Mission d'information Démocratie représentative, participative et paritaire

Réunion du 23 février 2017 à 13h35

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • consultation
  • démocratie
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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Cette nouvelle audition de la mission d'information nous permet d'accueillir conjointement les représentants de quatre associations.

Démocratie ouverte, représentée par M. Florent Guignard, regroupe des acteurs ayant développé des outils numériques d'information et de participation des citoyens, comme l'application Open dialog, qui permet d'attirer l'attention de candidats à une élection sur une thématique donnée.

La 27e région, représentée par M. Stéphane Vincent, se définit comme « un laboratoire de transformation des politiques publiques et territoriales ». Elle gère notamment « Superpublic », un programme qui propose différents ateliers d'échanges autour de thèmes politiques. Cette approche, liée aux problématiques locales, nous intéresse également.

Parlement et citoyens, association représentée par M. Cyril Lage, propose une plateforme de consultation en ligne. Cet outil a notamment été utilisé par notre collègue Joël Labbé lors de l'examen du projet de loi sur la biodiversité, ainsi que par M. Dominique Raimbourg, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, à propos des prisons.

L'objectif de Regards citoyens, association représentée par MM. Benjamin Ooghe-Tabanou et François Massot, est de « proposer un accès simplifié au fonctionnement de nos institutions démocratiques à partir des informations publiques ». Les sites qu'elle gère suivent tout particulièrement l'activité parlementaire.

Messieurs, depuis décembre, notre mission d'information s'interroge notamment sur les outils à mettre en oeuvre pour répondre à une attente des citoyens ou, à tout le moins, d'une partie d'entre eux, en leur permettant d'être associés à la prise de décision publique.

Ce questionnement général est complété par une analyse plus spécifique des procédures mises en oeuvre pour mieux consulter le public lors de la construction d'infrastructures et d'équipements de grande envergure. Des auditions sont prévues précisément sur ce sujet. Hier, nous recevions ainsi la Commission nationale du débat public (CNDP) et la Commission nationale des commissaires enquêteurs. Un autre axe de réflexion concerne enfin la démocratie paritaire. Nous avons ainsi entendu M. Jean-Denis Combrexelle et nous recevrons prochainement des organisations professionnelles représentatives.

Selon vous, quels sont les dispositifs les plus efficaces pour permettre une participation des citoyens ? Le cas échéant, pouvez-vous aussi nous présenter leurs limites ? Quelle articulation ont ces outils avec la démocratie représentative, socle de notre système institutionnel ? Les expérimentations de consultation en ligne sur des projets de loi sont-elles concluantes ? Enfin, quelle doit être, selon vous, la place des civic techs dans le débat public ?

Debut de section - Permalien
Florent Guignard, vice-président de Démocratie ouverte

Notre association regroupe des projets et des personnes extrêmement divers. Nous représentons des civic techs au sens large, c'est-à-dire des projets, numériques ou non, d'innovation démocratique. Notre collectif comprend aussi des chercheurs, comme M. Loïc Blondiaux, que vous avez entendu, et des citoyens engagés. Il n'est pas toujours simple de parler d'une seule voix au nom de notre collectif du fait de la variété des profils et des opinions de nos membres. Je m'attacherai à montrer ce foisonnement d'idées et à mettre en lumière certaines de nos initiatives.

Nous percevons chez les citoyens un désir très fort de participation, lié à une crise de légitimité des institutions. Une certaine défiance existe vis-à-vis de la démocratie représentative. Les citoyens désirent être associés à la construction des décisions politiques ; ils veulent plus de transparence et de décisions collectives. La manière dont la décision est prise est presque aussi importante que la décision elle-même : une décision adoptée sur un coin de table, sans participation, a tendance à être violemment rejetée.

L'outil numérique permet une forme d'intelligence collective beaucoup plus large que les autres méthodes. Des applications - par exemple, Stig ou encore Gov, laquelle ne fait pas partie de Démocratie ouverte - permettent de sonder la population en temps réel. Certaines permettent même d'associer, plus en amont, les citoyens à la prise de décision. Des mairies peuvent ainsi lancer des campagnes de financement participatif pour déterminer les commerces dont ils ont besoin. On peut aussi évoquer Fluicity, application notamment orientée vers l'urbanisme, ou encore Demodyne, qui est utilisée pour construire un projet numérique.

Ces outils sont souvent associés à des démarches et des méthodes d'animation non numériques. On peut citer à ce titre l'entreprise sociale et solidaire Kawaa, qui permet de créer du lien social autour de thématiques ou de projets variés. La dimension « hors-ligne » est aussi importante, car, si les outils numériques offrent bien des possibilités, ils peuvent également exclure ceux qui n'y ont pas accès et ne remplacent pas complètement les autres démarches.

Comment pousser les citoyens à s'engager ? Pour nous, cette question est cruciale. Ainsi, la Commission européenne avait mené une consultation en ligne sur la pêche en eaux profondes, qui avait reçu très peu de contributions ; en revanche, une pétition en ligne sur ce même sujet avait récolté plus d'un million de signatures. Il ne suffit pas de proposer des outils pour qu'ils soient utilisés et que les citoyens passent de l'attentisme à l'engagement ; un vrai travail d'explication est nécessaire.

De ce point de vue, certains adhérents de notre collectif développent des initiatives intéressantes. L'association Voxe, organisée autour d'un comparateur de programmes politiques, permet notamment aux jeunes de s'intéresser à la chose politique. Acropolis, une chaîne YouTube, commente les questions au Gouvernement et explique aux jeunes ce qu'est la politique. Enfin, à titre personnel, j'ai fondé Le Drenche, un journal de débats qui permet aux citoyens de se forger une opinion et de passer à l'action.

En fait, il est important de considérer chaque civic tech comme un maillon d'une chaîne permettant d'augmenter la participation. Ces outils inspirent une forte confiance, car ils sont créés par des citoyens et issus de structures de taille réduite et souvent personnalisées : on peut associer à chaque structure quelques visages. Ces outils sont souples, rapides et dynamiques, qu'ils soient le fait d'associations ou d'autres structures, voire même de projets sans statut juridique. Ils suscitent en conséquence un intérêt très fort.

En revanche, le financement de ces civic techs est un problème. Nombre d'acteurs de ce milieu peinent à trouver un modèle économique viable. En outre, leur définition même est parfois compliquée : certaines sources de financement de civic techs suscitent des questions éthiques.

M. Stéphane Vincent, délégué général de La 27e région. - L'action de notre association repose sur trois hypothèses.

Premièrement, selon nous, le désaveu démocratique est corrélé, avant tout, à l'échec des politiques publiques. Il faut donc s'intéresser de près à leur succès. La participation doit améliorer la qualité des décisions.

Deuxièmement, les modalités actuelles de fabrication des politiques publiques est obsolète. Ce point est tout à fait documenté par les chercheurs comme les praticiens. Les élus choisissent les problèmes auxquels ils souhaitent répondre, en tirent des programmes, puis évaluent les politiques menées. Cette démarche est aujourd'hui caduque.

Troisièmement, la marge de manoeuvre pour l'amélioration de la construction des politiques publiques réside dans le fonctionnement des institutions elles-mêmes. Les collectivités territoriales ne peuvent pas demander sans cesse aux autres d'être plus démocratiques et innovantes sans appliquer ces exigences à elles-mêmes. Il est prioritaire d'accomplir cette transformation au sein des institutions. Notre association travaille surtout à l'échelon des collectivités territoriales.

D'après notre expérience, il serait intéressant de reprendre l'histoire de chaque problème politique, de son identification à l'élaboration de solutions, et de déterminer ainsi l'origine de ces difficultés. Dans le cas de Notre-Dame-des-Landes, par exemple, il y a eu un malentendu au moment du diagnostic. Le manque de clarté dans le diagnostic peut aussi être un problème. Il est bien beau d'apporter des solutions aux problèmes, mais il faut d'abord prendre au sérieux le moment du diagnostic.

Il est temps de passer à une fabrique post-industrielle des politiques publiques. La société a changé depuis l'ère industrielle, durant laquelle nos institutions se sont formées. Il faut associer les usagers plus en amont et, peut-être, différemment.

Nous préférons parler de pistes, plutôt que de solutions. Il faudrait, selon nous, introduire plus de réflexivité, d'expériences et de dialogue avec les usagers, selon une pratique comparable aux départements de recherche et développement des entreprises. Par analogie, si Airbus construisait ses avions comme on construit nos politiques publiques, il y aurait beaucoup plus d'accidents aériens ! Comment réintroduire, dans la fabrique de l'action publique, les notions de tâtonnement, d'essai-erreur, communément admises dans le monde de l'entreprise ?

Il faut aussi un rôle accru pour la recherche. La sociologie, en particulier, est trop absente du processus de décision, alors qu'elle permettrait d'éviter bien des erreurs. Par exemple, les sociologues et les praticiens savent comment la police pourrait reconstruire sa relation avec les citoyens mais on ne le fait pas !

Il manque à la fabrique des politiques publiques des zones de test. Il faut construire un rapport « adulte » avec les citoyens, qui en ont assez du « marketing politique », dont la pauvreté symbolique est indéniable. L'impression dominante est que les politiques sont élaborées, pour ainsi dire, dans une « boîte noire » ; c'est devenu insupportable.

Debut de section - Permalien
Cyril Lage, fondateur de Parlement et citoyens

Notre plateforme permet aux parlementaires d'associer les citoyens à l'élaboration de la loi. Notre projet est issu d'un constat similaire à celui qu'a développé M. Vincent : les politiques publiques ne semblent pas répondre aux attentes de la population, laquelle exprime un sentiment de défiance très fort. Deux orientations sont possibles : soit on s'attaque aux maux et, éventuellement, on cherche les coupables, soit on s'adresse à ceux qui, à l'intérieur du système, sont prêts à expérimenter et à aller de l'avant. Nous avons choisi cette seconde voie et nous proposons donc un instrument aux parlementaires désireux de l'emprunter avec nous.

Nous nous sommes imposé une exigence d'indépendance vis-à-vis des engagements partisans ; nous nous sommes donc adressés à des parlementaires appartenant à chacun des principaux partis représentés au Parlement. Nous avons aussi fait le choix d'un engagement complètement bénévole, afin de ne dépendre de personne. Notre expérimentation, qui devait à l'origine durer un an, nous a finalement occupés deux ans et demi.

