégie commerciale des consultants. Avec cette proposition de loi, nous faisons le choix de la clarté : nous interdisons purement et simplement le pro bono, ce...
Vous le voyez, mes chers collègues, nous proposons un dispositif déontologique à la fois complet et cohérent et mettons en œuvre les recommandations de la commission d’enquête. Vous conviendrez que la confiance de l’administration envers ses consultants n’exclut pas le contrôle, ce qui justifie notre proposition de loi. Pour finir, j’évoquerai les représentants d’intérêts. Ce sujet n’entre pas dans le périmètre de notre texte, comme l’a justement rappelé la commission des lois. Je n’ignore toutefois pas son importance ni la nécessité de faire évoluer le droit en vigueur. C’est dans cet esprit que le Comité de déontologi...
Certains de nos concitoyens ont en effet été interpellés par le fait que l’État ait recours à des cabinets privés pour l’aider à définir sa stratégie, comme cela a été évoqué par Arnaud Bazin. Aussi divers que soient ses services, l’administration n’a pas, et ne peut pas, avoir en interne les compétences requises pour faire face aux situations qu’elle doit gérer. Le recours à ces cabinets permet d’apporter une expertise et de proposer des solutions. C’est ainsi que 72 % des près de 900 millions d’euros dépensés par l’État en conseil durant l’année 2021…
… lorsqu’ils travaillent pour l’État et ses établissements, afin de prévenir les conflits d’intérêts, mais aussi d’éviter les allers-retours entre ces cabinets et l’administration. Pour cela, le texte étend le pouvoir de la HATVP, qui est déjà chargée du contrôle des principaux responsables et agents publics, ainsi que des lobbies. L’État n’est évidemment pas le seul à recourir aux prestations de conseil ; nos régions, nos départements et nos communes le font aussi très régulièrement. Pour des raisons de périmètre d’enquête, cette proposition de loi ne vise cependant pas...
Nous comprenons parfaitement les inquiétudes que l’activité de conseil a pu susciter, mais nous doutons que les moyens proposés soient efficaces et adaptés. L’administration fait appel à de nombreux acteurs afin d’avoir un œil extérieur pour l’aider à résoudre les difficultés auxquelles elle est confrontée. Nous pensons, mais nous sommes manifestement minoritaires, qu’il n’est pas malsain que public et privé puissent échanger des idées et des personnes.
...re pays a au contraire besoin de souplesse et de simplicité. Les échanges entre le public et le privé sont monnaie courante dans beaucoup de pays, particulièrement dans ceux du nord de l’Europe. Et ils ne s’en portent pas plus mal ! Ces fertilisations croisées sont créatrices de synergies qui améliorent l’efficacité de l’action publique. Nous devons bien sûr être très attentifs aux ressources de l’administration : elles proviennent de l’argent des Français et doivent donc être employées à bon escient et sans abus – cela va sans dire. Mais nous pensons qu’il faut également veiller à préserver leur efficacité si nous ne voulons pas travailler nous-mêmes à l’impuissance de l’administration. Le Gouvernement a annoncé son intention d’encadrer davantage le recours aux prestations de conseil par les administra...
...que, qui – il faut le reconnaître – résulte non seulement de l’action de ce président, mais aussi de celle de ses prédécesseurs, explique le recours massif à ces cabinets. Les sociétés de conseil sont souvent perçues comme un moyen simple et agile, dans les moments de surcharge ponctuelle, de pallier le problème que posent les plafonds d’emploi. Cela entraîne des pertes de compétences au sein de l’administration ou des limitations de la montée en compétences – comme on le voit, par exemple, dans le domaine informatique. Certains y voient l’action de pompiers pyromanes qui ne donnent pas les moyens à l’administration de rester compétente dans ses prérogatives afin de justifier les recours coûteux à une poignée de grosses entreprises de conseil. Pourtant, une large majorité des entreprises de conseil de m...
