Déposé le 29 janvier 2019 par : MM. Capus, Bernard Fournier, Chasseing, Guerriau, Lagourgue, Wattebled, Decool, Malhuret, Mme Mélot, M. Bignon.
Après l’article 27 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après le cinquième alinéa de l’article L. 1611-7-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les opérateurs en financement participatif public sont régis par les dispositions particulières du chapitre IX du présent code. » ;
2° Le titre Ierdu livre VI est complété par un chapitre IX ainsi rédigé :
« Chapitre IX
« Dispositions particulières relatives au financement participatif public
« Art. L. 1619-1. – Les intermédiaires en financement participatif mentionnés à l’article L. 548-1 du code monétaire et financier et les conseillers en investissements participatifs mentionnés à l’article L. 547-1 du même code ne peuvent financer des collectivités territoriales ou des établissements publics qu’à la condition d’être immatriculés sur le registre unique prévu à l’article L. 512-1 du code des assurances.
« Art. L. 1619-2. – Un financement participatif public désigne tout titre de créance ou prêt à titre onéreux ou sans intérêt, collecté par un opérateur en financement participatif public, pour le financement d’un projet porté par une collectivité territoriale ou un établissement public à l’occasion duquel, des personnes de droit privé se sont volontairement constituées prêteurs.
« Art. L. 1619-2-1. – Les contrats conclus entre les opérateurs en financement participatif public et les collectivités territoriales ou les établissements publics, les contrats d’emprunt et les titres de créance légalement formés ne sont pas soumis à la réglementation relative aux marchés publics et ne nécessitent, à aucun moment de l’exécution du contrat, de convention de mandat.
« Art. L. 1619-2-2. – Toute collectivité ou établissement public peut avoir recours au dispositif de prêt tel que prévu par l’article L. 1619-2 du présent code, dans la limite de ses seules dépenses d’investissement.
« Art. L. 1619-2-3. – Les opérateurs en financement participatif public peuvent également collecter des dons au profit d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public.
« Art. L. 1619-3. – La nullité de l’ensemble des contrats conclus est encourue, lorsque la collectivité territoriale ou l’établissement public réalise un emprunt destiné à financer des dépenses de fonctionnement ou des entreprises.
« Art. L. 1619-4. – Les opérateurs en financement participatif public doivent, à la clôture de chaque exercice, être en mesure de fournir une documentation contenant les informations relatives à leur fonctionnement, aux flux financiers, aux contrats conclus, et en ce compris, toute information relative aux personnes ayant contribué au financement en cas de demande expresse.
« Cette obligation d’information vaut à l’égard du représentant de l’État dans le département lorsqu’un projet est conduit sur le territoire au sein duquel il exerce son autorité et de l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution et de l’autorité des marchés financiers le cas échéant, sans que ne puisse leur être opposé un quelconque droit au secret.
« Art. L. 1619-5. – Les opérateurs en financement participatif public doivent en tous cas observer l’interdiction qui leur est faite de consentir à l’égard d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public un prêt à titre onéreux dont le taux serait usuraire.
« La réglementation du taux d’usure à l’égard des opérateurs en financement participatif est celle relative aux prêts aux personnes morales n’ayant pas d’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale.
« Art. L. 1619-5-1. – Le fait de consentir à l’égard d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public un prêt à titre onéreux, dont le taux serait usuraire au sens de l’article L. 1619-5 du présent code, emporte la nullité du taux et une substitution de celui-ci au taux d’intérêt légal.
« Art. L. 1619-5-2. – Le taux effectif global servant à déterminer le caractère usuraire du taux ne comprend pas la commission de l’opérateur en financement participatif public.
« Art. L. 1619-6. – La procédure de débit d’office dont bénéficient les établissements de crédit, peut s’étendre aux opérateurs en financement participatif public ayant facilité l’octroi d’un prêt au bénéfice d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public.
« Un arrêté du ministre en charge des finances détermine les conditions préalables et la mise en œuvre du dispositif. »
II. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Le 4° de l’article L. 561-2 est complété par les mots : « et à l’article L. 1619-1 du code général des collectivités territoriales » ;
2° L’article L. 561-2-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les opérateurs en financement participatif public ne sont pas soumis, concernant les donateurs personnes physiques ou morales, aux dispositions du présent chapitre lorsque ces opérateurs collectent des dons, dans les conditions de l’article L. 1619-2-3 du code général des collectivités territoriales, au profit de collectivités territoriales et d’établissements publics remplissant les critères fixés au c de l’article R. 561-15 du présent code. »
III. – Le 8° de l’article 14 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics est complété par les mots : « y compris les contrats conclus avec les opérateurs en financement participatif public. »
Le financement participatif, ou « crowdfunding», est un moyen de financement en plein essor : au 1ersemestre 2017, 391, 9 millions d’euros de fonds ont été levés, en progression de 46 % par rapport à 2016, d’après les derniers chiffres publiés par l’association Finance Participatif France.
