Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2021 se réunit au Sénat le lundi 5 juillet 2021.
Elle procède tout d'abord à la désignation de son bureau, constitué de M. Claude Raynal, sénateur, président, de M. Éric Woerth, député, vice-président, de M. Laurent Saint-Martin, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et de M Jean-François Husson, sénateur, rapporteur pour le Sénat.
Étaient également présents MM. Stéphane Sautarel, Bernard Delcros, Rémi Féraud, Didier Rambaud, sénateurs titulaires, et M. Jérôme Bascher, sénateur suppléant, ainsi que M. Alexandre Holroyd, Mmes Bénédicte Peyrol, Cendra Motin, MM. Gilles Carrez, Jean-Noël Barrot, députés titulaires, et Mme Claudia Rouaux, députée suppléante.
La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
Je suis heureux de vous accueillir pour cette commission mixte paritaire (CMP), que j'espère conclusive.
Le projet de loi initial comportait 14 articles, dont l'article liminaire. L'Assemblée nationale a introduit 11 articles additionnels en première lecture. Parmi les 25 articles qui étaient soumis au Sénat, 10 articles ont été adoptés conformes et 15 ont été modifiés. Nous avons également introduit 26 nouveaux articles. En fin de compte, 41 articles du projet de loi restent donc en discussion.
Comme il est de tradition, je vous rappelle qu'une CMP est simultanément saisie du texte adopté par l'Assemblée nationale et du texte adopté par le Sénat. Elle peut, sur chaque article restant en discussion, choisir l'une ou l'autre des rédactions, ou retenir une rédaction de compromis, proposée par les rapporteurs ou tout autre membre de la CMP.
Afin de faciliter l'élaboration d'un compromis, lorsque celui-ci apparaît possible, nous avons pris l'habitude d'examiner une rédaction globale élaborée par les rapporteurs qui récapitule l'ensemble des articles du projet de loi de finances rectificative en précisant la rédaction retenue. Ils nous diront ce qu'il en est aujourd'hui.
Le rapporteur général de la dernière assemblée saisie, donc celui du Sénat, va nous présenter les conclusions de ses travaux mais je cède tout d'abord la parole au vice-président de notre CMP, s'il souhaite dire un mot complémentaire en introduction.
Je vous remercie. Nous avions, à l'Assemblée nationale, déjà enrichi le texte, qui comportait à l'origine 14 articles, en introduisant 11 articles additionnels sur des points importants, par exemple la prolongation du tarif réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable au gazole non routier (GNR), celle du régime de déduction des abandons de créances de loyers commerciaux, l'amélioration du dispositif de garantie des ressources du bloc communal qui avait été voté en loi de finances pour 2021, la prise en compte des pertes de versement mobilité pour Île de France Mobilités en 2021, la prolongation de la majoration du dispositif de réduction d'impôt sur le revenu pour l'investissement dans une PME (IR-PME), l'exonération de droits d'accises dans le cadre des liaisons trans-Manche, ou encore l'exonération facultative de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour les discothèques.
Le Sénat a amélioré le texte, en reportant du 1er juillet 2022 au 1er janvier 2023 la suppression du tarif réduit de TICPE pour le GNR et en supprimant, pour les entreprises de moins de 50 salariés, les conditions permettant de porter de 1 000 à 2 000 euros le montant de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat exonérée d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales.
Des mesures nouvelles introduites par le Sénat ont enrichi le texte et mériteraient d'être retenues par notre CMP : la hausse temporaire du plafond des titres restaurants, l'augmentation des seuils fiscaux applicables aux PME, l'amortissement accéléré de certains matériels, ou encore une période transitoire pour des dons exonérés de droits de mutation.
Mais les rapporteurs vont nous dire s'il est envisageable de parvenir à un accord sur l'ensemble des dispositions restant en discussion.
