La réunion est ouverte à 17 h 05.
Mes chers collègues, nous terminons cette journée de travaux par l'audition de M. M. René-Louis Perrier, président de l'éco-organisme Ecologic.
Nous vous souhaitons la bienvenue, monsieur le président, et vous remercions d'avoir répondu favorablement à notre sollicitation.
Je vous rappelle que notre mission d'information, créée à la demande du groupe écologiste, porte sur l'inventaire et le devenir des matériaux et composants des téléphones mobiles. Nous avons commencé nos travaux au tout début du mois de juillet et nous devons impérativement les achever à la fin du mois de septembre.
Nous avons souhaité entendre les responsables des éco-organismes spécialisés dans les déchets d'équipements électriques et électroniques, les DEEE, après avoir entendu les fabricants et les opérateurs de téléphonie mobile et avant d'entendre les professionnels de la gestion des déchets. Nous souhaitons en effet pouvoir analyser l'ensemble du cycle de vie des téléphones mobiles.
Nous sommes d'autant plus heureux de vous entendre que, au cours des auditions que nous avons déjà effectuées, beaucoup de nos interlocuteurs nous ont indiqué que les éco-organismes seraient en mesure de répondre à nombre de nos questions, notamment pour ce qui concerne les composants des téléphones mobiles, le niveau de la collecte des téléphones mobiles usagés ou le sort de ces derniers.
Je vais donc vous laisser la parole, monsieur le président, avant que Mme la rapporteure et les autres membres de la mission d'information ne vous interrogent.
Je vous remercie de votre invitation, monsieur le président. J'ai reçu de votre part une liste de questions, auxquelles je répondrai dans l'ordre.
Votre première question porte sur les composants et les matériaux utilisés dans les téléphones portables. On y trouve essentiellement du cuivre, du fer et de l'aluminium. Ces métaux, qui font aussi la valeur des téléphones en termes de recyclage, sont collectés dans la plupart des équipements électriques et électroniques, même s'ils sont présents en quantité plus importante dans les téléphones portables, qui sont des produits très compacts et très valorisables.
Le cuivre fait l'essentiel de la valeur d'un téléphone, qui contient aussi des métaux précieux, en particulier de l'or sur les cartes électroniques, et d'autres matières critiques stratégiques que l'on peut recycler.
Ces produits, s'ils sont recyclés, sont affinés, l'affinage étant la phase ultime de recyclage au cours de laquelle sont extraites les matières premières. Elle se déroule dans l'un des grands centres d'affinage dont vous avez probablement entendu parler - Umicore en Belgique, Boliden en Suède et Aurubis en Allemagne.
En France, certains sites effectuent un prétraitement, mais l'affinage, qui permet d'extraire la matière première, est réalisé sur ces grands sites, lesquels ont consenti de gros investissements et traitent les flux de notre collecte.
Autre point : les téléphones mobiles ne représentent pas de danger particulier. Ils ne contiennent a priori pas de produits toxiques, à l'exception peut-être des batteries au lithium, qui peuvent s'enflammer lorsqu'elles sont encore chargées, ce qui peut poser problème dans les centres de traitement de la filière DEEE.
Votre deuxième question porte sur le volume des téléphones portables mis sur le marché chaque année. Il est de l'ordre de 25 à 30 millions d'appareils, soit quelque 3 000 tonnes. Par comparaison, la filière des produits ménagers met chaque année sur le marché 1,3 million de tonnes environ.
Le gisement potentiel de déchets représente approximativement ce qui est mis sur le marché. Sur un marché mature comme celui des téléphones mobiles, à un produit entrant devrait en principe correspondre un produit sortant. En réalité, ce n'est pas totalement le cas, car il existe un attachement particulier à ces produits, qui, souvent, sont conservés dans les tiroirs, probablement pour être réutilisés en cas de panne du nouvel équipement.
Ce réflexe est au demeurant assez largement inutile : les technologies évoluant très vite, les produits deviennent rapidement obsolètes. Les éco-organismes vont devoir faire des efforts pour les faire sortir des tiroirs.
