Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme avait été présenté au Parlement, en 2012, dans le contexte de l’effroyable affaire Merah et des arrestations des membres d’une cellule terroriste, arrestations effectuées dans le sillage de l’enquête sur une attaque à la grenade contre une épicerie juive de Sarcelles.
Le contexte actuel est plus lourd encore, avec l’émergence de l’État islamique – que je dirais plutôt « islamiste » – et les progrès irrésistibles de son implantation sur le terrain, dans une région à feu et à sang depuis des années.
Nos concitoyens ont peur, et avec raison.
L’insupportable assassinat de notre compatriote Hervé Gourdel en Algérie et les différentes décapitations d’Occidentaux sont dans tous les esprits. Nous avons tous été touchés, et au plus profond de nous, par ces actes inqualifiables. Nous le sommes d’autant plus quand nous voyons croître le nombre de jeunes, voire de familles quittant le territoire national pour rejoindre les djihadistes au Moyen-Orient.
Tout cela nous impose certes d’agir, d’agir vite – très vite même – et efficacement. Mais, quand nos libertés fondamentales sont en jeu, il convient précisément de se garder d’agir trop vite et sous le seul coup de l’émotion et de la peur. La volonté de rendre plus efficace notre légitime lutte contre le terrorisme ne justifie assurément pas que l’on brade ces libertés !
Les dispositions en vigueur, déjà très lourdes, ne nous ont pas permis d’échapper aux attentats meurtriers qui sont dans toutes les mémoires. En outre, si le nombre inquiétant de nos jeunes partant à l’étranger se former ou combattre dans des conflits armés au sein de groupes terroristes doit nous mobiliser, notre objectif devrait être autant de prévenir que de s’en tenir à la seule répression.
Il ne suffit pas de légiférer. Encore faut-il se donner les moyens d’appliquer les textes votés, de dégager les fonds nécessaires, de s’assurer la collaboration de personnels en nombre suffisant et qualifiés en matière de lutte contre le terrorisme.
Il n’importe pas seulement de réagir, il faut aussi travailler en amont, pour tenter de comprendre pourquoi ces jeunes, y compris nombre de récents convertis à l’islam, se découvrent soudain une vocation de djihadiste.
Beaucoup, dont les parents et les grands-parents ont été humiliés pendant des décennies, ne se voient pas d’avenir chez nous. L’école a échoué dans sa mission d’inclusion, préférant s’intéresser à ceux qui réussissent.