Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies

Réunion du 8 septembre 2020 à 17h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • EHPAD
  • décès
  • résidents
  • âgée

La réunion

Source

Photo de René-Paul Savary

Un traçage précis des événements nous permettra en effet d'établir le rapport dont nous avons la charge en tant que commission d'enquête.

Merci pour votre participation.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 12 h 55.

- Présidence de M. René-Paul Savary, vice-président -

La réunion est ouverte à 17 h 30.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Un traçage précis des événements nous permettra en effet d'établir le rapport dont nous avons la charge en tant que commission d'enquête.

Merci pour votre participation.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 12 h 55.

- Présidence de M. René-Paul Savary, vice-président -

La réunion est ouverte à 17 h 30.

Photo de René-Paul Savary

Je vous prie d'excuser l'absence du président Milon, président la commission des affaires sociales, retenu dans son département et que je serai amené à remplacer pour les auditions du mois de septembre.

Nous poursuivons nos travaux avec l'audition du Pr Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie. Nous savons les difficultés que nous avons pu rencontrer dans ce domaine, les personnes âgées ayant été les plus touchées.

Nous espérons que cette audition contribue à répondre à nos interrogations sur la manière dont notre pays aurait pu apporter une meilleure réponse à la crise sanitaire, qui permette d'éviter autant de décès chez les résidents d'Ehpad et les personnes âgées les plus fragiles.

Je vais donner à notre intervenant un temps de parole d'environ 10 minutes avant de passer aux questions des rapporteurs, puis de nos commissaires.

À toutes fins utiles, je rappelle à tous que le port du masque est obligatoire et je vous remercie pour votre vigilance.

Je vais maintenant, conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, vous demander de prêter serment.

Je rappelle que tout témoignage mensonger devant une commission d'enquête parlementaire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Jeandel prête serment.

Monsieur le Professeur, vous avez la parole.

Photo de René-Paul Savary

Je vous prie d'excuser l'absence du président Milon, président la commission des affaires sociales, retenu dans son département et que je serai amené à remplacer pour les auditions du mois de septembre.

Nous poursuivons nos travaux avec l'audition du Pr Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie. Nous savons les difficultés que nous avons pu rencontrer dans ce domaine, les personnes âgées ayant été les plus touchées.

Nous espérons que cette audition contribue à répondre à nos interrogations sur la manière dont notre pays aurait pu apporter une meilleure réponse à la crise sanitaire, qui permette d'éviter autant de décès chez les résidents d'Ehpad et les personnes âgées les plus fragiles.

Je vais donner à notre intervenant un temps de parole d'environ 10 minutes avant de passer aux questions des rapporteurs, puis de nos commissaires.

À toutes fins utiles, je rappelle à tous que le port du masque est obligatoire et je vous remercie pour votre vigilance.

Je vais maintenant, conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, vous demander de prêter serment.

Je rappelle que tout témoignage mensonger devant une commission d'enquête parlementaire est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Jeandel prête serment.

Monsieur le Professeur, vous avez la parole.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je m'exprime aujourd'hui au nom du Conseil professionnel de gériatrie, instance qui fédère huit composantes nationales représentatives des différents métiers de l'exercice gériatrique : une société savante, la société française de gériatrie-gérontologie ; une société universitaire, le collège national des enseignants de gériatrie ; deux fédérations, l'association des médecins coordonnateurs d'Ehpad, le syndicat national de gérontologie clinique ; le syndicat CSMF (Confédération des Syndicats Médicaux Français) des médecins coordonnateurs ; les médecins gériatres libéraux et enfin l'association des jeunes gériatres.

Dès la mi-mars, nos instances ont entretenu des relations très proches avec les cabinets du ministère des Solidarités et de la Santé, puis avec Matignon et les administrations centrales. La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) organisait également des réunions mensuelles auxquelles je participais. Nous étions de plus en lien avec la direction générale de l'offre de soins (DGOS), avec les agences régionales de santé (ARS) au niveau régional ainsi qu'avec le conseil scientifique qui nous a interrogés.

Le 20 mars 2020, avec dix autres organismes nationaux, représentant l'ensemble du secteur - la fédération hospitalière de France (FHF), le syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa), les différentes associations de directeurs d'établissement et de soins à domicile et l'Uniopss - nous avons attiré l'attention du ministère sur les équipements de protection individuelle (EPI), et particulièrement les masques, qu'il nous paraissait urgent de mettre à disposition des résidents des Ehpad et des personnels. Nous avions estimé à 500 000 le nombre de masques nécessaires par jour pour les Ehpad uniquement, à savoir 60 masques pour un Ehpad de 80 places, soit 5 masques par jour et par personne.

Dans cette même correspondance, nous faisions référence aux difficultés d'accès des résidents des Ehpad à l'hospitalisation. Les mesures ont été mises en place de manière graduelle pour doter en EPI ces établissements.

Une seconde correspondance du 26 mars attire l'attention sur la nécessité d'identifier les personnes à risque, dans les Ehpad, mais aussi à domicile pour les personnes vulnérables - âgées de plus de 75 ans ou présentant des facteurs de comorbidité tels que des polypathologies ou des infections. Nous avions différencié trois situations :

- les résidents d'établissement étant soit en soins palliatifs, soit en fin de vie, pour lesquels la prise en soin doit être assurée là où ils sont hébergés ;

- les résidents qui présentent une suspicion de covid-19 et dont le pronostic vital n'est a priori pas en jeu au regard de leur morbidité et des premières manifestations de la maladie ;

- les résidents présentant une infection sur un organisme vulnérable, accompagnée de signes de détresse respiratoire ou en tout cas de formes cliniques préoccupantes justifiant le recours à l'hospitalisation.

Je rappelle que les Ehpad, par leur histoire, ne sont pas à même d'assurer des soins continus chez des patients à risque de décompensation d'organe. La covid est un des facteurs pronostics et survient sur des organismes fragilisés. La permanence infirmière n'est notamment pas assurée la nuit dans ces établissements.

Nous avons annoncé neuf mesures afin d'atténuer l'impact de l'infection de covid-19 : garantir l'accès à l'hospitalisation des résidents et des personnes âgées vivant à domicile, suspectées ou confirmées et dont le pronostic vital est engagé ; permettre le recours à l'expertise gériatrique et en soins palliatifs en renforçant les équipes mobiles se déplaçant dans les établissements ; faciliter l'accès aux tests PCR au sein des Ehpad et à domicile et garantir leurs conditions de réalisation ; renforcer l'encadrement médical des Ehpad et garantir le financement d'une permanence infirmière de nuit ; assurer une permanence de gériatres 24 heures sur 24 par territoire, ce qui a été mis en place au travers d'une plateforme ; autoriser le recours aux molécules réservées à ce jour à l'usage hospitalier. Un décret a mis en place cette mesure quelques jours plus tard ; élargir les autorisations de prescriptions du médecin coordonnateur dans cette situation exceptionnelle ; permettre la mise en oeuvre par l'infirmière de la prescription réalisée à distance par le médecin ; engager rapidement un essai clinique sur le volet recherche.

Ces mesures ont pour la plupart d'entre elles été suivies de réponse. J'ai ici une fiche ARS, intitulée « Stratégie de prise en charge des personnes âgées en établissement et à domicile dans le cadre de la gestion de l'épidémie de Covid 19 » qui reprend en grande partie ces éléments. Nous avons élaboré un logigramme pour aider à la prise des décisions des établissements, en tenant compte de différents paramètres.

Je voudrais mentionner une correspondance du 10 avril, qui attire l'attention sur les effets potentiellement délétères du confinement, en incitant à mettre en place des solutions impliquant l'ensemble des professionnels de santé libéraux, les médecins généralistes et les spécialistes.

Enfin, une correspondance du 11 avril, à la demande du cabinet du ministre, a trait à la doctrine à établir quant à la réalisation de tests en Ehpad, en insistant sur la nécessité de tester l'ensemble des résidents et soignants dès l'apparition d'une suspicion d'infection.

Ces réflexions se sont traduites par la révision d'un manifeste publié en 2019, comportant initialement quinze mesures et élargi à 22 mesures en 2020. Certaines ont fait leurs preuves pendant cette crise. Je pense notamment aux plateformes gériatriques qui font l'interface entre l'Ehpad, l'hôpital et le domicile, la nécessité de revoir la dotation des Ehpad en matière de moyens humains avec un ratio de soignants minimal pour un Ehpad de 80 places, le fait de permettre aux médecins de se déplacer plus volontiers au domicile pour tenir compte de la spécificité des personnes à domicile qui sont GIR 1, 2 ou 3 et se déplacent difficilement. D'autres mesures avaient trait à la spécialité que je représente, à savoir la nécessité de revoir le nombre de gériatres qualifiés.

Je m'arrête ici pour respecter le temps de parole qui m'est attribué.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je m'exprime aujourd'hui au nom du Conseil professionnel de gériatrie, instance qui fédère huit composantes nationales représentatives des différents métiers de l'exercice gériatrique : une société savante, la société française de gériatrie-gérontologie ; une société universitaire, le collège national des enseignants de gériatrie ; deux fédérations, l'association des médecins coordonnateurs d'Ehpad, le syndicat national de gérontologie clinique ; le syndicat CSMF (Confédération des Syndicats Médicaux Français) des médecins coordonnateurs ; les médecins gériatres libéraux et enfin l'association des jeunes gériatres.

Dès la mi-mars, nos instances ont entretenu des relations très proches avec les cabinets du ministère des Solidarités et de la Santé, puis avec Matignon et les administrations centrales. La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) organisait également des réunions mensuelles auxquelles je participais. Nous étions de plus en lien avec la direction générale de l'offre de soins (DGOS), avec les agences régionales de santé (ARS) au niveau régional ainsi qu'avec le conseil scientifique qui nous a interrogés.

Le 20 mars 2020, avec dix autres organismes nationaux, représentant l'ensemble du secteur - la fédération hospitalière de France (FHF), le syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa), les différentes associations de directeurs d'établissement et de soins à domicile et l'Uniopss - nous avons attiré l'attention du ministère sur les équipements de protection individuelle (EPI), et particulièrement les masques, qu'il nous paraissait urgent de mettre à disposition des résidents des Ehpad et des personnels. Nous avions estimé à 500 000 le nombre de masques nécessaires par jour pour les Ehpad uniquement, à savoir 60 masques pour un Ehpad de 80 places, soit 5 masques par jour et par personne.

Dans cette même correspondance, nous faisions référence aux difficultés d'accès des résidents des Ehpad à l'hospitalisation. Les mesures ont été mises en place de manière graduelle pour doter en EPI ces établissements.

Une seconde correspondance du 26 mars attire l'attention sur la nécessité d'identifier les personnes à risque, dans les Ehpad, mais aussi à domicile pour les personnes vulnérables - âgées de plus de 75 ans ou présentant des facteurs de comorbidité tels que des polypathologies ou des infections. Nous avions différencié trois situations :

- les résidents d'établissement étant soit en soins palliatifs, soit en fin de vie, pour lesquels la prise en soin doit être assurée là où ils sont hébergés ;

- les résidents qui présentent une suspicion de covid-19 et dont le pronostic vital n'est a priori pas en jeu au regard de leur morbidité et des premières manifestations de la maladie ;

- les résidents présentant une infection sur un organisme vulnérable, accompagnée de signes de détresse respiratoire ou en tout cas de formes cliniques préoccupantes justifiant le recours à l'hospitalisation.

Je rappelle que les Ehpad, par leur histoire, ne sont pas à même d'assurer des soins continus chez des patients à risque de décompensation d'organe. La covid est un des facteurs pronostics et survient sur des organismes fragilisés. La permanence infirmière n'est notamment pas assurée la nuit dans ces établissements.

Nous avons annoncé neuf mesures afin d'atténuer l'impact de l'infection de covid-19 : garantir l'accès à l'hospitalisation des résidents et des personnes âgées vivant à domicile, suspectées ou confirmées et dont le pronostic vital est engagé ; permettre le recours à l'expertise gériatrique et en soins palliatifs en renforçant les équipes mobiles se déplaçant dans les établissements ; faciliter l'accès aux tests PCR au sein des Ehpad et à domicile et garantir leurs conditions de réalisation ; renforcer l'encadrement médical des Ehpad et garantir le financement d'une permanence infirmière de nuit ; assurer une permanence de gériatres 24 heures sur 24 par territoire, ce qui a été mis en place au travers d'une plateforme ; autoriser le recours aux molécules réservées à ce jour à l'usage hospitalier. Un décret a mis en place cette mesure quelques jours plus tard ; élargir les autorisations de prescriptions du médecin coordonnateur dans cette situation exceptionnelle ; permettre la mise en oeuvre par l'infirmière de la prescription réalisée à distance par le médecin ; engager rapidement un essai clinique sur le volet recherche.

Ces mesures ont pour la plupart d'entre elles été suivies de réponse. J'ai ici une fiche ARS, intitulée « Stratégie de prise en charge des personnes âgées en établissement et à domicile dans le cadre de la gestion de l'épidémie de Covid 19 » qui reprend en grande partie ces éléments. Nous avons élaboré un logigramme pour aider à la prise des décisions des établissements, en tenant compte de différents paramètres.

Je voudrais mentionner une correspondance du 10 avril, qui attire l'attention sur les effets potentiellement délétères du confinement, en incitant à mettre en place des solutions impliquant l'ensemble des professionnels de santé libéraux, les médecins généralistes et les spécialistes.

Enfin, une correspondance du 11 avril, à la demande du cabinet du ministre, a trait à la doctrine à établir quant à la réalisation de tests en Ehpad, en insistant sur la nécessité de tester l'ensemble des résidents et soignants dès l'apparition d'une suspicion d'infection.

Ces réflexions se sont traduites par la révision d'un manifeste publié en 2019, comportant initialement quinze mesures et élargi à 22 mesures en 2020. Certaines ont fait leurs preuves pendant cette crise. Je pense notamment aux plateformes gériatriques qui font l'interface entre l'Ehpad, l'hôpital et le domicile, la nécessité de revoir la dotation des Ehpad en matière de moyens humains avec un ratio de soignants minimal pour un Ehpad de 80 places, le fait de permettre aux médecins de se déplacer plus volontiers au domicile pour tenir compte de la spécificité des personnes à domicile qui sont GIR 1, 2 ou 3 et se déplacent difficilement. D'autres mesures avaient trait à la spécialité que je représente, à savoir la nécessité de revoir le nombre de gériatres qualifiés.

Je m'arrête ici pour respecter le temps de parole qui m'est attribué.

Photo de René-Paul Savary

Nous traitons dans cette commission d'enquête de la crise, et nous n'allons pas régler la problématique des gériatres. Vous avez souhaité être auditionné, vous avez attiré l'attention du ministère, vous avez été écouté pour partie. Votre aide pourra être précieuse afin de savoir comment tirer les leçons de cette crise. Je laisse la parole aux rapporteurs.

Photo de René-Paul Savary

Nous traitons dans cette commission d'enquête de la crise, et nous n'allons pas régler la problématique des gériatres. Vous avez souhaité être auditionné, vous avez attiré l'attention du ministère, vous avez été écouté pour partie. Votre aide pourra être précieuse afin de savoir comment tirer les leçons de cette crise. Je laisse la parole aux rapporteurs.

