Intervention de Philippe Bas

Réunion du 19 mai 2015 à 14h30
Réforme de l'asile — Article 14

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, président de la commission des lois :

Avant de répondre à la proposition de M. le ministre, qui va dans le sens la commission, je tiens à réexpliquer la position de la celle-ci, même si M. le rapporteur l’a fort bien exposée et développée.

Sur le constat, nous sommes tous d’accord : chaque année, à peu près 60 000 demandes d’asile sont traitées et seules 20 000 d’entre elles environ font l’objet d’une décision d’attribution de la qualité de réfugié ou d’une décision de protection subsidiaire au titre des conventions internationales. Chaque année, par conséquent, sur les 40 000 étrangers déboutés, la très grande majorité – sinon l’intégralité ! – reste sur le territoire national.

La commission des lois refuse de s’accommoder de cette situation. Il lui est donc paru impossible de traiter du droit d’asile dans le cadre de la transposition des directives européennes sans chercher à résoudre cette question qui, pour les équilibres sociaux de la République, est sans doute l’une de celles qui se posent avec le plus d’acuité aujourd’hui.

Face à ce problème, les solutions qu’a trouvées la commission ne sont sans doute pas parfaites – M. le rapporteur l’a reconnu –, mais elles sont le fruit d’une réflexion et d’un examen juridiques approfondis.

Monsieur le ministre, je vous ai écouté très attentivement, mais je n’ai pas été convaincu par les arguments juridiques que vous avez avancés. D’autres peuvent vous être opposés.

Vous dites qu’il appartient au préfet d’apprécier la régularité du séjour et de décider de demander à l’étranger de quitter le territoire français. C’est en effet le cas, mais parce que la loi le prévoit. Or nous sommes en train d’écrire la loi. Rien ne nous interdit par conséquent de prévoir qu’une décision de l’OFPRA peut valoir obligation de quitter le territoire français. Après tout, il s’agit là d’une décision administrative.

Par ailleurs, il ne s’agit pas pour le juge administratif d’apprécier la décision de la Cour nationale du droit d’asile, celle-ci ne se prononçant pas sur cette partie de la décision de l’OFPRA. Le texte adopté par la commission prévoit en effet que c’est non pas à elle de le faire, mais au juge administratif, comme c’est d’ailleurs le cas pour les obligations de quitter le territoire français.

Se pose ensuite la question du changement de situation du demandeur d’asile, en raison d’événements familiaux ou de problèmes de santé, lesquels sont d’autant plus probables que le demandeur est présent sur le territoire national depuis longtemps. Pour couvrir ce type de difficulté, le texte de la commission prévoit que, en raison de circonstances particulières, le rejet de la demande d’asile peut ne pas valoir obligation de quitter le territoire français.

Je rappelle à cet égard que, même si nous n’avions pas pris cette précaution, aux termes de dispositions impératives et incontournables de notre droit, l’octroi d’un titre de séjour pour raison de santé est de plein droit quand les conditions requises sont réunies. Naturellement, la commission des lois du Sénat n’entend pas déroger à cette exigence, qui a été clairement posée par le législateur.

Serait-ce plus compliqué de procéder comme nous le proposons ? Il y a du pour et du contre, monsieur le ministre ! Je viens d’une région – vous la connaissez bien – où l’on pèse le pour et le contre.

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