En outre, ces produits ayant souvent une valeur de deuxième main, certains d'entre eux sont revendus et exportés dans des filières qui ne sont pas totalement contrôlées.
Le potentiel de gisement équivaut donc théoriquement aux 3 000 tonnes mises sur le marché, mais, en pratique, la filière DEEE voit très peu de ces téléphones.
En réponse à votre troisième question, l'éco-organisme que je préside et les éco-organismes en général relèvent d'une filière à responsabilité élargie du producteur, dite « REP », qui s'appuie sur le principe pollueur-payeur. Il s'agit de demander aux producteurs de contribuer, lors de la vente de leurs produits sur le marché français, au recyclage de ces équipements. Grâce à un système qui s'apparente un peu au système de retraite par répartition, les producteurs actifs financent l'ensemble des déchets collectés. Ils constituent éventuellement une marge pour des activités futures, puisque nous sommes des organismes à but non lucratif.
L'idée est donc que les producteurs financent l'intégralité de la collecte des déchets, laquelle s'effectue selon un cahier des charges établi par les pouvoirs publics, essentiellement par la direction générale de la prévention des risques, la DGPR, qui relève du ministère de l'environnement. Celle-ci définit le taux de retour, c'est-à-dire le ratio entre les déchets que l'on collecte et les produits qui sont mis sur le marché. Pour la filière DEEE, dont je rappelle qu'elle met sur le marché 1,3 million de tonnes environ chaque année, le taux de retour est fixé à 45 % pour 2016, soit un peu plus de 550 000 tonnes.
Nous sommes des sociétés de droit privé dont le rôle est de satisfaire aux obligations des producteurs, qui sont responsables de la fin de vie des produits qu'ils mettent sur le marché. Nous bénéficions d'un agrément des pouvoirs publics. Un cahier des charges définit nos objectifs annuels sur une durée de six ans et nos contraintes en termes de communication, de modes de collecte, etc.
Votre quatrième question porte sur le volume de déchets collectés et traités. L'ensemble de la filière a traité 575 000 tonnes de déchets en 2015 et devrait en traiter un peu plus de 600 000 tonnes en 2016.
Le réemploi, dans la filière DEEE, s'applique essentiellement au gros électroménager. On parle de réemploi lorsqu'une personne revend son produit à une autre personne. Les éco-organismes sont plutôt concernés par la réutilisation, lorsque l'appareil a été jeté et qu'il est récupéré par l'éco-organisme pour être remis en fonction.
La réutilisation représente de l'ordre de 1 % de la collecte et concerne surtout le gros électroménager. Les quantités sont faibles sur les petits appareils en mélange, les PAM, dont font partie les téléphones portables. Elles ne sont pas mesurées aujourd'hui et il n'existe pas de filières spécifiques pour le réemploi de ces produits.
En termes de valorisation, nous dépassons les objectifs de la directive européenne transcrite dans le droit français. Nous sommes à environ 80 % de recyclage et entre 5 % et 10 % de valorisation énergétique.
La cinquième question porte sur la part des déchets exportés pour être traités et sur le poids des filières illégales. C'est un problème très difficile, que l'on cherche à résoudre. Une étude avait été conduite en 2014, soutenue par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), pour essayer de comprendre quel était le devenir des déchets d'équipements électriques et électroniques en général. À l'époque, la filière des DEEE en traitait un gros tiers, soit 7 kilogrammes sur une vingtaine de kilogrammes environ par habitant. Un peu moins de la moitié, soit 9 kilogrammes environ, était pris en charge par des filières historiques informelles. Les activités de recyclage et de réemploi préexistaient en effet à la création de la filière DEEE et elles ont continué sur les déchets ayant une valeur ajoutée significative. Dans ces activités de recyclage ou de réemploi historiques, une partie des déchets est exportée, et il est encore difficile aujourd'hui d'avancer un chiffre. Pour moi, ce point n'est pas encore complètement éclairci.