Notre idée était de réfléchir à une nouvelle méthode d'élaboration de la loi ; il nous fallait alors imaginer un processus complet. Nous avons pris garde à certains dangers : il fallait éviter d'éventuelles tentatives d'instrumentalisation de la part de divers groupes d'intérêts, mais aussi décourager les « trolls » qui sévissent sur Internet. Nous ne voulions pas faire croire non plus aux citoyens qu'il s'agissait du passage d'une démocratie représentative à une démocratie directe.

L'objet de notre démarche n'était pas de changer de matrice ou de contester la légitimité des élus à voter la loi. Nous entendions simplement faire sortir l'élaboration de la loi du huis clos, de manière à ce qu'elle se fasse à ciel ouvert.

Nous entendions aussi tirer la conséquence d'évolutions sociologiques majeures. En 1958, on ne comptait que 10 % de bacheliers par génération. Le minitel n'avait pas même été inventé. Aujourd'hui, le taux de réussite au baccalauréat est de 85 % et nous disposons d'Internet !

Notre expérimentation a produit de bons résultats. M. Joël Labbé a notamment utilisé notre outil lors de l'examen de la loi du 6 février 2014, visant à mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national. On peut aussi mentionner la consultation menée sur la loi du 9 août 2016 de reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, ou encore celle engagée par M. Dominique Raimbourg sur les prisons. Cette dernière en particulier a démontré que, quand le processus est maîtrisé et que des engagements sont pris, les problèmes les plus craints sur Internet disparaissent. Ainsi, nous n'avons eu à modérer que 17 contributions, sur près de 10 000. Quand l'ambition est de stimuler la discussion, les citoyens s'engagent dans cette démarche avec une attitude constructive.

Quant au modèle économique, nous avons pour ainsi dire mis le doigt dans un engrenage qui nous dépasse. Nous n'avons pas obtenu des assemblées les moyens nécessaires à la prolongation de notre entreprise. En revanche, des élus, des chefs d'entreprise et des responsables associatifs ont voulu utiliser notre outil. Nous avons par conséquent créé une start-up, indépendante de l'association, afin de pérenniser et de faire essaimer notre démarche. Mme la ministre Axelle Lemaire a utilisé ce dispositif pour le projet de loi pour une République numérique. Nous avons aussi participé à la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024. Enfin, nous travaillons aujourd'hui avec la CFDT, ce qui nous permet de réfléchir au rôle de la démocratie paritaire. Nos méthodes se diffusent dans l'ensemble de la société.

Dans cette perspective, cette mission d'information nous donne l'occasion de porter le message que la transformation de la démocratie est l'affaire de tous. Il s'agit de travailler ensemble, de prendre des engagements simples au début du processus participatif, puis de les tenir. Témoignage du potentiel de cette démarche, quand on demande aux participants de la consultation sur la loi pour une République numérique s'ils sont prêts à renouveler l'expérience selon les mêmes modalités, 92 % d'entre eux disent oui !

Debut de section - Permalien
François Massot, administrateur de Regards citoyens

Notre association rassemble des bénévoles qui militent pour la transparence des institutions publiques et une meilleure compréhension du travail parlementaire. Il s'agit de rapprocher les citoyens du Parlement.

Nous connaissons très bien les enjeux de la participation. Nous autorisons les citoyens qui utilisent nos sites à déposer des commentaires sur les projets de loi ou les amendements : à ce jour, 2 500 personnes ont déposé 8 500 commentaires, avec également quelques réponses de députés et de sénateurs. Nous expérimentons également la possibilité de suggérer des modifications sur un projet de loi. Enfin, nous avons récemment participé à un crowdsourcing des résultats de la consultation citoyenne relative à la politique publique en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes, menée par l'Assemblée nationale. Un important travail d'analyse était nécessaire ; nous avons aidé l'Assemblée nationale à le faire.

La participation citoyenne n'est pas quelque chose de nouveau dans notre démocratie. Les assemblées en sont très conscientes et notre présence aujourd'hui le prouve. Des concertations publiques existent : on peut participer aux études d'impact sur le site de l'Assemblée nationale. Existent en outre la Commission nationale du débat public et les « agenda 21 » des collectivités locales. En général, il est très difficile d'avoir des retours sur les résultats des consultations. Il y a un effet de « boîte noire » très frustrant pour les citoyens et qui limite la participation.

Le numérique permet d'aller beaucoup plus loin qu'une audition comme aujourd'hui. La consultation sur la loi pour une République numérique l'a démontré. On a été surpris par la participation, mais aussi par la façon dont cette consultation a été utilisée. Alors que le Gouvernement a plutôt suivi les lobbys classiques, c'est le Parlement qui s'est plutôt saisi des propositions des citoyens. L'outil numérique est très puissant, mais ses bénéfices ne sont pas toujours là où on les attend.

Debut de section - Permalien
Benjamin Ooghe-Tabanou, administrateur de Regards citoyens

Cette consultation expérimentale sur la loi pour une République numérique l'a bien montré, le danger est que ces outils soient au final de simples « bacs à sable » : les citoyens pourraient s'amuser, mais cela ne changerait rien. Il faut veiller à ce que la participation soit effective et ait un impact.

