Déposé le 13 novembre 2023 par : Mmes Souyris, Poncet Monge, MM. Benarroche, Grégory Blanc, Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Mellouli, Mme Ollivier, MM. Parigi, Salmon, Mmes Senée, Mélanie Vogel.
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre 7 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est complété par une section ainsi rédigée :
« Section …
« Contribution sociale exceptionnelle des sociétés réalisant des superprofits
« Art. L. 137-42. – I. – A. – Il est institué une contribution sociale exceptionnelle sur les bénéfices des sociétés redevables de l’impôt sur les sociétés au sens de l’article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 750 000 000 euros.
« B. – La contribution est due lorsque le résultat imposable de la société pour l’exercice considéré au titre de l’impôt sur les sociétés précité est supérieur ou égal à 1, 25 fois la moyenne de son résultat imposable des exercices 2017, 2018 et 2019.
« C. – La contribution est assise sur le résultat imposable supplémentaire réalisé par rapport à 1, 25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités. La contribution est calculée en appliquant à la fraction de chaque part de résultat imposable supérieur ou égale à 1, 25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités le taux de :
« 1° 20 % pour la fraction supérieure ou égale à 1, 25 fois et inférieure à 1, 5 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;
« 2° 25 % pour la fraction supérieure ou égale à 1, 5 fois et inférieure à 1, 75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;
« 3° 33 % pour la fraction supérieure ou égale à 1, 75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités.
« II. – A. – Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, la contribution est due par la société mère. Cette contribution est assise sur le résultat d’ensemble et à la plus-value nette d’ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D dudit code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.
« B. – Le chiffre d’affaires mentionné au I du présent article s’entend du chiffre d’affaires réalisé par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d’un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.
« C. – Les réductions et crédits d’impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution.
« D. – Sont exonérées de la contribution prévue au présent I, les sociétés dont la progression du résultat imposable par rapport à la moyenne des exercices 2017, 2018 et 2019 résulte d’opérations de cession ou d’acquisition d’actifs, pour la fraction du résultat imposable de l’exercice concerné.
« E. – La contribution additionnelle est établie, contrôlée et recouvrée comme l’impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt. La contribution additionnelle est payée spontanément au comptable public compétent, au plus tard à la date prévue au 2 de l’article 1668 du code général des impôts pour le versement du solde de liquidation de l’impôt sur les sociétés. »
II. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur à compter de la publication de la présente loi et sont applicables jusqu’au 31 décembre 2025. Elles s’appliquent également à l’exercice fiscal de l’année de son entrée en vigueur.
III. – Les produits de la contribution sociale exceptionnelle créée par le présent article sont affectés sans rang de priorité aux branches mentionnées à l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale.
Le présent amendement du groupe Ecologiste - Solidarité et Territoires vise à créer une contribution sociale assise sur les super profits des grandes entreprises faisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires, dont le produit financera la Sécurité sociale.
D’un côté, il y a les entreprises qui réalisent des super profits.
Ainsi, alors que les économies mondiales connaissaient une forte récession en 2020, le groupe Sanofi voyait ses bénéfices progresser de 338 % par rapport à 2019, malgré l’absence de mise sur le marché d’un vaccin contre la Covid-19.
Quant au groupe Total Energies, son bénéfice du 1er semestre 2022 progresse lui de 122 % par rapport à 2021.
Enfin, l’armateur CMA-CGM a dégagé au premier semestre 2022 un profit net de 14, 7 milliards de dollars, soit presque autant que pour l’ensemble de l’exercice 2021, marqué déjà par des résultats exceptionnels.
Dans plusieurs secteurs tels que les transports, l’énergie, l’alimentation ou la finance, des bénéfices exceptionnels, décorrélés de toute innovation, gain de productivité ou décision stratégique interne à l’entreprise, ont ainsi été réalisés.
D’un autre côté, il y a la volonté du Gouvernement de réduire les dépenses sociales alors que l’argent existe.