Depuis 2014, de gros progrès ont toutefois été accomplis par la filière DEEE, qui collecte un plus grand nombre de déchets : nous étions à 7 kilogrammes par habitant ; nous sommes désormais à 8,5 kilogrammes et nous tendons vers les 9 kilogrammes. Nous intégrons par ailleurs les flux dans la filière DEEE, ce qui permet d'augmenter le contrôle et de vérifier si ces produits sont exportés. En règle générale, mis à part certains traitements spéciaux, 99 % des déchets de la filière DEEE sont traités en France.
Cette étude de 2014 révélait enfin un dernier point intéressant : sur 21 kilogrammes de déchets par habitant dans la filière, entre un et deux kilogrammes étaient réellement perdus, c'est-à-dire qu'ils finissaient enfouis ou incinérés. Ce chiffre est relativement faible et explique que, dans cette nouvelle période d'agrément, l'accent soit mis sur le contrôle de ces filières historiques. Il s'agit d'intégrer dans la filière DEEE les flux « historiques » sur les produits à forte valeur ajoutée, notamment les téléphones portables.
Je ne suis toutefois pas en mesure de vous dire quelle est la part des filières illégales. Il en existe, c'est évident, et certaines exportations ne devraient pas avoir lieu, puisqu'on retrouve des déchets en Afrique ou en Chine.
Pour répondre à la sixième question, nous constatons un effet positif de la modulation des éco-contributions, notamment en termes de développement de l'éco-conception. Le cahier des charges de la filière DEEE comprend une grille de modulation de la contribution, laquelle peut varier de plus ou moins 20 % en fonction de critères environnementaux - par exemple la conservation de pièces détachées pendant onze ans pour les machines à laver, ou l'utilisation de plastique recyclé dans certains produits. Cela donne lieu à un bonus de 20 % de la contribution, sachant que celle-ci est de l'ordre de 7 euros sur une machine à laver. Sur les téléphones portables, la modulation est de 100 %, la contribution pouvant varier de 1 centime d'euros à 2 centimes d'euros selon l'éco-conception de l'appareil - par exemple l'utilisation ou non d'un chargeur universel. L'impact n'est certes pas très important d'un point de vue financier, mais il peut l'être en termes d'image, les producteurs ne souhaitant pas qu'un malus soit appliqué à l'un de leurs produits.
À votre septième question - compte tenu du caractère international des entreprises mettant sur le marché des téléphones portables, ne faudrait-il pas envisager une action dans le cadre d'une filière européenne ? -, je ne peux que répondre par l'affirmative. Une des difficultés des filières DEEE en Europe tient au caractère variable des règles de traitement d'un État membre à l'autre. Ces distorsions favorisent le développement de canaux orientant les produits vers d'autres pays, notamment la Roumanie. C'est particulièrement vrai pour les téléphones portables, qui sont faciles à transporter. Il me semble d'ailleurs qu'un certain nombre d'entreprises de recyclage de téléphones portables ont externalisé leurs opérations en vue du réemploi de ces appareils dans les pays d'Europe de l'Est.
Il y a certainement des choses à faire au niveau européen, même si je sais que ce n'est pas facile d'agir. Quoi qu'il en soit, lorsque nous examinons les règles en matière de recyclage, nous devons toujours avoir en tête une vision industrielle et européenne, car toute distorsion nuit grandement à notre efficacité.
Votre huitième question porte sur les freins au développement du recyclage des téléphones portables en France.
Les téléphones étant des déchets peu encombrants, ils sont moins jetés que les machines à laver, lesquelles finissent en général à la déchetterie. Les téléphones portables, eux, restent dans les tiroirs. Un travail de sensibilisation du consommateur au recyclage est nécessaire à cet égard, sachant que, en tant qu'éco-organisme, nous sommes en concurrence avec des structures privées qui proposent sur internet de racheter les téléphones à des prix intéressants. Or nous ne pouvons pas entrer en concurrence avec ces structures, car nous n'avons pas du tout d'exutoire de réemploi, en particulier dans les pays étrangers. Il faut convaincre le consommateur de remettre son téléphone à la filière, même s'il pourrait encore bénéficier de sa valeur résiduelle. Ce message étant un peu difficile à faire passer, il faut jouer sur la valeur environnementale du déchet, plus que sur sa valeur économique.