Nous recommandons donc de ne pas systématiser les consultations. Du fait de la fracture numérique, cela risquerait d'entraîner une rupture d'égalité par rapport à ceux qui ne pourraient pas participer. Par ailleurs, il existe un danger d'épuisement : les citoyens ne seraient sans doute pas prêts à s'engager sur tous les textes que vous examinez, mesdames, messieurs les sénateurs, tant ils sont nombreux.

Il faut aussi qu'il y ait une obligation de réponse de la part des acteurs publics. Ce besoin de suivi est crucial dès lors que l'on permet aux citoyens de s'exprimer. Si ces derniers ne sont pas été entendus, il faut au moins qu'ils sachent pourquoi !

Il faut enfin apporter des garde-fous démocratiques. La démocratie, depuis toujours, repose sur la confiance, la transparence et la neutralité. Il est essentiel que les nouveaux outils numériques respectent ces principes. Lors d'une récente consultation sur la généralisation des consultations numériques pour les textes de loi les plus importants, des propositions étaient « épinglées » par Parlement et citoyens au-dessus des autres sur le site : cela crée une inégalité des acteurs qui est problématique. Le besoin de transparence est réel. Le dépouillement public des élections assure la confiance des citoyens dans le processus électoral ; en revanche, un outil numérique dont le fonctionnement est opaque ne peut susciter la confiance, car rien ne garantit que certains votes ne sont pas comptabilisés quatre ou cinq fois. Il existe des moyens simples pour garantir cette transparence dans le monde numérique : la transparence des programmes informatiques, par le biais du logiciel libre, et celle des données, l'open data. Tout outil utilisé dans le système démocratique doit reposer sur ces principes.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Notre mission d'information offre elle aussi un espace numérique ouvert aux citoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Ma première question concerne le foisonnement des outils de participation : panels, conférences, pétitions en ligne, etc. Selon vous, existe-t-il un outil devant être privilégié, ou bien considérez-vous que le choix de l'outil doit dépendre de l'échelle ou de la nature des problèmes à traiter ?

Debut de section - Permalien
Florent Guignard, vice-président de Démocratie ouverte

En tant que représentant d'un collectif, il m'est impossible de vous proposer une hiérarchie, forcément subjective, des outils numériques. Je pense, en outre, sincèrement que différents outils sont adaptés à différents objectifs ; une commune n'aura pas les mêmes besoins qu'un ministre ou qu'un parlementaire : il faut laisser chaque acteur choisir ces outils. Le foisonnement même conduira, par une sorte de darwinisme, à la sélection des outils les plus efficaces et les plus pertinents.

Debut de section - Permalien
Stéphane Vincent

Il existe un risque de « fétichisme » des outils. On s'en entiche, alors que la pluridisciplinarité est utile. D'un côté, on a besoin de meilleurs outils d'observation des usages, tels que ceux utilisés par les sociologues ; de l'autre, il existe aussi de nouveaux outils de conversation et de signalement des usagers. On aura atteint une nouvelle étape quand on aura une meilleure compréhension de la diversité des usages de ces outils. Ainsi, on parviendra à ce que la participation se fasse, non pas pour elle-même, mais pour nourrir une meilleure compréhension des problèmes et pour parvenir à de meilleures solutions. Je suis donc favorable à une grande diversité des outils en fonction des usages.

Debut de section - Permalien
Cyril Lage, fondateur de Parlement et citoyens

Je suis entièrement d'accord avec Stéphane Vincent. Il faut trouver les outils qui correspondent le mieux à chaque usage. Nous sommes moins dogmatiques que Regards citoyens de ce point de vue. Il existe aujourd'hui une très grande variété d'outils aujourd'hui. Les besoins des parlementaires sont assez définis, mais ceux des collectivités territoriales sont beaucoup plus divers : il appartient à chacun, par une procédure de marché public par exemple, d'établir des grilles de sélection des outils.

Debut de section - Permalien
Benjamin Ooghe-Tabanou, administrateur de Regards citoyens

Respecter les valeurs démocratiques serait-il une position dogmatique ? Je suis plutôt d'accord avec les orateurs qui m'ont précédé : il est difficile d'établir une liste arrêtée, d'autant que les meilleurs outils sont encore à venir. Il faut surtout que les outils soient adaptés à l'action recherchée et au public ciblé. Il importe aussi qu'ils respectent les valeurs démocratiques : c'est pourquoi nous voulons privilégier des outils qui peuvent permettre à d'autres projets d'émerger ou de s'améliorer. Un outil bloqué fermé est un outil qui ne peut évoluer facilement ; sa réutilisation par un autre acteur public est par conséquent difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Que pensez-vous, dans une logique de déblocage de la prise de décision, des référendums ? Je pense tant aux référendums français, où l'on pose une question de manière quelque peu dramatique, qu'au modèle suisse, où les référendums sont fréquents et quelque peu banalisés. Par ailleurs, que pensez-vous de l'expérimentation ? Existe-t-il des solutions pour la société française dans l'un ou l'autre de ces thèmes ?

Debut de section - Permalien
Florent Guignard, vice-président de Démocratie ouverte

Je n'ai pas d'avis particulier sur les référendums, mais dans les pays où ils sont rares, ils deviennent des défouloirs, les citoyens ne répondant souvent pas à la question posée. Une pratique régulière du référendum, comme en Suisse, ou une association plus en amont des citoyens aux décisions changerait la donne.

