En cet instant, je voudrais simplement insister sur un point particulier qui me paraît démontrer que les auteurs de ce texte ont une bien faible connaissance des réalités de la vie sociale dans notre pays, notamment dans le monde rural.
Notre pays compte 36 000 maires ; on peut trouver que c’est trop, mais c’est une réalité ! Il est parfois de plus en plus difficile de susciter des vocations pour animer la vie locale. Appliquer sans discernement aux 36 000 maires de France des dispositions qui n’ont manifestement pas été pensées pour eux risque de susciter à cet égard des difficultés supplémentaires, alors qu’on a déjà souvent bien du mal à trouver des Français prêts à se dévouer au service de nos collectivités.
Ne dresse-t-on pas un nouvel obstacle en prévoyant que n’importe qui pourra avoir connaissance du patrimoine non seulement des élus, mais aussi de leur conjoint, puisque le patrimoine de celui-ci, nous dit-on, ne sera pas rendu totalement public, mais sera néanmoins accessible.
En outre, le fait de devoir mentionner dans les déclarations d’intérêts les activités des enfants, des conjoints, des proches est un élément qui, dans la vie sociale française, touche de très près à la vie privée.
Chaque élu qui aura rendu publics un certain nombre d’éléments sera soumis à de nombreuses questions et, s’il fait le choix de ne pas répondre, il sera évidemment soupçonné d’avoir quelque chose à cacher. Ainsi, chaque élu devra être à même de justifier son patrimoine, l’activité de ses enfants, les liens qu’il entretient avec eux, les risques potentiels de conflits d’intérêts qui en découlent…
Je trouve que c’est trop ! Cette suspicion généralisée, ce système de défiance ne sont pas conformes à nos traditions démocratiques. Bien sûr, cela, nous l’avons sans doute déjà dit, mais j’ai le sentiment que nous n’avons pas été entendus.
Voilà pourquoi je considère que ce texte, loin de constituer un pas en avant, se traduit par une véritable régression de nos valeurs et de nos pratiques démocratiques. §