Commission des affaires sociales

Réunion du 7 octobre 2020 à 18h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • ONDAM
  • PLFSS
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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je prie le rapporteur général de prendre place car le ministre Véran a une contrainte d'agenda.

Messieurs les ministres, mes chers collègues, nous recevons cette après-midi M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, et M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, pour la présentation devant notre commission du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, présenté ce matin en conseil des ministres.

Cette audition fait l'objet d'une captation vidéo en vue de sa retransmission en direct sur le site du Sénat. Elle sera consultable en vidéo à la demande.

Nous examinerons le PLFSS en commission le 4 novembre prochain et en séance publique à partir du lundi 9 novembre.

Il s'agit d'un PLFSS inédit, qui présente un déficit des comptes sociaux de plus de 46 milliards d'euros. La sécurité sociale avait affronté la crise de 2008 avec un déficit de près de 10 milliards d'euros et elle n'avait pas retrouvé l'équilibre lorsqu'est survenue la crise du covid.

La crise sanitaire a conduit à un effondrement de recettes et à une augmentation des dépenses, notamment de Santé publique France, agence financée par l'assurance maladie.

Notre commission avait saisi l'ancien premier ministre et les ministres concernés d'une demande de rebudgétisation du financement des agences sanitaires. Nous pensons en effet qu'elles relèvent du domaine régalien, ce que la crise sanitaire a d'ailleurs confirmé. Or le Gouvernement a choisi de maintenir une mission budgétaire « Santé », qui comprend des financements très réduits pour quelques agences et n'a plus de cohérence. Pourrez-vous, messieurs les ministres, justifier ce choix ?

Le Gouvernement a également choisi de mettre des dépenses nouvelles à la charge de la sécurité sociale, avec la création d'une branche autonomie, dont les contours restent assez largement à définir, et d'autres mesures plus ponctuelles. En l'absence de recettes nouvelles, cette branche est de fait financée par un déficit accru de l'assurance maladie et par la dette future. Ne devons-nous pas nourrir de fortes inquiétudes sur la pérennité même de notre modèle social dans ces conditions ?

Je vous laisse la parole, messieurs les ministres, pour présenter votre projet.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

Madame la présidente, permettez-moi de vous féliciter de votre élection en tant que présidente de la commission des affaires sociales et de saluer votre illustre prédécesseur.

À l'Assemblée nationale comme au Sénat, nous avions pris l'habitude de regarder fondre le « trou de la sécu » comme neige au soleil. Des mécanismes de remboursement - l'affectation de recettes, notamment de CSG et de CRDS, à la Cades - nous permettaient d'envisager, ces dernières années, la fin de ce déficit. Hélas, la crise du covid a eu des conséquences sanitaires et budgétaires terribles. Le déséquilibre des comptes de la sécurité sociale est massif. Vous connaissez le choix du Gouvernement : celui de la santé. Finalement, n'est-ce pas la finalité profonde de notre système de protection sociale que de jouer un rôle d'amortisseur pendant les périodes de crise ?

Tout comme le Gouvernement assume ces dépenses, qui déséquilibrent considérablement le budget de la sécurité sociale pour des années, il assume aussi des mesures ambitieuses portées par le PLFSS.

Après le Ségur de la santé, vous allez voter, mesdames, messieurs les sénateurs, la plus forte hausse de salaires - 8,8 milliards d'euros - jamais enregistrée dans l'histoire de l'hôpital.

Dans l'écrasante majorité des cas, les métiers du soin, historiquement sous-rémunérés, sont exercés par des femmes. En augmentant les salaires de 15 % à 20 %, nous procédons à la plus grosse compensation de l'écart salarial entre hommes et femmes dans notre pays.

J'évoquerai également la reprise de dette, le plan d'investissement et des modifications profondes de fonctionnement de l'hôpital. Il nous faudra faire vivre le Ségur de la santé et montrer que la donne a changé.

Au chapitre des grands défis relevés par notre système de protection sociale, il y a la création de la branche autonomie. Je m'étais engagé à la doter d'un milliard d'euros. D'ores et déjà, nous disposons de 2,4 milliards d'euros, notamment avec les revalorisations dans les Ehpad. Nous prendrons également des mesures concernant les aides à domicile.

Les collectivités locales seront des forces motrices d'une politique du grand âge ambitieuse et profondément renouvelée, capable d'absorber le choc démographique qui nous attend.

Le Laroque de l'autonomie viendra enrichir les débats. Il précédera la loi sur l'autonomie que nous attendons tous.

Enfin, le Gouvernement s'était engagé, sous l'égide d'Adrien Taquet, à faire quelque chose pour la famille. Boris Cyrulnik nous a remis son rapport, en insistant sur la nécessité d'allonger le congé paternité, qui passera à 28 jours, dont 7 jours obligatoires. Il s'agit d'une avancée sociale majeure.

Mesdames, messieurs les sénateurs, à situation exceptionnelle, Ondam exceptionnel. À chaque instant, depuis le début de la crise, nous avons pris nos responsabilités : nous préparons l'avenir sereinement, en ne reportant pas sur nos enfants le déséquilibre d'aujourd'hui.

Le choix de rembourser notre dette sociale est confirmé, mais la sortie de crise ne se fera qu'en refondant notre système de régulation. J'ai confié une mission importante au HCAAM, le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, concernant l'Ondam. Les indicateurs tels que l'évolution du taux d'Ondam ne veulent désormais plus dire grand-chose. Je souhaite également que le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale éclaire les discussions en cours.

Fidèles aux engagements de ce gouvernement, de nombreuses mesures de ce PLFSS concernent les territoires. Je me réjouis de pouvoir préciser et enrichir ce texte avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs. C'est un très beau texte !

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, des finances et de la relance, chargé des comptes publics

ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. - Madame la présidente, je m'associe aux félicitations d'Olivier Véran concernant votre élection à la présidence de la commission des affaires sociales. Je remercie également Alain Milon, avec qui j'avais noué des relations de travail et de respect.

L'année 2020 s'est caractérisée par la crise de la covid, qui a entraîné, pour la sécurité sociale, des dépenses supérieures à ce qui était prévu, à hauteur de 15 milliards d'euros. Dans la mesure où 4 milliards d'euros n'ont pas été réellement dépensés, nous avons un solde positif supérieur à 10 milliards d'euros de dépenses. L'Ondam atteint un niveau rarement atteint. L'année prochaine, il sera également particulièrement élevé, à la suite de la première année de pleine application des accords du Ségur de la santé.