Démocratie ouverte défend l'expérimentation : on a le droit de se tromper, d'expérimenter, pour voir ce qui est bon et ce qui l'est moins. Un peu comme le font les start-ups ! Elles testent, elles tâtonnent ; leurs produits réussissent rarement du premier coup : ils sont améliorés en fonction des réactions des utilisateurs. Pareillement, cela permet d'associer les citoyens à l'élaboration des outils.

Debut de section - Permalien
Stéphane Vincent

Nous passons beaucoup de temps à faire de l'expérimentation. Mais entendons-nous sur le terme « expérimentation » : à mes yeux, il s'agit de tester auprès des utilisateurs les politiques publiques. Le référendum, c'est la démocratie spectaculaire, mais bien d'autres expérimentations se déroulent plus discrètement, au niveau local - sur l'avenir des services publics en zone rurale, par exemple : l'immersion sur le terrain fonctionne comme un travail en laboratoire. On part alors du terrain. Nous vivons dans un monde où les innovations publiques sont nombreuses, tous les États suivent d'ailleurs cette piste du recours aux « essais-erreurs ». Aujourd'hui, la règle a basculé : les problèmes sont complexes, les dirigeants n'ont pas la science infuse, et il y aurait des risques considérables à ne pas tester les politiques envisagées.

Debut de section - Permalien
Cyril Lage, fondateur de Parlement et citoyens

Je suis très favorable à la logique d'expérimentation. Nous la pratiquons constamment depuis 2013. Depuis hier, nous expérimentons la co-construction du programme d'un candidat à la présidentielle : nous avons eu 10 000 contributeurs en deux jours, et le rythme s'accélère. Chaque nouvelle consultation est une expérience inédite malgré une méthode assez identique, car chacune repose sur une sociologie, une population, des objectifs différents. Aucun outil, aucun modèle n'est parfait dès le départ. Il faut tester, pour améliorer.

Je suis partisan d'un vrai référendum d'initiative citoyenne, comme en Suisse. Oui, les Français, lors d'un référendum, répondent, non pas à la question posée, mais à la personne qui la pose - le président de la République, en général. Il en irait différemment si la question était soulevée par les citoyens eux-mêmes. Le Parlement pourrait intervenir au préalable pour éclairer la consultation ; le processus d'expression des opinions serait ainsi complet.

Systématiser les consultations ne signifie pas que tout le monde doive y participer tout le temps, mais que tout le monde peut y participer, à égalité. Procéder en toute transparence est indispensable pour que les effets en soient bénéfiques.

Debut de section - Permalien
Benjamin Ooghe-Tabanou, administrateur de Regards citoyens

Comment, avec des référendums à question fermée - réponse A ou B, oui ou non -, gérer la complexité ? Le sens d'un texte se joue souvent à la virgule près. Il est difficile de prétendre pouvoir prendre ainsi de grandes décisions. On peut plutôt décider de grandes orientations pour qu'ensuite, le Parlement élabore une loi qui va dans la direction ainsi définie.

En revanche, quelle est la signification d'un référendum organisé tous les dix ans et qui revient à soutenir ou non le Président de la République ?

Debut de section - Permalien
Benjamin Ooghe-Tabanou, administrateur de Regards citoyens

Exactement. Olivier Rozenberg avait proposé à François Hollande, après l'élection présidentielle, d'organiser un référendum à questions multiples, comme lors de certains scrutins américains. Interroger les citoyens en début de mandat sur plusieurs sujets (en l'occurrence, le vote des étrangers vivant en France, le mariage pour tous, etc.) nous aurait fait sortir du vote sanction.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Quels sont les avantages et les inconvénients du numérique pour la participation des citoyens ? Des universitaires que nous avons entendus ont souligné des biais de motivation : ceux qui ont une idée sur la question se mobilisent fortement, ceux qui n'ont pas de position a priori se trouvent marginalisés. Certains de nos interlocuteurs rappellent aussi que le numérique n'incite pas à l'esprit critique, à la recherche d'une information équilibrée. Facebook et les autres acteurs du numérique s'interrogent sur leur responsabilité dans la propagation des « fake news » pendant la campagne présidentielle américaine. Je ne critique pas l'outil numérique ni les civic techs, mais il serait bon de définir plus précisément ce que l'on entend par intelligence collective et écouter quelles précautions il convient de prendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Notre réunion est retransmise en direct via Facebook...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

C'est le président de Facebook lui-même qui s'est exprimé sur la responsabilité des réseaux sociaux !

Debut de section - Permalien
Florent Guignard, vice-président de Démocratie ouverte

Les bulles de filtres ont certes tendance à nous entretenir dans nos opinions. Avec le journal dont je m'occupe, nous poussons les personnes à lire des avis divergents. Le numérique est un outil ; il peut produire le meilleur ou le pire, tout dépend de la façon dont il est utilisé. Certains utilisent Internet non pour développer l'intelligence collective, mais pour la rentabilité économique, le buzz, la diffusion d'une idéologie. L'intelligence collective se travaille ; la faire émerger est un métier. L'exemple de la loi pour une République numérique nous rend optimistes. Lorsque l'on pose les bonnes questions et que chacun peut s'exprimer dans un cadre à la fois contrôlé et intelligent, les résultats sont extraordinaires. Des systèmes autogérés, comme Wikipédia, associant des millions de personnes, donnent des résultats remarquables !

Debut de section - Permalien
Stéphane Vincent

L'intelligence collective peut aussi se traiter à petite échelle. Loin de la course au volume, à la concertation avec la terre entière, nous nous rendons en immersion dans un village ou un quartier pendant quelques semaines : c'est la condition pour parvenir à une compréhension profonde de la situation. Cette démarche relève de l'ethnologie ou de la sociologie de terrain, elle est le contraire du buzz ! Nous allons à la rencontre de gens qui ne sont pas dans le système et nous construisons ainsi des contrefeux, aux côtés des moyens offerts par la technologie. Pourquoi des personnes ne réclament-elles pas le revenu de solidarité active (RSA) auquel pourtant elles ont droit ? Pour le comprendre, il faut aller les voir. C'est en créant la confiance que l'on peut poser la question et obtenir des réponses. J'appelle donc à un renouveau des sciences humaines et sociales. Elles doivent se réinventer, développer de nouvelles formes de « recherche-action ». Les solutions ne se trouvent pas exclusivement sur les supports numériques !

Debut de section - Permalien
Cyril Lage, fondateur de Parlement et citoyens

Aucune civic tech ne vous dira que la solution se trouve dans l'Internet ! C'est un outil, une brique.

Je veux dire un mot des ateliers-relais que nous avons créés pour les populations éloignées des réseaux. L'une de nos premières expérimentations avec le Conseil national du numérique a également consisté à monter une plateforme numérique comprenant différents niveaux, dont un très simple, consistant à choisir entre « je suis d'accord », « je suis mitigé » et « je ne suis pas d'accord », sans nécessité de développer une thèse.

À mon sens, la question essentielle est : comment garantir un droit égal pour tous les citoyens à participer à la décision, quel que soit le mode par lequel chacun s'exprime ? Il importe de veiller à éviter le favoritisme, grâce à la transparence des contributions. L'intelligence collective peut sembler une expression de marketing ; il ne faut pas oublier l'intelligence individuelle, dans ces processus... Lors de la consultation menée par Joël Labbé, un individu a vu une faille dans le dispositif, les collectivités territoriales pouvant échapper à leur obligation par l'externalisation. Preuve que l'on construit à la fois collectivement et individuellement. Ce qui compte, c'est le processus, ce ne sont pas les moyens.

Debut de section - Permalien
François Massot, administrateur de Regards citoyens

Le numérique n'est effectivement pas la solution unique, il y en a beaucoup d'autres ! Un citoyen expert inconnu peut faire valoir sa connaissance, comme pour la loi pour une République numérique, et faire connaître ses réflexions. En outre, des communautés de personnes se créent à cette occasion autour de certains thèmes ; elles peuvent faire émerger des idées, qui pourront être retenues. Il y a aussi des garanties à donner, de neutralité et de transparence des plateformes.

À titre personnel, je pense que les fake news dépassent le cadre des bulles d'information et le numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Combien de personnes ont-elles été consultées sur la loi pour une République numérique ? Vaut-il mieux demander des propositions anonymes ou signées ? Si de nombreuses contributions sont déposées, comment doivent-elles être traitées ? Avec un algorithme ? Et quel est le coût d'une consultation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Forissier

Vos initiatives sont très intéressantes. Vous avez montré que l'enjeu n'est pas l'outil, mais son usage. Je suis élu d'un territoire qui a connu la construction d'un aéroport, d'un stade de 60 000 places, de deux autoroutes et d'une gare TGV et nous avons à venir la construction de la ligne Lyon-Turin et le contournement ferroviaire. Ma commune est passée de 1 000 habitants au début du XXe siècle à 35 000 aujourd'hui et pourrait grossir jusqu'à 60 000 habitants dans l'avenir. J'ai accepté qu'y soient implantés un établissement pénitentiaire pour mineurs, puis une mosquée ; or j'ai été réélu au premier tour. Tout dépend de la confiance entre les citoyens et leurs élus ; tout est dans la manière dont on aborde un sujet.

L'école de la République ne règle pas la difficulté de l'égalité des chances à la sortie et nos compatriotes ne sont pas préparés à devenir des citoyens. Le périmètre de l'intérêt général est variable : l'autoroute qui traverse un territoire est supportable par la population si une sortie est prévue à peu de distance de leur domicile ; sinon, elle peut poser problème. Il faut régler tous ces détails. La concertation doit avoir lieu au stade de l'idée, très en amont.

J'ai participé à des débats publics. Ils débouchent sur de la frustration quand la décision est inchangée quelles que soient les opinions exprimées.

Comment former les Français à devenir des citoyens ? Je pensais jadis que la démocratie était naturelle. Je crois aujourd'hui qu'elle est un idéal impossible à atteindre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Nous en sommes tous d'accord, la démocratie doit évoluer, comme évoluent aussi les méthodes de consultation, les médias et les réseaux sociaux. Le rapporteur vous a plutôt interrogés sur les outils, je me concentrerai sur les sujets. On observe une montée des populismes. En effet, les pétitions lancées ici et là sont parfois effrayantes, leur contenu témoignant d'un manque criant d'information. Sur une question d'urbanisme, il est facile de réunir les habitants d'une commune et d'améliorer les projets par les remarques de chacun. En matière scientifique, en revanche, sur les vaccins ou les organismes génétiquement modifiés (OGM), des avis renient les connaissances établies. À ce compte-là, l'invention de Pasteur resterait, peut-être, inexploitée aujourd'hui ! Les citoyens ne possèdent pas toutes les données, ne les maîtrisent pas en profondeur. Comment s'éloigner des populismes ? Les médias peuvent vendre de la peur et les gens signent la pétition...