...roposition de loi. En effet, il est essentiel d’éviter de faire peser une charge déraisonnable sur des structures de taille réduite. Le seuil de 60 millions d’euros de dépenses est déjà bien connu des acteurs concernés, car il correspond au seuil des avances obligatoires versées aux PME dans le cadre d’un marché public. Le deuxième amendement vise à exclure les prestations de conseils internes à l’administration, pour éviter une surinterprétation par le juge. Le troisième a pour objet de réaffirmer l’exclusion des prestations de gestion des ressources humaines et d’expertise informatique. À l’article 11, nous défendrons un amendement visant à prévoir la définition par décret des modalités d’enregistrement des actions de démarchage, l’objectif étant d’aligner le dispositif sur les règles de droit commun...
Ne mélangeons pas tout. Il est vrai que dans certains domaines il est utile de faire appel à des compétences extérieures à l’administration ; personne ne le conteste. Mais encore faut-il que cela soit fait en toute transparence. Mes chers collègues, nous avons nous aussi déposé quelques amendements pour élargir le champ du texte. Madame la rapporteure, vous nous avez dit qu’il vous était apparu plus sage de vous en tenir strictement au champ de la commission d’enquête. J’entends cet argument, mais rien n’empêche le législateur d’all...
...ien, l’ampleur du phénomène est inédite : ils représentent pour l’État un coût de 1 milliard d’euros en 2021. Mais ce qui change par rapport à hier, c’est la croyance toujours plus affirmée depuis le début du premier quinquennat d’Emmanuel Macron qu’il existe une différence entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas, les « sachants » appartenant aux cabinets de conseil, les autres étant dans l’administration. Le monopole de la vérité objective et rationnelle incomberait à des cabinets connus pour appliquer les mêmes recettes à des problèmes différents, économies d’échelles obligent… Nous nous souvenons des mots de Nicolas Sarkozy, ancien Président de la République, le 12 décembre 2007, lors de la présentation de la fameuse révision générale des politiques publiques (RGPP) : « La réforme de l’État, ...
...ont rappelé : publication d’une circulaire le jour de l’audition de la ministre par la commission d’enquête, d’un rapport et maintenant d’un « jaune budgétaire »… Vous courez après tout cela sans paraître très à l’aise. Rassurez-vous, monsieur le ministre : nous sommes là non pour accuser les uns ou les autres, mais pour faire notre travail de parlementaires, en lien tant avec l’exécutif qu’avec l’administration, qui va donc devoir se priver un petit peu des cabinets de conseil. Rassurez-vous, le Sénat n’est absolument pas contre le recours à des cabinets de conseil, notamment dans le secteur informatique, car c’est un domaine dans lequel on apprend en conduisant de nombreux projets. La conduite d’un seul projet informatique important dans une administration ne permet pas un tel apprentissage. En revanc...
...es directions départementales des finances publiques (DDFiP). Pour la DITP, c’est la même chose : elle croit centraliser, mais des dépenses sont faites partout, comme la commission d’enquête l’a révélé. On le voit, beaucoup reste à faire, monsieur le ministre, mais je ne doute pas de votre bonne volonté. Vous l’avez compris, nous sommes là non pour vous embêter, mais pour mieux faire fonctionner l’administration française. Certains collègues ont parlé des collectivités locales. Il ne faut tout de même pas exagérer : eu égard à l’état des finances locales, je ne suis pas sûr qu’il y soit fait beaucoup appel à des cabinets de conseil pratiquant de tels honoraires ! Monsieur le ministre, ma mère me disait de ranger ma chambre avant de dire que celle de mon frère était mal rangée. Avant de donner des conse...
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon camarade Jean-Pierre Sueur vous ayant exposé la position du groupe socialiste sur les grandes lignes du texte, je me concentrerai pour ma part sur l’article 7, qui impose aux cabinets de conseil travaillant pour l’État de bien vouloir, s’il vous plaît, employer la langue française dans leurs échanges avec l’administration et dans leurs documents. Cet article est la traduction de l’une des recommandations de cette commission d’enquête, à laquelle j’ai participé avec plaisir. Grâce à elle, nous avons pu mesurer ce qui se passe dans les coulisses de ces marchés publics où, diapositive après diapositive, les cabinets offrent des solutions adéquates que les administrations ne sauraient trouver par elles-mêmes. Pour m...