À ma connaissance, il n'existe ni frein réglementaire ni frein technique au recyclage des téléphones portables. Si les téléphones portables étaient collectés, la meilleure solution pour les valoriser serait de les envoyer chez Umicore, mais on perdrait alors la valeur, qui serait générée en Belgique. Si Umicore fonctionne extrêmement bien et réalise des marges extraordinaires, c'est d'une certaine manière grâce à nos produits. Il est dommage qu'il n'existe pas en France un équivalent de cette entreprise.
Dans ce cas, pourquoi a-t-il disparu ?
Umicore s'est entièrement restructurée. Industrie minière à l'origine, elle s'est spécialisée dans le recyclage des déchets et a adopté un positionnement agressif.
La création d'une entreprise semblable nécessiterait d'importants investissements. En outre, la compétence est peut-être perdue en France. Il est donc peut-être trop tard. Cela étant dit, peut-être faudrait-il en effet étudier ce modèle.
Une telle décision relève d'une politique industrielle. Le problème d'une politique industrielle, c'est qu'il faut qu'elle soit un peu orientée, mais pas trop, afin que les entreprises ne perdent pas la manoeuvrabilité qui leur est nécessaire.
Cette question n'entre-t-elle pas dans le cadre de la REP et ne relève-t-elle pas à ce titre de votre responsabilité ?
Notre mission est de récupérer les téléphones portables, non de les recycler. Nous collectons les déchets et nous les orientons ensuite vers les bons canaux de dépollution et de revalorisation. Nous assurons la logistique de proximité, en mettant en place des points de collecte dont nous faisons la récolte régulièrement. Nous effectuons ensuite un tri préalable. Dans le cas des téléphones portables par exemple, nous extrayons les accumulateurs, que nous envoyons vers la filière piles et accumulateurs. Ces déchets ont alors une forte valeur économique, de l'ordre de 2 000 euros à 3 000 euros la tonne, contre 150 euros ou 200 euros la tonne pour d'autres métaux.
Ensuite, c'est un autre modèle économique, un autre métier. Le métier d'affineur est un métier industriel, économique. Pour qu'une entreprise comme Umicore puisse exister en France, il faut créer les conditions pour qu'un industriel ait envie de s'installer en tant qu'affineur et puisse gagner de l'argent. Si une telle entreprise venait à voir le jour, nous orienterons alors nos déchets vers elle, mais ce n'est pas nous qui la créerons.
D'autres éco-organismes dans d'autres domaines - je pense à Éco-mobilier, l'éco-organisme de la filière du meuble - s'occupent de tout de A à Z, y compris du business model. Ne disposez-vous pas vous aussi d'une certaine latitude ?
Ecologic est une petite structure dont le métier est d'atteindre des objectifs de collecte fixés par les pouvoirs publics. En tant qu'éco-organisme, nous ne sommes pas capables de gérer un investissement massif dans une industrie lourde et de créer un centre tel Umicore. Nous ne sommes pas compétents dans ce domaine.
La filière des DEEE a permis le développement d'une dizaine de centres de traitement de réfrigérateurs ou de petits appareils, mais ils sont pilotés par Veolia, SITA ou Derichebourg, dont c'est le métier. Notre rôle est uniquement d'orienter les flux vers ces acteurs, mais ce sont eux qui procèdent aux investissements. L'affinage est un métier très difficile, exercé seulement par une dizaine d'entreprises dans le monde, essentiellement en Europe et au Japon.
Enfin, le risque d'une approche monopolistique, centralisée, comme celle d'Éco-mobilier, c'est que, en l'absence de concurrence, elle ne débouche sur des solutions moins optimales que celles de nos camarades européens, qui, eux, travaillent sur un marché plus ouvert. Dans la filière DEEE, l'éco-organisme qui s'occupe du photovoltaïque envisage d'investir dans des unités de traitement en France.
