Intervention de Bernard Angels

Réunion du 18 novembre 2010 à 15h00
Loi de finances pour 2011 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Bernard AngelsBernard Angels :

Si, comme nous le pensons, la croissance en 2011 et au cours des années suivantes s’établit à un niveau moindre que celui qui est estimé dans le projet de loi de programmation des finances publiques révisé, alors c’est à tout le moins 4 milliards d’euros supplémentaires qui devront être dégagés chaque année. Qui va payer ? La réponse est dans votre projet : les ménages et les services publics seront les principales victimes, au mépris de l’efficacité économique et de la justice sociale.

Il est indéniable que les impôts vont augmenter l’année prochaine. C’était d’ailleurs tout à fait prévisible, compte tenu de votre obstination à ne pas revenir sur de nombreuses mesures fiscales qui, en plus d’être ouvertement injustes, pèsent sur nos finances publiques.

Oui, vos choix pèsent dramatiquement sur les finances du pays, et il est désormais admis que la crise n’explique qu’un tiers du déficit structurel, le reste étant imputable à la politique budgétaire et fiscale que vous avez menée au cours des trois années précédentes.

Entre 2000 et 2009, 70 milliards d’euros de recettes ont disparu des caisses de l’État, dont 15 milliards d’euros entre 2007 et 2010 du simple fait des mesures relatives à l’impôt sur le revenu, aux allégements contenus dans la loi TEPA, c'est-à-dire la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, à la TVA sur la restauration et à la taxe professionnelle.

En 2012, selon vos propres prévisions, la dette publique atteindrait 1 800 milliards d’euros, soit deux fois plus qu’en 2002. La charge des intérêts de la dette dépassera bientôt le montant du premier poste du budget de l’État, l’éducation nationale. Nos finances publiques ne sont pas soutenables, et l’orientation budgétaire que vous choisissez pour remédier au problème ne va pas dans le sens de la justice fiscale.

Disons-le clairement : les impôts augmenteront l’année prochaine, faisant des ménages les variables d’ajustement du Gouvernement en matière de réduction du déficit.

En 2011, les prélèvements obligatoires vont accuser une hausse de 20 milliards d’euros. Sur ce montant, 2 milliards d’euros sont imputables à la reprise de l’activité économique, c’est-à-dire à la reconstitution spontanée des recettes. Il reste donc 18 milliards d’euros de reconstitution volontaire, dont 10 milliards d’euros du fait de mesures nouvelles.

Ainsi, les ménages seront les premiers à contribuer à la résorption du déficit, car ils vont supporter 70 % de cet effort. À ce titre, la mesure d’augmentation de la TVA sur les offres dites « triple play » illustre bien le jeu de dupes du Gouvernement. Il ne fait aucun doute, en effet, que cette nouvelle taxe acquittée par les fournisseurs d’accès à Internet sera quasi entièrement répercutée sur le coût des abonnements des utilisateurs.

En revanche, pour les foyers fiscaux les plus favorisés, l’horizon s’éclaircit sérieusement ! Votre mansuétude à l’égard des privilégiés est presque touchante. En proposant la suppression du bouclier fiscal, vous auriez pu rétablir en partie l’équilibre, mais vous choisissez d’adosser cette mesure à une éventuelle suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF.

Il reste que, là où le bouclier fiscal coûte 600 millions d’euros chaque année, l’ISF en rapporte plus de 3 milliards. Ces deux mesures ne sont donc pas neutres et induiront un manque à gagner d’environ 2, 5 milliards d’euros chaque année.

La deuxième victime de votre politique budgétaire, ce sont les services publics et ceux qui les font vivre : les fonctionnaires.

En ne remplaçant pas un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, vous exposez notre pays à une pénurie qui ne sera pas sans conséquences sur la qualité des services publics et leur bon fonctionnement.

Et pour quel bénéfice budgétaire ? Il devait être de un milliard d’euros par an, mais s’établit aux alentours de 800 millions d’euros, dont il faut retrancher 430 millions d’euros redistribués aux fonctionnaires et encore 300 millions d’euros destinés à payer leurs heures supplémentaires.

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