Debut de section - Permalien
Florent Guignard, vice-président de Démocratie ouverte

Quelle est la place des médias dans le débat public : au service de qui, de quoi, sont-ils ? Forment-ils les Français à devenir des citoyens responsables, à s'engager ? Aujourd'hui, le système des médias est financé en partie par l'État ; de nombreux intérêts privés investissent également beaucoup d'argent, souvent à perte, pour des raisons idéologiques. Cependant certains médias innovants s'efforcent de contribuer à la formation et à la participation citoyennes, mais ils ont du mal à trouver les financements. Sans doute faut-il revoir les critères d'attribution des aides financières.

Quel est le coût d'une consultation ? C'est difficile à évaluer. Plus les participations seront nombreuses, plus le coût sera réduit. Au reste, je parlerais plutôt d'investissement pour la démocratie que de coût.

Debut de section - Permalien
Stéphane Vincent

Sur la formation des citoyens, vous auriez pu entendre des associations et mouvements telles que Pouvoir d'agir, dans la sphère de l'éducation populaire, qui apprend aux personnes à prendre la parole en public, à développer des arguments, etc. Hélas, ces mouvements reçoivent peu de soutiens financiers. Personne n'investit dans l'innovation démocratique.

Les pouvoirs publics doivent considérer les citoyens comme des acteurs capables, non comme des consommateurs de services publics et de politiques publiques. Le courant de l'innovation sociale reconnaît l'expertise des utilisateurs et des citoyens : le médecin doit admettre à présent que le patient se renseigne, teste des traitements, possède lui aussi un savoir. La loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) du 7 août 2015, avec la notion de droits culturels, va dans le même sens.

Debut de section - Permalien
Cyril Lage, fondateur de Parlement et citoyens

Je suis farouchement opposé à l'utilisation d'algorithmes pour traiter les contributions, au nom de la crédibilité du processus. Une machine traiterait les contributions des citoyens, tandis que les lobbies sont reçus dans le cadre d'auditions parlementaires ? Il faut le même traitement pour ceux qui ont la possibilité de vous rencontrer et ceux qui font une contribution par la voie numérique. Nous avons en revanche songé à un back-office qui cartographierait les contributions, en établissant des familles d'arguments. Cette cartographie serait ensuite rendue publique. Quant au coût, il est au moins cent fois inférieur aux charges salariales des collaborateurs qui répondent chacun, en silo, à tous les mails que vous recevez !

La démocratie est un système assez fou : personne n'est d'accord sur rien, mais l'on s'impose de voter une loi pour tous. Oui, c'est un idéal impossible à atteindre ! L'éducation, c'est apprendre à respecter les points de vue, même si l'on n'est pas d'accord. Dans les prochains mois, nous mènerons une expérimentation dans des collèges et des lycées pour faire vivre la citoyenneté, par la confrontation à la parole des autres et la recherche, ensemble, de solutions.

Les populismes naissent d'une distance qui s'est créée entre les élites et les citoyens, avec au milieu les médias, qui ne servent plus de relais pour faire remonter les attentes ou purger les fake news.

Debut de section - Permalien
François Massot, administrateur de Regards citoyens

Les outils participatifs ont un rôle à jouer dans la formation des citoyens. Et ils sont à même de réduire la fracture entre les décideurs publics et les citoyens, malgré le bruit des médias. La participation peut donc renouveler la démocratie... à quelques conditions. Car aujourd'hui, elle s'applique à peu de sujets : l'expérience autour du projet de loi pour une République numérique a causé beaucoup de déceptions, car l'exécutif a repris peu de contributions. Que de surprises aussi lors de la publication de certains décrets d'application, les citoyens n'ont plus leur mot à dire lors de leur élaboration...

Debut de section - Permalien
François Massot, administrateur de Regards citoyens

Dans ses fonctions de contrôle, également, le Parlement pourrait solliciter la participation des citoyens experts. Cela les formerait et les rapprocherait de la décision publique.

Le minimum est de répondre à ceux qui s'expriment. Si l'on prend le temps de présenter une contribution, ne recevoir aucune réponse entraîne une défiance, voire une révolte. Car la participation est un investissement !

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Place aux femmes, enfin, dans cette réunion d'hommes... Les objectifs de notre mission se multiplient. Au-delà de la participation des citoyens, la question est posée de l'efficience des politiques publiques. J'ai apprécié à cet égard les propos de M. Stéphane Vincent.

Dans un monde complexe, on ne peut pas tout simplifier, il faut gérer la complexité. Il n'y a pas de recettes, par exemple pour ce qui concerne les collectivités territoriales. Une grande rigueur méthodologique est indispensable. La méthode est une question de fond, une question politique.

