Déposé le 16 janvier 2023 par : MM. Salmon, Labbé, Dantec, Fernique, Benarroche, Breuiller, Dossus, Gontard, Mme de Marco, M. Parigi, Mmes Poncet Monge, Mélanie Vogel.
Supprimer cet article.
Cet article pose une dérogation générale à l’application de la loi « littoral » pour la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de celles déjà existantes sur le littoral.
Cette solution radicale et inédite n’apparaît pas justifiée en droit et en opportunité.
Il convient tout d’abord de rappeler que la loi « littoral » constitue, en droit positif, la meilleure illustration de la conciliation qu’il est possible d’opérer entre les intérêts liés, d’une part, au développement économique et à l’aménagement du territoire et, d’autre part, à la protection et la mise en valeur de l’environnement.
Le Conseil d’Etat a déjà alerté le Gouvernement : « la multiplication au fil du temps et sans logique d’ensemble, de régimes dérogatoires à la législation très protectrice du littoral, qui sont de surcroît assortis de conditions procédurales et de fond très hétérogènes, n’est pas satisfaisante » et l’a invité à « engager une réflexion pour tenter de donner une cohérence à ces dérogations et harmoniser les règles les régissant ».
Le dispositif de cet article, contrairement aux dérogations très encadrées actées dans le projet de loi relatif à l’accélération des énergies renouvelables, n’est pas une dérogation ponctuelle, assortie de conditions de procédure et de fond destinées à en encadrer l’usage, mais bien une dérogation de portée générale, même si son objet est limité aux nouvelles installations nucléaires implantées en continuité des sites existants, et échapperont purement et simplement à l’application de la loi « littoral ».
Sacrifier les règles de protection de l’environnement issues de la loi « littoral » sur l’autel du développement de l’énergie nucléaire, nous parait injustifié.
Cette dérogation générale rompt brutalement l’équilibre des droits, porte également une atteinte disproportionnée à l’article 1er de la Charte de l’environnement dès lors que, comme l’a récemment rappelé le Conseil constitutionnel, « la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation » et les dérogations aux règles environnementales ne sauraient s’appliquer que dans des circonstances exceptionnelles.
Alors qu’il s’agit de zones en bord de mer exposées au recul du trait de côte, la définition du champ d’application géographique de cette exemption de la loi « littoral » est floue et imprécise, et pourra générer une forte insécurité juridique (avec la mention “de proximité immédiate”) car ces exceptions pourraient s’appliquer de manière large.
Par ailleurs, ce régime dérogatoire ne prend aucunement en compte la question de la vulnérabilité des centrales aux conséquences du changement climatique. Du fait de sa complexité et de la nécessité d’assurer la sûreté en continu, le nucléaire est sensible à de nombreux risques, en lien direct ou indirect avec le dérèglement climatique (canicules, tempêtes, stress hydrique, montée des eaux, …). Il ne peut donc bénéficier d’un tel régime de contournement des exigences environnementales sans restriction dans la durée ni encadrement ou obligations à la charge de l’exploitant concernant les risques d’érosion côtière auxquels pourraient être exposés les réacteurs.
Le texte de la commission élargit la dérogation aux ouvrages de raccordement. Même si le dispositif est davantage encadré, la dérogation est toujours bien présente.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Ecologiste, Solidarité & Territoires souhaite la suppression de cet article.
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