Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, par ce rappel au règlement, je veux attirer l'attention de la présidence du Sénat, de la commission des finances et du Gouvernement sur l'application de l'article 40 de la Constitution, relatif à l'irrecevabilité financière des amendements présentés par les parlementaires.
Depuis la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-544 du 14 décembre 2006, le Sénat applique strictement la règle de l'irrecevabilité financière des amendements présentés par les parlementaires, irrecevabilité qui est désormais déclarée dès le dépôt de l'amendement. Cela signifie que celui-ci ne peut être examiné ni en commission ni en séance.
S'agissant du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, c'est une quinzaine d'amendements de mon groupe qui ont ainsi été déclarés irrecevables. Ils portaient sur des sujets aussi importants que le handicap, l'amiante, le financement des services départementaux d'incendie et de secours. Sur ces thèmes, point de salut possible hors initiative du Gouvernement ! J'y reviendrai plus tard dans le cours des débats, mais, sur un sujet qui me tient particulièrement à coeur, celui de l'amiante, on voit bien que cela nous mène à l'inertie.
À l'heure où le comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par M. Balladur, suggère de renforcer les droits du Parlement, l'application de l'article 40 de la Constitution dans les conditions actuelles constitue une véritable négation du droit d'amendement des parlementaires. Dans le cas présent, nous l'acceptons et le comprenons d'autant moins que le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un texte financier - il l'est parfois trop, malheureusement - et qu'il est donc difficile de ne pas présenter d'amendements dont l'adoption aurait des conséquences financières.
En effet, si l'on peut toujours gager un amendement visant à diminuer une recette, il est impossible de le faire pour un amendement tendant à aggraver une charge. La seule solution qui nous reste alors est de nous montrer plus restrictifs que le Gouvernement, qui est pourtant déjà bien parcimonieux lorsqu'il propose d'ouvrir de nouveaux droits. Je pense en particulier ici à l'article 60 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont l'objet est notamment d'instaurer un droit d'option entre l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé et la prestation de compensation du handicap.
Il est d'ailleurs à noter que cette parcimonie est bien moins prononcée lorsqu'il s'agit d'accorder des cadeaux fiscaux aux plus aisés de nos compatriotes. Mais passons !
Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, cette situation ne peut perdurer. Il faut trouver un nouvel équilibre entre le droit d'amendement des parlementaires et l'orthodoxie financière. Je suis sûr que, sur toutes les travées de cet hémicycle, de nombreux collègues déplorent la dureté de cette règle et les conséquences de son application sur la qualité et la richesse du travail parlementaire. Il nous semble que, s'agissant notamment des débats qui touchent aux grands enjeux de société - et le financement de la sécurité sociale en est assurément un -, on ne saurait souffrir que le droit d'amendement, droit imprescriptible de la représentation nationale, puisse être à ce point limité.