Il est possible de créer un concurrent d'Umicore, à condition d'en avoir les moyens. Il faut que, à moyen ou long terme, cette entreprise soit compétitive et que son rendement soit supérieur à celui d'Umicore, sinon on ne lui rendra pas service. On aura juste rapatrié un peu de valeur en France, ce qui est certes intéressant. Pour que cette entreprise soit compétitive, j'y insiste, il lui faut un concurrent. Elle ne doit pas être seule et décider de manière totalement autonome de ses investissements.
Le défaut des filières REP, c'est qu'elles constituent souvent des monopoles. À cet égard, Ecologic fait figure d'exception, car elle est en concurrence avec la société Eco8systèmes, dont elle est un petit concurrent. Cette tendance au monopole peut assécher le dispositif en termes industriels. Il faut donc être prudent.
Il faut aller dans la direction que vous évoquez, c'est une bonne idée, en gardant toutefois en tête que si vous favorisez une solution unique, vous n'aurez aucun point de comparaison vous permettant de vous assurer que le chemin suivi est le bon. On risque alors une désillusion d'ici cinq ou dix ans, alors que des investissements importants auront été réalisés.
Une concurrence doit exister entre les industriels, qui doivent être maîtres de leurs décisions et de leurs investissements. Si la solution était purement planifiée, elle pourrait ne pas être pérenne.
Votre dernière question portait sur les moyens d'accroître le volume de téléphones portables collectés. Une consigne fonctionnerait certainement, l'économie étant un moteur fort pour récupérer des objets. L'instauration d'une consigne de 5 euros, appliquée à 25 ou 30 millions de téléphones, rapporterait 150 millions d'euros annuels. Cela étant dit, il serait compliqué de restituer cet argent au consommateur. Beaucoup d'argent circulerait, ce qui serait dangereux.
Les batteries au lithium sont-elles systématiquement utilisées dans les téléphones portables et dans quelles proportions ?
Toutes les batteries sont au lithium aujourd'hui et elles sont inévitables dans les téléphones portables.
Quelles batteries sont utilisées : des batteries classiques ou des batteries lithium-polymère, moins pourvoyeuses d'énergie, mais plus sûres ?
Je ne connais pas les détails techniques. Vous les connaissez certainement mieux que moi.
Les batteries au lithium ne sont pas dangereuses en règle générale. Toutefois, dans nos processus, les produits étant concentrés, manipulés parfois sans délicatesse, et stockés en tas, les batteries peuvent provoquer des départs de feu lorsqu'elles contiennent encore de l'énergie, car le lithium est un produit très inflammable. C'est un problème pour la filière, mais je ne suis pas sûr que c'en soit un pour la société.
Récemment, le groupe Paprec, qui avait investi dans un site de traitement des PAM, a fait les frais de son manque d'expérience dans le métier. D'autres sites, plus expérimentés, semblent contrôler un peu mieux ce problème. Le seul danger que présentent les matériaux utilisés dans les téléphones portables, selon moi, c'est celui-là.
Vous dites que les téléphones ne contiennent pas de produits toxiques. Or, si le processus de recyclage est mal mené, cela pose des problèmes.
C'est le cas pour tous les équipements électriques.
Eux ne contiennent pas de tantale par exemple !
De nombreux intervenants que nous avons auditionnés ont évoqué la filière qu'Orange aurait mise en place avec Emmaüs. Il s'agirait d'une filière de retour de l'Afrique vers la France de téléphones ayant achevé leur seconde vie, lesquels seraient envoyés à des filières de recyclage. Quel est l'intérêt pour Orange ?
Ce sont probablement les Ateliers du bocage qui font cela. Ces Ateliers font du réemploi. Le marché pour le réemploi étant plutôt en Afrique, quand on y expédie un produit de deuxième main, on se débarrasse en fait d'un déchet. L'idée, qui est bonne, sincère en tout cas, est de rapatrier le déchet en fin de vie afin de ne pas le faire supporter au continent africain. C'est assez onéreux.
