Amendement N° 252 2ème rectif. (Retiré)

Convocation du parlement en session extraordinaire

Discuté en séance le 25 juin 2021
Avis de la Commission : Défavorable — Avis du Gouvernement : Défavorable
( amendements identiques : )

Déposé le 11 juin 2021 par : M. Longuet, Mme Valérie Boyer, MM. Burgoa, Cadec, Mme Chain-Larché, MM. Charon, Chatillon, Cuypers, Dallier, de Nicolay, Mmes Deromedi, Garriaud-Maylam, MM. Daniel Laurent, Panunzi, Piednoir, Mme Procaccia, MM. Sautarel, Vogel, Mme Lavarde, M. Bascher, Mmes Deroche, Dumas, M. Duplomb.

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I. – Alinéas 19 et 22

1° Remplacer le mot :

sept

par le mot :

dix

2° Compléter ces alinéas par les mots :

, compte tenu le cas échéant des mesures de réparation prises par l’auteur

III. – Alinéa 21

Compléter cet alinéa par les mots :

et en ayant connaissance du caractère grave et durable des dommages susceptibles d’en résulter

Exposé Sommaire :

Il serait incohérent de réprimer une atteinte comme durable lorsque son auteur l’a correctement réparée. C’est pourquoi il est proposé de passer d’une durabilité potentielle hypothétique à une durée potentielle circonstanciée en fonction des mesures de restauration le cas échéant mises en œuvre à la charge du prévenu.

Le III de l’amendement a pour objet de préciser le critère constitutif du délit « aggravé » de pollution (ex écocide) susceptible d’entrainer l’application des peines maximales (7 ans de prison et 4, 5M € d’amende porté au décuple de l’avantage procuré).

L’alinéa 21 vise les « faits […] commis de manière intentionnelle »

En règle générale, la loi pénale ne précise pas si telle infraction est intentionnelle ou non. Ce parti pris s’explique notamment par la règle suivant laquelle les délits et les crimes sont intentionnels par défaut, à moins que leur caractère non-intentionnel soit expressément spécifié dans la loi[1].

Dans ce contexte, on s’interroge sur le sens de renvoyer au caractère intentionnel, sans spécifier l’objet de l’intentionnalité exigée. En effet, la faute intentionnelle est une notion floue et discutée ; son interprétation donne lieu à des batailles judiciaires de longue haleine. Ce n’est finalement qu’après plusieurs années que l’on finit par comprendre l’élément intentionnel requis pour qualifier telle ou telle nouvelle infraction, ce qui constitue un facteur d’insécurité juridique.

Il est donc indispensable de mieux préciser le degré d’intentionnalité requis, et ce d’autant plus que cette graduation plus fine va de pair avec un alourdissement considérable des sanctions encourues. En effet, le standard d’intentionnalité requis (« les faits commis de manière intentionnelle ») semble insuffisamment exigeant au regard des sanctions encourues.

A la lumière de la jurisprudence passée, il est possible d’anticiper que les juges, s’ils étaient destinés à appliquer l’article L. 231-2 dans sa rédaction telle qu’elle résulte de l’examen en commission, exigeraient qu’il soit établi que l’auteur de l’infraction ait eu la volonté de commettre les faits matériels constitutifs de l’infraction, sans aller jusqu’à exiger qu’il ait eu conscience qu’il en résulterait des dommages à l’environnement graves et durables.

Autrement dit, l’élément intentionnel est souvent assimilé à la seule volonté de commettre les faits, à l’exclusion de la conscience de susciter le résultat infractionnel. Ainsi, seule la volonté de commettre l’acte de violence est requise sans qu’il soit besoin d’établir une volonté de causer le résultat de celui-ci. »[2].

Dans cette perspective, la jurisprudence appelée à appliquer le nouvel article L. 231-2 considérerait probablement l’intention suffisamment établie par la preuve de la volonté de méconnaître l’obligation administrative.

