Y a-t-il un pilote dans l’avion ?
Je ne doute pas, monsieur le ministre, que, dans les semaines ou les mois qui viennent, vous serez amené à demander au Parlement de nouvelles autorisations de crédits d’engagement pour venir en aide à Chypre. Ce qui a été défaillant, c’est la gouvernance de la zone euro. Après l’admission de Chypre dans la zone euro en 2008, la Commission comme l’Eurogroupe avaient le devoir impératif de veiller à la crédibilité du système prudentiel des banques chypriotes.
En dépit de ces considérations, vous avez l’ambition de formuler un modèle français de séparation et de régulation bancaire. Vous entendez donner à l’Autorité de contrôle prudentiel un pouvoir de résolution dès lors qu’un risque systémique est avéré. Nous en comprenons la logique, mais peut-être faudrait-il aussi, à ce stade, s’interroger sur les excès de la concentration bancaire et leur corollaire : too big to fail…
Ce n’est pas l’option que vous avez retenue. Vous vous en tenez à l’institution d’un pouvoir sidérant, le pouvoir de résolution. Il faudra pour le moins respecter une procédure contradictoire avant que de limoger les dirigeants de banques en risque de péril imminent.
Au surplus, n’y a-t-il pas incompatibilité entre l’exercice du contrôle prudentiel et la désignation d’équipes de direction après révocation de l’équipe précédente ?
Autre interrogation : comment qualifier un risque systémique et sa résolution ? Nous parlons d’opérations de plusieurs milliards d’euros.
Cette absence de définition du risque systémique n’est pas anodine. La crise financière et bancaire des années 2007 et 2008 n’a pas été causée par nos banques, qui ont même plutôt bien résisté. Peut-être, monsieur le ministre, avez-vous à l’esprit la faillite de Dexia ou bien faites-vous une fixation sur les anciens dirigeants du Crédit immobilier de France, dont les relations avec le Trésor étaient tendues, c’est le moins que l’on puisse dire ?
Cela étant, c’est une banque étrangère, Lehman Brothers, qui a été le déclencheur systémique de la défiance. C’est une cause étrangère au système bancaire français qui nous conduit ici aujourd’hui.