L’ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014 a créé des statuts pour les plateformes de financement participatif dans la perspective du financement des entreprises et des associations.
Depuis septembre 2016, des collectivités locales ont elles aussi commencé à réaliser des campagnes de financement participatif, malgré l’absence de cadre légal spécifiquement prévues pour elles.
Elles financent leurs projets grâce aux citoyens, qui leur accordent des prêts avec ou sans intérêts, ou des dons.
Le financement participatif public dépasse la logique financière : certaines collectivités emploient ce mode de financement pour communiquer sur leur politique d’investissement, fédérer la population, faire participer concrètement les citoyens aux projets publics afin de renforcer leur lien avec eux et les responsabiliser sur les équipements publics.
Par exemple, ont été financés par des prêts participatifs une installation photovoltaïque sur le toit d’un bâtiment public de l’Agglomération de Saint-Brieuc, ou encore une étude en vue de la conception d’habitats éco-responsables d’une petite commune de 600 habitants, Langouët, laquelle, après le succès de cette opération et la dynamique locale qui en a résulté, a lancé un second prêt participatif projet pour financer une ferme en permaculture.
Contrairement au crowdlending(prêt participatif) des entreprises, le financement participatif public est, pour les particuliers, un placement sans risque, l’emprunteur étant la collectivité, et qui plus est, il est réalisé au profit direct de l’intérêt général.
Dans un contexte où l’investissement des collectivités, qui joue un rôle crucial dans l’économie, souffre (baisse des dotations, prêts structurés, Bâle III, baisse des ressources fiscales ...), le développement de cette solution alternative qui repose sur l’épargne stable des Français doit être soutenu.
Aucun texte n’encadre le financement participatif public.
Un seul texte l’aborde sans l’encadrer : le décret n° 2015-1670 du 14 décembre 2015 relatif aux conventions de mandat.
Ce texte est source d’insécurités juridiques, pouvant être dissuasives pour certaines collectivités, conduire au refus de comptables publics, ou encore faire prendre le risque de l’annulation de l’opération réalisée.
Ce décret relatif aux conventions de mandat pourrait être interprété en ce sens qu’il n’autorise le recours au financement participatif des collectivités que pour les projets réalisés au profit d’un « service public culturel, éducatif, social ou solidaire ».
Or, d’une part la conclusion d’une convention de mandat est inutile pour ces opérations et, elle crée des contraintes inutiles et, d’autre part et surtout, la notion de « service public culturel, éducatif, social ou solidaire » n’est pas définie.
C’est la raison pour laquelle il vous est proposé d’introduire dans le code général des collectivités territoriales un chapitre spécifiquement dédié au financement participatif public.
Ce nouveau chapitre clarifie le champ du financement participatif public en rappelant que les collectivités et les établissements publics peuvent, comme pour les « prêts classiques », financer tout type de dépense d’investissement, conformément aux principes de la comptabilité publique généraux. Il rappelle également que la conclusion d’une convention de mandat n’est pas obligatoire.
Par ailleurs, des dispositions doivent être adaptées pour tenir compte de l’existence du financement participatif public et permettre son développement :
Il est ainsi proposé d’introduire le financement participatif public parmi les exceptions du code des marchés publics, pour le mettre sur un pied d’égalité avec les prêts bancaires et les émissions obligataires, qui en sont également exclus.
Cette disposition est une mise à jour de la liste des exclusions du code des marchés publics, dont la dernière réforme de 2015, n’avait pas tenu compte du prêt participatif des collectivités, qui n’existait pas encore.
De plus, il vous est proposé pour sécuriser les remboursements des prêts participatifs aux citoyens d’autoriser aux plateformes de financement participatif, dont il est rappelé qu’elles sont agréées et contrôlées par l’ACPR et/ou l’AMF, de recourir comme les banques à la procédure du débit d’office, ce qui permet de prélever les échéances de remboursement des collectivités.
L’objectif est d’éviter, comme pour les emprunts bancaires, les défauts ou retard de paiement, au profit des citoyens prêteurs.
Enfin, il vous est proposé d’adapter les obligations en matière de lutte anti-blanchiment et de financement du terrorisme au financement participatif public pour le don.
En effet, les plateformes de don doivent réaliser des « dues diligences » pour identifier les donateurs (notamment recueillir la pièce d’identité et le justificatif de domicile des donateurs). L’objectif est de réduire le risque de blanchiment d’argent ou de financement du terrorisme en identifiant les associations créées dans ce dessein, avec parfois des pseudo-donateurs qui cherchent à blanchir leur argent.
Si ce risque est plausible s’agissant d’associations, il ne l’est pas concernant les collectivités territoriales et les établissements publics qui sollicitent des dons pour leurs projets, à la condition qu’ils soient identifiés par les plateformes de financement participatif.
C’est la raison pour laquelle il est proposé d’exonérer les plateformes de l’obligation de réaliser des « dues diligences » vis-à-vis des donateurs dans les projets de don des collectivités locales et établissements publics, dès lors que ces-derniers sont identifiés.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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