Intervention de François Trucy

Réunion du 8 avril 2013 à 22h00
Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe — Article 1er

Photo de François TrucyFrançois Trucy :

Quoi que vous en disiez, l’ouverture du mariage aux couples de même sexe ne trouve aucune justification sur le terrain du combat pour l’égalité. D’ailleurs, le Conseil constitutionnel lui-même rappelle qu’il est loisible au législateur d’organiser le droit différemment afin de régler des situations différentes.

C’est d’ailleurs ce que le législateur a fait depuis toujours en créant notamment le PACS, dont le régime fiscal et patrimonial a été progressivement aligné sur celui du mariage. Certes, des différences existent, vous l’avez rappelé, mais d’autres formules, plus respectueuses de tous, pouvaient être envisagées pour remédier à cette différence de traitement. Vous ne les avez pas voulues.

Contrairement à ce que certains d’entre vous croient, les enfants élevés par des couples de personnes de même sexe ne sont pas non plus en situation de totale insécurité juridique. Le législateur a prévu des possibilités en matière de partage ou de délégation de l’autorité parentale. Voilà du droit appliqué !

En revanche, si la situation actuelle ne porte préjudice à personne, l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe crée, à nos yeux, de nouvelles inégalités.

Une telle ouverture produit des inégalités au sein même du mariage. Si ce texte est adopté, le principe d’unité du mariage disparaît. Il existera un mariage « hétérosexuel », qui continuera de garantir à l’enfant une double filiation par le biais de la présomption de paternité, et un mariage « homosexuel », dans lequel la filiation tiendra plutôt du virtuel.

Cette ouverture crée des inégalités dans l’accès au mariage. Si l’on transforme fondamentalement et substantiellement le fondement, autrefois juridique, du mariage en lui substituant un fondement simplement sentimental, on réduit le mariage à une simple reconnaissance sociale de l’amour des couples de même sexe. Dans ces conditions, comment le Conseil constitutionnel, saisi par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité, pourrait-il ne pas s’attaquer aux lois prohibant la polygamie ou la minorité dans le mariage ? Cet aspect ne vous a pas inquiétée, madame la garde des sceaux. Nous, il nous inquiète !

Cette ouverture crée des inégalités parmi les couples de personnes de même sexe. Le Gouvernement aurait dû nous permettre de discuter sereinement de ce dispositif, qui introduit une inégalité certaine entre les couples homosexuels sur le simple fondement de leur sexe.

Cette ouverture crée des inégalités parmi les enfants adoptés, nous en avons suffisamment parlé. La vérité nous oblige à dire que la majorité des enfants adoptés sont des ressortissants de pays qui n’acceptent pas l’union homosexuelle des adoptants. C’est pourquoi les enfants, selon les candidats à l’adoption, ne disposeront pas des mêmes droits pour créer une famille.

Enfin, cet article, que nous contestons et qui constitue le cœur de ce texte, ne nous paraît pas en conformité avec notre ordre juridique interne qui, depuis 1804, a fait de l’altérité sexuelle un caractère fondamental du mariage. Or, en rappelant ce principe dans un nombre important de textes antérieurs à 1946 – la loi du 27 juillet 1884 sur le divorce, la loi du 13 juillet 1907 sur le libre salaire de la femme mariée et la contribution des époux aux charges du ménage, la loi du 18 février 1938 portant modification des textes du code civil relatifs à la capacité de la femme mariée –, le législateur en a fait un principe fondamental reconnu par les lois de la République.

C'est la raison pour laquelle je voterai ces amendements identiques de suppression.

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