Intervention de Laurent Béteille

Réunion du 29 juin 2011 à 14h30
Exercice du droit de préemption — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Laurent BéteilleLaurent Béteille :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais, d’emblée, saluer le travail tout à fait remarquable de notre rapporteur, également auteur de la proposition de loi. Ce thème du droit de préemption nous concerne de très près, nous qui, pour la plupart d’entre nous, sommes des élus locaux.

Il est vrai que ce domaine avait déjà été exploré par le président Warsmann dans sa proposition de loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures. Pour autant, tout le monde a bien compris que l’enjeu va bien au-delà d’une « simple simplification », si je peux m’exprimer ainsi, tant il est nécessaire d’apporter quantité d’ajustements.

Le droit de préemption s’est créé en portant atteinte au principe de l’absolutisme du droit de propriété. À ce propos, mon interprétation du droit révolutionnaire diffère légèrement de celle de Thierry Repentin. Je pense, en effet, que les révolutionnaires avaient, bien au contraire, fait du droit de propriété, notamment en matière immobilière, un droit quasiment absolu, souverain et inaliénable, qui ne pouvait guère être limité que par la loi, et pour des motifs d’intérêt général.

Normalement, toute notion d’abus du droit de propriété ne pouvait exister. C’est la jurisprudence, initialement forgée sur les troubles de voisinage, qui a commencé à battre en brèche ce principe de l’absolutisme du droit de propriété en lui portant une première atteinte. Petit à petit, au fil du temps, des conquêtes et progrès qui ont eu lieu dans l’intérêt social, les collectivités ont pu, elles, se fonder sur les décisions de justice pour réaliser un certain nombre de projets dans l’intérêt général.

Ce droit de préemption constitue aujourd'hui – cela a été dit et je partage complètement ce sentiment – un outil tout à fait indispensable pour la gestion de nos communes : d’abord, il permet de mener à bien un certain nombre de projets d’aménagement qui nécessitent cette maîtrise foncière ; ensuite, c’est un observatoire extrêmement utile de l’évolution du marché foncier sur nos territoires ; enfin – cet aspect est moins souligné –, il est parfois l’occasion d’éviter un certain nombre d’abus ou d’utilisation des sols qui pourraient être particulièrement néfastes à la gestion de nos communes.

C’est dire qu’aujourd'hui il est, à mon avis, essentiel à la fois de simplifier ce droit et de l’améliorer pour remédier aux difficultés qui sont progressivement apparues.

Je suis de ceux qui approuvent totalement les avancées proposées par la commission de l’économie à travers ce texte. Outre une simplification qui était nécessaire et utile, il permet des progrès notables par rapport au droit existant. Ces dispositions, qui sont dans l’intérêt des propriétaires vendeurs et probablement celui des acheteurs, profitent également aux communes.

Au titre des améliorations qui concernent les propriétaires, je citerai notamment tout ce qui permet de raccourcir les délais. Ces mesures sont aussi prévues dans l’intérêt des acquéreurs : en effet, lorsqu’une commune exerce un droit de préemption, elle suscite en général une réaction, qui émane le plus souvent de l’acquéreur et non du propriétaire. Ce dernier regrette, certes, de ne pas toucher son argent aussi vite qu’il l’avait imaginé, mais la vraie gêne suscitée par l’exercice du droit de préemption est souvent ressentie par l’acquéreur, dont les projets de logement auxquels il attachait une extrême importance sont contrariés.

Si la diminution des délais constitue sans doute une contrainte pour les communes, elle apporte, à mon sens, une amélioration évidente pour les acquéreurs.

Pour les communes, ce texte est également porteur de progrès. Tout ce qui permet d’enrichir le formulaire sur le DPU me paraît très positif. Quant aux autres mesures pratiques contenues dans la proposition de loi, notamment la visite du bien, elles sont tout à fait heureuses.

Pour ma part, j’ai déposé quelques amendements sur ce texte, dont l’un consiste à soumettre les décisions de préemption à un affichage en mairie et à une publication dans le recueil des actes administratifs municipaux, de manière que le droit de préemption s’exerce dans la plus grande transparence et que les tiers puissent prendre connaissance de la décision.

Mes chers collègues, je vous soumets un autre amendement que j’avais déjà défendu en 2005. Il ouvre la possibilité, pour les communes, d’exercer un droit de préemption à l’égard d’un certain nombre de donations déguisées sur des biens en général de faible valeur, mais d’une importance tout à fait cruciale pour ces municipalités.

Des exemples, nous en connaissons tous. En tant que président d’une association départementale de maires, je pourrais vous citer des dizaines de cas dans lesquels des propriétaires et des acquéreurs s’entendent avec des notaires plus ou moins consentants…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion