Dans tous les cas, elle a toujours essayé de faire entendre sa voix, qui est celle des territoires qui nous élisent, certes, mais aussi de l'ensemble du peuple français, avec une tonalité quelque peu différente de celle de nos collègues de l'assemblée nationale. Nous sommes élus différemment : les élections sénatoriales n’interviennent pas juste après l’élection présidentielle, laquelle affecte forcément les élections législatives. Nous sommes par conséquent peut-être plus libres et plus dégagés des contraintes ou des règles de nos différentes formations politiques.
Je le fais remarquer pour m'en réjouir, ce projet de loi ne prévoit aucune modification des dispositions organiques régissant notre assemblée. Certains, à droite comme à gauche, y avaient pensé. À droite, le fils même d'un ancien président de la Haute Assemblée l'avait suggéré à un Président de la République, et l’on connaît le sort réservé au référendum de 1969, qui prévoyait purement et simplement la dissolution du Sénat dans un ensemble hétéroclite dans lequel les élus n'auraient eu que peu de place et de pouvoir. Quant au Président de la République en question, il a démissionné immédiatement après cet échec.
Le Sénat reste donc ce qu'il est. Le Gouvernement et sa majorité affirment que notre assemblée a toute sa place dans le bicamérisme et qu'il doit continuer à légiférer.
D'ailleurs, lorsqu'on a été dans un premier temps député avant de devenir sénateur, comme c'est le cas d’un certain nombre de mes collègues ici, dont M. Jean-Claude Gaudin, on apprécie d’autant mieux l'apport du Sénat au travail législatif. Par rapport à nos collègues de l'Assemblée nationale, non seulement nous sommes, comme je le disais, un peu plus libres de nos réflexions, mais nous avons également davantage d’expérience et d’expertise – je le dis comme je le pense et comme je l'ai vécu. Cela tient au mode d'élection et, il faut le dire, à la durée et aux modalités de renouvellement de notre mandat.
Si l'on compare la situation des sénateurs à celle des députés, l’on s'aperçoit que le rythme de renouvellement du mandat des députés est beaucoup plus rapide que le nôtre. Ainsi, certains sénateurs, de tous bords politiques, sont des experts reconnus dans un certain nombre de matières, parfois d'ailleurs sur de créneaux très étroits, auxquelles ils apportent tout leur savoir. On pense naturellement aux questions relatives aux collectivités territoriales, mais il y en a bien d'autres, comme on le constate à la commission des lois ou dans d’autres commissions. Fort heureusement, le projet de loi n’apporte aucun changement sur ce point, auquel nous sommes très attachés.
Je ne m’étendrai pas sur ce texte, qui tend à apporter, cela a été dit, deux modifications mineures.
La première consiste à abaisser le seuil de la proportionnelle aux départements qui élisent trois sénateurs. L’objectif n’est pas de renforcer la parité parce que, d’une part, il faudrait pour cela beaucoup plus de temps, et, d’autre part, je ne sais pas si la parité implique forcément une répartition à 50-50.