Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à mon sens, la proposition de loi de Jacques Mézard et plusieurs de ses collègues que nous examinons ce jour est de nature à faciliter la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale voulue par la loi NOTRe du 7 août 2015.
Si j’en arrive, avant toute démonstration, à cette conclusion, c’est que les nombreux retours d’expérience des territoires mettent en évidence un besoin réel de disposer de davantage de temps pour gérer les situations les plus complexes, afin de « construire » un véritable projet intercommunal.
Pour autant, tous les représentants des territoires ne demandent pas de délai supplémentaire exprimant même, pour certains, le souhait d’aboutir le plus rapidement possible dans la mise en œuvre, car, il faut bien l’admettre, la réflexion intercommunale n’en est pas au même état d’avancement en tous points de notre territoire national.
À cet égard, je veux remercier les cent présidents des associations départementales des maires qui ont répondu de manière significative à notre consultation. En résumé, les réponses convergent absolument toutes vers un même souci : réussir de la meilleure façon possible la mise en œuvre des schémas.
Je veux également remercier les associations nationales d’élus locaux, l’Association des maires de France, ainsi que l’Assemblée des communautés de France, de leur écoute et de leurs remarques, qui, elles aussi, convergent sur deux grands principes : la nécessité de ne pas modifier les schémas départementaux de coopération intercommunale, qui, depuis le 31 mars, sont une affaire réglée, mais aussi le constat de délais très contraints, en tout cas beaucoup plus contraints que ceux qui sont définis par la précédente réforme, dans le cadre de la loi de réforme des collectivités territoriales.
Sur le premier point, il me semble que nous sommes tous d’accord. D’ailleurs, la modification des schémas n’est pas du tout évoquée dans la proposition de loi : nous ne remettons pas en cause les schémas départementaux. Laissons aujourd’hui aux communes le soin de s’exprimer sur les projets de périmètre. À partir du 15 juin 2016, elles auront l’obligation de répondre dans un délai de soixante-quinze jours. Il est, d’ailleurs, préférable qu’elles répondent – comme on le sait, qui ne dit mot consent !
Sur le second point, je me permets de rappeler la position de l’Assemblée des communautés de France, au-delà du communiqué de presse de soutien à la proposition de loi, qui considère que le « délai moyen de préparation » des fusions d’EPCI est d’environ quinze mois. Une telle durée permet d’éviter l’apparition ou de garantir un meilleur traitement des difficultés liées à l’harmonisation des compétences, au rapprochement des fiscalités, à la répartition des sièges, ou encore à la réorganisation des services.
Pour ce qui concerne l’harmonisation des compétences, cette proposition de loi, en autorisant le report d’une année de la mise en œuvre du schéma, permet, dans les situations les plus complexes, de laisser davantage de temps à la discussion et au rapprochement des points de vue sur le transfert des compétences obligatoires et, en même temps, de rester dans le calendrier du mandat s’agissant des compétences facultatives et optionnelles, dont je vous rappelle, mes chers collègues, qu’elles s’exercent en quelque sorte de façon territoriale pendant une, voire deux années. Il convient donc de stabiliser cet ensemble avant les élections municipales de 2020.
C’est d’ailleurs un sujet sensible dans les intercommunalités qui exerçaient des compétences liées aux services à la personne et qui doivent fusionner avec des intercommunalités de plus grande taille, lesquelles, bien souvent, n’ont pas retenu ce type de compétence.
Avec cette hypothèse de report d’une année, le régime des compétences sera ainsi complètement stabilisé en 2020.
C’est un sujet d’importance que ce calendrier, car il permettra de garder l’un des principes de la loi NOTRe consistant à ne pas faire glisser d’un mandat sur l’autre, et donc vers de nouveaux élus, la mise en œuvre d’une nouvelle intercommunalité.
Pour ce qui est de la fiscalité, il faut bien reconnaître la complexité de certaines situations : taxe professionnelle unique, fiscalité additionnelle, fiscalité mixte… Pour autant, dans de très nombreuses intercommunalités, on ajoute un nouveau régime fiscal transitoire à celui qui est déjà en vigueur depuis la loi de 2010.
Il faut enfin relever certaines difficultés liées aux nouveaux conseils communautaires nés de la volonté des élus ou de celle des préfets et qui sont allés beaucoup plus loin que les seuils fixés par la loi. Sont visées des communautés de très grande taille, dites « XXL », dont on a du mal à concevoir les modes de gouvernance. Nous devons garder à l’esprit, à chaque instant, que les communes et leurs élus sont au cœur du dispositif de l’intercommunalité.
Comme je l’ai indiqué en préambule, tous les territoires ne sont pas au même stade d’avancement. Cette proposition de loi a vocation non pas à imposer une modification des délais, mais à proposer une clause permettant de faciliter la mise en œuvre des projets de fusion.
Nous avons recentré ce texte, avec l’accord de son auteur, sur les cas de fusions de communautés – les plus nombreux –, ce qui permet de ne pas « ralentir » les projets d’extension de périmètre prêts au 1er janvier 2017.
Nous avons également pensé que la saisine de la commission départementale de la coopération intercommunale devait être définie dans le cadre de cette proposition de loi.
Ainsi, avant le 31 juillet 2016, et ce avant que les communes ne se déterminent sur le projet préfectoral de périmètre, le préfet ou 20 % des membres composant la CDCI pourront saisir la commission départementale de la coopération intercommunale afin d’obtenir ce délai supplémentaire d’une année.
Les conditions de majorité ont également été redéfinies pour être portées à 50 % des membres composant la CDCI, ce qui nous semble, tout en étant très représentatif, beaucoup plus souple que la majorité des deux tiers, extrêmement difficile à obtenir.
Voilà, mes chers collègues, en quelques mots – j’ignore s’ils sont de sagesse, monsieur Mézard –, les éléments que je souhaitais livrer à votre réflexion sur un texte qui vise simplement, comme vous l’aurez compris, à mettre du lien dans la construction de l’intercommunalité de notre pays, texte que je vous encourage à adopter.