Intervention de Jean-Pierre Vial

Réunion du 26 janvier 2017 à 10h45
Accord avec l'italie : nouvelle ligne ferroviaire lyon-turin — Adoption définitive en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre VialJean-Pierre Vial :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, seize ans après le traité franco-italien de 2001, signé sous la présidence de Jacques Chirac, notre vote va aujourd'hui clore le volet politique de ce qui sera l’une des plus grandes infrastructures du monde. Le volet politique clos, s’ouvre celui de la réalisation d’un ouvrage qui nécessitera un chantier d’une quinzaine d’années.

Je veux saluer le travail du rapporteur, qui soutient avec passion la ligne Lyon-Turin : il a fait une analyse extrêmement rigoureuse du projet, notamment sous ses aspects juridiques. On ne peut que se féliciter de la quasi-unanimité que recueille ce projet et regretter l’obstination des écologistes à reposer toujours les mêmes questions, alors que les réponses sont connues depuis des années…

Je ferai quelques observations que complètera mon collègue et ami Michel Bouvard.

La ligne Lyon-Turin représente un enjeu économique dans les relations franco-italiennes.

Le corridor méditerranéen comprenant cette liaison concerne 18 % de la population de l’Union européenne et 17 % de son PIB, avec 200 milliards d’euros d’échanges commerciaux. Les échanges entre l’Italie et la France, à eux seuls, s’élèvent à 70 milliards d’euros. Les échanges au travers de l’arc alpin représentent presque 150 millions de tonnes par an, répartis entre la France et l’Italie pour 40 millions de tonnes, dont seulement 10 % par le ferroviaire, entre la Suisse et l’Italie pour 39 millions de tonnes, dont 68 % par le ferroviaire, et entre l’Autriche et l’Italie pour 68 millions de tonnes, dont 29 % par le ferroviaire.

Pour répondre au groupe écologiste, je rappelle que le trafic transalpin atteint aujourd’hui 150 millions de tonnes, avec une progression du trafic poids lourds de 1 % de 2009 à 2015 et de 6 % en 2015 et 2016.

Au-delà, le chantier lié à la réalisation de cette ligne est lui-même un enjeu économique.

Le coût de cet ouvrage de plus de 57 kilomètres s’élève à 8, 6 milliards d’euros, coût comparable à celui du Gothard, qui vient d’être mis en service. M. le secrétaire d’État l’a dit, le financement est assuré par une contribution exceptionnelle de l’Europe de 40 % et une participation de l’Italie à hauteur de 35 %, ce qui ne laisse que 25 % à la charge de la France, soit 2, 3 milliards d’euros, alors que l’ouvrage est situé pour plus des deux tiers sur notre territoire national.

L’enjeu est aussi écologique. Avec l’ambition de reporter à terme un million de poids lourds de la route sur le rail, le défi est énorme : faire passer la part du mode ferroviaire au travers des Alpes franco-italiennes de 9 % actuellement à 40 %, pour une économie d’émissions de gaz à effet de serre d’un million de tonnes équivalent CO2. Il faut relever ce défi !

Ces enjeux sont d’une particulière actualité quand on les rapproche des récents événements survenus dans la vallée de l’Arve, où élus et population demandaient à l’État d’encourager le transport du fret par rail en supprimant la circulation des poids lourds dans le tunnel du Mont-Blanc.

Le projet représente également un enjeu de sécurité. Il importe de rappeler que le tunnel historique est un tunnel monotube d’environ 13 kilomètres réalisé il y a plus d’un siècle et demi sur l’initiative de Cavour, avant que la Savoie soit rattachée à la France.

Enfin, l’enjeu est également stratégique. Les échanges commerciaux entre la France et l’Italie, par leur importance, justifieraient à eux seuls la réalisation d’un tel équipement, que Bruxelles place au cœur du corridor sud-européen reliant la péninsule ibérique et l’Europe centrale.

La semaine dernière, un grand quotidien national présentait la stratégie économique de la Chine et sa volonté de recréer une nouvelle route de la soie, avec une liaison ferroviaire de l’est de la Chine à l’Ouest européen qui, depuis 2014, permet déjà à un convoi de conteneurs de partir chaque jour de l’Allemagne pour rejoindre la Chine.

Cette ambition est clairement affichée et prend en compte la place que doivent jouer le Moyen-Orient et l’Afrique. La Méditerranée, sur les bords de laquelle la Chine est en train de s’installer puissamment, notamment en développant le port du Pirée, et où elle souhaite disposer du transport ferroviaire, illustre à quel point l’infrastructure du Lyon-Turin, de par sa situation au cœur du corridor sud-européen, est une opportunité pour la France de ne pas se disqualifier au sud de l’Europe, comme malheureusement elle l’a fait sur sa façade maritime au nord.

Oui, le Lyon-Turin est l’infrastructure des défis de demain. Je tenais à le dire à tous mes collègues, en particulier à ceux du groupe écologiste, puisque ce projet est un véritable défi écologique !

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