Déposé le 13 octobre 2020 par : MM. Cadic, del Picchia, Regnard, Mme Billon, MM. Canevet, Delahaye, Mmes Dindar, Gatel, MM. Henno, Janssens, Kern, Laugier, Levi, Mmes Perrot, Sollogoub, Vermeillet, M. Yung, Mme Saint-Pé.
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… – Après le premier alinéa du 4° du I de l’article 1erde la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent 4°, en ce qu’il permet d’imposer aux personnes souhaitant se déplacer par transport public aérien à destination du territoire métropolitain ou de l’une des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution de présenter le résultat d’un examen biologique de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par le covid-19 avant l’embarquement, ne s’applique pas aux ressortissants français. »
La mise place d’une obligation de présentation du résultat d'un examen biologique de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par le covid-19 avant l’embarquement aux fins de se déplacer par transport public aérien à destination du territoire métropolitain, telle qu’elle fut créée par ledécret n° 2020-911 du 27 juillet 2020 modifiant le décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans les territoires sortis de l'état d'urgence sanitaire et dans ceux où il a été prorogé, représente une atteinte grave et inconstitutionnelle au droit fondamental « général et absolu »de tout ressortissant français à retourner sur le territoire national.
En effet, le droit au retour sur le territoire national de ressortissants français ne peut faire l’objet des mêmes restrictions que la liberté d’aller et venir sur le territoire national. L’article 13, paragraphe 2, de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) prévoit que « [t]oute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. » Déclaration universelle des droits de l’Homme, Rés AG 217A (III), Doc off AG NU, 3e sess, Doc NU A/810 (1948) 71, art. 13, para. 2. Cette disposition constitutionnelle ne souffre aucune condition de restriction, par exemple liée à des considérations de sécurité nationale, sanitaire ou de police. De plus, la France a ratifié, par le décret n° 74-360 du 3 mai 1974 le Protocole n° 4 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (ci-après « Protocole n° 4 »). En effet, l’article 3 du protocole suscité prévoit que« [n]ul ne peut être privé du droit d'entrer sur le territoire de l'Etat dont il est le ressortissant."Protocole No 4 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention et dans le premier Protocole additionnel à cette dernière, 16 septembre 1963, 1496 RTNU 263, art. 3, para. 2 (entrée en vigueur : 2 mai 1968).
Cette situation, qui s’applique aux ressortissants français aux Etats-Unis, Panama, Emirats Arabes Unis et Bahreïn, révélée par une ordonnance du Conseil d’Etat en date du 18 août 2020 [1] doit être rectifiée par la loi.
D’une part, le contentieux en référé devant le Conseil d’Etat et les témoignages reçus des conseillers consulaires aux Etats-Unis, notamment celui de Stéphanie Kamaruzzaman à Washington, démontrent que l’obtention d’un test préalablement à l’embarquement est impossible dans de nombreux états des Etats-Unis. Un fait conforté par le vote de la résolution n°1 par l'Assemblée des Français de l'étranger, le 8 octobre 2020 à Paris, au nom de l'équité entre les Français de l'étranger, demandant qu'aucune différence ne soit faite entre les Français en provenance des pays listés rouge et que tous puissent passer le test PCR à leur arrivée en France.
D’autre part, la procédure dérogatoire de laisser-passer sanitaire exigée par l’ordonnance du Conseil d’Etat n’est pas appliquée à tous nos ressortissants par le ministère des solidarités et de la santé et le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, sur la base d’informations recueillies par la Commission d'enquête pour l'évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19. Cet état de fait a été récemment confirmé par le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, chargé du Tourisme, des Français de l'étranger et de la Francophonie lui-même, quand il déclare à la presse que 20% des demandes de dérogations sont rejetées. Enfin, le gouvernement ne peut s’abriter derrière des considérations financières ou matérielles pour justifier une telle situation, car ces considérations matérielles n’excusent jamais la violation d’un droit constitutionnel. De plus, le Parlement a voté de très importants crédits depuis le début de la pandémie aux fins de donner les moyens à l’Agence Santé Publique France de mette en place toutes les ressources nécessaires à une politique de tests adaptée à l’évolution de la pandémie.
Par conséquent, telles que proposées dans le projet de loi, les conditions de mise en place des tests de détection dans le cadre des déplacements par transport public aérien à destination du territoire métropolitain n’offrent pas toutes les garanties constitutionnelles nécessaires.
Cet amendement vise donc à corriger cette situation et à faire respecter le droit constitutionnel au retour sur le territoire national des ressortissants français.
[1]CE, ord., 18 août 2020, Ciric c/ Décret n° 2020-911 du 27 juillet 2020, n° 442581.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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