Photo de Sylvie Vermeillet

Je réagis par rapport aux neuf mesures que vous avez déclinées. La première vise à garantir l'accès à l'hôpital à toute personne en Ehpad présentant des graves difficultés. Cela n'a donc pas toujours été le cas ?

Photo de Sylvie Vermeillet

Je réagis par rapport aux neuf mesures que vous avez déclinées. La première vise à garantir l'accès à l'hôpital à toute personne en Ehpad présentant des graves difficultés. Cela n'a donc pas toujours été le cas ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Dans la région Grand Est, qui a été parmi les premières touchées, la réponse n'a pas été immédiatement adaptée du fait d'un effet de sidération. Nous avons proposé pour cette raison d'ouvrir l'ensemble de l'offre sanitaire.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Dans la région Grand Est, qui a été parmi les premières touchées, la réponse n'a pas été immédiatement adaptée du fait d'un effet de sidération. Nous avons proposé pour cette raison d'ouvrir l'ensemble de l'offre sanitaire.

Photo de Sylvie Vermeillet

Pouvez-vous quantifier le nombre de personnes en Ehpad qui seraient concernées ?

Photo de Sylvie Vermeillet

Pouvez-vous quantifier le nombre de personnes en Ehpad qui seraient concernées ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je ne dispose pas de cette information. Mais la proportion des plus de 75 ans dans les services d'urgence n'a pas été corrélée au fait que cette population était la plus impactée. On pourrait en déduire que cette population n'a pas été amenée vers l'hôpital aussi rapidement que les autres tranches d'âge.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je ne dispose pas de cette information. Mais la proportion des plus de 75 ans dans les services d'urgence n'a pas été corrélée au fait que cette population était la plus impactée. On pourrait en déduire que cette population n'a pas été amenée vers l'hôpital aussi rapidement que les autres tranches d'âge.

Photo de Catherine Deroche

Michèle Delaunay, spécialiste du grand âge, nous indiquait que l'isolement a pu être terrible pour les personnes âgées. Quelle a été la gestion de cet isolement dans les établissements ? Quelles en sont les causes en matière de pénurie d'EPI ou de tests ? Par ailleurs, on voit actuellement des cas positifs détectés dans des établissements, parmi le personnel et les résidents, par exemple dans un Ehpad de l'Aveyron. Quelle est aujourd'hui votre vision de la situation des personnes âgées ?

Photo de Catherine Deroche

Michèle Delaunay, spécialiste du grand âge, nous indiquait que l'isolement a pu être terrible pour les personnes âgées. Quelle a été la gestion de cet isolement dans les établissements ? Quelles en sont les causes en matière de pénurie d'EPI ou de tests ? Par ailleurs, on voit actuellement des cas positifs détectés dans des établissements, parmi le personnel et les résidents, par exemple dans un Ehpad de l'Aveyron. Quelle est aujourd'hui votre vision de la situation des personnes âgées ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Le confinement avait pour but de protéger les personnes les plus vulnérables. Nous avions annoncé que le risque de chaîne de contamination était grand dès lors que le virus entrait dans un Ehpad. Nous savions que le premier vecteur était les aides-soignants et les proches. Aujourd'hui, dans la mesure où les mesures barrière sont strictement respectées, la situation est différente et doit permettre d'éviter un nouveau confinement. Je parle ici de prévention, les cas contaminés peuvent être quant à eux isolés.

Le respect des gestes barrière doit permettre d'éviter les transmissions. Dans les établissements au sein desquels on constate des premiers cas, il est impératif d'appliquer ces mesures barrières strictes et de réaliser des tests, dès lors qu'on a une quelconque suspicion concernant un soignant ou un proche.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Le confinement avait pour but de protéger les personnes les plus vulnérables. Nous avions annoncé que le risque de chaîne de contamination était grand dès lors que le virus entrait dans un Ehpad. Nous savions que le premier vecteur était les aides-soignants et les proches. Aujourd'hui, dans la mesure où les mesures barrière sont strictement respectées, la situation est différente et doit permettre d'éviter un nouveau confinement. Je parle ici de prévention, les cas contaminés peuvent être quant à eux isolés.

Le respect des gestes barrière doit permettre d'éviter les transmissions. Dans les établissements au sein desquels on constate des premiers cas, il est impératif d'appliquer ces mesures barrières strictes et de réaliser des tests, dès lors qu'on a une quelconque suspicion concernant un soignant ou un proche.

Photo de René-Paul Savary

Si nous avions eu le matériel de protection nécessaire, nous aurions pu éviter certains cas.

Photo de René-Paul Savary

Si nous avions eu le matériel de protection nécessaire, nous aurions pu éviter certains cas.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Il ne s'agit pas uniquement de matériel, mais aussi de procédures, de contrôle de ces procédures et d'éducation. Concernant le comportement vis-à-vis de l'hygiène, nous avons tous été repris à l'ordre. Dans le secteur médico-social et bien évidemment à domicile, les pratiques hygiénistes n'étaient peut-être pas suffisamment appliquées par rapport aux établissements sanitaires, qui étaient peut-être plus armés.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Il ne s'agit pas uniquement de matériel, mais aussi de procédures, de contrôle de ces procédures et d'éducation. Concernant le comportement vis-à-vis de l'hygiène, nous avons tous été repris à l'ordre. Dans le secteur médico-social et bien évidemment à domicile, les pratiques hygiénistes n'étaient peut-être pas suffisamment appliquées par rapport aux établissements sanitaires, qui étaient peut-être plus armés.

Photo de Bernard Jomier

Je reprends la question posée par Catherine Deroche qui s'appuyait sur les propos de Michèle Delaunay. Il y a là une question de fond, qui est revenue dans les propos du Comité consultatif national d'éthique (CCNE). Quelle légitimité avons-nous de décider pour des personnes n'ayant pas de trouble cognitif et qui disposent de leur libre-arbitre ? Est-ce que, parce qu'on a 75, 80 ou 85 ans, et qu'on réside dans un habitat collectif, on doit être soumis à une décision, et non pas choisir soi-même si on veut assumer un risque ou si l'on accepte une contrainte d'isolement social ? Comment votre instance aborde-t-elle la question du libre choix et du fait qu'être une personne âgée n'est pas synonyme d'infantilisation ni de renoncement à exercer ses droits ?

Cette épidémie nous a surpris sur de nombreux plans, mais nous savions en observant l'épidémie en Chine que les personnes âgées étaient plus à risque. Avant même que la vague ne déferle, nous savions que cette catégorie de population serait touchée du fait de l'expérience chinoise. Quelle a été la parole des gériatres au mois de février ? Comment vous êtes-vous préparés et qu'avez-vous alors dit aux pouvoirs publics ? Avez-vous été sollicités pour préparer le monde de la gériatrie à protéger les personnes âgées ?

Photo de Bernard Jomier

Je reprends la question posée par Catherine Deroche qui s'appuyait sur les propos de Michèle Delaunay. Il y a là une question de fond, qui est revenue dans les propos du Comité consultatif national d'éthique (CCNE). Quelle légitimité avons-nous de décider pour des personnes n'ayant pas de trouble cognitif et qui disposent de leur libre-arbitre ? Est-ce que, parce qu'on a 75, 80 ou 85 ans, et qu'on réside dans un habitat collectif, on doit être soumis à une décision, et non pas choisir soi-même si on veut assumer un risque ou si l'on accepte une contrainte d'isolement social ? Comment votre instance aborde-t-elle la question du libre choix et du fait qu'être une personne âgée n'est pas synonyme d'infantilisation ni de renoncement à exercer ses droits ?