...responsables publics ; chacun les connaît désormais. Au moment de fatigue démocratique forte que connaît notre pays et où le lien de confiance entre les pouvoirs publics et nos concitoyens est pour le moins distendu, il convient de compléter notre arsenal législatif pour encadrer ces pratiques, en définir le périmètre, en piloter l’intervention, les rendre transparentes et protéger les données de l’administration. Je me bornerai, dans le temps qui m’est imparti, à aborder deux aspects de ce texte : l’interdiction des prestations réalisées à titre gratuit, déjà abordée par Arnaud Bazin, et la protection des données. J’ai beaucoup insisté, lors des auditions de la commission d’enquête et lors de la réunion d’examen de son rapport, sur le problème majeur que constituent les interventions dites pro bono<...
Jean-Yves Roux l’a souligné lors de la discussion générale, cette proposition de loi est la bienvenue. Ses apports sont, j’y insiste avec force, indéniables. Il reste néanmoins un écueil, auquel je vous propose de remédier sans attendre la suite de la navette : une partie de l’administration publique a été oubliée. En effet, comme l’État, nos collectivités prennent des décisions politiques qui affectent la vie de nos concitoyens et, comme lui, elles sont susceptibles de faire appel à des consultants, engageant ainsi les finances publiques. Aussi, il ne paraît pas absurde de mieux encadrer ces recours, même si nous savons qu’il existe déjà des mécanismes d’encadrement, via le...
Cet amendement vise à préciser la définition des consultants au sens de la loi. L’article 1er prévoit l’inclusion, dans la catégorie des consultants, des « personnes physiques qui s’engagent à titre individuel avec l’administration bénéficiaire pour réaliser une prestation de conseil ». Si les termes « qui s’engagent » renvoient assurément aux personnes physiques ayant passé un contrat avec l’administration bénéficiaire, les termes « à titre individuel » sont beaucoup plus ambigus et sources de difficultés d’interprétation. Une lecture extensive de ces termes pourrait, par exemple, conduire à inclure, dans la définition de...
Comme mes collègues, j’estime anormal que l’État ne rédige pas lui-même les études d’impact et les exposés des motifs de ses projets de loi. Cela étant, je rappelle que le III de l’article 2 de la proposition de loi crée une obligation de transparence quant à la participation de cabinets de conseil à la rédaction de documents pour le compte de l’administration, ce qui inclut bien évidemment les études d’impact et les exposés des motifs des projets de loi. Cette obligation de transparence devrait permettre de freiner cette pratique, fortement réprouvée et qui a pu heurter nos concitoyens. Cet amendement me semble donc superfétatoire. J’insiste sur le fait que nous devons croire à l’effectivité de cette proposition de loi qui entraînera tout le monde, ...
...lice de la langue. Nous devons démystifier cette idée et ne pas tomber dans la caricature. Dans le privé, sur les réseaux sociaux, les gens parlent entre eux comme ils l’entendent – et c’est heureux. Mais plus on entre dans les interactions sociales, à commencer par le monde du travail, plus les règles se précisent. Nous parlons dans cet article des pouvoirs publics. Le Premier ministre, chef de l’administration, et les ministres sont là pour faire appliquer un droit, qui découle de certaines normes telles que la Constitution et la loi Toubon, par exemple. L’administration doit aussi suivre les circulaires primo-ministérielles, notamment sur la féminisation des titres. On doit dire aujourd’hui « Mme la préfète » et pas autrement. Si des préfètes, dans certains départements, continuent de se faire appeler...
...ois, comme la présidente Assassi l’a souligné en discussion générale, l’article 2 de la Constitution définit déjà le français comme langue de la République. Il me semble donc que cet article est satisfait. Il l’est même depuis l’édit de Villers-Cotterêts de 1539 – peut-être Mme Assassi l’a-t-elle oublié, car antérieur à la Révolution française. Toujours d’application, il précise que la langue de l’administration est le français. Il ne peut donc s’agir d’une autre langue. À l’époque, la concurrente était le latin, désormais c’est l’anglais. Je ne suis pas opposé au principe, mais cet article est peut-être inutile, surtout si nous voulons éviter d’avoir des lois bavardes…