Or on s’aperçoit que les tribunaux n’en utilisent que 300 ou 400. Là encore, on peut s’interroger sur l’efficacité du droit pénal, mais c’est une autre question.
L’examen de la proposition de loi est néanmoins l’occasion – et c’est heureux – de faire le bilan d’application de la CRPC. Après tout, cela fait dix ans que la loi a été adoptée. Nous constatons qu’elle est très utilisée et représente environ 15 % des poursuites à partir de 2009, avec un taux d’homologation d’environ 12 % par le tribunal correctionnel. Je relève également, à la suite de nombreux intervenants, que le contentieux routier, pour lequel cette procédure est particulièrement adaptée, en constitue presque 60 % des procédures mises en œuvre.
Si l’on examine le taux d’échec de la CRPC, et bien que le ministère de la justice ait abandonné l’évaluation de ce dispositif depuis 2009 – comme je suis bienveillant, je précise que c’est sans doute en raison de son évolution positive ; il faut y voir la preuve que cet outil fonctionne –, il faut reconnaître qu’il est faible : les CRPC non homologuées ne représentent que 12 %. Encore faut-il indiquer que le refus d’homologation par le tribunal de grande instance ne concerne qu’un peu moins de 3 % des dossiers, le reste étant soit la non-comparution du prévenu, soit le refus de la peine par le prévenu.
Comme le rappelle le rapport de notre excellent collègue Pierre-Yves Collombat, la procédure de CRPC est entourée de garanties sérieuses tant sur le plan procédural que sur le fond, au rang desquelles figure la présence obligatoire de l’avocat, l’exclusion du champ de cette procédure de certains délits portant une atteinte sérieuse aux intérêts de la société et des victimes.
La publicité de l’audience d’homologation et l’examen réel par le président du tribunal de grande instance des éléments du dossier sont autant de garanties de l’équité du procès. C’est d’ailleurs ce qu’a souligné le Conseil constitutionnel.
Pour toutes ces raisons qui militent en faveur du maintien de la CRPC, il eut été envisageable de déposer une motion tendant à poser la question préalable. Nous en avons eu l’intention, mais cela aurait été dommage, car cela nous aurait empêchés de débattre. En effet, il ne nous paraît pas souhaitable de restreindre le champ d’application de la CRPC, ni de limiter la peine proposée, ni de permettre une modification par le tribunal de grande instance de la proposition du procureur, qui n’a pas à être tenu d’assister à l’audience. Si la CRPC est refusée, il reprend le dossier.
En revanche – et c’est le sens du texte issu des travaux de la commission des lois –, il y a sans doute lieu, bien que ces règles soient déjà appliquées, d’inscrire dans le droit positif les réserves d’interprétation du Conseil Constitutionnel, notamment à l’égard des victimes.
Les autres dispositions qui correspondent à la pratique des parquets n’ont sans doute pas d’incidence réelle sur l’utilisation de la CRPC, mais demanderaient à notre avis à être approfondies. Par ailleurs, nous soutenons la disposition qui vise à permettre à la victime de faire parvenir ses observations au parquet dès les premiers stades de la procédure.
Nous n’aurions pas voté le texte initial de nos collègues, mais nous ne ferons pas obstacle aux modifications raisonnables qui ont été apportées par la commission des lois à cette procédure de la CRPC, qui permet en définitive à la justice d’être plus efficace. Vous avez raison, monsieur le ministre, cette efficacité n’est pas uniquement comptable ; mais il faut souligner que cette nouvelle procédure accélère le cours de la justice. Après tout, un procès équitable, c’est aussi un procès qui ne dure pas trop longtemps. C’est également l’un des moyens de résoudre un certain nombre de conflits.
On parle beaucoup du statut du parquet. Il existe une solution simple : si l’on veut éviter des problèmes avec la Cour européenne des droits de l’homme, notamment des problèmes d’interprétation, il suffit de scinder le projet de loi que vous nous aviez proposé et de ne plus parler du Conseil supérieur de la magistrature. §
Vous savez très bien que beaucoup d’entre nous ont déjà voté à plusieurs reprises pour que, s’agissant des nominations des magistrats du parquet, l’avis du Conseil supérieur de la magistrature soit conforme. Cette disposition pourrait faire l’objet d’un large consensus du Parlement. §