Il est même à craindre que les juges ne déduisent cette intention des faits eux-mêmes. En effet, le code pénal de 1994 a eu pour ambition de supprimer la catégorie des délits dits « matériels », c’est-à-dire des délits caractérisés sans qu’il soit établi que leur auteur ait eu l’intention de les commettre. Cependant, la jurisprudence n’a eu de cesse de restaurer, en pratique, ces délits, à travers une tendance à présumer de l’intention de commettre les faits. Ainsi, « [l]’intention est souvent déduite des faits eux-mêmes et la Cour de cassation rappelle fréquemment que la seule constatation de la violation en connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire implique, de la part de son auteur, l’intention coupable exigée par l’article 121-3, alinéa 1er, du code pénal. »[3]

A ce titre, les délits environnementaux actuels sont pour la plupart des « délits intentionnels à intention présumée »[4]. « Aujourd’hui, ces infractions demeurent donc punissables par le simple accomplissement des faits incriminés, sans que soit exigée la preuve de l’élément moral, donc d’une intention ou d’une indifférence blâmable aux valeurs sociales, exactement comme une contravention. Cette interprétation jurisprudentielle va à l’encontre de la volonté du législateur qui a supprimé la catégorie des délits matériels afin d’imposer l’établissement de l’élément moral de l’infraction »[5].

Aussi, afin de mieux préciser le degré d’intentionnalité requis qui va de pair avec un alourdissement considérable des sanctions encourues, il est proposé de compléter la définition du délit aggravé de pollution par la démonstration que l’auteur des faits avait connaissance également du caractère grave et durable des dommages potentiels.

Compte tenu de la gravité des sanctions encourues, il serait utile que la loi soit ainsi rédigée qu’il n’y ait pas de doute sur la nécessité pour les juges d’adosser leurs décisions à ladémonstration par les autorités de poursuite et le cas échéant les parties civiles du fait que la violation de la loi est intervenue en connaissance du risque qu’il en résulte une atteinte à l’environnement à la fois grave et durable.

[1]En ce sens, l’article 121-3 du code pénal dispose que :

« Il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre.

Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui.

Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. (…) »

[2]J.-Y. Maréchal, Fasc. 20 : Elément moral de l’infraction, J.-Cl code pénal, Art. 121-3.

[3]Fiche d’orientation Dalloz, Élément moral de l’infraction – septembre 2020. Pour un exemple d’exploitation sans autorisation d’une installation classée par un chef d’entreprise, v. par ex. Crim. 25 mai 1994, no 93-85.158. Dans un arrêt du 2 mars 2016, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a par exemple censuré l’arrêt d’appel qui avait refusé l’application des sanctions prévues à l’article L. 173-1 du code de l’environnement au motif que l’élément intentionnel n’était pas établi. Dans cette affaire, la cour d’appel avait conclu à la relaxe, faute de preuve de l’élément intentionnel. En effet, les prévenus n’avaient pas reçu de mise en demeure d’obtenir une autorisation. Bien plus, les experts consultés et l’administration elle-même avaient encouragé les prévenus à penser que les travaux qu’ils s’apprêtaient à réaliser n’étaient pas soumis à autorisation. mais pour la Cour de cassation, « [e]n statuant ainsi, alors que les prévenus ne pouvaient ignorer que l’opération qu’ils envisageaient nécessitait une autorisation administrative », la cour d’appel avait méconnu les articles 121-3, alinéa 1, du code pénal et L. 173-1- I du code de l’environnement (Cass. Crim. 2 mars 2016, no 15-84.949, Bull. n° 98). Ainsi, il y avait des raisons de penser, comme l’avait fait la cour d’appel, que les prévenus n’avaient pas eu connaissance de leur situation d’infraction. Pourtant, cette connaissance a été présumée.

[4]M. Daury-Fauveau, « Les délits intentionnels à intention présumée », Mélanges en l’honneur du professeur Nicole Decoopman – Les frontières du droit, éd. CEPRISCA, Amiens, 2014, p. 171.

[5]Ibid, pp. 176-177.

NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.

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