Séance en hémicycle du 18 novembre 2010 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Bernard Frimat.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger, en application de l’article 2 du décret n° 2001-784 du 28 août 2001, au sein du Conseil national de la sécurité routière.

La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a fait connaître qu’elle propose la candidature de M. Jean Patrick Courtois pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme nous l’avions indiqué dès le début du mois de septembre lorsque nous avons examiné le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, et comme nous l’avons confirmé par la suite, notamment à l’occasion du débat sur la réforme des retraites, il nous a semblé indispensable que la commission des affaires sociales examine aussi cette année la première partie du projet de loi de finances pour 2011.

C’est une première ! Nous ne nous étions encore jamais saisis pour avis du projet de loi de finances à ce stade de la discussion. J’espère toutefois que cela ne deviendra pas une règle, car, si les interactions entre les deux textes ne peuvent être évitées et sont en partie normales, il n’est pas satisfaisant qu’elles soient aussi nombreuses – plus du tiers des mesures fiscales ! – et embrouillées qu’elles le sont cette année.

Trois séries de mesures ont attiré notre attention : celles qui contribuent au financement de la réforme des retraites ; celles qui sont destinées à alimenter non plus la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, comme dans le projet de loi initial, mais la branche famille ; celles, enfin, qui touchent au financement des caisses, notamment à travers la compensation des allégements de cotisations sociales.

La première série de mesures porte sur le financement de la réforme des retraites.

Dans l’équilibre de la réforme que nous a présenté le Gouvernement, il était prévu de dégager 3, 5 milliards d’euros en 2011 pour financer la réforme des retraites.

Une partie de ces mesures figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, principalement l’annualisation du calcul des allégements généraux, pour 2 milliards d’euros. L’autre partie est inscrite dans le projet de loi de finances.

Il s’agit, d’abord, de la contribution supplémentaire de 1 % sur les hauts revenus, avec le relèvement de 40 % à 41 % du taux d’imposition de la tranche la plus élevée du barème de l’impôt sur le revenu, contribution qui, vous le savez, est exclue du champ du bouclier fiscal. Le gain qui en est attendu est de 495 millions d’euros en 2011.

Il s’agit, ensuite, de la suppression à compter du 1erjanvier 2011 du crédit d’impôt attaché aux revenus distribués, pour un gain de 645 millions d’euros.

Il s’agit, encore, de l’imposition, dès le premier euro, des plus-values réalisées par des particuliers à l’occasion de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux, pour un gain de 180 millions d’euros à partir de 2012.

Il s’agit enfin de la suppression, dans le cadre du régime « mères-filles », du plafonnement de la quote-part des frais et charges prélevés sur les dividendes perçus de ses filiales par une société mère, pour un gain de 200 millions.

Pour permettre l’affectation du produit de ces quatre recettes à la sécurité sociale, il est prévu de transférer au profit de celle-ci une nouvelle part de TVA collectée sur des activités ayant un lien avec l’assurance maladie – activités des médecins généralistes, des infirmiers, des établissements hospitaliers –, pour un montant total de 1, 34 milliard d’euros.

La deuxième série de mesures porte sur l’alimentation de la branche famille.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale a prévu une très importante reprise de dette en 2011. Or la nature des recettes qui doivent abonder la Caisse d’amortissement de la dette sociale pour en assurer le financement a beaucoup évolué au cours des dernières semaines. Finalement, pour lever les réserves formulées par l’Assemblée nationale sur le dispositif qu’il avait initialement envisagé, le Gouvernement a décidé, et cela figure dans la loi organique relative à la gestion de la dette sociale, que les recettes de la CADES seront, hors mobilisation du Fonds de réserve pour les retraites, exclusivement constituées de la contribution au remboursement de la dette sociale et d’une fraction de la contribution sociale généralisée, la CSG.

En conséquence de ce principe, 0, 28 point de la CSG, jusqu’à présent destiné à la branche famille, a été transféré à la CADES, ce qui représente un montant de 3, 2 milliards d’euros.

En compensation, la branche famille doit recevoir le produit de trois recettes relatives au secteur des assurances qui était initialement destiné à la CADES et dont les modalités figurent dans le projet de loi de finances.

Monsieur le ministre, si le sujet n’était pas aussi grave, on aurait envie de rire de ces jeux de tuyauterie, incompréhensibles pour les non-initiés.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

La première recette provient de la taxation des contrats d’assurance maladie solidaires et responsables. Ces contrats seraient non plus exonérés, mais taxés à un « demi-taux » de 3, 5 %. Pour le Gouvernement, il s’agit de maintenir l’incitation fiscale à la conclusion de tels contrats, tout en réduisant la « dépense fiscale » de moitié, soit à 1, 1 milliard d’euros.

La deuxième recette provient du prélèvement « au fil de l’eau » des contributions sociales sur les compartiments euros des contrats d’assurance vie multisupports. Le gain prévu est de 1, 6 milliard d’euros en 2011, montant qui irait en décroissant jusqu’en 2019.

