Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, peu de mots, mais des mots forts, suffiraient assurément pour exprimer la déception des acteurs du secteur des demandeurs d’asile.
Les événements de ces dernières semaines – l’expulsion des migrants de la Chapelle, puis de la halle Pajol, l’épisode du Bois Dormoy et tout ce qui a suivi – montrent à quel point ce texte est en deçà de la réalité vécue quotidiennement par les personnes dont nous sommes censés parler. Je les ai accompagnées à plusieurs reprises après avoir constaté que nous avions été occupés, particulièrement au Sénat, à détricoter le projet de loi original, qui contenait pourtant quelques avancées, même si elles étaient insuffisantes.
Regardons les choses en face au lieu de faire de la politique politicienne en pensant aux prochaines élections, à l’instar de celles et ceux qui ont fait du problème migratoire un programme politique, oubliant qu’il s’agit d’hommes et de femmes qui fuient leur pays pour échapper au pire.
Nous savons tous que des migrants économiques se faufilent parmi les demandeurs d’asile. Ils ne sont toutefois pas nombreux ; n’entretenons pas la confusion. Les demandeurs d’asile arrivent en masse. Nous avons réussi à loger une partie des expulsés de la Chapelle et de la halle Pajol ; à cet égard, je rends hommage aux pouvoirs publics, qu’il a toutefois fallu pousser un peu…
Le problème n’est pourtant pas résolu et ne le sera pas de sitôt. Les regroupements existent encore à Paris et l’accès aux hôpitaux est refusé à des femmes enceintes ! Des dizaines et des dizaines de demandeurs d’asile sont toujours à la rue. Beaucoup ne souhaitent pas rester chez nous, mais veulent aller ailleurs, et ils ont raison. Facilitons-leur au moins la tâche et laissons-les rejoindre le pays de leur choix. De même, à Calais, cessons de faire la police pour la Grande-Bretagne.
Dire que l’Europe n’est même pas capable d’assurer une répartition équitable de ces demandeurs d’asile entre les différents pays ! Au lieu de prendre une décision, elle tergiverse, comme elle l’a fait pour d’autres, par le passé. C’est inadmissible.
Ne comprenez-vous donc pas qu’il y a urgence ? En cette période de canicule, l’urgence, pour ces personnes en extrême détresse, c’est de disposer d’un toit, d’eau pour se laver et de quoi manger. Ne pourrions-nous prendre exemple sur ces jeunes, militants, bénévoles associatifs ou simples riverains, qui apportent aux migrants ce qu’ils peuvent et les aident comme ils peuvent, sans compter leur temps ? Ceux-là honorent la France ; grâce à eux, nous pouvons nous dire que tout n’est pas perdu !
Ce ne sont pas de vaines joutes oratoires ni de vains calculs politiciens qui sortiront la France du marasme ; ils ne garantiront pas davantage aux demandeurs d’asile un traitement simplement humain. Les grandes vacances approchent, n’est-il pas vrai ? Beaucoup continueront à rester dans la rue.
Mes chers collègues, je nous appelle à plus de compassion, à plus de hauteur aussi : élaborons un texte digne de la France ! Las, je crois que la partie est perdue. Si du moins on revenait aux grandes lignes du projet de loi original, on pourrait espérer améliorer un peu le traitement des demandes d’asile en France. Avons-nous donc oublié que ce projet de loi vise à transposer dans le droit français le régime d’asile européen, et que l’objectif n’était pas de rendre notre droit de l’asile encore plus restrictif qu’il ne l’est aujourd’hui ?