L'année 2020 s'achèvera avec un déficit de 44,4 milliards d'euros, soit 39 milliards d'euros de plus que le déficit prévisionnel, qui était évalué à 5,4 milliards d'euros. Cela s'explique non seulement par les dépenses supplémentaires que je viens d'évoquer, mais aussi par une chute des recettes de 32 milliards d'euros, due à une baisse des cotisations issues du secteur privé, de 23 milliards d'euros, à une baisse des recettes fiscales, de 6,2 milliards d'euros, et à un report d'échéances sociales, à hauteur de 6,5 milliards d'euros, pour les travailleurs indépendants affiliés au régime général.

Pour 2021, ce déficit est estimé à 27 milliards d'euros. À l'occasion du PLFR3, nous avions décidé d'un certain nombre d'exonérations de cotisations patronales pour les entreprises les plus touchées par la crise. Ces exonérations sont intégralement compensées par la sécurité sociale. Alors qu'elles étaient évaluées à 3,9 milliards d'euros, elles se chiffrent en réalité à 5,2 milliards d'euros, du fait de l'élargissement des conditions d'accès. En outre, le maintien d'une activité plus forte que ce qui était prévu s'est mécaniquement traduit par un niveau plus important de cotisations, donc d'exonérations.

Nous sommes donc dans une situation dégradée. Cette dégradation sera durable. À l'horizon 2024-2025, le déficit devrait toujours avoisiner les 20 milliards d'euros, ce qui est considérable.

Nous avons donc l'obligation de trouver les voies et les moyens de redresser la trajectoire des finances de la sécurité sociale. Nous avons fait le choix de ne pas intégrer des mesures de redressement permettant de retrouver rapidement une trajectoire satisfaisante. Nous considérons en effet que la sécurité sociale doit bénéficier de tous les moyens possibles pour répondre à la situation de crise. Nous considérons aussi que des mesures trop fortes seraient contraires à l'idée même de la relance.

Quoi qu'il en soit, nous ne devons pas nous contenter d'attendre le retour de la croissance et nous devons continuer à travailler sur un certain nombre de réformes structurelles, qui sont de deux ordres. Les premières sont contenues dans le texte que nous vous présentons. Je pense notamment au dispositif de déclaration des revenus tirés d'une activité annexe et à la fusion de la déclaration sociale et fiscale pour les agriculteurs. Ces réformes structurelles, que nous vous proposons d'adopter dès cette année, sont des réformes de simplification.

Nous devons travailler sur une autre catégorie de réformes, plus structurelles. Je pense aux travaux sur la contemporanéité du crédit d'impôt pour les services à la personne, sur la base mensuelle de revenus, pour mieux ajuster le niveau des prestations avec la situation que connaissent les assurés, et sur l'unification du recouvrement.

D'autres réformes feront suite aux travaux que le ministre de la santé et des solidarités a demandés au Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, mais aussi aux travaux que le Premier ministre a demandés au Conseil d'orientation des retraites, pour actualiser ses prévisions en fonction des conditions financières.

Si la situation est extrêmement dégradée, nous pouvons être optimistes s'agissant de la capacité de notre système de protection sociale à faire face. En effet, la loi organique permettant le transfert d'une part des déficits de la dette sociale sur la Cades - 136 milliards d'euros au titre des exercices 2020 à 2023 - permettra à l'Acoss de disposer d'une capacité de financement sur les marchés et d'une capacité à faire face en matière de trésorerie.

Pour résumer, nous réalisons un effort inégalé, qui se traduit par une dégradation, que nous espérons temporaire, des comptes de la sécurité sociale, des réformes structurelles visant à améliorer le service aux usagers et à trouver une trajectoire de redressement des comptes sociaux et une capacité de notre système à résister, pour accompagner les usagers, qu'il s'agisse des particuliers ou des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Ce PLFSS, vous venez de le rappeler, prévoit des déficits considérables pour les années 2020 et 2021. Tout le monde en est d'accord ici, la sécurité sociale doit jouer pleinement son rôle d'amortisseur social.

Mais la trajectoire des années suivantes se révèle troublante, avec un plateau annuel de déficit supérieur à 20 milliards d'euros, sans même intégrer les effets de la future loi autonomie. Le Gouvernement se résigne-t-il vraiment à faire ainsi dériver à long terme les comptes de la sécurité sociale ?

Le cas échéant, croyez-vous que ce modèle, qui revient à transférer le coût de notre protection sociale aux générations futures, soit réellement soutenable ? Malgré votre recherche de mesures structurelles, ces dernières ne paraissent pas de nature à nous rassurer.

Le PLFSS prévoit une autorisation de découvert de 95 milliards d'euros pour l'Acoss en 2021. L'agence aura-t-elle besoin d'un tel montant, malgré les transferts à la Cades ? Un tel niveau ne présente-t-il pas un risque de financement de l'agence par les marchés ?

Lors de l'examen des projets de loi organique et ordinaire relatifs à la dette sociale et à l'autonomie, le Sénat avait rejeté la reprise par la Cades des encours de dettes des établissements de services publics hospitaliers. Notre commission avait notamment considéré que les emprunts contractés par les hôpitaux étaient pour une part substantielle liés à des investissements immobiliers et non des dépenses de soins, ces investissements découlant de surcroît des plans gouvernementaux pour les hôpitaux. Il semble que la rédaction proposée par ce PLFSS concernant la reprise de dettes précise que celle-ci ne peut couvrir que des encours liés au financement du seul champ sanitaire. Quel périmètre recouvre cette terminologie ? Les emprunts contractés par les hôpitaux permettent-ils d'isoler exclusivement le seul champ sanitaire ? Cela change-t-il la liste des établissements qui pourraient être concernés ? Pouvez-vous nous dire quelle est la part du champ sanitaire dans les 33 milliards d'euros de la dette hospitalière ?

Enfin, la Cour des comptes a récemment remis à notre commission un rapport sur la fraude aux prestations sociales. Celui-ci montrait que plusieurs organismes ne se sont dotés d'aucun moyen pour estimer le montant des fraudes dont ils sont victimes, ce qui ne permet aucun pilotage de la lutte contre la fraude et peut laisser libre cours à tous les fantasmes. Monsieur le ministre, comptez-vous demander aux organismes concernés de se donner très vite les moyens d'estimer cette fraude ? Quelles suites entendez-vous donner aux préconisations de la Cour des comptes concernant le déconventionnement des professionnels de santé se rendant coupables de tels actes ?