Cette épidémie nous a surpris sur de nombreux plans, mais nous savions en observant l'épidémie en Chine que les personnes âgées étaient plus à risque. Avant même que la vague ne déferle, nous savions que cette catégorie de population serait touchée du fait de l'expérience chinoise. Quelle a été la parole des gériatres au mois de février ? Comment vous êtes-vous préparés et qu'avez-vous alors dit aux pouvoirs publics ? Avez-vous été sollicités pour préparer le monde de la gériatrie à protéger les personnes âgées ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Pour répondre à la première question, 80 % des personnes en Ehpad présentent des troubles de la cohérence qui ne permettent pas de prendre des décisions éclairées et d'évaluer les risques qu'elles encourent. Nous sommes dans ce cas obligés, a fortiori lorsque ces personnes sont sous protection juridique, de prendre des précautions. Cela fait partie de notre responsabilité collective. S'agissant des personnes, je n'aime pas le terme de personnes âgées, disons plutôt de « personnes avançant en âge », dès lors qu'elles ne présentent pas de trouble cognitif, il n'y a pas de différence entre une personne de 90 ans et quelqu'un de 50 ans. Il faut dans ce cas s'assurer que le risque pour elles et pour leurs proches, ainsi que les enjeux, sont bien connus et bien pris en compte.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Pour répondre à la première question, 80 % des personnes en Ehpad présentent des troubles de la cohérence qui ne permettent pas de prendre des décisions éclairées et d'évaluer les risques qu'elles encourent. Nous sommes dans ce cas obligés, a fortiori lorsque ces personnes sont sous protection juridique, de prendre des précautions. Cela fait partie de notre responsabilité collective. S'agissant des personnes, je n'aime pas le terme de personnes âgées, disons plutôt de « personnes avançant en âge », dès lors qu'elles ne présentent pas de trouble cognitif, il n'y a pas de différence entre une personne de 90 ans et quelqu'un de 50 ans. Il faut dans ce cas s'assurer que le risque pour elles et pour leurs proches, ainsi que les enjeux, sont bien connus et bien pris en compte.

Photo de Bernard Jomier

Ce n'est pas ce qui a été fait pour les personnes ne présentant pas de troubles cognitifs massifs. Vous donnez corps aux propos de Michèle Delaunay.

Photo de Bernard Jomier

Ce n'est pas ce qui a été fait pour les personnes ne présentant pas de troubles cognitifs massifs. Vous donnez corps aux propos de Michèle Delaunay.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

La grande difficulté sont les personnes isolées qui présentent des troubles sans le savoir. Il faut vérifier qu'elles sont informées et qu'on a mis en place les mesures les concernant. M. Guedj a fait un rapport sur ce sujet pour tenter d'identifier ces personnes. C'est un enjeu majeur de société sur lequel il faut travailler et dont la crise a révélé les fragilités.

Sur la deuxième question, nous étions en prise directe avec le virus à partir du premier foyer dans le Grand Est. Je crois que vous avez été amenés à auditionner certains de mes collègues qui étaient dans cette région. Nous ne pouvions que gérer la crise, nous étions la « tête dans le guidon » et loin de pouvoir nous exprimer sur les sujets que vous avez évoqués. Nous ne sommes pas un grand corps professionnel, nous sommes peu nombreux et la plupart d'entre nous sommes sur le terrain à pratiquer notre métier.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

La grande difficulté sont les personnes isolées qui présentent des troubles sans le savoir. Il faut vérifier qu'elles sont informées et qu'on a mis en place les mesures les concernant. M. Guedj a fait un rapport sur ce sujet pour tenter d'identifier ces personnes. C'est un enjeu majeur de société sur lequel il faut travailler et dont la crise a révélé les fragilités.

Sur la deuxième question, nous étions en prise directe avec le virus à partir du premier foyer dans le Grand Est. Je crois que vous avez été amenés à auditionner certains de mes collègues qui étaient dans cette région. Nous ne pouvions que gérer la crise, nous étions la « tête dans le guidon » et loin de pouvoir nous exprimer sur les sujets que vous avez évoqués. Nous ne sommes pas un grand corps professionnel, nous sommes peu nombreux et la plupart d'entre nous sommes sur le terrain à pratiquer notre métier.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Tout à fait.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Tout à fait.

Photo de René-Paul Savary

Moi qui suis un élu du Grand Est, nous avons effectivement constaté que les personnes âgées n'étaient pas prises en compte ou très tardivement. Si nous n'avions pas alerté le département et les ARS, le retard aurait été encore plus accentué. Il est vrai que la vague a été très brutale. L'expérience a t-elle été tirée ?

Photo de René-Paul Savary

Moi qui suis un élu du Grand Est, nous avons effectivement constaté que les personnes âgées n'étaient pas prises en compte ou très tardivement. Si nous n'avions pas alerté le département et les ARS, le retard aurait été encore plus accentué. Il est vrai que la vague a été très brutale. L'expérience a t-elle été tirée ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Nous parlons des Ehpad, mais il ne faut pas oublier les personnes à domicile pour lesquelles nous avons moins d'informations.

Les établissements médico-sociaux n'étaient pas armés, à la différence des établissements sanitaires qui disposent de moyens humains et d'une médicalisation bien différente. Un grand nombre, voire la majorité des Ehpad ont su faire face, tirant les leçons de la région Grand Est. Pour autant, ce secteur reste fragile au regard de la population qu'il accueille. Depuis la création des Ehpad en 1999, nous n'avons plus affaire aujourd'hui à la population qu'il y avait il y a vingt, ou même dix ans si l'on regarde les profils de soins ou d'accompagnement, les fameux PMP-GMP. Et ce mouvement est appelé à se prolonger. Il faut donc se repencher sur le modèle des Ehpad. La résidence d'autonomie d'aujourd'hui est l'Ehpad d'hier et l'Ehpad d'aujourd'hui ressemble à un soin de longue durée. Il faut réagir.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Nous parlons des Ehpad, mais il ne faut pas oublier les personnes à domicile pour lesquelles nous avons moins d'informations.

Les établissements médico-sociaux n'étaient pas armés, à la différence des établissements sanitaires qui disposent de moyens humains et d'une médicalisation bien différente. Un grand nombre, voire la majorité des Ehpad ont su faire face, tirant les leçons de la région Grand Est. Pour autant, ce secteur reste fragile au regard de la population qu'il accueille. Depuis la création des Ehpad en 1999, nous n'avons plus affaire aujourd'hui à la population qu'il y avait il y a vingt, ou même dix ans si l'on regarde les profils de soins ou d'accompagnement, les fameux PMP-GMP. Et ce mouvement est appelé à se prolonger. Il faut donc se repencher sur le modèle des Ehpad. La résidence d'autonomie d'aujourd'hui est l'Ehpad d'hier et l'Ehpad d'aujourd'hui ressemble à un soin de longue durée. Il faut réagir.

Photo de René-Paul Savary

Le délai moyen pour finir ses jours en Ehpad est de deux ans à deux ans et demi, il faut le rappeler.

Photo de René-Paul Savary

Le délai moyen pour finir ses jours en Ehpad est de deux ans à deux ans et demi, il faut le rappeler.

Photo de Laurence Cohen

Pour poursuivre les réflexions de Catherine Deroche et de Bernard Jomier, cela pose la question du libre arbitre de ces résidents, pour les personnes en capacité de jugement. Il y a là quelque chose qui ne va pas : ils subissent des décisions prises sans eux et en dehors d'eux. Cela constitue un déficit de notre démocratie sanitaire. Les associations de patients ne sont pas associées aux prises de décisions et nous voyons avec la crise de la covid-19 l'acuité de ce manque. C'est une problématique qui concerne les professionnels qui passent des Ehpad aux soins à domicile, mais aussi de la société toute entière. Après un certain âge, conserve-t-on une citoyenneté pleine et entière ? Cette question me semble fondamentale.