Nous voici réunis en CMP à la suite de l'examen par nos deux assemblées du premier PLFR de l'année 2021. Lors de son examen par le Sénat la semaine dernière, nous avons pris acte de la mise à jour des données macroéconomiques du Gouvernement, en particulier du taux de croissance prudent à 5 % ainsi que du déficit public à 9,4 points de PIB et de l'endettement à 117,2 % du PIB, signes de la très forte dégradation de nos finances publiques. Le rebond d'activité reste fragile et serait moins important que celui de nos principaux partenaires européens. Il convient désormais de regarder l'avenir et de définir une stratégie pour le redressement des comptes publics.
Concernant le budget de l'État proprement dit, j'ai émis de fortes réserves sur les reports opérés par le Gouvernement et qui atteignent un niveau exceptionnel cette année, allant dès lors, à mon sens, bien au-delà de l'autorisation parlementaire. Il apparaît clairement que l'augmentation des dépenses répond à un objectif de précaution et d'extrême prudence. La demande d'1,5 milliard d'euros supplémentaires au titre de la dotation pour les dépenses accidentelles et imprévisibles en est une parfaite illustration.
Tous, nous espérons que ce PLFR sera bien celui de la sortie de crise avec, en particulier, un soutien en faveur des entreprises encore touchées par les dernières contraintes et une pleine mise en oeuvre du plan de relance. Sur ce dernier point, la consommation des crédits réellement constatée à mi-année nous inquiète.
Plusieurs autres postes de dépenses publiques doivent également être surveillés de près, en particulier s'agissant de l'agriculture, marquée par plusieurs crises cette année.
S'agissant des mesures fiscales et budgétaires de ce texte, il y avait peu de mesures significatives, à l'exception du carry back, pour lequel le Gouvernement a finalement donné raison au Sénat qui l'avait proposé, en vain, dès l'été dernier.
Le Sénat soutient également la prolongation de l'octroi de garantie de l'État au titre des prêts garantis par l'État (PGE) ainsi que la reconduction de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (PEPA), sur laquelle je reviendrai, car nous avons fait évoluer le dispositif pour le rendre pleinement opérationnel pour les PME de moins de 50 salariés.
Comme dans les précédents collectifs budgétaires pour 2020, le Sénat, en conscience et responsabilité, a donc largement voté les mesures du Gouvernement destinées, non plus à soutenir l'économie mais à l'accompagner en sortie de crise, avec le prolongement des dispositifs tels que le fonds de solidarité ou encore l'activité partielle.
Lors de l'examen en première lecture, le Sénat a adopté 92 amendements qui, outre les amendements rédactionnels et techniques, visent principalement à accompagner la sortie de crise et à soutenir la relance.
Pour soutenir les entreprises mais aussi faciliter la transition énergétique de l'économie, nous avons voté la mise en place d'un mécanisme fiscal de déduction pour le capital à risque ; un amortissement accéléré et temporaire des biens destinés à l'économie d'énergie et des équipements de production d'énergies renouvelables ; l'actualisation des seuils d'imposition pour les PME au titre de l'impôt sur les sociétés ; un relèvement temporaire à 30 % du taux de la réduction d'impôt sur le revenu pour la souscription au capital des PME - dit dispositif « Madelin » - et prorogé jusqu'à fin 2022, avec le même taux, la réduction d'impôt au titre de l'investissement dans les foncières solidaires chargées d'un service d'intérêt économique général (SIEG). Nous avons également prévu le financement d'une aide pour les entreprises issues d'une création en 2020 et qui, à défaut d'avoir repris un fonds de commerce et en l'absence de tout chiffre d'affaires, ne bénéficient d'aucun soutien ; ou encore l'extension aux discothèques, qui ont subi 15 mois de fermeture continue, du dispositif d'aide au paiement des cotisations et contributions sociales prévu par le projet de loi, avec une majoration du taux, à 20 % au lieu de 15 %.