Par ailleurs, j'ai lu et entendu que l'institut Pasteur de Lille était sur une piste très prometteuse concernant le traitement du covid-19. Il manque à cet organisme 5 millions d'euros, nécessaires pour procéder à des essais cliniques rapides. Le ministère pourrait-il envisager de financer ces recherches - je ne limite pas ma question à l'institut Pasteur -, afin de les accélérer ?

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, ministre délégué

S'agissant de l'état des finances sociales, nous sommes parfaitement conscients d'un risque de dérive à long terme. Nous ne pouvons pas imaginer que la sécurité sociale puisse rester dans une situation de déficit durable, à hauteur de 20 milliards d'euros.

Nonobstant notre décision de ne pas inscrire dans ce PLFSS des mesures qui auraient pour effet de ralentir la croissance, nous devons trouver ensemble les voies et moyens de redresser les comptes de la sécurité sociale. Cela passera nécessairement par des réformes structurelles que nous devons identifier. Les travaux du HCAAM comme du Conseil d'orientation des retraites devront nous guider.

J'en viens au plafond de découvert de 95 millions d'euros de l'Acoss. Tout d'abord, il s'agit bien d'un plafond : si nous souhaitons bien évidemment que l'Acoss n'ait pas à mobiliser la totalité de cette somme, nous souhaitons nous donner des marges de manoeuvre en cas de difficulté. Ensuite, la loi organique du 7 août dernier prévoit un transfert progressif de 20 milliards d'euros de l'Acoss vers la Cades. Le caractère progressif du transfert nécessite aussi de ménager des marges.

S'agissant des risques liés aux capacités de financement de l'Acoss, nous les avons pris en compte. L'État sait accompagner l'ensemble de ses opérateurs quand c'est nécessaire.

Pour ce qui concerne la fraude, chaque organisme doit être en capacité, aussi vite que possible, d'avoir des outils permettant de mesurer la fraude et son impact, ce qui évitera bien des hypothèses farfelues. Le rapport de la Cour des comptes le souligne, en dix ans, le nombre de cas de fraudes détectés a augmenté de 30 %. D'une année sur l'autre, l'augmentation est de 10 %, avec une accélération de certaines techniques de traitement des données disponibles par les caisses de sécurité sociale. Le rapport pointe aussi le fait que l'ensemble des caisses de sécurité sociale consacre 4 300 équivalents temps plein à la prévention et à la lutte contre la fraude, ce qui est considérable.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

S'agissant de la reprise de la dette hospitalière, tout ce qui permet de financer du bâti participe, à mon sens, aux soins. Nous vérifierons ce point, monsieur le rapporteur général. Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas conçu le dispositif pour exclure une partie de la dette. Les clés de répartition ont fait l'objet d'une mission IGAS-IGF, qui nous a permis d'avoir une prérépartition à l'échelle régionale de sommes considérables. Par la suite, les ARS, au sein des différents territoires, tiendront compte de la situation de chaque hôpital. En effet, certains hôpitaux sont très peu endettés, mais sont délabrés, tandis que d'autres sont très lourdement endettés.

Pour ce qui concerne le traitement innovant de l'institut Pasteur, nous avons bien un certain nombre de documents sur le projet de recherche qui est en cours. Ces projets sont d'ailleurs nombreux et doivent passer par les circuits habituels. Sachez que tous les services de l'État en matière de recherche en santé sont totalement mobilisés, avec des réponses ultrarapides. À un stade précoce d'études cliniques, monsieur le rapporteur général, une demande de 5 millions d'euros me paraît inhabituelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Sur la dette hospitalière et la question du champ sanitaire, vous n'avez pas répondu, monsieur le ministre de la santé.

Monsieur le ministre Olivier Dussopt, vous dites qu'un gros effort est fourni en matière de lutte contre la fraude. Je vous réponds qu'il est insuffisant ! Les estimations nécessaires n'ont pas été faites, ce qui laisse le champ libre à tous les fantasmes. Cette question relève de la responsabilité du Gouvernement et du Parlement. Il faut aller vite en la matière !

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

L'« objet sanitaire » fait référence à une dette contractée par des EPS ou Espic. Il n'y a aucune volonté d'exclure tel type de dette par rapport à tel autre.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Messieurs les ministres, quels sont les principaux objectifs assignés à la mission de refonte de l'Ondam, que vous avez confiée au Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie ? Ont-ils d'ores et déjà inspiré la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 ?

Alors que le Sénat avait alerté sur le transfert des dotations de Santé publique France à l'assurance maladie, la crise sanitaire et le relèvement substantiel des dépenses de l'agence, porté par l'Ondam, montrent que les craintes que nous avions sur cette débudgétisation étaient justifiées. Ces dépenses, qui ne sont pas des dépenses de soins, ne devraient-elles pas revenir dans le giron de l'État ?

Par ailleurs, pourquoi ne pas avoir remanié dès 2021 le périmètre de l'Ondam ou proposé un suivi tendanciel de l'Ondam hors autonomie, la branche autonomie nouvellement créée ayant vocation à reprendre les deux sous-objectifs relatifs aux dépenses pour le handicap et les personnes âgées.

L'article 26 de l'avant-projet de loi tend à instituer un Fonds pour la modernisation de l'investissement en santé, en lieu et place du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés. Cette mesure s'inscrit dans le cadre des conclusions du Ségur de la santé, qui porte l'ambition de donner le pouvoir aux territoires en matière d'investissements en santé. Comment la création de ce fonds concrétisera-t-elle cette ambition ? Quelles sont les autres évolutions prévues pour rendre les élus locaux pleinement parties prenantes des décisions d'investissement ?

L'article 39 de l'avant-projet de loi présente une refonte globale de l'accès précoce aux médicaments innovants, en réformant le régime des autorisations temporaires d'utilisation, les fameuses ATU, et des recommandations temporaires d'utilisation, les RTU. Dans ce secteur particulier, dont les acteurs industriels évoquent depuis plusieurs années l'instabilité normative comme l'une des principales causes de la perte d'attractivité du modèle français, comment anticipez-vous l'appropriation de ces nouvelles normes ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

Le FMIS remplace le FMESPP. Cela implique une présence des représentants des associations d'élus locaux, ainsi que davantage de crédits pilotés localement et non par le CNIS, le Conseil national de l'investissement en santé. Il s'agit de changer la donne concernant la participation des élus à la construction des projets de santé dans les territoires, en les associant véritablement. Par ailleurs, nous donnons la possibilité aux collectivités qui le souhaitent de participer au pot commun - n'y voyez pas malice !