La représentante de l'association Renaloo, que nous avons auditionnée ce matin, a posé cette question du pouvoir du corps médical à l'égard des patients. Elle nous a alertés sur le maintien du droit individuel à l'information et à la décision médicale partagée pour les patients. Nous voyons qu'il y a aujourd'hui une dérive de notre système.

Quelle est votre approche par rapport à cet état de fait et comment travaillez-vous pour le dépasser ? Avez-vous le sentiment qu'il y a désormais une prise de conscience des pouvoirs publics ?

J'entendais samedi dernier sur France Inter une dame de 102 ans, navrée de sa privation de liberté et coincée dans sa chambre du fait d'un lourd protocole de désinfection. Je ne dis pas que ces mesures n'étaient pas nécessaires, mais les conditions dans lesquelles elles sont prises se font en dehors de la personne et sans son adhésion. Cela peut entraîner ce qu'on appelle des phénomènes de glissement. Certaines personnes ne sont pas mortes de la covid-19 mais du fait d'être trop seules.

Comment cela peut-il être dépassé ?

Photo de Laurence Cohen

Pour poursuivre les réflexions de Catherine Deroche et de Bernard Jomier, cela pose la question du libre arbitre de ces résidents, pour les personnes en capacité de jugement. Il y a là quelque chose qui ne va pas : ils subissent des décisions prises sans eux et en dehors d'eux. Cela constitue un déficit de notre démocratie sanitaire. Les associations de patients ne sont pas associées aux prises de décisions et nous voyons avec la crise de la covid-19 l'acuité de ce manque. C'est une problématique qui concerne les professionnels qui passent des Ehpad aux soins à domicile, mais aussi de la société toute entière. Après un certain âge, conserve-t-on une citoyenneté pleine et entière ? Cette question me semble fondamentale.

La représentante de l'association Renaloo, que nous avons auditionnée ce matin, a posé cette question du pouvoir du corps médical à l'égard des patients. Elle nous a alertés sur le maintien du droit individuel à l'information et à la décision médicale partagée pour les patients. Nous voyons qu'il y a aujourd'hui une dérive de notre système.

Quelle est votre approche par rapport à cet état de fait et comment travaillez-vous pour le dépasser ? Avez-vous le sentiment qu'il y a désormais une prise de conscience des pouvoirs publics ?

J'entendais samedi dernier sur France Inter une dame de 102 ans, navrée de sa privation de liberté et coincée dans sa chambre du fait d'un lourd protocole de désinfection. Je ne dis pas que ces mesures n'étaient pas nécessaires, mais les conditions dans lesquelles elles sont prises se font en dehors de la personne et sans son adhésion. Cela peut entraîner ce qu'on appelle des phénomènes de glissement. Certaines personnes ne sont pas mortes de la covid-19 mais du fait d'être trop seules.

Comment cela peut-il être dépassé ?

Photo de Roger Karoutchi

Pendant la crise, les 120 Ehpad de mon département des Hauts de Seine ont été très durement touchés. L'immense majorité d'entre eux a subi des cas de covid-19 et de nombreux décès. La conception des Ehpad doit-elle être modifiée ? Les chiffres des morts en Ehpad ou issus des Ehpad mais décédés à l'hôpital s'élèvent entre 15 000 à 16 000 décès sur 700 000 résidents, soit le même nombre de décès que celui constaté sur les cinq millions de personnes âgées vivant à domicile. Le vrai sujet est de savoir si la conception de l'Ehpad pensée il y a vingt ans n'est pas dépassée aujourd'hui.

Une majorité des résidents en Ehpad n'ont pas toutes leurs capacités cognitives et ne se rendent pas compte qu'ils risquent la mort. Mais la minorité, c'est-à-dire les 25 % restant qui ont toutes leurs facultés, est traitée de la même manière. Je sais bien qu'on me répondra qu'une telle sectorisation est impossible. Le fonctionnement des Ehpad peut-il cependant être modifié pour éviter ces situations ? La mortalité en Ehpad n'est-elle pas un élément déterminant qui nous indique qu'il n'est pas possible de continuer avec un système qui ne permet pas de sauver les personnes ?

Dans le département des Hauts-de-Seine, on avait parfois le sentiment que, à partir du moment où il y avait quelques cas dans un Ehpad, c'était fini, on attendait juste de savoir qui pouvait survivre, ce qui est épouvantable.

Photo de Roger Karoutchi

Pendant la crise, les 120 Ehpad de mon département des Hauts de Seine ont été très durement touchés. L'immense majorité d'entre eux a subi des cas de covid-19 et de nombreux décès. La conception des Ehpad doit-elle être modifiée ? Les chiffres des morts en Ehpad ou issus des Ehpad mais décédés à l'hôpital s'élèvent entre 15 000 à 16 000 décès sur 700 000 résidents, soit le même nombre de décès que celui constaté sur les cinq millions de personnes âgées vivant à domicile. Le vrai sujet est de savoir si la conception de l'Ehpad pensée il y a vingt ans n'est pas dépassée aujourd'hui.

Une majorité des résidents en Ehpad n'ont pas toutes leurs capacités cognitives et ne se rendent pas compte qu'ils risquent la mort. Mais la minorité, c'est-à-dire les 25 % restant qui ont toutes leurs facultés, est traitée de la même manière. Je sais bien qu'on me répondra qu'une telle sectorisation est impossible. Le fonctionnement des Ehpad peut-il cependant être modifié pour éviter ces situations ? La mortalité en Ehpad n'est-elle pas un élément déterminant qui nous indique qu'il n'est pas possible de continuer avec un système qui ne permet pas de sauver les personnes ?

Dans le département des Hauts-de-Seine, on avait parfois le sentiment que, à partir du moment où il y avait quelques cas dans un Ehpad, c'était fini, on attendait juste de savoir qui pouvait survivre, ce qui est épouvantable.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Aujourd'hui, la question est d'informer largement les patients sur leurs droits. J'ai été exceptionnellement sollicité pour l'élaboration de mandats de protection juridique. Cela permet d'anticiper le jour où la prise de décision ne sera plus possible et de transmettre à une personne de confiance la possibilité d'une mise en protection. En tant que médecin, je suis habilité à établir ces mandats. Les textes existent mais ne sont généralement pas connus. C'est un élément de réponse.

Lorsqu'on accueille un résident dans un établissement médico-social, on crée un plan d'accompagnement personnalisé, afin de connaître la personne, son historicité et ses besoins et personnaliser le plan de réponse individuelle. Cette mesure est appliquée dans la majorité des établissements. La difficulté est que les personnes accueillies en Ehpad aujourd'hui sont dans des situations beaucoup plus extrêmes qu'il y a dix ou quinze ans. A l'époque, on programmait l'admission. Aujourd'hui, plus de la moitié des résidents arrivent après avoir été hospitalisés parce qu'il y a eu une situation de crise, une maladie chronique ou un événement non prévisible, pour lequel la seule réponse est l'hospitalisation. C'est l'hôpital qui oriente ensuite vers l'Ehpad. Nous ne sommes plus dans une situation de préparation.

Mais dans un Ehpad, il y a des sous-populations. Certaines personnes ont des niveaux cognitifs préservés et la population n'est pas non plus homogène en termes de soins et d'accompagnement. Mais dans un établissement collectif, on applique des règles collectives. La restauration est un exemple caricatural.