Afin de valoriser la mobilisation des salariés pendant la crise et renforcer leur pouvoir d'achat, le Sénat a également prévu la possibilité de doubler le montant de la PEPA pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés, dès lors qu'il est très difficile pour elles, dans les temps impartis, de mettre en place des accords de participation.
Dans le même ordre d'idée et afin d'assurer une égalité de traitement entre les personnels hospitaliers « en première ligne », le Sénat a adopté l'amendement que j'ai proposé à la commission, tendant à exonérer la majoration exceptionnelle des indemnités de gardes des internes durant la première vague de l'épidémie.
En soutien aux associations venant en aide aux personnes les plus défavorisées, nous avons également prorogé jusqu'à la fin de l'année 2022 le relèvement temporaire à 1 000 euros du plafond des dons éligibles à la réduction d'impôt sur le revenu de 75 % au titre du dispositif « Coluche ».
À l'initiative de plusieurs parlementaires, le Sénat a temporairement augmenté le plafond d'exonération d'impôt pour la contribution patronale sur les titres-restaurant, ou encore, dans une logique de relance de la consommation, voté un plafond à 50 000 euros jusqu'à la fin 2021 pour l'exonération de droits de mutation à titre gratuit applicable aux dons familiaux, avec des conditions de réemploi identiques à la mesure votée dans le cadre de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 et qui s'est achevée au 30 juin dernier.
Dans le cadre du plan de relance, nous avons aussi adopté un amendement de crédits que j'avais présenté afin que les travaux préalables à la reforestation entrent dans le champ des aides financières apportées aux communes (10 millions d'euros) ainsi qu'un amendement du Président Claude Raynal pour donner une enveloppe complémentaire au financement des autorités organisatrices de mobilités (AOM).
Le Sénat a également voté plusieurs amendements du Gouvernement, en particulier l'enveloppe budgétaire destinée à renforcer les moyens de soutien aux collectivités territoriales à la suite de la tempête Alex de l'automne dernier, l'élargissement aux régies départementales du dispositif de compensation des pertes d'épargne brute prévues pour les régies communales ainsi que l'abandon d'une créance du Fonds de développement économique et social (FDES) pour l'entreprise Ascoval.
Je ne cite pas tous les amendements qui ont été votés, faute de temps. Certains sont d'ailleurs assez éloignés des dispositifs liés à la crise sanitaire et économique ainsi qu'aux difficultés rencontrées par le monde agricole.
Par ailleurs, le Sénat a reporté au 1er janvier 2023 la suppression du taux réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable au gazole non routier (GNR). C'est cette date que le Gouvernement avait annoncée aux secteurs concernés, qui ont été durement touchés par la crise et n'ont à ce jour que des solutions balbutiantes comme alternatives à l'utilisation du gazole.
Enfin, soucieux de bien suivre l'usage des crédits votés depuis le début de la crise sanitaire, nous avons prolongé jusqu'à la fin de l'année l'obligation pour le ministre de l'économie d'informer le président et le rapporteur général des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, avant toute opération réalisée au titre des participations financières de l'État sur des crédits ouverts sur le budget général ; ensuite, constatant que l'augmentation de 1,5 milliard d'euros demandée par le Gouvernement de la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles était insuffisamment justifiée, le Sénat a ramené cette ouverture de crédits à 500 millions d'euros.
Le Sénat a été constructif et raisonnable dans ses propositions, preuve en est que l'article d'équilibre a peu évolué à la suite de nos travaux.
Depuis jeudi dernier, nous avons travaillé avec le rapporteur général de l'Assemblée nationale, que je remercie pour son écoute, pour parvenir à un texte commun.
Je suis globalement très satisfait qu'un certain nombre de mesures demeurent dans le texte, fruit de nos échanges ; je ne les cite pas toutes, faute de temps.
