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La question qui se pose à nous est assez simple : choisissons-nous de conserver la législation actuelle ou de la faire évoluer vers la pénalisation du client, sachant qu’une très grande majorité d’entre nous est contre le réglementarisme ? La législation actuelle, en faisant peser la présomption de culpabilité sur la personne prostituée, a été efficace contre la prostitution dite « traditionnelle », qui est en train de disparaître. Toutefois, son application a eu pour effet pervers de favoriser le développement des réseaux, et donc de la prostitution sous contrainte, ce qui rend nécessaire une évolution de notre législation. Nous l’avons affirmé, les personnes prostituées sont d'abord des victimes. Il serait donc logique et cohérent que notre droit le reconnaisse et ...
...ticles 16 et 17 de cette proposition de loi. Non seulement ces derniers sont un outil indispensable dans la lutte contre la traite, mais ils ont une portée symbolique et pédagogique pour les jeunes en ce qu’ils fixent clairement l’interdit dans la loi. Mes chers collègues, il est temps de changer, dans les faits, notre regard, et de responsabiliser la société tout entière à la réalité du système prostitutionnel.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cinq minutes pour résumer deux ans et demi de travail, c’est très court ! Longtemps, appliqué au problème de la prostitution, le terme « abolitionnisme » a visé la suppression de toute forme de réglementation. Je songe notamment au combat mené en Angleterre par Josephine Butler dans les années 1870. Je pense bien entendu à la loi de 1946, qui a érigé le racolage en délit lors de la fermeture des maisons closes. Par extension, ce que l’on appelle « abolitionnisme » est devenu le combat contre la prostitution, pour la d...
À titre personnel, je suis favorable à l’instauration de cette nouvelle infraction. En effet, la création de cette incrimination permettrait de renverser la charge de la preuve et de souligner enfin que la personne prostituée n’est pas la responsable de l’acte de prostitution. En désignant le client comme partie prenante au système prostitutionnel, l'objectif est de diminuer la demande et d’agir sur l’offre. L’instauration de cette sanction du client, même relativement modérée, aurait une forte portée symbolique et poserait clairement le principe qu’il est inacceptable d’acheter un acte sexuel. Cependant, la majorité de la commission spéciale a considéré que la créa...
...elle contravention ne pourraient-ils pas être plus utilement employés, au service de la lutte contre le proxénétisme et les réseaux internationaux ? À cela s’ajoute un problème de cohérence. Les auteurs du présent texte ont voulu renverser le mécanisme actuel en supprimant toute pénalisation du racolage et en sanctionnant le client. Mais comment pourrait-on concilier juridiquement le fait que la prostitution soit autorisée en France, puisqu’elle n’est pas interdite, la suppression du délit de racolage et la pénalisation du client ? Nous aboutirions à cette situation : la prostitution serait autorisée ; sa promotion serait permise par le texte que nous voterions ; en revanche, il serait interdit aux clients de se livrer à de telles relations tarifées… Il me semble que, en agissant ainsi, nous irions ...
Madame la secrétaire d’État, vous venez d’évoquer le cas de la Norvège. Il est en effet nécessaire de regarder autour de nous, car nous ne sommes pas les seuls à réfléchir sur ce sujet et à en débattre. La Norvège a effectivement décidé de pénaliser le client. Au Canada, la loi précise que la prostitution porte préjudice à toute la société en faisant apparaître le corps de la femme comme une « commodité » pouvant être achetée par ceux qui possèdent argent et pouvoir. La prostitution a engendré des effets négatifs là où elle est pratiquée, en raison des actes criminels qui y sont liés. Comme je l’ai dit au cours de la discussion générale, c’est le plus important des trafics, dont les bénéfices vie...
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes appelés à débattre d’un texte important, visant à lutter contre le système prostitutionnel en France. Je suis heureux de constater qu’un large consensus se dégage autour d’une action contre la prostitution qui soit efficace et qui permette de lutter contre les réseaux mafieux et les violences que subissent les personnes prostituées. Ce consensus concerne notamment le volet social du présent texte comme l’interdiction de l’utilisation d’internet. À ce stade de la réflexion, le déba...
