La commission a longuement délibéré sur chacun de ces amendements.
S’agissant de l’amendement n° 80 rectifié, elle a parfaitement compris la nécessité d’apporter des protections à un certain nombre de professions. Elle a aussi compris tout l’intérêt que M. Mézard porte, à juste titre, à la profession d’avocat, ainsi qu’à un certain nombre d’autres qui concourent à la protection des libertés publiques. C’est le cas, en démocratie, de la profession de journaliste ou, bien entendu, de la fonction de parlementaire ; il n’est nul besoin de s’étendre sur ce point.
L’objet de cet amendement est d’empêcher, même dans le cas où l’on aurait de sérieuses raisons de croire que la personne agit aux ordres d’une puissance étrangère ou dans le cadre d’un groupe terroriste, la mise en œuvre des procédures d’urgence. Dans un tel cas, même dans une situation d’urgence, on interdirait donc par principe la mise en œuvre de la technique de renseignement. En effet, celle-ci deviendrait tout simplement impossible à appliquer si on laissait passer les quelques minutes ou l’heure qui offrent l’occasion de mettre en place la surveillance. Une telle proposition ne peut que susciter l’inquiétude.
Pour que l’article L. 821-5-1 puisse s’appliquer dans le cas où sont concernées des personnes appartenant aux catégories visées, qui doivent effectivement être spécialement protégées en raison de leur fonction ou de leur métier, il faudra qu’existent des raisons sérieuses de croire que la personne agit aux ordres d’une puissance étrangère, ou dans le cadre d’un groupe terroriste ou d’une organisation criminelle : ce niveau d’exigence très élevé constitue une garantie, d’autant que le contrôle de légalité par la CNCTR pourra s’exercer dans des conditions très ouvertes. C’est pourquoi on ne doit tout de même pas exclure a priori la possibilité de mettre en œuvre une technique de renseignement, sauf à refuser à l’autorité chargée d’assurer la protection des Français les moyens de remplir sa mission.
Au bénéfice de ces arguments et de ceux que Mme la garde des sceaux ne manquera sans doute pas d’invoquer, je sollicite le retrait de cet amendement : les professions et la fonction en question doivent être protégées, mais il faut également protéger les intérêts publics susceptibles d’être menacés par des personnes dont on aurait tout lieu de croire qu’elles sont à la solde d’une puissance étrangère.
Concernant l’amendement n° 138 rectifié, monsieur Raynal, l’expression « indices graves et concordants » appartient à la terminologie du code de procédure pénale.