Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 4 novembre 2014 à 14h30
Lutte contre le terrorisme — Discussion des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme vous l’a indiqué mon éminent homologue, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur le projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme.

Il restait finalement peu de désaccords entre l’Assemblée nationale et le Sénat sur la partie du texte concernant la répression pénale des actes de terrorisme, dont j’avais plus particulièrement la charge. Les deux assemblées avaient ainsi déjà adopté dans les mêmes termes l’article 3, qui inclut les infractions relatives aux produits explosifs dans la liste des infractions pouvant recevoir la qualification terroriste dès lors qu’elles sont accomplies avec cette intention.

Par ailleurs, la commission mixte paritaire a approuvé la création par l’article 5 d’un nouveau délit d’entreprise individuelle de préparation d’un acte terroriste, en retenant la rédaction issue du Sénat, à l’exception de la notion de préparation logistique de l’acte terroriste, qui semblait, à l’issue de nombreux débats, trop imprécise et n’était finalement pas nécessaire pour couvrir l’ensemble des cas de figure rencontrés par les juges antiterroristes. Les enquêteurs et la justice disposeront ainsi désormais d’un fondement juridique efficace pour appréhender le phénomène d’autoradicalisation, qui caractérise de plus en plus souvent les auteurs d’actes terroristes, tout en évitant, grâce à l’exigence d’une sorte de « faisceau d’indices », la pénalisation de la seule intention criminelle, ce qui n’aurait pas été compatible avec les principes de notre droit pénal.

Concernant les délits d’apologie et de provocation au terrorisme, qui font l’objet de l’article 4, la commission mixte paritaire a préféré revenir, pour l’essentiel, au texte initial du Gouvernement, en faisant sortir de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse l’ensemble des actes d’apologie et de provocation. L’idée émise par notre commission des lois, suivie par le Sénat, qui était de n’incriminer que les faits commis sur internet en tant qu’ils comportaient une dangerosité supplémentaire du fait des spécificités de ce média, n’a donc pas été retenue par la commission mixte paritaire. Il faudra pourtant revenir sur le sujet, tant les caractéristiques du web rendent nécessaire un traitement nouveau du point de vue de la procédure pénale. D’ailleurs, la rédaction retenue érige tout de même la commission des faits par le moyen d’internet en circonstance aggravante du nouveau délit, ce qui montre, d’une certaine façon, le bien-fondé du raisonnement qui avait été celui de notre commission.

S’agissant des dispositions figurant aux articles 7 et 7 bis et relatives à la centralisation auprès de la juridiction parisienne du traitement judiciaire des actes terroristes, notamment ceux commis en détention par des personnes déjà condamnées pour ce type d’infractions, c’est la rédaction plus claire et précise de notre assemblée qui a été pour l’essentiel retenue. Ce parachèvement de la centralisation auprès du tribunal de grande instance, de la Cour d’appel et des juges d’instruction de Paris est d’ailleurs un aspect important du texte, tant cette compétence concurrente nationale de la juridiction parisienne est une pièce essentielle de notre dispositif antiterroriste.

Enfin, comme l’a rappelé Alain Richard, mais je ne peux résister au plaisir de le redire, concernant la durée de conservation des enregistrements des interceptions de sécurité, la commission mixte paritaire, à défaut de trouver une rédaction pleinement satisfaisante pour concilier l’efficacité du contrôle de la CNCIS, la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, avec la demande récurrente du ministère de l’intérieur concernant les délais de ce contrôle, a décidé la suppression pure et simple de l’article 15, ce qui ne peut que réjouir ceux qui avaient milité en faveur d’une telle suppression.

Telles sont, mes chers collègues, les dispositions du projet de loi tel qu’issu des travaux de la commission mixte paritaire, complétées par un amendement de coordination déposé par le Gouvernement à l’Assemblée nationale.

Ce texte, compte tenu de l’évolution du terrorisme est, selon moi, extrêmement utile. Il doit donner à la fois à nos services de renseignement, à nos forces de sécurité et à la justice les moyens de combattre les nouvelles formes de terrorisme. Que n’ai-je point entendu ou lu, dans certaines gazettes, sur le respect des libertés publiques ! Je rappelle que l’ensemble du texte est, à nos yeux, parfaitement conforme à l’État de droit. Les procédures administratives ne sont pas interdites, dans la mesure où elles sont contrôlées par le juge, administratif ou judiciaire. Quelques-uns sont la proie d’une certaine confusion, ce qui ne nous étonne pas complètement.

Au demeurant, je me réjouis que ce texte ait fait l’objet d’un consensus. Au moment du renouvellement du Sénat, la désignation de deux rapporteurs a sans doute permis d’avancer plus vite, en nous fondant sur un travail commun. Je me félicite des avancées que nous avons pu réaliser avec Alain Richard.

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