Monsieur Vial, Nicolas Sarkozy avait introduit le délit de racolage en 2003 en le présentant comme la solution pour lutter contre la prostitution. Dix ans plus tard, nous avons constaté l’échec complet de cette mesure. Il n’est pas sérieux de proposer aujourd’hui de mener la lutte contre la prostitution avec une recette qui a déjà démontré son inefficacité absolue. Choisissons l’efficacité : sanctionnons le client plutôt que de revenir à une idée qui a déjà montré ses limites.
... intellectuelle ! §Oui, monsieur Kaltenbach, les scientifiques ont une certaine honnêteté intellectuelle ! En juillet 2012, l’ONU constatait que, depuis le début de son application en 1999, la loi suédoise, loin d’améliorer les conditions de vie des personnes prostituées, les avait au contraire aggravées. Selon la police, le commerce sexuel dans la rue a diminué de moitié en Suède. Toutefois, la prostitution dans son ensemble est restée au niveau qui était le sien avant la promulgation de la loi : elle est simplement devenue en grande partie clandestine. Son exercice s’est en effet reporté vers les hôtels et les restaurants, ainsi que vers internet et le Danemark. Selon les services suédois de police judiciaire, il est devenu plus violent. Le même constat a été établi par la Belgique, qui a pour cett...
...oitation de femmes et d’hommes à des fins sexuelles. C’est bien l’un des objets de cette proposition de loi. La question est de déterminer les moyens les plus efficaces. Tel qu’adopté par les députés, dans un large consensus transpartisan, le texte comporte une vraie cohérence, manifestée par quatre piliers : renforcement de la lutte contre le proxénétisme, création d’un parcours de sortie de la prostitution, prévention et éducation, responsabilisation du client. Il s’agit donc bien d’agir auprès des trois acteurs : les réseaux, les prostituées et les clients. Cessons l’hypocrisie : le client est le premier rouage du système prostitutionnel ; c’est bien son argent qui enrichit les réseaux, lesquels, pour satisfaire sa demande, mettent sur le trottoir toujours plus de prostituées. Tout est dit, suis-...
...s forte aux proxénètes, qui disposent de studios, d’appartements ou de structures d’accueil où les prostituées se rendront après avoir pris rendez-vous avec les clients, ainsi que de l’acceptation plus large de pratiques à risques, telles que les rapports sans préservatif. Les prostituées étrangères migreront vers des pays où le client n’est pas pénalisé, ce qui ne soustraira pas ces femmes à la prostitution. Celles qui resteront en France, à savoir les prostituées traditionnelles ou occasionnelles, devront, pour maintenir leurs revenus, entrer plus avant dans la clandestinité. Soyons pragmatiques, mais surtout honnêtes ! Avec la pénalisation des clients, cette proposition de loi, loin d’atteindre l’objectif affiché de protéger les prostituées, aggravera encore la précarité de leur condition. Lutton...
La très grande majorité du groupe RDSE, opposée à la pénalisation du client, votera contre ces amendements. La pénalisation du client renforcera la clandestinité de la prostitution, qui s’exercera de plus en plus dans les bois, sur les aires d’autoroute, dans des lieux isolés et sordides où les prostituées seront mal protégées et à la merci des mafias et des proxénètes.
... en posant un interdit, aurait un effet pédagogique : une moitié de l’humanité ne peut pas considérer qu’elle peut louer une partie du corps de l’autre. Ce n’est pas ainsi que l’on peut construire des rapports d’égalité. Je voudrais combattre plusieurs idées reçues qui relèvent selon moi d’une construction culturelle et sociale, et en aucune manière d’une loi naturelle. Ainsi, selon certains, la prostitution serait un mal nécessaire pour satisfaire des pulsions sexuelles irrépressibles, on se prostitue parce qu’on le veut bien, voire parce que l’on aime cette activité, qui permettrait de gagner de l’argent facilement… Des inspecteurs de l’Inspection générale des affaires sociales, dont le témoignage m’a beaucoup choquée, nous ont dit que, dès le secondaire, on constatait la pratique de relations sex...
