Le risque ultime qu’ils courent nous oblige à veiller à garantir, au travers de la définition des moyens mis à leur disposition, l’efficacité de leur action et leur sécurité.
À ce titre, le présent projet de budget est préoccupant. Il conduira, à terme, à une insuffisance des moyens consacrés à la défense, qui sera préjudiciable à la sécurité de notre pays et au respect de nos engagements internationaux.
La question de l’utilité des lois de programmation militaire se pose. En effet, une réduction de 3, 63 milliards d’euros pour la période 2011-2013 est prévue par rapport à la loi de programmation militaire pour 2009-2014. Les crédits budgétaires inscrits dans cette programmation triennale marquent incontestablement un décrochage par rapport à celle-ci.
Nous ne sommes pas dupes, monsieur le ministre d’État ! La baisse des crédits budgétaires est en partie masquée par la hausse des recettes exceptionnelles, qui la ramène à 1, 25 milliard d’euros. En fait, cette hausse tient essentiellement à un glissement des recettes non réalisées en 2009 et en 2010, mais pourtant mises à contribution pour rendre présentables ces deux exercices budgétaires.
En ce qui concerne le projet de budget pour 2011, ce sont 1 milliard d’euros de recettes exceptionnelles non prévues qui sont prises en compte, permettant de masquer une réduction des crédits par rapport à 2010 d’un montant équivalent.
Le fait que le financement du budget de la défense repose dans une mesure importante sur des recettes exceptionnelles amène à s’interroger sur la pérennité de celui-ci. Le principe et le régime de ces recettes exceptionnelles, qui avaient pourtant une finalité particulière, à savoir le financement d’un supplément de dépenses d’équipement résultant d’engagements antérieurs, ne risquent-ils pas d’être remis en cause au regard des nouvelles contraintes budgétaires ?
En outre, la réalité de ces recettes exceptionnelles est, en l’espèce, pour le moins sujette à caution. Les exercices 2009 et 2010 prouvent qu’une grande partie des recettes exceptionnelles pourtant inscrites dans le budget n’ont pas été perçues. Je vous rappelle, monsieur le ministre d’État, que les finances publiques reposent sur le principe de sincérité budgétaire. Or, en dépit des annonces, aucune ressource tirée de l’utilisation du spectre hertzien et quasiment aucune ressource immobilière n’ont été perçues en 2009 et en 2010. Un nouveau report de la réalisation de ces recettes exceptionnelles aurait une incidence notable sur le budget de 2011. Nous verrons…
Le débat parlementaire sur les crédits de cette mission a mis en lumière des problématiques qui n’ont pas reçu de réponse satisfaisante.
Ainsi, le projet de partenariat public-privé pour le site de Balard est-il réellement opportun sur le plan financier ? Quelle sera l’incidence financière de la réforme des retraites que vous avez soutenue, monsieur le ministre d’État ? Quelle est l’efficacité financière de la politique d’externalisation conduite ? Le réseau des bases de défense est-il réellement efficient ? Je pourrais multiplier les exemples témoignant que vos orientations manquent de cohérence au regard de la rigueur budgétaire imposée.
Dans leur excellente note de présentation, les rapporteurs spéciaux ont souligné que les moyens financiers seront nettement inférieurs à ceux qui étaient prévus dans le Livre blanc de 2008. En octobre dernier, vous avez même précisé, monsieur le ministre d’État, que l’écart avec les prévisions de la loi de programmation militaire pourrait atteindre 20 milliards d’euros et remettre profondément en cause notre modèle d’armée.
La rareté des ressources financières, même si les impératifs budgétaires ne devraient pas régir les choix stratégiques essentiels, va inéluctablement conduire à des arbitrages sur trois éléments fondamentaux : l’effectif de notre armée, les spécifications des matériels produits et destinés à équiper notre armée pour qu’elle puisse assurer efficacement ses missions, le ciblage de la recherche et du développement sur des technologies adaptées à la nature des conflits futurs.
Il semble acquis que le format prévu pour l’armée française à l’horizon 2020 ne pourra être atteint et que des arbitrages politiques vont être nécessaires, l’ambition étant que la France conserve son statut militaire mondial, condition indispensable pour que nous puissions influer sur les grandes décisions internationales. Les orientations prises par le Gouvernement ne nous éclairent pas sur ses réelles intentions à cet égard.
Avec un Livre blanc et une loi de programmation militaire obsolètes, nous avons vraiment le sentiment de naviguer à vue. Ces deux documents fixaient des objectifs parfois critiquables, mais qui avaient le mérite d’exister. Or, le projet de budget présenté et les suivants en sont déconnectés. Vers quelle défense allons-nous désormais ?
Ce flou est d’autant plus inquiétant que, parallèlement, la construction de l’Europe de la défense est au point mort. Il est incontestable que l’Agence européenne de défense est dans un état végétatif et que la mécanique bureaucratique des coopérations structurées permanentes aboutit, ce qui était prévisible, à une impasse.