Tout à fait.
Le mieux serait de mettre en place des sites de traitement en Afrique. Des tentatives ont déjà été faites, par exemple en informatique. Hewlett-Packard avait ainsi commencé à développer des sites de traitement en Afrique afin de prendre en charge les déchets qui y sont souvent exportés de manière illégale. Le problème, c'est qu'il est très difficile d'alimenter de tels sites, toujours pour les mêmes raisons : les flux sont détournés avant même d'arriver sur les sites de traitement.
En tant qu'éco-organisme, vous percevez des éco-contributions. Sont-elles payées par tout le monde ? Quelle somme gérez-vous et qu'en faites-vous ? Avez-vous des fonds de roulement importants ?
Le téléphone portable représente-t-il une activité annexe dans votre filière ? Ne faudrait-il pas créer une filière autonome afin de collecter plus de téléphones ?
Le téléphone portable, comme d'autres produits à forte valeur, par exemple les PC portables, nous reviennent peu.
Créer une filière à part pour les téléphones portables serait de mon point de vue une erreur, alors qu'il existe déjà de multiples filières. Cela impliquerait d'extraire ce flux des DEEE, d'en faire un flux spécifique et de mettre en place une infrastructure dédiée. Je connais la question, car elle s'est posée concernant les piles. Or le nerf de la guerre des filières REP, c'est la concentration des flux. Le rôle des éco-organismes est de convaincre les détenteurs de faire le bon geste de tri afin d'être sûrs de la qualité du traitement. On ne peut pas leur expliquer qu'il existe un point de collecte pour le téléphone portable, un pour les PC, un autre pour les machines à laver, etc.
Le problème de fond, c'est qu'on éclate la logistique alors qu'il faut la mutualiser, y compris pour des raisons environnementales. La logistique des retours représente 80 % des coûts de la filière.
Quasiment tout le monde paie.
Dans une filière REP, les producteurs sont responsables du traitement des déchets, par flux ou en général, au prorata de leur mise sur le marché. On distingue quatre flux dans cette filière : les petits appareils en mélange, le gros électroménager -froid et hors froid, soit deux filières de traitement différentes - et les écrans.
L'éco-participation d'Apple correspond à sa part de marché. Apple finance ainsi le traitement des petits appareils en mélange provenant de déchetteries, lesquels ne sont pas forcément des téléphones portables ni des produits Apple. La contribution d'Apple est faible - un centime par produit -, car les produits qu'ils mettent sur le marché sont petits, un téléphone pesant 150 ou 200 grammes.
Pourriez-vous revenir sur le processus de traitement des téléphones portables ?
Il faut distinguer deux cas de figure.
On trouve des portables dans le flux générique, mélangés à d'autres petits appareils - fers à repasser, radios, grille-pains. Ils sont alors traités dans la filière PAM, qui est une filière standard. Une dépollution préalable est effectuée, la batterie est enlevée. Ensuite, le produit est broyé assez grossièrement, les matières grossièrement séparées et réparties en différentes fractions -il existe une fraction ferreuse, une fraction non ferreuse, une fraction « cartes électroniques » et une fraction « plastique ». Les cartes électroniques suivent un autre chemin et finissent en général chez Umicore.
Ceux qui font de la collecte pure de téléphones portables, comme Orange - ce n'est pas le cas d'Ecologic aujourd'hui -, font de la dépollution, ôtent la pile, qu'ils confient à la filière « piles et accumulateurs », avant d'envoyer le lot de déchets à Umicore. Cette entreprise met le tout dans un four afin de séparer les métaux. Elle obtient alors des métaux purs : de l'or, du platine, du cuivre. C'est un processus lourd, qui n'a rien à voir avec les opérations de broyage et de séparation des fractions.
Vous avez évoqué Umicore. Existe-t-il d'autres entreprises de ce genre, en particulier en France ?
Outre Umicore, en Belgique, il y a Boliden en Suède et Aurubis en Allemagne.
Il n'y a plus de questions ? Je vous remercie.
La réunion est levée à 18 h 00.