La difficulté aujourd'hui est de réviser ce modèle pour essayer de mieux personnaliser les réponses. Il faut répondre aux attentes quand elles ont pu être exprimées et tenir compte des profils de soins. Il y a dans des Ehpad des personnes en unité protégée qui cohabitent avec des personnes qui n'ont pas de troubles du comportement. C'est une situation complexe. Nous accueillons aussi des personnes handicapées ou migrantes vieillissantes en l'absence de structure idoine, alors que ces établissements n'avaient pas vocation au début à accueillir cette typologie différenciée. Le professionnel doit être bon en tout et traiter des situations aussi variées. C'est un élément qui a un impact sur l'attractivité de la profession et qui crée chez les soignants des frustrations, tout simplement parce qu'on ne peut pas demander à un aide-soignant d'être capable de traiter des situations aussi variées.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Aujourd'hui, la question est d'informer largement les patients sur leurs droits. J'ai été exceptionnellement sollicité pour l'élaboration de mandats de protection juridique. Cela permet d'anticiper le jour où la prise de décision ne sera plus possible et de transmettre à une personne de confiance la possibilité d'une mise en protection. En tant que médecin, je suis habilité à établir ces mandats. Les textes existent mais ne sont généralement pas connus. C'est un élément de réponse.

Lorsqu'on accueille un résident dans un établissement médico-social, on crée un plan d'accompagnement personnalisé, afin de connaître la personne, son historicité et ses besoins et personnaliser le plan de réponse individuelle. Cette mesure est appliquée dans la majorité des établissements. La difficulté est que les personnes accueillies en Ehpad aujourd'hui sont dans des situations beaucoup plus extrêmes qu'il y a dix ou quinze ans. A l'époque, on programmait l'admission. Aujourd'hui, plus de la moitié des résidents arrivent après avoir été hospitalisés parce qu'il y a eu une situation de crise, une maladie chronique ou un événement non prévisible, pour lequel la seule réponse est l'hospitalisation. C'est l'hôpital qui oriente ensuite vers l'Ehpad. Nous ne sommes plus dans une situation de préparation.

Mais dans un Ehpad, il y a des sous-populations. Certaines personnes ont des niveaux cognitifs préservés et la population n'est pas non plus homogène en termes de soins et d'accompagnement. Mais dans un établissement collectif, on applique des règles collectives. La restauration est un exemple caricatural.

La difficulté aujourd'hui est de réviser ce modèle pour essayer de mieux personnaliser les réponses. Il faut répondre aux attentes quand elles ont pu être exprimées et tenir compte des profils de soins. Il y a dans des Ehpad des personnes en unité protégée qui cohabitent avec des personnes qui n'ont pas de troubles du comportement. C'est une situation complexe. Nous accueillons aussi des personnes handicapées ou migrantes vieillissantes en l'absence de structure idoine, alors que ces établissements n'avaient pas vocation au début à accueillir cette typologie différenciée. Le professionnel doit être bon en tout et traiter des situations aussi variées. C'est un élément qui a un impact sur l'attractivité de la profession et qui crée chez les soignants des frustrations, tout simplement parce qu'on ne peut pas demander à un aide-soignant d'être capable de traiter des situations aussi variées.

Photo de Victoire Jasmin

Avez-vous dans ces établissements des procédures dégradées concernant la chaîne de décision et la continuité des activités en fonction des différents professionnels ? Lors des auditions organisées par ma collègue Corine Féret il y a quelques mois, un responsable d'association avait évoqué la situation d'une infirmière lanceur d'alerte qui a été révoquée, parce qu'elle avait annoncé qu'il y avait un nombre trop important de personnes qui mouraient dans cet Ehpad. Cette personne a eu des problèmes de santé et, d'après les informations que j'ai eues, est actuellement en décompensation dans un établissement psychiatrique. Ne pourrions-nous pas éviter ce stade de souffrance professionnelle ?

D'autre part, nous avons eu un grand nombre de personnes décédées en Ehpad. Nous n'avons pas ressenti dans votre intervention les grandes souffrances des familles et des proches qui en sont victimes.

Photo de Victoire Jasmin

Avez-vous dans ces établissements des procédures dégradées concernant la chaîne de décision et la continuité des activités en fonction des différents professionnels ? Lors des auditions organisées par ma collègue Corine Féret il y a quelques mois, un responsable d'association avait évoqué la situation d'une infirmière lanceur d'alerte qui a été révoquée, parce qu'elle avait annoncé qu'il y avait un nombre trop important de personnes qui mouraient dans cet Ehpad. Cette personne a eu des problèmes de santé et, d'après les informations que j'ai eues, est actuellement en décompensation dans un établissement psychiatrique. Ne pourrions-nous pas éviter ce stade de souffrance professionnelle ?

D'autre part, nous avons eu un grand nombre de personnes décédées en Ehpad. Nous n'avons pas ressenti dans votre intervention les grandes souffrances des familles et des proches qui en sont victimes.

Photo de Annie Guillemot

Certains professionnels de santé n'ont pas pu rentrer dans les Ehpad pendant le confinement, par exemple les kinésithérapeutes. Lors de l'audition des ordres professionnels la semaine dernière, on nous a annoncé que c'était de nouveau le cas. Qu'en dites-vous ?

Photo de Annie Guillemot

Certains professionnels de santé n'ont pas pu rentrer dans les Ehpad pendant le confinement, par exemple les kinésithérapeutes. Lors de l'audition des ordres professionnels la semaine dernière, on nous a annoncé que c'était de nouveau le cas. Qu'en dites-vous ?

Photo de Angèle Préville

Je reviens sur le nombre de décès qui a été évoqué par d'autres collègues, qui est dramatique. Quels enseignements tirer de cette situation ? Nous avions déjà connu avec la canicule un nombre de décès important. En avait-t-on tiré les conséquences ? Quelqu'un, à la tête d'une des organisations, aurait-il dû tirer la sonnette d'alarme et ne l'a pas fait ? J'ai posé une question écrite le 2 avril, dont la réponse a été publiée il y a quelques jours, pour demander qu'il y ait des protections dans les Ehpad de mon territoire. Dans mon département du Lot, la moitié des résidents des Ehpad proche de chez moi a été testée positivement faute de matériel, alors même que le Lot a été très peu touché.

Aura-t-on autant de décès au prochain épisode affectant les personnes âgées ?

Photo de Angèle Préville

Je reviens sur le nombre de décès qui a été évoqué par d'autres collègues, qui est dramatique. Quels enseignements tirer de cette situation ? Nous avions déjà connu avec la canicule un nombre de décès important. En avait-t-on tiré les conséquences ? Quelqu'un, à la tête d'une des organisations, aurait-il dû tirer la sonnette d'alarme et ne l'a pas fait ? J'ai posé une question écrite le 2 avril, dont la réponse a été publiée il y a quelques jours, pour demander qu'il y ait des protections dans les Ehpad de mon territoire. Dans mon département du Lot, la moitié des résidents des Ehpad proche de chez moi a été testée positivement faute de matériel, alors même que le Lot a été très peu touché.

Aura-t-on autant de décès au prochain épisode affectant les personnes âgées ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je ne vais pas m'attarder sur les chiffres qui sont publics. Nous avons tous les jours réagi d'ailleurs par un certain nombre d'éditoriaux, je ne pensais pas utile de le rappeler. Il s'agit de comprendre et de tirer des réponses pour éviter que cette situation ne se renouvelle.

Nous avons évoqué tous les déterminants, les pratiques hygiéniques, les bons réflexes, la formation aux mesures d'hygiène, les cellules d'hygiène, les interfaces avec le sanitaire, les équipes mobiles, les médecins coordonnateurs assurant ce rôle en l'absence de médecin... Le lien qui a pu s'établir avec les filières hospitalières gériatriques et les autres filières hospitalières a joué un rôle important pour réduire les risques.