Tout d'abord, et assez logiquement, les mesures pour lesquelles le Gouvernement avait émis un avis favorable ou de sagesse ont été conservées, en particulier la reconduction pour 2021 du « filet de sécurité » pour certaines ressources spécifiques des collectivités territoriales d'outre-mer et de la Corse.
Ensuite, figure dans le texte l'exonération de la majoration exceptionnelle des indemnités versées au titre des gardes des internes. Il s'agit là d'une mesure d'équité fiscale.
De même, la PEPA pourra bien être exonérée à hauteur de 2 000 euros, sans condition, pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés.
La suppression du tarif réduit de TICPE applicable au GNR est bien reportée au 1er janvier 2023, comme l'a souligné le Président Woerth.
S'agissant du soutien aux entreprises face à la crise, l'aide à la reprise de fonds de commerce sera exonérée d'imposition, au même titre que les aides du fonds de solidarité, par cohérence.
Figure également la prorogation jusqu'à fin 2022 du relèvement temporaire à 25 % du taux de la réduction d'impôt sur le revenu pour l'investissement dans les foncières solidaires chargées d'un service d'intérêt économique général (SIEG).
Par ailleurs, j'espère que le Président Raynal sera satisfait que 50 millions d'euros soient finalement prévus au titre de l'investissement des autorités organisatrices des mobilités (AOM). C'est un compromis raisonnable.
De même, le texte conserve les 10 millions d'euros supplémentaires au titre de la forêt dans le plan de relance. La définition des dépenses couvertes étant de nature réglementaire, il conviendra de s'assurer que l'administration prévoit bien, en conséquence, le bénéfice de ces aides aux travaux préalables à la reforestation comme souhaité.
Le Gouvernement, par la voix du ministre Olivier Dussopt, cherche une solution pour l'aide aux entreprises créées en 2020 et qui n'ont, faute de chiffre d'affaire déclaré, obtenu aucun soutien de l'État. Je surveillerai cela de près, de même que l'intégration dans le dispositif de l'article 10 des quelques cas de régies nouvellement créées et qui n'ont pas de perte d'épargne brute à déclarer.
S'agissant du contrôle de l'usage des crédits ouverts dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative, le texte conserve la prolongation jusqu'à fin 2021 de l'information préalable à l'usage des enveloppes budgétaires accordées au titre des participations financières de l'État.
En retenant la même logique, si l'ouverture d'1,5 milliard d'euros au titre de la dotation pour les dépenses accidentelles et imprévisibles a été rétablie, nous avons toutefois inscrit une obligation d'information du Parlement au moins trois jours avant la publication du décret prévoyant le versement de plus de 100 millions d'euros sur un programme.
Bien sûr, quelques regrets subsistent et nous devrons continuer de convaincre dans la prochaine loi de finances. Mais ce collectif sera indubitablement enrichi à la suite de son examen par le Parlement, si vous acceptez le texte que nous vous proposons.
Nous sommes effectivement parvenus à un compromis et je m'en réjouis. Nous avons préservé la culture des collectifs budgétaires de crise, avec la volonté d'aboutir en CMP à un meilleur texte pour nos concitoyens, tout en respectant les principes que nous nous étions fixés - en particulier ceux de s'en tenir à l'urgence sans créer de fiscalité pérenne, de se focaliser sur les mesures réalisables les plus utiles à nos concitoyens et d'éviter de dégrader davantage le solde budgétaire.
Ce compromis comprend bien entendu les dispositions initiales du texte, très marquées par l'urgence et la nécessité de continuer à accompagner nos compatriotes et nos entreprises dans les mois qui viennent : rechargement des dispositifs d'urgence, activité partielle et fonds de solidarité, pour 10 milliards d'euros - et « remboursement » à l'activité partielle de longue durée des fonds qui ont servi à l'urgence, confortant les 100 milliards du plan de relance.
Je ne reviens pas sur les crédits ouverts en faveur de l'hébergement d'urgence, des étudiants boursiers, des agriculteurs touchés par le gel, tout cela pour répondre aussi aux besoins de nos concitoyens dans les semaines et mois qui viennent.
