Le simple fait que les crédits consacrés à l'agriculture et la forêt augmentent dans le PLF pour 2017 pourrait suffire à qualifier cette année de bon millésime.
Nous avons comme politique constante de rechercher un niveau très élevé de sécurité sanitaire en agriculture. Il y va de la confiance des consommateurs dans les produits alimentaires qui en sont issus. Ce haut niveau de sécurité sanitaire n'est pas seulement un objectif français mais un objectif européen, porté par une réglementation communautaire très stricte. Il ne peut être garanti que par des moyens à la hauteur de nos ambitions, ce qui est d'autant plus difficile que l'on assiste d'une part à une montée des menaces sanitaires dans le domaine tant végétal qu'animal et, d'autre part, à une montée des attentes de nos concitoyens en matière d'expertise sur les risques.
C'est le programme 206 qui porte les moyens de l'État en matière de sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation. Il augmente dans le projet de budget pour 2017 de 4,3 % pour s'établir à près de 510 millions d'euros, traduisant concrètement la priorité donnée par le Gouvernement à la sécurité sanitaire.
Les effectifs sont renforcés cette année encore de 60 postes. C'est la dernière tranche de l'augmentation de 180 postes en trois ans lancée en 2015 afin de renforcer les contrôles de sécurité sanitaire, notamment dans les abattoirs. Je salue le maintien de cet effort qui était indispensable pour répondre aux critiques de la Commission européenne, de la Cour des comptes et de l'Office alimentaire et vétérinaire européen. Presque 5 millions d'euros de plus sont prévus sur le risque végétal, pour porter l'enveloppe totale au-dessus de 25 millions d'euros. Il s'agit de renforcer le plan de surveillance de l'expansion de la bactérie xylella fastidiosa, qui a commencé sa propagation en Corse et sur la Côte d'Azur. Ce plan coûtera au total 5,7 millions d'euros en 2017, auxquels s'ajoutent les dépenses d'indemnisation en cas d'arrachage, financées par le Fonds de mutualisation sanitaire et environnemental (FMSE).
L'augmentation des crédits en matière de lutte contre les maladies animales traduit la nécessité de compenser la réduction de certaines subventions européennes et non l'élargissement des actions du ministère dans ce domaine. Or les risques dans le domaine animal restent élevés : influenza aviaire, fièvre catarrhale ovine, tuberculose bovine... L'année 2016 a été marquée par des crises sanitaires d'envergure sur le secteur animal nécessitant la prise d'un décret d'avance de 64 millions d'euros sur le programme 206 pour payer des vaccins FCO ou encore financer le vide sanitaire dans les élevages de canards du Sud-Ouest. Je salue ce souci de répondre vite à la crise, et constate que, lorsque les crédits ordinaires ne permettent pas de faire face, des moyens supplémentaires sont rapidement mobilisés.
Le budget prend bien en compte la montée des besoins relatifs à la lutte contre les salmonelles en élevage : 1,3 million d'euros supplémentaires sont prévus.
Une ligne budgétaire est consacrée aux programmes alimentaires territoriaux (PAT) : elle est modeste avec moins d'un million d'euros, mais c'est une bonne chose d'accompagner cette dynamique.
Enfin, je rappelle le rôle central de l'ANSES, dont les missions ne cessent de se renforcer : délivrance des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques en 2015, des produits biocides en 2016, responsabilité de la toxicovigilance et de l'évaluation des effets du tabac et de ses dérivés depuis 2016, responsabilité de la phytopharmacovigilance, exigence d'évaluation nouvelle des néonicotinoïdes dans la loi biodiversité.
Pour 2017, la dotation budgétaire de l'ANSES en provenance du ministère de l'agriculture baisse de 1,6 million d'euros pour atteindre 60,1 millions d'euros - sur un budget total de l'ANSES de 138 millions d'euros. Cette réduction devrait pouvoir être absorbée par l'Agence, qui dispose aussi d'autres recettes : dotations des autres ministères et taxes diverses. La difficulté se situe à un autre niveau : son plafond d'emplois est abaissé de six postes en 2017. En outre, les souplesses autorisées en matière de recrutements hors plafond prennent fin en 2017.
Ainsi, l'ANSES risque tout simplement de ne pas pouvoir recruter, quand bien même elle disposerait de ressources provenant des taxes et redevances. Elle risque ainsi de prendre du retard dans l'exécution de ses missions, d'autant plus qu'avec le Brexit, se profile une hausse de la charge de travail, les évaluations de produits qui étaient faites au Royaume-Uni devant être transférées dans d'autres États membres de l'Union européenne. Il est indispensable de régler cette difficulté qui est technique et non budgétaire.