Dans le cadre d'une future PPL portant d'autres dispositions du Ségur, nous irons plus loin, en modifiant profondément le conseil d'administration des ARS, pour y intégrer davantage les élus et, surtout, les grands élus du territoire.

En ce qui concerne l'Ondam, j'ai confié au HCAAM une mission qui fait le point sur les fameux sous-objectifs de l'Ondam, pour savoir ce qui fait encore sens, notamment dans le cadre du débat démocratique. Pour ma part, je ne sais pas ce que signifie l'évolution du taux de l'Ondam. Selon moi, il vaut mieux parler en milliards d'euros et dire aux Français que l'on dépense plus de 220 milliards d'euros pour leur santé, plutôt que de leur dire que l'évolution est de 6 % ou de 3 % ! Sans compter que la crise du covid a fait perdre tout son sens à cet indicateur : il faut neutraliser les dépenses covid pour se rendre compte que l'on augmente massivement les dépenses de santé dans notre pays cette année. Une telle réflexion est puissamment démocratique.

Concernant la reprise des deux sous-objectifs « autonomie » et « handicap » de l'Ondam dans la branche autonomie, vous avez raison, madame la rapporteure ; cependant, une mission est en cours sur le sujet et le périmètre de la branche a vocation à évoluer. Nous avons souhaité une branche à l'équilibre à sa création ; l'intégration des deux sous-objectifs irait dans le sens de l'Histoire.

La refonte de la recommandation temporaire d'utilisation (RTU) et de l'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) est un débat important, dans lequel Mme la rapporteure s'est beaucoup impliquée. L'accès compassionnel a été bâti et consolidé au Sénat, avec une évaluation en cours. Aucun big bang n'est prévu cette année dans le champ du médicament, compte tenu de ce qu'ont traversé les industriels au cours des derniers mois, mais nous n'abandonnons pas le dispositif, bien au contraire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

L'article de la LFSS pour 2019 qui étendait l'indication de l'ATU et de la RTU était incompréhensible, et je suis indulgente... Son décret d'application n'était paru qu'au mois d'août suivant.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

La branche vieillesse connaîtra un déficit quatre fois plus important que prévu, ce qui nous renvoie aux réformes qui auraient dû être menées, mais qui sont restées lettre morte. Mes questions ont déjà reçu une réponse ; je ferai donc questions et réponses ! Quelles mesures envisagez-vous pour redresser rapidement et durablement les comptes de notre système de retraite ? Vous avez répondu en substance : « pas de questions d'argent entre nous », puisque vous ne prenez pas de mesures structurelles, les mesures de redressement allant à l'encontre du plan de relance.

En raison d'une erreur de gestion, la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) n'a pas recueilli des prélèvements de CSG auprès de 200 000 retraités. Vous lui avez demandé de ne pas recouvrer ces sommes, qui représentent un manque à gagner de 50 millions d'euros. Allez-vous les compenser ?

Le président de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss), Jean-Noël Cardoux, ne pouvant être présent ce soir, je vous pose sa question, qui portait sur la Caisse d'amortissement de la dette sociale. Voilà quelques mois, une dette supplémentaire de 136 milliards d'euros lui a été transférée. Depuis lors, 50 milliards s'y sont ajoutés, ce qui remet en cause l'objectif d'extinction de la dette en 2033. Vous nous avez assuré que cette dette ne serait pas confiée à nos enfants, mais la Cades a été créée en 1996... Quelle est votre stratégie ?

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

Une dette, naturellement, se rembourse. Pour 2021, nous avons fait le choix d'accompagner la relance, de répondre à la crise et de nous laisser le temps d'examiner les différentes études commandées.

Le franchissement d'un seuil de revenu pendant deux années consécutives fait passer le contribuable retraité à un taux majoré de CSG. Or la CNAV a mis huit ou neuf mois à appliquer ce taux majoré aux contribuables concernés. Les montants individuels étaient compris entre 160 et 400 euros, avec de fortes disparités, puisque seule la pension principale est prise en compte. De plus, ceux dont la pension les plaçait en deçà du seuil de pauvreté ne pouvaient rembourser ce montant que de manière volontaire. D'accord avec Laurent Pietraszewski, nous avons demandé à la CNAV de ne pas recouvrer ce trop-perçu, considérant que les retraités n'avaient pas à faire les frais d'une difficulté d'application d'une décision administrative, conformément à l'esprit de la loi pour un État au service d'une société de confiance (Essoc) que vous avez examinée en 2018.

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

Nous avons adopté l'année dernière un dispositif d'intermédiation financière assurée par les caisses d'allocations familiales (CAF) pour le recouvrement et le versement des pensions complémentaires. Or la mise en oeuvre de la première étape de cette réforme, prévue pour le 1er juin, a été repoussée au 1er octobre, au motif que le personnel des CAF n'avait pas encore été formé et que les outils n'étaient pas achevés. Quelles mesures sont entrées en vigueur le 1er octobre ? Est-il toujours prévu d'ouvrir dès le 1er janvier prochain l'intermédiation financière des CAF à tous les parents qui en feront la demande ?

J'applaudis l'allongement du congé de paternité, qui est bienvenu pour le développement du jeune enfant. Ces moments sont uniques, les pères doivent les connaître autant que les mères. Toutefois, avez-vous évalué le surcoût pour les entreprises de cet allongement, avec ses seize jours obligatoires ? Des concertations seront-elles engagées sur les modalités d'application ? Quelles sont les intentions du Gouvernement sur le fractionnement du congé et le délai de prévenance de l'employeur ?

Ce PLFSS prolonge le remboursement de la télémédecine ; qu'en est-il de la télésurveillance médicale, tout aussi utile dans un contexte de crise sanitaire ? Avez-vous des éléments sur l'avenir du programme Étapes, prévu pour quatre ans et prolongé pour quatre nouvelles années ? La télésurveillance est très importante pour nombre de maladies chroniques.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

La réforme entrée en vigueur au 1er octobre permet à toute personne qui n'a pas perçu sa pension alimentaire d'obtenir auprès de sa CAF une allocation forfaitaire qui peut atteindre 113 euros par mois, en attendant un prélèvement direct sur le compte du parent, un homme dans l'immense majorité des cas, qui n'a pas versé la pension. Il suffit de présenter RIB, livret de famille et pièce d'identité. Nous pouvons remonter jusqu'à 24 ans en arrière.

