Intervention de François Fortassin

Réunion du 7 juillet 2015 à 14h30
Réouverture exceptionnelle des délais d'inscription sur les listes électorales — Adoption en nouvelle lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission, amendement 1

Photo de François FortassinFrançois Fortassin :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, après l’échec de la commission mixte paritaire, nous sommes à nouveau appelés à nous prononcer sur cette proposition de loi visant à revenir de façon exceptionnelle sur le principe de révision annuelle des listes électorales. Comme cela a été rappelé, il s’agit de permettre la réouverture des délais d’inscription sur les listes pour les élections de décembre 2015.

Bien sûr, nous partageons l’objectif des auteurs de la proposition de loi, qui est de lutter contre l’absentéisme électoral en adaptant notre procédure d’inscription au report des élections régionales.

Près de 3 millions de Français ne sont pas inscrits sur les listes électorales, auxquels il faut ajouter 6, 5 millions de « mal inscrits ». Parmi les Français qui ont déménagé en 2014, seul un électeur sur cinq s’est réinscrit dans sa nouvelle commune, contre un sur deux en 2013.

Pour autant, ce ne sera pas la première fois que nos concitoyens seront appelés à se déplacer dans les bureaux de vote en fin d’année : cela s’est déjà produit pour les élections cantonales de 1967, de 1973 et de 1988. Je n’ai pas le souvenir que nous ayons adopté de mesure exceptionnelle à l’époque !

Si nous souscrivons à l’objectif de la proposition de loi, nous n’approuvons pas la position de l’Assemblée nationale qui consiste à prévoir une réouverture exceptionnelle des délais d’inscription. Comme l’avait parfaitement expliqué notre excellent rapporteur, mon ami Pierre-Yves Collombat, on ne peut « en permanence faire des lois pour régler les dégâts collatéraux des lois antérieures ».

C’est pourquoi, en première lecture, le Sénat a fait le choix de suivre la commission des lois, en assouplissant les conditions d’inscription « hors période », pour permettre à toutes les personnes qui déménagent, pour quelque motif que ce soit, de s’inscrire sur les listes électorales et donc de voter aux prochaines élections régionales.

Ce dispositif nous semble bien plus pertinent, car il prévoit une solution pérenne et beaucoup plus simple. Il témoigne d’ailleurs de la volonté du Président de la République d’autoriser l’inscription sur les listes électorales jusqu’à un mois avant un scrutin pour qu’« aucun Français ne soit privé de son droit de vote à cause de la rigidité des règles ».

Aussi, nous regrettons que l’Assemblée nationale soit revenue au dispositif initial. Le texte que nous avions adopté en première lecture ne permettrait pas « à ceux qui auraient oublié de s’inscrire avant le 31 décembre 2014 de participer aux élections régionales de décembre prochain ». Tel est l’argument avancé par la rapporteur de l’Assemblée nationale lors des débats du 29 juin dernier et repris par le groupe socialiste dans l’objet de l’amendement n° 1.

Pensez-vous vraiment, mes chers collègues, que nos concitoyens qui s’intéressent à la vie de la cité aient pu oublier de s’inscrire, alors que des élections départementales avaient lieu en mars dernier ? Et je n’évoque même pas les nombreuses campagnes d’incitation menées avant la date fatidique du 31 décembre par les différents médias ! Je crois sincèrement que ceux qui n’ont pas fait la démarche en décembre dernier ne la feront pas davantage avant le 30 septembre prochain.

Par ailleurs, vous estimez que le dispositif adopté par la Haute Assemblée est insatisfaisant parce qu’il soulèverait de nombreuses difficultés opérationnelles liées aux modalités actuelles de révision des listes électorales.

Comme M. le rapporteur, je ne crois malheureusement ni à un afflux d’inscriptions ni au fait que ces électeurs nouvellement inscrits iront voter deux fois. Je salue toutefois l’initiative de notre rapporteur, qui a souhaité, dans un souci de conciliation, sécuriser le dispositif. Ainsi, le délai dont disposerait l’électeur pour déposer sa demande serait porté de dix à vingt jours avant le scrutin, et le délai laissé à la commission électorale pour statuer serait porté de cinq à dix jours.

Pierre-Yves Collombat l’a dit, c’est une solution de bon sens à laquelle l’Assemblée nationale pourrait tout à fait souscrire. Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE apportera de nouveau son soutien au texte de la commission des lois.

Mes chers collègues, permettez-moi de dire en conclusion que les scrutins n’attirent les électeurs que lorsque ces derniers ont le sentiment que leur vote est utile. À l’inverse, s’ils pensent que les jeux sont faits et que l’intérêt de la consultation est limité, ils sont peu tentés d’aller voter. Ainsi, lors des dernières élections départementales, on a constaté, dans les cantons disputés, un afflux relativement massif des électeurs, qui se sont précipités aux urnes. Dans d’autres endroits, malheureusement, vous ne pourrez pas forcer les gens à aller voter, et ce quelles que soient les règles qui seront adoptées !

Mes chers collègues, je vous incite donc à faire un travail pugnace de pédagogie pour convaincre nos concitoyens d’aller voter. Ce sera bien plus pertinent que tous les textes que nous pourrons adopter, même si nous devons le faire.

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