Dans ce budget, le premier de la Nation et le dernier de la refondation de l'école engagée depuis le début de la législature, les crédits de la mission « Enseignement scolaire » connaissent une augmentation inédite de près de 3 milliards d'euros, soit une hausse de 4,5 %. C'est quatre fois plus que les crédits consacrés au sport, à la vie associative et à la jeunesse. L'effort consenti est considérable : les crédits de la mission s'élèvent à 70 milliards d'euros, dont 68,6 au profit des cinq programmes du ressort du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Une part significative de ces dépenses nouvelles relève de mesures applicables à la fonction publique, sans lien direct avec la politique éducative. Les hausses successives de la valeur du point d'indice et la mise en oeuvre de l'accord sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR), représentent, à elles seules, une dépense supplémentaire de 1,46 milliard d'euros, soit la moitié environ de l'augmentation du budget. Si l'on y ajoute le glissement vieillesse-technicité (GVT), la part quasi automatique de la hausse atteint 1,87 milliard d'euros !
La politique d'inflation des moyens menée depuis 2012 trouve ici son apogée. Elle procède du postulat selon lequel l'augmentation continue des moyens permettra d'améliorer la situation de l'école, ce qui est pourtant démenti par trente années passées à remplir, chaque année, le tonneau des Danaïdes de la rue de Grenelle.
Les dépenses en faveur de l'éducation ont doublé en euros constants depuis 1980 et augmenté de plus de 10 % depuis 2000, pour atteindre près de 131 milliards d'euros en 2015, sans effet positif sur les résultats de notre école, bien au contraire. Cet effort important se situe dans la moyenne des pays de l'OCDE, mais il est fondamentalement déséquilibré.
La France dépense beaucoup plus pour le secondaire et beaucoup moins pour le primaire, niveau auquel tout se joue. La maîtrise des savoirs fondamentaux dès la fin du cours préparatoire (CP) est déterminante pour l'avenir scolaire et professionnel des enfants. C'est là que se forme la difficulté scolaire, à laquelle notre système éducatif est incapable de remédier. Ainsi, plus de la moitié des 140 000 décrocheurs étaient en difficulté à l'issue du cours moyen 2e année (CM2), si ce n'est du cours élémentaire.
Les résultats des dernières études ne sont pas encourageants. L'enquête CEDRE de 2015 montre que seuls 60 % des élèves ont une maîtrise suffisante des compétences attendues en fin d'école primaire. Une étude plus récente met en évidence la dégradation extrêmement préoccupante de la maîtrise de l'orthographe des élèves en fin d'école primaire. Enfin, la comparaison d'études de cohortes menées en 1999 et en 2013 fait apparaître une baisse significative des résultats en orthographe et en vocabulaire à l'issue du cours élémentaire 1re année (CE1).
Si l'école ne parvient pas à inculquer à tous les élèves le célèbre « lire, écrire, compter », il n'est pas surprenant que notre pays soit celui où l'origine sociale pèse le plus dans le parcours scolaire.
L'échec n'est pas une fatalité. Il faut donner la priorité au primaire et à l'enseignement des savoirs fondamentaux. C'était une des mesures phares de la refondation de l'école ; je m'efforcerai, dans un second temps, d'en dresser le bilan.
Revenons à l'examen des crédits : tout augmente ! Les crédits consacrés à l'enseignement scolaire public du premier degré progressent de 6,6 % ; l'augmentation atteint 3,7 % pour le second degré, 3,2 %, pour l'enseignement privé, 4,4 % pour la vie de l'élève et 0,5 % pour le soutien de la politique de l'éducation nationale.
Il faut reconnaître au Gouvernement la cohérence de sa politique : 11 662 créations de postes sont prévues en 2017, l'engagement de créer 54 000 postes sur la durée du quinquennat semble donc tenu.
Le schéma d'emplois pour 2017 se décompose ainsi : 4 311 équivalents temps plein d'enseignants du premier degré public, 4 400 équivalents temps plein d'enseignants et 150 de personnels administratifs, techniques et de service au profit du secondaire public, 1 000 postes d'enseignants, répartis pour moitié entre les premier et second degrés, au profit de l'enseignement privé et, dans le programme « Vie de l'élève », 1 801 équivalents temps plein, dont 200 de personnels médico-sociaux, 250 de conseillers principaux d'éducation et 1 351 d'accompagnants d'élèves en situation de handicap. La prévision budgétaire ne dit rien, toutefois, de leur création effective ni de l'amélioration du service rendu.
La revalorisation de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE) versée aux professeurs des écoles, portée de 400 à 1 200 euros bruts annuels à compter de la rentrée 2016, est une mesure d'équité.
En matière de pré-recrutement des enseignants, le remplacement du dispositif des emplois d'avenir professeurs par un dispositif fondé sur l'apprentissage est une bonne chose. Je me réjouis de voir l'éducation nationale s'emparer de l'apprentissage. Souhaitons qu'elle étende cet intérêt à d'autres domaines !
Les crédits consacrés au fonds de soutien au développement des activités périscolaires s'élèvent pour 2017 à 373 millions d'euros, conformément aux engagements du Gouvernement.
En revanche, le financement du renouvellement des manuels scolaires pose problème. Le ministère annonçait l'année dernière un effort de 300 millions d'euros sur deux ans, revu à la baisse à 260 millions d'euros, alors que les chefs d'établissement peinent à renouveler leurs manuels avec les seuls crédits prévus l'année dernière. Pour les manuels de l'école primaire, l'État se repose sur les communes, qui n'ont pourtant pas d'obligation en la matière et qui sont déjà asphyxiées par la baisse des dotations et par la réforme des rythmes scolaires.