Déposé le 2 décembre 2015 par : M. Gilles, Mme Garriaud-Maylam, MM. J.P. Fournier, Grosdidier, Grand, Mmes Morhet-Richaud, Deroche, Imbert, MM. Houpert, Bouchet, Cambon, Vial, Milon, Laufoaulu, Revet, Dufaut, Savary.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes | Autorisations d’engagement | Crédits de paiement | ||
+ | - | + | - | |
Liens entre la Nation et son armée | 1 708 000 | 1 708 000 | ||
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant | 1 708 000 | 1 708 000 | ||
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale dont titre 2 | ||||
TOTAL | 1 708 000 | 1 708 000 | 1 708 000 | 1 708 000 |
SOLDE | 0 | 0 |
Les membres de nos forces supplétives en Algérie avaient deux statuts différents, selon qu’ils étaient arabo-berbères et de statut civil de droit local, ou de souche européenne et de statut civil de droit commun. Les supplétifs de souche européenne, engagés sous le drapeau français, sont, comme leurs semblables arabo-berbères, des civils qui ont épaulé l’armée française dans des missions civiles et des opérations militaires. Ils ont partagé avec eux les mêmes risques au péril de leur vie. Et quand ils ont quitté l’Algérie, ils ont tout perdu. Ils s’estiment eux-mêmes au nombre de 500.
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 25 novembre 2010 par le Conseil d'État, dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les différentes allocations, aides accordées aux anciens supplétifs de l’armée française en Algérie, rapatriés, et à leurs ayants droit. Dans sa décision n° 2010-93 QPC du 4 février 2011, il a jugé que les dispositions faisant référence au critère de nationalité de nos forces supplétives en Algérie sont non conformes à la Constitution. Il a donc censuré, dans l’ensemble des dispositions qui lui étaient renvoyées, les termes qui imposaient un critère de nationalité. Il a précisé que cette abrogation prenait effet à compter de la publication de sa décision et devait être appliquée à toutes les instances en cours.
Cet amendement entend donc corriger certaines dispositions concernant ces supplétifs, conformément à la décision du Conseil constitutionnel, précisée par celle du Conseil d’État (n° 342957 du 20 mars 2013). Dans sa décision, celui-ci indique clairement que « La portée de cette déclaration d'inconstitutionnalité s'étend à celles de ces dispositions qui, par les renvois qu'elles opéraient, réservaient aux seuls ressortissants de statut civil de droit local le bénéfice de l'allocation de reconnaissance allouée aux anciens membres des forces supplétives ayant servi en Algérie. Cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de sa date de publication au Journal officiel, le 5 février 2011 (...). Dès lors, à compter de cette date le refus d’accorder le bénéfice de l’allocation au motif que l’intéressé relevait du statut civil de droit commun est dépourvu de base légale ».
Cet amendement vise à supprimer les dispositions anticonstitutionnelles votées dans la loi de programmation militaire pour 2014 à 2019 (article 52), dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (article 79) et celle soumise à notre vote dans ce projet de loi de finances à l’article 51, qui réservent le bénéfice de certaine allocation, rente ou aide aux seuls supplétifs au statut civil de droit local, arabo-berbères et à leurs ayants droit. Car, ce faisant, elles réintroduisent dans la loi un critère de nationalité, discriminatoire et déclaré « non conforme à notre Constitution ».
Cet amendement n’a en soi pour conséquence ni une diminution des ressources publiques, ni la création ou l'aggravation d'une charge publique. Il ne fait que rétablir la constitutionnalité des textes mentionnés, conformément à la décision du Conseil constitutionnel.
En effet, d’une part, comme le stipule l’article 62 de notre loi fondamentale « une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. (…) Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. ». Le Parlement, comme le Gouvernement, doit donc s’y conformer. Tel est bien l’objet de cet amendement.
D’autre part, sans les ajouts anticonstitutionnels du Gouvernement, déjà votés, et celui soumis au vote du Parlement à l’article 51 du présent projet de loi de finances pour 2016, qui renvoient à un critère de nationalité abrogé, nos supplétifs en Algérie de souche européenne, rapatriés, et leurs ayants droit étaient inclus de facto au bénéfice de l’allocation de reconnaissance de la Nation. Ils le seraient également, en vertu des décisions mentionnées de nos deux hauts conseils s’agissant des deux autres mesures. Comme l’indique clairement la décision mentionnée du Conseil d’État, la référence au statut civil de nos supplétifs rapatriés d’Algérie réintroduit bien, de façon détournée, un critère de nationalité abrogé.
Enfin, les modifications contenues dans le présent amendement d’un point de vue financier représentent,
- s’agissant de l’attribution de l’allocation de reconnaissance de la Nation étendue aux quelque 500 supplétifs au « statut civil de droit commun » rapatriés, un montant de l’ordre de 15 millions d’€ en capital pour solde de tout compte, ou bien 1 708 000 € en rente annuelle.
- La disposition portant sur la rente viagère prévue à l’article 51 du présent projet de loi, étendue au cas de décès de ces mêmes supplétifs, viendrait en déduction de la somme mentionnée précédemment.
- Enfin, la mesure à l’article 79 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, réservée aux seuls enfants de harkis « de statut civil de droit local » au titre des années passées dans les camps de transit, introduit une discrimination inutile et d’autant plus humiliante pour les harkis de souche européenne. En effet, comme eux-mêmes le reconnaissent, la très grande majorité des 500 harkis de statut civil de droit commun ne sont pas passés par les camps de transit et d’hébergement. Il en résulte que très peu de leurs enfants réclameront le bénéfice de la mesure et qu’elle leur soit accordée.
Diminuer les crédits de l’action 1 du programme 167 « Journée défense et citoyenneté » de 1 708 000 €. Transférer ces crédits vers l’action 7 « Action en faveur des rapatriés » du programme 169, « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » correspondant au montant annuel actualisé de l’allocation de reconnaissance de la Nation destinée aux 500 supplétifs rapatriés d’Algérie de souche européenne. Ce transfert peut notamment se faire en rationalisant les crédits consacrés à l'alimentation dont le coût total est de 6, 8 millions d'euros.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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