Au 1er janvier, comme vous l'avez dit, l'intermédiation sera possible sur simple proposition des couples, même en l'absence de problèmes de versement. C'est un chantier monumental, pour lequel 400 personnes seront embauchées dans les CAF. Cette mesure, qui répond à une demande très forte du grand débat national, complète le dispositif de la majorité précédente.

Tous les détails pratiques touchant au congé paternité seront fixés par décret. Il n'y a pas de surcoût pour les entreprises : l'extension à 28 jours du congé paternité est à la charge de la sécurité sociale.

La télésurveillance, instaurée dans la LFSS 2018, a été étendue voici quelques mois ; une enquête de satisfaction est en cours, et les premières données sont attendues pour le début de 2021. Le mot de télésurveillance contient celui de « surveillance », d'où la nécessité que la démocratie sanitaire soit assurée. En 2012 ou 2013, la première application de la télésurveillance médicale, sur l'apnée du sommeil, avait été mal perçue. Il faut s'assurer de la satisfaction des usagers.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Bonne

Le dossier de presse indique que la projection pluriannuelle n'inclut pas les mesures nouvelles qui interviendraient dans la prochaine loi sur le grand âge et l'autonomie. Le terme « prochaine » me rassure, mais le conditionnel m'inquiète. Quand ce projet de loi sera-t-il présenté, et quelles seraient ces mesures nouvelles ?

Ce PLFSS est vide de mesures de soutien au secteur de l'aide à domicile, alors qu'il est entendu au moins depuis le rapport de 2019 qu'il faut permettre aux personnes âgées de rester à domicile le plus longtemps possible. Comment expliquer cette absence ?

Je lis également qu'il est question d'anticiper le vaccin contre la covid. Ne serait-il pas judicieux de prévoir dès à présent l'obligation de vaccination contre la grippe du personnel médical et médico-social ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Le Gouvernement a fait une lecture très minimale du rapport Vachey, qui dessinait le périmètre de la branche autonomie : elle représente une trentaine de milliards d'euros, contre 40 milliards proposés dans le rapport. Le dossier de presse indique que le périmètre a vocation à évoluer « en fonction des concertations à venir ». Où en sont ces concertations, et à quels changements de périmètre la représentation nationale doit-elle se préparer ?

La branche autonomie étant dotée de ressources propres, à quoi correspond le sous-objectif de l'Ondam relatif aux dépenses pour les établissements et services pour personnes âgées et handicapées ?

Les conclusions de la conférence nationale du handicap, dévoilées en février dernier, faisaient apparaître un effort de 600 millions d'euros qui ne figure ni dans la révision de l'objectif pour 2020, ni dans les mesures nouvelles pour 2021.

Pouvez-vous préciser l'état d'avancement et les modalités de financement des chantiers en cours ? Enfin, que ferez-vous des conclusions du rapport Piveteau-Wolfrom sur l'habitat inclusif et de celui de Philippe Denormandie sur le handicap ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

Le Président de la République a rappelé, le 22 septembre, sa volonté de voir la loi sur l'autonomie présentée au Parlement. Elle va donc arriver ! Parlons-nous franchement : vous m'avez interrogé sur le niveau des dépenses sociales, sur celui du déficit qui devrait se creuser pendant un moment, sur la nécessité de ne pas faire peser une dette trop lourde sur les générations à venir. Au moment d'engager des dépenses légitimes et nécessaires dans le champ de la protection sociale, il est nécessaire de se poser la question du financement. Le Gouvernement devra faire des choix, dans le cadre de l'agenda social qui se profile. Nous avons besoin de justice et de rigueur. Je retire le conditionnel sur le projet de loi qui vous sera présenté, mais la question du financement sera posée.

Les travailleurs de l'aide à domicile sont, pour beaucoup d'entre eux, des travailleurs pauvres. Dans le cadre de la prime covid, 71 départements ont contractualisé avec l'État, qui apporte 80 millions d'euros à concurrence de la contribution de ceux-ci pour le versement de la prime aux acteurs de l'aide à domicile ; mais on ne peut se contenter d'une prime. Oui, une revalorisation est nécessaire, et il faut faire un geste pour l'aide à domicile. Des arbitrages sont en cours, et ce texte sera amené à évoluer au cours des débats parlementaires. Je ne puis vous en dire plus à ce stade.

Le 13 octobre commencera la campagne habituelle de vaccination antigrippale pour les soignants à l'hôpital, en ville ou dans les Ehpad, et les personnes vulnérables. Ce vaccin ne présente pas de bénéfice individuel important ; en revanche, son bénéfice collectif, vis-à-vis des plus fragiles, est significatif. S'engager dans les métiers du soin relève d'une vocation dont l'un des principes est primum non nocere : d'abord, ne pas nuire. Je souhaite donc une vaccination massive des soignants. La question de l'obligation se pose régulièrement, mais les externalités négatives d'une telle décision seraient trop importantes, eu égard à la pression sanitaire dans les Ehpad et les hôpitaux.

Je vais vous parler très franchement : en cas de départs massifs, ou de mise en avant du droit de retrait, si certains soignants décidaient ne pas apporter le coup de main attendu dans les Ehpad parce qu'ils refuseraient de se faire vacciner, les difficultés seraient encore plus importantes. Quelles que soient nos idées sur le fond, le moment n'est pas venu.

Le rapport Vachey propose une progressivité dans l'évolution du périmètre de la branche. Je me suis entretenu avec son auteur. Ce n'est pas un one shot : nous posons les bases d'un régime à l'équilibre, avec un périmètre défini, mais amené à évoluer par la suite. Il fait sens, à mes yeux, d'intégrer les sous-objectifs « autonomie » et « handicap », mais attendons la première évaluation.

Dans le champ du handicap, des mesures très fortes sont proposées : la PCH (prestation de compensation du handicap) parentalité, dans le PLFSS pour 2021, représente 200 millions d'euros de dépenses supplémentaires. Votre question me permet de la rendre visible.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Bonfanti-Dossat

Je voudrais vous dire mon incompréhension vis-à-vis de ce PLFSS, qui crée une branche autonomie, mais néglige les services d'aide à domicile et leurs salariés, semblant même revenir sur les engagements de revalorisation salariale pris par le Gouvernement. C'est un contresens au regard du virage domiciliaire régulièrement annoncé, ainsi qu'une marque de mépris envers les Français qui veulent vieillir chez eux et envers cette catégorie de personnel. Ces arbitrages font craindre une cinquième branche sans moyens pour la réponse domiciliaire.

Aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, vous avez déclaré que les aides à domicile étaient « des gens en or ». Oui, ce sont des gens en or, qui ont besoin d'une revalorisation salariale ; or certains départements, dont le mien, auront des difficultés à leur verser la prime covid. Au-delà des considérations salariales, le recrutement est difficile et nous ne savons comment répondre aux nouvelles demandes des bénéficiaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Richer

Je vous ai adressé cette semaine un courrier qui porte sur la parution du décret 2020-1152 attribuant un complément de traitement à certains agents de la fonction publique hospitalière. Cette revalorisation, attendue par tous, devrait apporter reconnaissance et apaisement. Toutefois, le décret exclut certaines catégories de personnel, notamment les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), qu'a évoqués ma collègue et ceux du secteur du handicap.

Ainsi, dans le Cher, quelque 92 des 1 317 agents hors personnel médical du centre hospitalier George Sand, qui travaillent notamment dans les maisons d'accueil spécialisées et les foyers d'accueil médicalisé (FAM), sont exclus du dispositif, d'où un fort sentiment d'injustice et d'iniquité. Pourtant, les unités de prise en charge des personnes handicapées ont subi les mêmes contraintes : maintien du lien avec les familles, mesures barrières, distanciation, reprise des visites à un haut niveau de sécurité, etc. Cette exclusion va exacerber les difficultés de recrutement dans des secteurs déjà en proie à des problèmes d'attractivité, notamment en zone rurale. L'indignation est grande, chez les directeurs d'établissement comme dans les rangs des syndicats. Le décret doit être corrigé et étendu à l'ensemble de la fonction publique hospitalière, sans oublier tous les agents exclus du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

La crise du covid n'occulte pas les autres problèmes médicaux. Où en sont le financement de la création d'un infirmier en pratique avancée en psychiatrie et la revalorisation de la médecine libérale, dont on a peu parlé dans cette crise ? Quel véhicule législatif assurera la prolongation des zones de revitalisation rurale (ZRR), qui permettent l'aide à l'installation des médecins ?

Qu'en est-il du décret d'application du forfait post-cancer annoncé par Mme Buzyn ? Un malade du cancer en rémission a besoin de soins.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Théophile

La reprise de la dette des établissements hospitaliers sera soumise à certaines conditions. Y aura-t-il un traitement différencié entre le public et le privé à but non lucratif ?

L'avant-projet de loi de finances et le PLFSS 2021 prévoient une généralisation des maisons de naissance. Dès 2013, une série d'expérimentations dans l'Hexagone et en outremer avait donné des résultats concluants. Mais l'article 30 du PLFSS ne sécurise que partiellement le rôle des sages-femmes dans ces structures, dont la gestion peut être confiée à un tiers, établissement de santé ou personne morale. Or les sages-femmes, qui sont à l'origine de ces maisons de naissance, craignent qu'elles ne deviennent des services annexes des établissements. Elles s'inquiètent également d'une gestion par des personnes morales. C'est pourquoi il faudrait une vraie convention d'exploitation confiée aux sages-femmes pour sécuriser leur activité.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

Le Gouvernement tient ses engagements : les salariés de l'aide à domicile ont bénéficié d'une revalorisation de 2,7 %. Madame Bonfanti-Dossat, vous me dites que votre département n'a pas les moyens de verser la prime covid - et dans le même temps, vous réclamez de l'État une augmentation des salaires. Gouverner, c'est choisir. Le Gouvernement a fait le choix d'une impulsion très forte en faveur d'une prime pour les aides à domicile versée par les départements ; 71 ont suivi, je considère que l'ensemble des départements doivent tenir leur part de cet engagement.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

Les « exclus » et « oubliés » de Ségur ne sont ni exclus, ni oubliés. Le protocole d'accord signé par les syndicats majoritaires prévoit un travail spécifique sur la situation des agents et salariés des établissements et services médico-sociaux.

La prime covid sera versée au personnel du secteur hospitalier et des Ehpad, soit près de 2 millions de salariés, pour un total de 1,8 milliard d'euros. Il n'est pas illégitime d'envisager un élargissement du cercle ; mais cela inclurait le secteur social, avec les établissements éducatifs, les FAM, tous les établissements qui relèvent du care, les auxiliaires de vie scolaire... Le regard du ministre du budget m'indique que cela serait difficile ! Je me suis néanmoins engagé avec les syndicats à réfléchir sur certains soignants en dehors du périmètre du Ségur, dont les missions pourraient justifier une inclusion, mais cela pourrait concerner un million de personnes supplémentaires.

Les mesures concernant les médecins libéraux relèvent des négociations conventionnelles qui ont commencé entre l'Assurance maladie et les syndicats représentatifs, et non du domaine parlementaire ; mais les libéraux ne sont pas oubliés.

Le dispositif post-cancer fait l'objet d'une évaluation en cours. Le parcours de soins global sera mis en place par des structures conventionnées. Un décret devrait être publié prochainement, ainsi que des arrêtés fixant les conditions de prescription et la liste des structures susceptibles de conclure une convention. Tout cela peut prendre du retard en période de covid, mais nous n'abandonnons pas.

La reprise de dette concerne l'ensemble des établissements de santé qui participent du service public hospitalier. Les établissements privés à but lucratif qui en relèvent peuvent donc postuler mais, d'après le président de la Fédération des cliniques et hôpitaux privés de France, aucun ne s'est porté volontaire. En revanche, des établissements de santé privés d'intérêt collectif (Espic) sont concernés.

Sur les maisons de naissance, vous semblez faire référence à une situation précise. Il y en a huit en France, et ce PLFSS prévoit la création de douze maisons supplémentaires. Attendons les résultats de l'évaluation, qui posera la question médico-économique, mais ces maisons correspondent à une attente des parturientes et des maïeuticiens.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, secrétaire d'État

Un amendement du Gouvernement prolongeant les ZRR sera présenté en première lecture à l'Assemblée nationale. Je m'associe aux propos d'Olivier Véran sur la question du financement. Certains d'entre vous ont légitimement porté des demandes de financement, craignant que l'on oublie l'un ou l'autre secteur ; mais en tant que ministre des comptes publics, je me dois de souligner le paradoxe consistant à s'inquiéter des déficits accumulés tout en proposant de nouvelles dépenses. Malheureusement, les propositions de nouvelles recettes sont plus rares et plus difficiles à mettre en oeuvre, sous forme d'économies comme de ressources nouvelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

J'envoie un message de solidarité aux députés, qui n'ont que quelques jours pour déposer des amendements sur ce PLFSS.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

Comme tous les ans, hélas !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Jomier

Comme tous les ans, hélas, le rôle du Parlement est minoré. Heureusement, le Sénat a davantage de temps pour le PLFSS...