Les ressources générées par une telle taxe (environ 10 milliards d’euros) pourraient venir financer l’augmentation des salaires dans le secteur sanitaire, médico-social, social, l’augmentation des capacités d’accueil pour les personnes en situation de handicap, l’ouverture de places en crèche, l’engagement d’un vaste plan de recrutement et d’attractivité de ces métiers du « « prendre soin » » aujourd’hui excessivement dévalorisés, etc.
La société de la protection de la pleine santé que le groupe Ecologiste - Solidarité et Territoires appelle de ses vœux demande deux grands mouvements : sortir de la logique de l’enveloppe budgétaire « fermée » pour passer à une logique d’investissements pluriannuels, et en finir avec le cloisonnement des politiques de santé, de solidarité et de transition écologique.
Le 6 septembre 2023, le secrétaire général de l’ONU António Guterres a estimé que « l’effondrement climatique a commencé ». Plus tôt dans la même journée, l’observatoire européen Copernicus annonçait que compte-tenu de la canicule océanique (chaleur excessive à la surface des océans), il était probable que 2023 sera l’année la plus chaude que l’humanité ait connue. Partout dans le monde, les phénomènes climatiques extrêmes se sont multipliés (Grèce, Canada etc.).
Pourtant, le constat de l’Organisation Mondiale de la Santé : l’augmentation des maladies chroniques est directement liée aux facteurs environnementaux ainsi qu’à nos modes de vie. Les symptômes sont connus : problèmes respiratoires dus à la pollution de l’air, affections générées par les perturbateurs endocriniens, troubles et pathologies liées à l’exposition à des pollutions toxiques. Investir dans une politique de prévention en santé environnementale, c’est réduire à terme le coût social et sanitaire du bruit qui s’élève chaque année à près de 155 milliards, celui de la pollution de l’air entre 70 et 100 milliards par an, celui de la malbouffe à près de 50 milliards ou encore celui du mal-logement à près de 30 milliards.
Et ce sont toujours les plus pauvres d’entre nous qui trinquent :
• Les personnes les plus précaires ont 3 fois plus de risques de renoncer aux soins que les autres ;
• Les personnes les plus pauvres sont celles qui dépensent relativement le plus pour leur santé. Les 10 % les plus précaires consacrent 7, 5 % de leur revenu à leur santé contre 2, 4 % pour les 10 % les plus aisés ;
• Les 10 % les plus pauvres limitent leur frais relatifs aux complémentaires santé. En 2017, ils dépensaient 386 € contre 1 414 € pour les 10 % les plus riches pour s’offrir une complémentaire santé. En conséquence, ils sont peu remboursés lors des dépassements d’honoraires et bénéficient de moins de soins impliquant des honoraires libres (310 € par an contre 708 € par an pour les 10 % les plus riches).
Si l’espérance de vie s’allonge (en 2022, 85, 2 ans pour les femmes et 78, 7 ans pour les hommes), elle s’accompagne aussi d’une croissance des maladies chroniques :
• Les affections de longue durée concernent aujourd’hui plus de 12 millions de personnes, soit plus d’une personne sur six, contre 9 millions en 2010 ;
• Les 10 % les plus pauvres ont ainsi un risque 1, 4 fois plus élevé de développer une maladie cardiovasculaire, et 3 fois plus de risque de contracter un diabète que les 10 % les plus riches, et conduisent à d’importantes inégalités d’espérance de vie (13 ans d’écart d’espérance de vie à la naissance entre les 5 % des hommes les plus aisés et les 5 % les plus pauvres).
Pour le groupe Ecologiste - Solidarité et Territoires, il n’y aura pas de transition écologique sans planification sociale, et inversement. C’est dans cette perspective que notre groupe appelle à un big bang de la protection sociale. Ni le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, ou le projet de loi de finances pour l’État ne sont à la hauteur de ces enjeux.
NB:La rectification consiste en un changement de place de l'article additionnel après l'article 7 vers l'article additionnel après l'article 10.
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