Deuxième sujet de mon intervention, l'accompagnement des changements de pratiques agricoles : cette transition vers une conduite des exploitations moins dépendante des intrants, ayant moins d'impact sur l'environnement, est nécessaire pour des raisons économiques, environnementales et pour répondre aux attentes de la société vis-à-vis du monde agricole.
Des moyens importants sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2017 pour répondre à cet enjeu. Les aides à l'agriculture biologique progressent. Lancé en 2013, le programme Ambition bio 2017 visait à doubler les surfaces du bio en France. Le rythme de progression est bon : plus 28 % en deux ans. Nous attendons encore les chiffres de 2016, qui devraient être également orientés à la hausse. Le total des aides au bio, nationales et européennes - à la conversion et au maintien - a cru de 90 à 160 millions d'euros par an. Le budget 2017 poursuit cet engagement en faveur du bio. Il maintient notamment les crédits du Fonds avenir Bio, géré par l'Agence Bio à 4 millions d'euros, soit 1 million de plus que sur la période 2008-2012. Enfin, le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture biologique est conservé.
Les mesures agroenvironnementales (MAE) sont renforcées : le budget global pour ces deux mesures passe de 71,9 millions d'euros dans le précédent budget à 85 millions d'euros. L'orientation vers l'agroécologie constitue une préoccupation transversale qui se concrétise dans l'enseignement agricole, encore renforcé en 2017 de 140 postes d'enseignants et 25 postes d'auxiliaires de vie scolaire. Elle se concrétise aussi dans les appels à projets du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural », et à travers 1 million d'euros sur le programme 149 destiné à l'animation des groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE).
Les programmes Ecophyto et Ecoantibio contribuent aux mêmes objectifs de changements des pratiques agricoles : les crédits d'Ecoantibio sont maintenus en 2017 à 2 millions d'euros ; le budget de l'État est un contributeur marginal - à hauteur de 370 000 euros - au plan Ecophyto, principalement financé par une enveloppe de 41 millions d'euros provenant de la redevance pour pollutions diffuses collectée par les agences de l'eau.
L'accompagnement des changements de pratiques agricoles mobilise des moyens spécifiques - crédits bio, MAE, Ecoantibio, Ecophyto -, mais cette préoccupation n'est pas absente du reste des dispositifs de la politique agricole : ainsi, les aides à la modernisation des exploitations doivent aussi répondre à cet enjeu de conduite écoresponsable des exploitations.
Le budget 2017 propose également un autre type d'accompagnement des exploitations agricoles, vers l'amélioration des performances économiques et de la compétitivité des exploitations agricoles. C'est un sujet cher au Sénat, une proposition de loi a été adoptée l'année dernière.
Nous devrions être satisfaits, car le budget de l'agriculture pour 2017 répond à cette préoccupation : l'augmentation de l'enveloppe de 600 millions d'euros s'explique, pour 480 millions, par la prise en charge de la baisse de sept points de cotisation des exploitants agricoles décidée début 2016, qui s'ajoute à la baisse générale de trois points des cotisations familiales décidée en 2015.
Par ailleurs, les agriculteurs employeurs, mais aussi les entreprises de l'agroalimentaire bénéficient des mesures de réduction du coût du travail par l'allégement des cotisations patronales dans le cadre du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Les coopératives, non éligibles au CICE, ont bénéficié de la suppression en 2015 de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Le dispositif d'exonération pour l'embauche de travailleurs agricoles occasionnels dit TO-DE, recentré en 2013 sur les bas salaires, est maintenu en 2017. Il représente 430 millions d'euros intégralement compensés à la Mutualité sociale agricole (MSA) par le budget du ministère de l'agriculture. Le ministère de l'agriculture chiffre à 2,2 milliards d'euros les allégements de charges des entreprises dans la production agricole en 2017 et 1,8 milliard d'euros pour les coopératives agricoles et les sociétés de l'agroalimentaire.
La problématique de la compétitivité n'est donc pas oubliée. Les agriculteurs et les industries agroalimentaires devraient retrouver des marges de manoeuvre, notamment à l'exportation. Je salue le choix d'augmenter de 21 % en 2017 les crédits de la promotion et de l'action internationale, pour financer les conventions avec les acteurs du secteur : Business France, Sopexa, Adepta... Avec cette politique de présence à l'étranger, nous reconquerrons des marchés extérieurs, où les produits français jouissent d'une excellente image de marque.
J'émets donc un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».