J’ai été frappé que l’on puisse donner à entendre que la pénalisation des clients aurait eu des effets très positifs en Suède. J’ai ici un rapport que l’on ne saurait considérer comme suspect, celui de la fondation Scelles, intitulé « La prostitution masculine en plein essor ». On y apprend que, « selon une enquête réalisée par le Conseil national de la jeunesse auprès de 2 254 jeunes Suédois, parue en novembre 2012, 2, 1 % des jeunes Suédois entre 16 et 25 ans et 0, 8 % des jeunes Suédoises ont indiqué s’être prostitués au cours de l’année 2012. Au total, ce serait près de 20 000 personnes […]. De plus, les jeunes sont aussi clients, car la ...
Cet amendement a pour objet de rétablir la possibilité de bloquer les sites internet utilisés par les réseaux de traite et de proxénétisme. Je ne développerai pas les arguments présentés par Mme Jouanno. Avec la loi du 13 novembre 2014, le contexte a évolué. Aussi est-il possible de réinstaurer la faculté de bloquer les sites à caractère prostitutionnel.
...ertains de nos collègues prétendent que pénaliser le client reviendrait à fragiliser la situation de la personne prostituée, mais le rétablissement du délit de racolage emportera de plus graves conséquences de ce point de vue ! Il s’agit ici de poser un interdit. Nous avons beaucoup travaillé sur la problématique de l’hypersexualisation. On assiste à une véritable banalisation du phénomène de la prostitution, que ce soit à travers les films, les clips vidéo ou les défilés de mode. Dernièrement, Louis Vuitton a organisé un défilé sur le thème de la prostitution, ce qui n’a choqué personne… En tant qu’abolitionniste assumée, j’estime que nous devons fixer des lignes directrices claires dans notre législation. C’est pourquoi je propose d’introduire la notion de prostitution sous contrainte, à titre de ...
Au motif de parvenir à un compromis, Mme Jouanno vient de rectifier son amendement pour introduire la notion de contrainte, rejoignant ainsi la position de M. Godefroy. C’est faire bien peu de cas de ce qu’expliquait à l’instant Mme la secrétaire d’État. Introduire la notion de prostitution sous contrainte, c’est sous-entendre qu’existerait une prostitution librement choisie. Or les chiffres montrent que la grande majorité des prostituées sont soumises à des réseaux criminels. Disant cela, j’ai moi aussi la prétention, de par ma formation scientifique, psychologique et parlementaire, d’être honnête intellectuellement. Par conséquent, je suis totalement opposée à ce que l’on donne à...
La commission spéciale n’ayant pu se prononcer sur cet amendement, je m’exprimerai à titre personnel. En adoptant un tel amendement, le Sénat semblerait indiquer que, à côté d’une prostitution sous contrainte, dont le client serait puni, il en existe une autre, plus acceptable, ne donnant pas lieu à pénalisation. Je ne saurais l’accepter. Certes, il convient d’éviter le statu quo et de ne pas en rester à l’absence de pénalisation des clients dans tous les cas, mais il faut aussi se garder d’adresser un message qui manquerait à la fois de clarté et de justice envers les personne...
...éjour. Dans ce contexte, l’introduction de la notion de contrainte sonne comme un pis-aller. Surtout, elle accrédite l’idée selon laquelle un certain nombre de personnes se prostitueraient de gaieté de cœur, si j’ose dire, sans contrainte. Or tous nos travaux ont montré que l’immense majorité des prostituées sont sous l’emprise de réseaux de traite d’êtres humains ou, en tout cas, se livrent à la prostitution parce qu’elles y sont contraintes par leur situation économique. Encore une fois, parmi toutes les prostituées que j’ai eu l’occasion de rencontrer, y compris celles qui affirment se prostituer par choix, il n’en est aucune qui n’ait fini par avouer avoir perdu toute estime d’elle-même. Certaines cachent même à leurs enfants leur condition de prostituée.
L’article 3 de cette proposition de loi crée un parcours de sortie de la prostitution pour les victimes de cette prostitution. Il consacre la création d’une instance chargée d’organiser et de coordonner l’action en faveur des victimes de la prostitution, du proxénétisme et de la traite des êtres humains. Si je tiens à intervenir à propos de cet article 3, c’est qu’il me paraît fondamental. Il constitue en effet l’un des piliers les plus importants de ce texte. L’essentiel, c’est ...