Déposé le 2 janvier 2020 par : Mme Muriel Jourda, rapporteur.
Supprimer cet article.
Cet amendement vise à supprimer l'article 1er ouvrant l'accès à l'assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes seules.
Si elle fait écho à un sentiment de discrimination vécu par des femmes dans l'accès à cette technique médicale autorisée depuis 1994, l'évolution portée par le projet de loi n'est pas guidée par un argument juridique. Le Conseil d’Etat a rappelé dans son étude de juin 2018 qu'« aucun principe juridique n’impose (…) l’extension de l’accès à l’AMP », « ni le fait que l’adoption soit ouverte aux couples de femmes et aux personnes seules, ni le principe d’égalité, ni le droit au respect de la vie privée, ni la liberté de procréer, pas plus que l’interdiction des discriminations ».
Le législateur est ainsi invité à se prononcer, en responsabilité, sur un sujet qui relève d’un choix politique, sur lequel s'expriment, comme le CCNE en a fait état dans le compte rendu des Etats généraux de la bioéthique, des « différences profondes » dans la société.
La diversité des structures familiales et la reconnaissance de leur égale valeur, comme la légitimité du désir d'enfant, ne sont nullement, ici, en question.
Les interrogations sur lesquelles se fonde cet amendement de suppression sont de nature différente.
La première tient au changement induit par cet article dans la finalité même de la procédure d'assistance médicale à la procréation. Celle-ci a aujourd'hui comme fonction première celle de pallier l'infertilité d'un couple dont le caractère pathologique a été diagnostiqué (ou d'éviter la transmission d'une maladie particulièrement grave), c'est à dire d'apporter "une réponse médicale à l’infertilité naturelle". Le recours à un tiers donneur ne représente que moins de 4% des tentatives d'AMP. Cette technique médicale deviendrait demain fondée sur une réponse à une demande, sur la satisfaction d'un désir, quelle que soit la légitimité de cette demande ou de ce désir. Mais comme le CCNE le relève justement dans son compte rendu des Etats généraux : "Un désir – même compréhensible – peut-il aboutir à un droit ?"
La seconde interrogation posée tient à la banalisation par le législateur de l'absence de filiation paternelle qu'emporte cet article. Ce n'est pas la même chose, d'une part, d'accepter la diversité, de facto, des situations familiales, de permettre à des couples ou personnes seules d'adopter un enfant privé de toute famille (après une procédure lourde et exigeante) et, d'autre part, d'autoriser par la loi l'accès à une technique médicale qui priverait dès le départ un enfant de sa lignée paternelle. L'accès aux origines du tiers donneur ouvert par l'article 3 ne peut tenir lieu de succédané. Au-delà de cette question de l'intérêt de l'enfant à naître, cette évolution conduit le Gouvernement à opérer à l'article 4 une « révolution » dans le droit civil en établissant une filiation maternelle d'intention, détachée de toute référence aux conditions naturelles de la procréation fondée sur la vraisemblance biologique et hors de toute décision de justice.
Pour ces différentes raisons, il est proposé de supprimer cet article 1er.
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