Concernant les libéraux, sachant qu'il existait un risque de transmission par tous les professionnels, ce risque ne pouvait être levé que lorsque ceux-ci respectaient les mesures barrières. Cela a effectivement nécessité un délai. L'alternative, c'est l'accès à l'hospitalisation.

Il faut également rappeler que le modèle des Ehpad n'était pas préparé à affronter cette situation terrifiante pour les soignants.

Il fallait ouvrir toutes les lignes d'hospitalisation y compris les hôpitaux de proximité et non uniquement les services d'urgence ou de réanimation, pour s'assurer que les établissements médico-sociaux puissent orienter leurs résidents. Des unités Covid ont été mises en place. Il faut appliquer, renforcer et surtout pérenniser ces mesures. Cette crise nous aura montré le cloisonnement entre le sanitaire, le médico-social et le social classique. Il faut trouver des solutions en créant des interfaces beaucoup plus opérationnelles. Il faut médicaliser ces établissements et les renforcer en moyens humains.

Les enveloppes de soins peuvent être partielles ou globales. Il faut peut-être se reposer la question de l'intérêt de ces enveloppes globales, qui sont mieux adaptées que les enveloppes partielles.

Des pistes figurent parmi les 22 mesures que j'ai évoquées et que je n'ai pas eu le temps de développer. Je crois qu'il faut maintenant les mettre en application et les renforcer.

Il faut également trouver des professionnels pour appliquer ces propositions. Ce sont des métiers difficiles tout au long de la chaîne de soin et qui doivent être revalorisés.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je ne vais pas m'attarder sur les chiffres qui sont publics. Nous avons tous les jours réagi d'ailleurs par un certain nombre d'éditoriaux, je ne pensais pas utile de le rappeler. Il s'agit de comprendre et de tirer des réponses pour éviter que cette situation ne se renouvelle.

Nous avons évoqué tous les déterminants, les pratiques hygiéniques, les bons réflexes, la formation aux mesures d'hygiène, les cellules d'hygiène, les interfaces avec le sanitaire, les équipes mobiles, les médecins coordonnateurs assurant ce rôle en l'absence de médecin... Le lien qui a pu s'établir avec les filières hospitalières gériatriques et les autres filières hospitalières a joué un rôle important pour réduire les risques.

Concernant les libéraux, sachant qu'il existait un risque de transmission par tous les professionnels, ce risque ne pouvait être levé que lorsque ceux-ci respectaient les mesures barrières. Cela a effectivement nécessité un délai. L'alternative, c'est l'accès à l'hospitalisation.

Il faut également rappeler que le modèle des Ehpad n'était pas préparé à affronter cette situation terrifiante pour les soignants.

Il fallait ouvrir toutes les lignes d'hospitalisation y compris les hôpitaux de proximité et non uniquement les services d'urgence ou de réanimation, pour s'assurer que les établissements médico-sociaux puissent orienter leurs résidents. Des unités Covid ont été mises en place. Il faut appliquer, renforcer et surtout pérenniser ces mesures. Cette crise nous aura montré le cloisonnement entre le sanitaire, le médico-social et le social classique. Il faut trouver des solutions en créant des interfaces beaucoup plus opérationnelles. Il faut médicaliser ces établissements et les renforcer en moyens humains.

Les enveloppes de soins peuvent être partielles ou globales. Il faut peut-être se reposer la question de l'intérêt de ces enveloppes globales, qui sont mieux adaptées que les enveloppes partielles.

Des pistes figurent parmi les 22 mesures que j'ai évoquées et que je n'ai pas eu le temps de développer. Je crois qu'il faut maintenant les mettre en application et les renforcer.

Il faut également trouver des professionnels pour appliquer ces propositions. Ce sont des métiers difficiles tout au long de la chaîne de soin et qui doivent être revalorisés.

Photo de René-Paul Savary

Qui aurait dû tirer la sonnette d'alarme ? Qui devra la tirer demain ? Dans la dichotomie entre le médico-social et sanitaire, êtes-vous ou non pour séparer les compétences des établissements ?

Photo de René-Paul Savary

Qui aurait dû tirer la sonnette d'alarme ? Qui devra la tirer demain ? Dans la dichotomie entre le médico-social et sanitaire, êtes-vous ou non pour séparer les compétences des établissements ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Avoir séparé soin et dépendance nous interroge. Dans la majorité des cas, la dépendance est la conséquence de la maladie chronique : il n'y a pas de dépendance sans cause médicale pour les personnes âgées. La plupart du temps, cette dichotomie n'est pas adaptée pour les personnes âgées.

Il faut revoir l'organisation territoriale pour s'interroger sur le parcours des personnes âgées et la bonne dimension de ce territoire. Il faut vérifier que toute l'offre est présente pour assurer un parcours de soins adaptés à ces populations particulières, parce que polypathologiques ou présentant des maladies aussi bien somatiques neuro-psychologiques.

Ce sont des sujets compliqués pour lesquels les réponses sont plurielles. Les dispositifs d'appui à la coordination doivent être efficients, car nous avons utilisé aujourd'hui des réponses nombreuses mais pas forcément coordonnées. Les moyens existent mais ne sont pas bien utilisés. Il faut s'appuyer sur le plan personnalisé de santé qui définit pour chaque individu ses besoins et en regard desquels on doit mettre en place les bonnes réponses.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Avoir séparé soin et dépendance nous interroge. Dans la majorité des cas, la dépendance est la conséquence de la maladie chronique : il n'y a pas de dépendance sans cause médicale pour les personnes âgées. La plupart du temps, cette dichotomie n'est pas adaptée pour les personnes âgées.

Il faut revoir l'organisation territoriale pour s'interroger sur le parcours des personnes âgées et la bonne dimension de ce territoire. Il faut vérifier que toute l'offre est présente pour assurer un parcours de soins adaptés à ces populations particulières, parce que polypathologiques ou présentant des maladies aussi bien somatiques neuro-psychologiques.

Ce sont des sujets compliqués pour lesquels les réponses sont plurielles. Les dispositifs d'appui à la coordination doivent être efficients, car nous avons utilisé aujourd'hui des réponses nombreuses mais pas forcément coordonnées. Les moyens existent mais ne sont pas bien utilisés. Il faut s'appuyer sur le plan personnalisé de santé qui définit pour chaque individu ses besoins et en regard desquels on doit mettre en place les bonnes réponses.

Photo de René-Paul Savary

Sur la sonnette d'alarme ? Tout le monde la tire mais personne ne l'entend.

Photo de René-Paul Savary

Sur la sonnette d'alarme ? Tout le monde la tire mais personne ne l'entend.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je n'ai pas bien compris votre question, parce que tout le monde l'a tirée. Nous nous sommes manifestés bien avant la crise. Les informations que je vous ai données aujourd'hui figuraient déjà dans nos manifestes précédents. La gériatrie n'est qu'une spécialité depuis 2004. Nous sommes une jeune discipline. Par ailleurs, nous ne cessons d'attirer l'attention, je vous ai notamment parlé des 22 mesures du manifeste publié bien avant la crise. Tout ce que je vous ai dit aujourd'hui, ce sont des éléments qui figuraient déjà dans nos textes précédents. Mais peut-être n'avons nous pas su les faire connaître.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Je n'ai pas bien compris votre question, parce que tout le monde l'a tirée. Nous nous sommes manifestés bien avant la crise. Les informations que je vous ai données aujourd'hui figuraient déjà dans nos manifestes précédents. La gériatrie n'est qu'une spécialité depuis 2004. Nous sommes une jeune discipline. Par ailleurs, nous ne cessons d'attirer l'attention, je vous ai notamment parlé des 22 mesures du manifeste publié bien avant la crise. Tout ce que je vous ai dit aujourd'hui, ce sont des éléments qui figuraient déjà dans nos textes précédents. Mais peut-être n'avons nous pas su les faire connaître.