Je pense important de préserver 1,5 milliard d'euros de crédits pour les dépenses accidentelles et imprévues (DDAI). Le Sénat avait restreint ce montant pour des raisons de principe relatives à l'autorisation parlementaire ; je partage ces préoccupations, mais je crois que l'incertitude sanitaire justifie la position du Gouvernement. Nous proposons de l'accompagner d'un dispositif ad hoc d'information du Parlement.
Bien entendu, nous avons conservé les mesures initiales de ce texte, en particulier l'amélioration du carry back et le renouvellement de la PEPA. S'agissant des entreprises de moins de 50 salariés, nous proposons, à l'initiative du Sénat, d'ouvrir la majoration à toutes les entreprises de moins de 50 salariés. C'est différent de ce que nous avions adopté à l'Assemblée où nous souhaitions encourager la participation, mais celle-ci est encore trop peu développée dans les petites entreprises pour en faire aujourd'hui un levier, une condition à une politique en faveur du pouvoir d'achat. Nous avons aussi conservé le relèvement temporaire de la réduction d'impôt sur les dons pour les associations cultuelles ; la capacité à souscrire un prêt garanti par l'État jusqu'à la fin de l'année 2021 ; la prolongation du fonds de solidarité durant l'été.
Il nous semble important de proposer à la CMP des compléments, apportés au cours de la navette notamment par le Sénat. Je pense à la prorogation, en 2022, de la réduction d'impôt sur le revenu pour l'investissement dans une PME (IR-PME), avec l'ajout par le Sénat de la même prorogation pour le dispositif des foncières solidaires. Nous vous proposons également, à l'initiative de Jean-François Husson, une mesure de justice avec la défiscalisation des rémunérations supplémentaires des internes et étudiants en médecine.
Nous proposons encore d'intégrer le versement mobilité d'Île-de-France Mobilités dans le filet de sécurité des ressources des collectivités territoriales en 2021 et, à l'initiative du Sénat, des ressources spécifiques de certaines collectivités d'outre-mer et de la collectivité de Corse. Nous avons également inclus la prorogation de la déductibilité des abandons de loyers, qui avait été proposée à l'origine par mon collègue Jean-Noël Barrot. Enfin, nous avons prévu la faculté pour les communes d'exonérer de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) les propriétaires des murs de discothèques, quand ils ont consenti des remises de loyers aux gérants.
Ce compromis respecte le travail important effectué par chaque assemblée parlementaire, ainsi que l'esprit du texte que le Gouvernement nous a soumis. Je vous invite à l'adopter.
Merci pour cette présentation du compromis, nous y retrouvons des éléments votés au Sénat, y compris certains auxquels mon groupe s'était opposé. Je regrette que de nombreux amendements ne s'y retrouvent pas, en particulier les crédits que nous avions votés pour renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes, qui se sont accrues pendant les confinements.
Je félicite les rapporteurs généraux pour ce compromis. Je tiens cependant à souligner l'urgence qu'il y a de traiter la question du déficit structurel de La Poste au titre du service universel postal : il est évalué à 1,3 milliard d'euros, l'État a donné son accord de principe pour compenser cette somme, mais pour le moment il n'en n'a rien fait. Or, il faut le faire dès cette année, ou bien cette somme va peser non seulement sur La Poste, mais aussi sur la Caisse des dépôts et consignations, qui détient les deux-tiers du capital de La Poste - la perte pour la Caisse avoisinerait le milliard d'euros, ce qui diminuerait mécaniquement le versement qu'elle effectue chaque année à l'État... Le Gouvernement s'est engagé, mais il faut une disposition législative pour que la compensation soit effective et il y a urgence à le faire - je déplore que nous ne le fassions pas dans ce collectif budgétaire.