Quid de l'éthique ? Vous avez parlé d'indépendance, de garanties... J'ajouterai la protection des données. Ce qui se passe aux États-Unis est très dangereux, les Français, eux, ont heureusement un vrai souci de la protection des données.

Il est temps de faire en sorte que les expérimentations sur les projets aient un réel impact dans nos collectivités territoriales. Au plan national, la belle démarche sur la loi pour une République numérique a toutefois donné lieu à une traçabilité et à un feed-back insuffisants.

Faut-il changer structurellement l'organisation de nos institutions, afin que l'élaboration et l'application des lois soient rendues plus transparentes et plus efficientes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Je tenais à vous remercier, le groupe écologiste a profité de votre expertise d'usage ; grâce à vous, nous avons augmenté notre force de frappe. Cela n'a pas toujours été agréable, mais le Parlement a globalement bénéficié de vos travaux, notamment pour la dotation parlementaire ou l'établissement des statistiques sur l'absentéisme. Le 26 septembre, je serai heureuse de travailler de nouveau avec vous, quand je serai de retour dans ma salle de classe...

Une question sur la mixité et la parité : pourquoi tous nos invités sont-ils des hommes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

M. Cyril Lage insiste sur la nécessité de faire évoluer la fabrication de la décision en raison d'une élévation du niveau d'éducation. Je partage cet avis. Toutefois, il se produit une autre évolution, à laquelle les élus locaux sont confrontés, c'est la montée de l'individualisme - le not in my backyard. Autrement dit, l'intérêt général ne doit pas contrarier mon intérêt particulier.

Comme ma collègue, je suis frappée qu'aucun de nos invités ne soit une femme. La démocratie et la fabrication de la décision publique ne les intéressent-elles pas ?

M. Stéphane Guignard a présenté un avis personnel sur certains points. C'est sans doute que les avis sont multiples au sein de son collectif. Telle est précisément ma question en tant qu'élue : comment transformer des avis divers, tous très valables, en un seul avis pour prendre une décision ?

La pétition fonctionne aussi parce que l'on n'ose pas refuser sa signature à un voisin. Cela interroge. En ce qui concerne l'association des citoyens - et non des individus - à la décision, il reste à savoir comment l'on conduit les citoyens à se forger une opinion.

Vous avez évoqué les suites des consultations : je voudrais dire un mot sur l'aéroport Notre-Dame des Landes. Le contrôle de la situation échappait à tout le monde et le référendum a donc paru une bonne idée. Son résultat a été clair. Or, depuis, silence absolu ! Un tel exercice de la démocratie directe ne dessert-il pas le principe de la concertation pour associer les citoyens à la prise de décision ? Les élus n'utilisent-ils pas la consultation pour se défausser d'un problème ?

Debut de section - Permalien
Florent Guignard, vice-président de Démocratie ouverte

Je ne peux que comprendre que vous abordiez le thème du sexisme lorsque les personnes qui viennent vous rencontrer sont toutes des hommes. Je le déplore et m'en excuse. C'est un exemple d'une société qui demeure trop sexiste alors que les femmes sont effectivement aussi intéressées par ces sujets.

S'agissant des valeurs, l'enjeu éthique est certain. On constate un rapprochement entre les civic techs et l'entrepreneuriat social et solidaire. Il existe, par exemple, un label « entreprise sociale et solidaire de presse », qui représente hélas encore peu de chose. Une labellisation des projets serait bienvenue, le législateur pourrait y contribuer.

Debut de section - Permalien
Stéphane Vincent

Sur l'éthique, le problème est de décrypter les idéologies. Il importe de savoir d'où chacun parle.

Aujourd'hui, madame Bouchoux, nous sommes ici cinq hommes, mais je précise que l'équipe de neuf personnes à laquelle j'appartiens en compte seulement deux. C'est un effet d'optique.

Debut de section - Permalien
Cyril Lage, fondateur de Parlement et citoyens

Le statut ne fait pas la vertu : chef d'entreprise ou acteur associatif, la vertu se constate aux actes, aux résultats. Sinon on en arrive à dire que tout élu est pourri, que tout entrepreneur est un patron voyou...

On peut juger insuffisante l'opération de participation sur la loi pour une République numérique, mais c'était un début. Trois amis ont remporté ce marché public de 60 000 euros et monté cette consultation en installant un bureau de fortune dans leur garage. Ils ont eu moins de trois semaines pour améliorer la méthodologie. Grâce au portage quasi sacrificiel du projet, les résultats ont été énormes. Il faut encore progresser.

Debut de section - Permalien
Benjamin Ooghe-Tabanou, administrateur de Regards citoyens

Regards citoyens a un conseil d'administration composé à 80 % de développeurs informatiques, une activité où les femmes y sont sous-représentées. Néanmoins, nous avons accueilli une première administratrice récemment, et je suis certain qu'elle participera bientôt à une audition.

Je veux dire toute l'importance de la neutralité et de la transparence. Je suis attristé que Cyril Lage qualifie cet élément de « dogmatisme ». En effet, tout l'enjeu est de respecter les valeurs éthiques. Il faut évaluer la méthode et pour cela, comprendre comment fonctionne le logiciel. Sinon, on reste dans l'opacité, qui crée la défiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Messieurs, nous vous remercions vivement.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 15 h 05.