Photo de Catherine Deroche

La crise a mis en évidence les insuffisances de beaucoup de domaines, et notamment celui de la prise en charge des personnes avançant en âge. Comment le conseil national professionnel de gériatrie était-il impliqué dans la gestion de la crise, et à quel moment vous être vous manifesté ? La loi « Grand Âge » va arriver, nous aurons l'occasion d'en débattre à la commission des affaires sociales et, je l'espère, de trouver des solutions et de rédiger un bon texte.

À quel moment vous dites-vous que vous avez été prévenus trop tard ? Vous avez sollicité cet entretien par rapport à une gestion de crise, c'est donc cela que je voudrais entendre.

Photo de Catherine Deroche

La crise a mis en évidence les insuffisances de beaucoup de domaines, et notamment celui de la prise en charge des personnes avançant en âge. Comment le conseil national professionnel de gériatrie était-il impliqué dans la gestion de la crise, et à quel moment vous être vous manifesté ? La loi « Grand Âge » va arriver, nous aurons l'occasion d'en débattre à la commission des affaires sociales et, je l'espère, de trouver des solutions et de rédiger un bon texte.

À quel moment vous dites-vous que vous avez été prévenus trop tard ? Vous avez sollicité cet entretien par rapport à une gestion de crise, c'est donc cela que je voudrais entendre.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Comme évoqué dans mon propos liminaire, nous étions en lien rapproché avec les cabinets des ministres dès le courrier du 20 mars. Nous avions également des échanges oraux réguliers. Des questions nous parvenaient et nous y répondions quasiment en temps réel. Quant aux administrations, nous avons participé aux échanges avec la DGCS et la DGOS. Les relations préexistaient par ailleurs. Nous donnons régulièrement notre opinion au vu des enjeux démographiques et épidémiologiques. Nous avons participé à l'élaboration des rapports de M. Libault et de Mme El Khomri.

Nous ne pouvons que dénoncer des opinions qui prennent appui sur ce que nous constatons dans notre vie quotidienne, c'est-à-dire les insuffisances que nous détectons : les ruptures de parcours, le recours aux urgences, etc. Ces réflexions sont aussi en cours dans « Ma Santé 2022 ».

Le recours direct à l'hospitalisation implique en regard une offre qui soit adaptée. Il faut revoir les capacités hospitalières en gériatrie : le nombre de lits de médecine gériatrique et de soins gériatriques n'est pas adapté aux besoins actuels et futurs.

D'un point de vue préventif, nous devons mettre en place des outils de la prévention de la perte d'autonomie. Il en existe d'ailleurs déjà. Les expérimentations dans les régions ont montré leur intérêt. Il faut déployer tous ces dispositifs de prévention pour éviter l'afflux des personnes âgées dépendantes annoncé d'ici dix à quinze ans.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Comme évoqué dans mon propos liminaire, nous étions en lien rapproché avec les cabinets des ministres dès le courrier du 20 mars. Nous avions également des échanges oraux réguliers. Des questions nous parvenaient et nous y répondions quasiment en temps réel. Quant aux administrations, nous avons participé aux échanges avec la DGCS et la DGOS. Les relations préexistaient par ailleurs. Nous donnons régulièrement notre opinion au vu des enjeux démographiques et épidémiologiques. Nous avons participé à l'élaboration des rapports de M. Libault et de Mme El Khomri.

Nous ne pouvons que dénoncer des opinions qui prennent appui sur ce que nous constatons dans notre vie quotidienne, c'est-à-dire les insuffisances que nous détectons : les ruptures de parcours, le recours aux urgences, etc. Ces réflexions sont aussi en cours dans « Ma Santé 2022 ».

Le recours direct à l'hospitalisation implique en regard une offre qui soit adaptée. Il faut revoir les capacités hospitalières en gériatrie : le nombre de lits de médecine gériatrique et de soins gériatriques n'est pas adapté aux besoins actuels et futurs.

D'un point de vue préventif, nous devons mettre en place des outils de la prévention de la perte d'autonomie. Il en existe d'ailleurs déjà. Les expérimentations dans les régions ont montré leur intérêt. Il faut déployer tous ces dispositifs de prévention pour éviter l'afflux des personnes âgées dépendantes annoncé d'ici dix à quinze ans.

Photo de Roger Karoutchi

Je ne sais pas si l'alerte a été sonnée assez tôt, mais je pense que ce n'est pas la question. Le représentant départemental de l'ARS et la préfecture nous ont par exemple alertés dans les Hauts de Seine dès la fin février sur les risques dans les Ehpad, alors qu'il n'y avait pas encore de prise de conscience dans le reste de la société.

Certes, les pouvoirs publics et les responsables d'Ehpad étaient alertés mais, du fait du manque de moyens financiers et de personnels, ils ne pouvaient pas faire complètement face à la crise.

Plus largement, si à Sparte la fonction de géronte était à vie, les sociétés occidentales vieillissent et n'acceptent pas de se dire qu'il faut changer de modèle. Les personnes âgées sont de plus en plus marginalisées dans nos sociétés alors qu'elles vont être de plus en plus nombreuses. Comment va-t-on payer et comment va-t-on organiser dans les années qui viennent cette société ?

Photo de Roger Karoutchi

Je ne sais pas si l'alerte a été sonnée assez tôt, mais je pense que ce n'est pas la question. Le représentant départemental de l'ARS et la préfecture nous ont par exemple alertés dans les Hauts de Seine dès la fin février sur les risques dans les Ehpad, alors qu'il n'y avait pas encore de prise de conscience dans le reste de la société.

Certes, les pouvoirs publics et les responsables d'Ehpad étaient alertés mais, du fait du manque de moyens financiers et de personnels, ils ne pouvaient pas faire complètement face à la crise.

Plus largement, si à Sparte la fonction de géronte était à vie, les sociétés occidentales vieillissent et n'acceptent pas de se dire qu'il faut changer de modèle. Les personnes âgées sont de plus en plus marginalisées dans nos sociétés alors qu'elles vont être de plus en plus nombreuses. Comment va-t-on payer et comment va-t-on organiser dans les années qui viennent cette société ?

Photo de René-Paul Savary

Les gériatres sont-ils associés au Conseil scientifique présidé par le professeur Delfraissy ?

Photo de René-Paul Savary

Les gériatres sont-ils associés au Conseil scientifique présidé par le professeur Delfraissy ?

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Non, mais nous avons été interrogés à deux ou trois reprises.

Claude Jeandel, président du conseil national professionnel de gériatrie

Non, mais nous avons été interrogés à deux ou trois reprises.

Photo de René-Paul Savary

L'élargissement du Conseil scientifique, limité aux sachants et insuffisamment ouvert sur l'ensemble des professionnels concernés, est une préconisation possible. Cela entraîne une incompréhension des mesures par la population. L'acceptabilité est remise en cause dès lors la décision n'est pas suffisamment partagée.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 18 h 40.

Photo de René-Paul Savary

L'élargissement du Conseil scientifique, limité aux sachants et insuffisamment ouvert sur l'ensemble des professionnels concernés, est une préconisation possible. Cela entraîne une incompréhension des mesures par la population. L'acceptabilité est remise en cause dès lors la décision n'est pas suffisamment partagée.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

La réunion est close à 18 h 40.