J'ai aussi déposé des amendements dans ce sens, ce sujet est majeur. Nous savons que La Poste paie indument environ 300 millions d'euros de taxe sur les salaires. Auparavant, elle payait moins de cotisations sociales, une grande partie de ses salariés étant fonctionnaires. Mais dès lors que les cotisations sociales ont été abaissées dans le privé, La Poste n'a plus cet avantage. Or l'État lui prélève toujours le surcroît de taxe sur les salaires : nous le savons tous, c'est 330 millions d'euros de « surtaxe », le rapport publié en mars dernier par le groupe sénatorial sur l'avenir de La Poste l'a bien montré. Supprimer cette surtaxe n'apporterait certes qu'une partie de la compensation de 1,3 milliard d'euros pour le service universel postal, mais c'est important. Enfin, j'attends le nouveau plan de relance dans un nouveau collectif budgétaire.
Je m'associe entièrement à ces remarques sur la compensation du service universel postal.
Nous devons également nous inquiéter des AOM, qui continuent d'enregistrer des pertes tarifaires d'au moins 20 % par rapport à l'avant-crise sanitaire - avec des conséquences directes sur leurs capacités à financer des projets de rénovation et de développement que nous savons nécessaires, en particulier à la transition énergétique. Le Gouvernement a certes lancé un appel à projets de 450 millions d'euros, mais les travaux utiles s'élèvent à 11 milliards d'euros, c'est dire qu'il y a beaucoup à faire. Je me réjouis qu'il y ait un signal dans ce collectif budgétaire, mais il faudra y revenir en loi de finances, les AOM nous attendent.
Nous avons pris pour méthode de ne pas créer de petits programmes dans la maquette budgétaire, pour ne pas la rendre plus complexe et illisible, et nous avons opté pour des augmentations sans changer de maquette. Certains amendements étaient pertinents, en particulier l'objectif de renforcer la lutte contre les violences faites aux femmes, mais ils modifiaient la maquette budgétaire, d'où notre position pour ne pas les reprendre. Cela dit, nous examinons aussi le fond, et nous avons constaté, sur cette question, que depuis la fin avril, 1 000 places supplémentaires ont été ouvertes en accueil et en hébergement d'urgence, auxquelles les femmes victimes de violence ont accès ; les moyens sont renforcés et je considère à ce titre que vos amendements sont satisfaits.
La compensation du service universel postal à La Poste est un problème dont nous avons déjà parlé avec Gilles Carrez, nous sommes mobilisés. Cette compensation ne saurait être seulement budgétaire et financière, la véritable question associée est celle de la transformation de La Poste - et sur ce point, nous savons que des discussions se poursuivent, pour que La Poste adapte son service.
Sur les AOM, je rejoins le Président Claude Raynal. Cependant, nous avions voté il y a un an un acompte de 425 millions d'euros pour Île-de-France Mobilités au titre de la garantie de ressources portant sur le versement mobilité. Eu égard aux modalités de calcul alors votées, le montant définitif garanti devrait s'élever à seulement environ 150 millions d'euros : il est toujours difficile de prévoir avec précision quelles seront les pertes réelles des entreprises.
Un mot sur les éléments que nous avions votés au Sénat et qui ne figurent pas dans ce compromis : je n'ai pas obtenu partout satisfaction, c'est la règle, mais je veux souligner que j'ai insisté sur la question des moyens budgétaires de la lutte contre les violences faites aux femmes, nous en débattrons de nouveau en loi de finances.
Un compromis ne peut jamais retenir toutes les propositions, le texte évolue, nous avons bien travaillé. Le sujet sur La Poste n'a rien d'anodin, le problème est structurel, c'est un sujet de loi de finances initiale et nous y reviendrons.
La commission mixte paritaire adopte, dans la rédaction proposée par ses rapporteurs, l'ensemble des dispositions restant en discussion du projet de loi.
La réunion est close à 19 h 15.