Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, le 20 octobre dernier, la Haute Assemblée avait examiné la proposition de loi de Catherine Troendlé relative à la protection des mineurs contre les agressions sexuelles. Ce texte n’a jamais été inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
Nous sommes saisis aujourd’hui d’un projet de loi portant sur le même sujet, présenté par le Gouvernement. Il comporte cinq articles, qui reprennent l’économie générale des amendements déposés par l’exécutif l’été dernier sur le projet de loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l’Union européenne, dit « DDADUE pénal ».
Ces dispositions avaient été proposées à la suite de deux affaires de pédophilie survenues dans le milieu scolaire au printemps 2015. Les articles additionnels insérés alors dans le projet de loi DDADUE avaient été censurés par le Conseil constitutionnel au motif qu’ils ne présentaient pas de lien, même indirect, avec l’objet du texte.
Attachée à la protection de l’enfance sous toutes ses formes, je ne rentrerai pas dans un débat politique stérile pour reconnaître la paternité, ou plutôt la maternité, devrais-je dire, des mesures proposées. Je déplore cependant, tout comme mes collègues, que le travail parlementaire ait été méprisé.
Ce qui m’importe, c’est que le texte soit adopté et, surtout, appliqué au plus vite pour éviter que les affaires de Villefontaine et d’Orgères ne se reproduisent.
La protection de l’enfance, c’est l’école de la rigueur, de la volonté et surtout de l’humilité. Elle demande donc une attention toute particulière.
Le constat a été dressé : l’organisation des relations entre l’autorité judiciaire et l’administration de l’éducation nationale est défaillante. Le cadre légal applicable est également porteur d’incertitudes juridiques pour les parquets, chargés de la transmission des informations, dès lors qu’une procédure pénale est en cours.
Quitte à me répéter par rapport à la discussion générale qui s’est tenue au mois d’octobre dernier et à réitérer les propos de précédents orateurs, je souhaite réaffirmer deux choses.
D’une part, nous devons adopter la plus grande fermeté face à des crimes commis sur des mineurs. D’autre part, s’il faut préserver un environnement sans danger pour les enfants, il faut aussi respecter les libertés individuelles et l’ordre constitutionnel. Nous devons donc nous doter d’un dispositif garantissant la plus grande sécurité juridique, tout en instaurant un partage d’informations efficace et respectueux de la présomption d’innocence.
Je félicite le rapporteur, François Zocchetto, pour son implication sur ce texte, tout comme précédemment sur celui de Catherine Troendlé.
La commission des lois a adopté dix-neuf amendements, dont dix-huit présentés par son rapporteur, qui ont pour objet de renforcer, dans le cadre du régime général d’information, les garanties pour la personne concernée : il s’agit de lui donner la possibilité de faire des observations pour toutes les décisions que le ministère public transmet à l’administration, observations qui seront ensuite transmises à celle-ci.
Cette personne aura également la possibilité de saisir le président du tribunal de grande instance ou le premier président en cas de non-transmission par le ministère public d’une décision de relaxe ou d’acquittement. C’est l’objet de l’article 1er.
Concernant le régime de transmission obligatoire, je me rallie volontiers à la voix de la raison et à la position de notre rapporteur, à savoir supprimer la faculté pour le ministère public de transmettre l’information dès le stade de la garde à vue ou de l’audition libre, et exclure certaines infractions de ce régime tout en les maintenant dans le champ du régime facultatif, les laissant à la libre appréciation des parquets.
Bien que le caractère facultatif puisse être considéré comme un fléchissement à l’encontre de la protection des mineurs, le respect de la présomption d’innocence s’impose évidemment. Je fais toute confiance aux magistrats, qui sauront prendre les décisions appropriées et proportionnées aux situations.
Je félicite la commission des lois qui a adopté plusieurs amendements et ainsi amélioré, d’une part, le dispositif en faveur de la protection des mineurs, et, d’autre part, la sécurité juridique de l’article 1er. Inscrire au fichier des personnes recherchées les individus interdits d’activité au contact des mineurs me semble ainsi une piste intéressante.
Les articles 2, 3 et 4 du projet de loi contiennent des dispositions qui reprennent celles qu’a adoptées la Haute Assemblée lors de l’examen de la proposition de loi précitée de Mme Troendlé. Je n’ai donc pas de remarques particulières à émettre.
L’article 2 modifie des dispositions relatives à l’interdiction d’enseigner, d’animer ou d’encadrer une activité physique ou sportive auprès de mineurs.
L’article 3 étend l’incapacité de diriger des établissements, services ou lieux de vie et d’accueil régis par le code de l’action sociale et des familles ou d’y exercer en cas de condamnation définitive pour certains délits.
L’article 4 modifie le régime disciplinaire des chefs d’établissement d’enseignement du premier degré privé.
Je salue, enfin, la commission des lois qui a repris l’article 1er de la proposition de loi de Mme Troendlé. Cet article prévoit que la peine complémentaire d’interdiction d’exercice d’une activité impliquant un contact habituel avec les mineurs pour les personnes condamnées pour infraction sexuelle sur mineur ait un caractère automatique. La juridiction de jugement ne pourra y déroger que par une décision spécialement motivée prise au regard des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe UDI-UC votera en faveur de ce texte. Il n’y a plus de temps à perdre. La vulnérabilité de nos enfants n’est pas un sujet que l’on peut prendre à la légère. Elle ne peut et ne doit faire l’objet d’aucune récupération politicienne.