Il n'est pas tout à fait exact que la crise du covid soit survenue au moment où le déficit de la sécurité sociale s'éteignait. Les comptes sociaux se sont redressés de 2010 à 2018, date à laquelle le Gouvernement a fait peser sur la sécurité sociale les décisions prises par le Président après la crise des gilets jaunes, faisant ainsi replonger ces comptes dans le rouge. Ensuite est arrivée la crise du covid, et je vous donne acte de la difficulté à construire un PLFSS dans ce contexte.

Deuxièmement, la crise de la covid entraîne des dépenses d'ordre conjoncturel, mais elle nous donne des enseignements sur la façon dont notre système de santé doit évoluer : le rôle des professionnels de ville et de la première ligne, celui des aides à domicile, la place des agences sanitaires... Ce PLFSS devrait être l'occasion de traduire ce mouvement structurel dans les lignes budgétaires. Or, sur tous ces points, il est plutôt inquiétant. Certes, il faut des réformes structurelles pour améliorer les comptes de la sécurité sociale, mais cette crise sanitaire violente a montré qu'il fallait modifier structurellement notre système de santé.

C'était pour beaucoup les principes de Ma Santé 2022, auxquels vous ne faites plus référence, tout comme ceux de la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé que nous avons votée en 2019. J'ai l'impression qu'une page est tournée : on ne lit pas ces orientations dans le PLFSS.

Troisièmement, il est compliqué de lire l'Ondam. Même si l'on retranche les mesures de revalorisation salariale qui ont été prises, on s'aperçoit que l'effort structurel ne sera pas suffisant. Certes, on peut changer la façon de concevoir l'Ondam, mais il ne s'agit pas de casser le thermomètre pour empêcher de lire l'évolution de la température.

Je vous donne acte de la difficulté de construire ce PLFSS dans le contexte que nous vivons, mais ces éléments de brouillage ne facilitent pas le travail parlementaire.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre

Je répondrai rapidement, car je dois partir.

On amplifie et on accélère Ma Santé 2022 : c'est retranscrit partout, jusque dans les négociations conventionnelles qui activent et amplifient les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). La réforme des financements psy, la sortie de la T2A notamment attestent bien que la marque de fabrique reste la même. Le lien de parentalité entre Ma Santé 2022 et la stratégie nationale de santé élaborée sous le quinquennat précédent est très fort. Il n'y a pas de raison de changer de cap. En revanche, on s'appuie davantage sur les territoires et non plus sur des procédures qui pourraient être jacobines. On est plus girondin dans la façon de procéder...

Sur la construction de l'Ondam, on ne peut pas nous faire le procès de brouiller le message. Jamais on n'a eu une évolution du taux de l'Ondam aussi forte, hors dépenses covid : c'est l'équivalent de l'évolution du taux de l'Ondam de trois années réunies du quinquennat précédent. Le taux de l'Ondam n'est pas un bon indicateur, cela ne parle pas aux Français, il vaut mieux parler en euros : cela représente 220 milliards d'euros supplémentaires de dépenses de santé.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis désolé de ne pouvoir rester plus longtemps parmi vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Sur la cinquième branche et la perte d'autonomie, le rapport Vachey ouvre un certain nombre de pistes de financement. Lesquelles privilégiez-vous ?

Pour lutter contre les déserts médicaux, quels dispositifs prévoyez-vous dans le cadre de ce PLFSS, au-delà du développement de la télémédecine ?

Debut de section - PermalienPhoto de Victoire Jasmin

Je suis scandalisée par le départ du ministre des solidarités et de la santé en pleine audition, alors que de nombreux commissaires sont présents et ont des questions à poser. Il n'est pas normal que le Sénat se retrouve dans cette situation, qui s'est déjà produite il y a un an. C'est du mépris !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Au début de cette audition, j'ai prévenu que le ministre devrait partir. Les circonstances sanitaires sont exceptionnelles !

Debut de section - PermalienPhoto de Victoire Jasmin

Je pose malgré tout mes questions.

La situation des laboratoires, qu'ils soient extrahospitaliers ou dans les établissements publics de santé, est critique dans toute la France. Vous l'avez ignorée et découverte à l'occasion de cette mesure. Les laboratoires sont dans une démarche d'amélioration continue de la qualité et d'accréditation. Dans le même temps, les nomenclatures baissent. Quelles mesures comptez-vous prendre ?

Olivier Véran a parlé des établissements vétustes et endettés : c'est le cas dans les outre-mer, en particulier en Guadeloupe. Dans ces territoires, les évacuations sanitaires inter-îles, par exemple entre la Guyane et la Martinique ou la Guadeloupe, engendrent des surcoûts considérables. Ces situations, qui ne sont pas forcément liées à des problèmes de gestion, doivent être prises en compte. Ces territoires sont confrontés à des difficultés de prise en charge et de continuité des soins propres.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est tout à fait singulier - crise sanitaire, Ségur de la santé, revalorisation des salaires, chute des recettes, augmentation des dépenses, déficit abyssal... L'inquiétude de voir transférer des dépenses de santé et des dépenses sociales sur les générations à venir croît. Vous avez politiquement décidé de renoncer à toute piste de régulation et d'économie dans ce texte. Même si nous traversons une crise extrêmement grave, est-ce pertinent ?

Il va pourtant bien falloir réguler nos dépenses, sinon je crains que les conséquences des remèdes de demain ne soient encore plus brutales que nos souffrances d'aujourd'hui !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

La création de la cinquième branche au mois de juillet dernier a permis la reconnaissance des enjeux d'accompagnement de la perte d'autonomie. Toutefois, le Sénat reste assez perplexe sur son financement. Le PLFSS pour 2021 ne permet pas de dessiner une trajectoire de croissance pluriannuelle des ressources dédiées à l'autonomie.

Olivier Véran a parlé de 2,5 milliards d'euros de mesures nouvelles ; certes, cela représente un effort significatif, mais, pour les trois quarts, cela correspond au financement des engagements pris dans le cadre du Ségur : revalorisation des rémunérations des personnels des Ehpad et soutien à l'investissement. Pour le champ des personnes âgées, l'Ondam n'est construit que sur un taux d'actualisation de 0,8 : ce n'est pas considérable et ne permet pas d'avoir une vision sur la politique que vous pourrez ensuite mettre en place en matière de perte d'autonomie. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale n'amorce pas la dynamique attendue en matière de croissance progressive des ressources affectées à la perte d'autonomie.

Selon ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, l'hôpital devra de nouveau faire une économie de 850 millions d'euros sur l'Ondam global. Si le Ségur de la santé et la crise du covid affectent forcément les dépenses à la hausse, qu'en est-il du financement des besoins préexistants ?

Selon les chiffres portés à notre connaissance, il s'agit d'une enveloppe non pas de 2 milliards d'euros, mais de 1,3 milliard d'euros. Cela ne correspond pas aux engagements pris au début de la mandature du Président de la République : un Ondam à 2,4 milliards d'euros tous les ans pendant cinq ans, hors covid.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet

Le Ségur de la santé porte sur le sanitaire et le médico-social établissement, c'est-à-dire les Ehpad. Quid du médico-social à domicile ?

Jusqu'à présent, je trouvais regrettable que le Ségur de la santé ait exclu le médico-social domiciliaire. Désormais, j'ai de fortes inquiétudes. Je pensais en effet que le médico-social domiciliaire et le social seraient inclus dans les travaux autour de l'autonomie et qu'il y avait une ligne budgétaire, en avance de phase. J'avais bien pointé que l'impact de la revalorisation des professionnels du domicile n'apparaissait pas dans les exemples que vous donniez sur cette ligne en avance de phase, mais je pensais qu'il s'agissait d'une omission.

Les acteurs du domicile ne pourront pas faire face à un deuxième épisode de pandémie. Aujourd'hui, une demande sur cinq à domicile ne peut pas être honorée : la crise du recrutement liée à la perte d'attractivité est telle que le secteur est sinistré.

À juste titre, la rémunération des acteurs dans les Ehpad a été revalorisée. Cela a pour conséquence des départs des aides-soignants vers ces établissements. Il faut cesser les discours louangeurs sur les aides à domicile, car le décalage entre les discours et les actes n'est plus supportable.

Après la réponse du ministre, j'ai bien compris que les travaux Laroque étaient une énième opération dilatoire. Le diagnostic et les préconisations sont connus !

Les agréments de la branche du domicile qui sont en souffrance de signature du Gouvernement seront-ils délivrés avant la fin de 2020, pour être applicables en 2021 ? Sinon, l'application sera reportée en 2022 et le tournant domiciliaire n'aura pas lieu.

Debut de section - Permalien
Olivier Dussopt, ministre délégué

Madame Deseyne, le rapport Vachey a été rendu : aucune piste n'est encore privilégiée. Il existe différents types de propositions, par exemple des économies extrêmement difficiles à réaliser : exonérations permises pour les employeurs à domicile de plus de 70 ans, augmentation des prélèvements obligatoires, fléchage de recettes...

C'est un véritable enjeu que de trouver les voies et les moyens d'assurer à la cinquième branche une trajectoire pluriannuelle à la fois solide et financée de façon crédible et durable, sans obérer d'autres postes de dépenses ou augmenter les prélèvements obligatoires. Ce n'est pas simple ; les concertations ouvertes autour du rapport Laroque devront être l'occasion de trouver ce type de réponses.

Pour lutter contre les déserts médicaux, le projet de loi de financement de la sécurité sociale acte le remboursement à 100 % des consultations en télémédecine. Nous espérons également bénéficier d'un certain nombre de mesures prises précédemment, comme l'élargissement du numerus clausus ou la reconduction de mesures qui existaient, notamment dans les ZRR.

Madame Jasmin, un protocole biologique a été annulé afin de permettre aux laboratoires de travailler plus facilement. Nous avons mis en place un dispositif de rémunération des tests, qui s'appuie sur un prix juste, et participé au financement des automates.

En ce qui concerne les établissements hospitaliers vétustes, vous avez insisté sur la nécessité d'accompagner les investissements outre-mer. La reprise de dette des hôpitaux prévue dans le cadre des accords du Ségur et les 6 milliards d'euros d'investissements prévus pour les hôpitaux et les Ehpad dans le cadre du plan de relance, consécutivement au Ségur, concerneront tous les territoires. Nous y veillerons.

Je ne puis qu'être en contradiction avec M. Henno : nous n'avons pas abandonné toute piste de régulation. La construction de l'Ondam pour 2021 intègre 4 milliards d'euros d'économies, par exemple en matière de pertinence et de qualité des soins de ville. L'Ondam est un outil perfectible, et la crise rend encore plus nécessaire le travail d'amélioration de cet outil.

L'augmentation de l'Ondam de 8 % est conjoncturelle et liée à la crise, mais elle va perdurer. En 2021, nous prévoyons 4,3 milliards d'euros pour faire face à la crise.

L'Ondam de 2021 est de 3,5 % à condition de mettre dans la base de référence les 10 milliards d'euros de dépenses supplémentaires liées à la crise en 2020. Si l'on tient uniquement compte des dépenses traditionnelles, l'Ondam s'élève à 6 %. Par conséquent, les engagements du Président de la République sont tenus.

La construction de l'Ondam à 6 % hors covid avec une évolution tendancielle autour de 2,4 % intègre les 4 milliards d'euros d'économies que j'ai évoqués. Il va falloir trouver d'autres pistes de réduction des dépenses ou de génération de recettes, mais il convient d'attendre la fin de certains travaux.

Sur le grand âge, il s'agit bien de construire une trajectoire pluriannuelle. Les concertations autour du rapport Laroque le permettront.

Sur la question des aides à domicile, nous allons ouvrir un certain nombre de pistes de travail. Les semaines à venir seront l'occasion pour le ministre des solidarités et la santé et pour la ministre déléguée en charge de l'autonomie d'apporter des réponses.

Je ne peux pas laisser dire que le Gouvernement abandonnerait le secteur de l'aide à domicile. Il s'agit d'un travail important à faire avec les départements. Si l'État peut accompagner les collectivités, celles-ci, dans le cadre de l'exercice de leurs compétences, ont des arbitrages à faire, notamment dans l'affectation et l'allocation des moyens dont elles disposent. On ne peut pas souhaiter l'autonomie lorsque les recettes sont en augmentation et considérer que, lorsqu'il y a une crise, y compris quand celle-ci affecte la structure de recettes des collectivités, l'autonomie n'aurait plus de sens et qu'il faudrait que l'État compense des recettes. Cela relève de l'autonomie de gestion, même si cela met parfois les élus locaux face à des choix cornéliens.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Monsieur le ministre, je vous remercie.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 20 h 20.