Enfin, la troisième recette provient de l’instauration d’une taxe sur les sommes mises en réserve en franchise d’impôt par les entreprises d’assurance. Le gain attendu de cet exit tax, soit 1, 7 milliard d’euros, sera réparti entre 2011 et 2012.

La commission des affaires sociales considère que ces trois recettes ne présentent pas la solidité et la pérennité nécessaires pour assurer un financement stable des dépenses de la branche famille. En effet, l’exit tax est une mesure « à un coup », et le prélèvement anticipé des contributions sociales sur les contrats d’assurance vie est destiné à s’éroder peu à peu.

Seule la mesure de taxation des contrats responsables paraît à peu près stable. Mais cette mesure présente d’autres inconvénients.

D’un côté, en effet, on nous dit que l’instauration de cette nouvelle taxe renchérira sensiblement le coût des assurances complémentaires, et certains de nos interlocuteurs n’hésitent pas à parler d’augmentation des primes allant jusqu’à 6 ou 8 points dès l’année prochaine.

De l’autre côté, celui du Gouvernement, on nous dit que les organismes complémentaires, quel que soit leur statut, ont les réserves nécessaires pour prendre en charge ce nouveau prélèvement, sans en faire peser les conséquences sur les assurés, ou au maximum à hauteur d’un ou deux points supplémentaires. Les ministres, François Baroin comme Roselyne Bachelot, mettent en avant les conséquences positives pour les organismes complémentaires des mesures d’économie sur l’assurance maladie, ainsi que la progression toujours rapide du nombre des assurés pris en charge à 100 % dans le cadre des affectations de longue durée, les ALD.

Alain Vasselle, qui m’a demandé de le remplacer à cette tribune, a souhaité pouvoir confronter ces deux thèses. Il a donc demandé au Gouvernement le détail des calculs à partir desquels il aboutit à ses conclusions et il a transmis ce document aux mutuelles et aux assurances. Les éléments de réponse reçus ne sont pas assez précis pour pouvoir conclure dans un sens ou dans un autre.

Comme la Cour des comptes, nous regrettons que le secteur des organismes complémentaires ne soit pas plus transparent et capable de fournir des informations plus détaillées au Parlement. Nous manquons à l’évidence d’informations pour mesurer les conséquences de nos décisions. Or il en va de la couverture du risque maladie d’un grand nombre de nos concitoyens.

J’en viens à la troisième série de mesures. Le projet de loi de finances pour 2011 comporte une nouvelle répartition du droit de consommation sur les tabacs.

Cet ajustement n’est toutefois pas le premier et, ces derniers temps, les évolutions de l’affectation des droits sur les tabacs se sont toujours faites au détriment de la sécurité sociale. Pour cette raison, nous revendiquons depuis plusieurs années que la totalité des droits sur les tabacs soit affectée à la sécurité sociale et que la loi de financement de la sécurité sociale puisse en gérer les évolutions.

À l’occasion de l’adoption de l’article 12 bis du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il y a quelques jours, le Gouvernement a accepté de faire ce transfert. Pour en tirer les conséquences dans le projet de loi de finances, nous vous proposerons un amendement à l’article 40.

Notre commission des affaires sociales a donc pris acte des mesures de financement de la réforme des retraites et de compensation, au bénéfice de la branche famille, de la ponction faite sur les ressources de cette dernière pour alimenter la CADES. Nous resterons cependant très vigilants sur l’exécution de ces mesures, car il faut que les recettes prévues soient au rendez-vous, tant pour permettre le retour progressif à l’équilibre de la branche vieillesse, que pour assurer des ressources pérennes à la branche famille.

Nous avons prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale une clause de garantie pour la branche famille, à hauteur du manque à gagner qu’implique pour elle la substitution des trois recettes « assurances » à 0, 28 point de CSG. Il importera, là encore, qu’elle soit pleinement mise en œuvre dans les prochaines années.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, plus de chômage, plus d’impôts, peu de croissance et moins de service public : voilà comment on peut résumer, en quelques mots, le projet de loi de finances pour 2011 !

À ceux qui parlent de sortie de crise, 4 millions de travailleuses et de travailleurs privés d’emploi ou n’exerçant qu’une activité réduite, répondent clairement : non, la crise continue !

À ceux qui polémiquent sur le taux des prélèvements obligatoires, ceux qui voient grimper la facture des impôts locaux, flamber le prix du plein d’essence à la pompe, augmenter le prix du paquet de cigarettes ou s’envoler le prix des produits frais peuvent répondre que les taxes et les impôts se portent très bien quand il s’agit de frapper la consommation populaire !

À ceux qui se demandent si, pour financer les entreprises, il faut passer par les banques ou par la bourse, les salariés victimes de plans sociaux en 2010, ceux qui sont frappés par le chômage partiel et le ralentissement, déjà perceptible, de l’activité industrielle, peuvent répondre que là n’est pas la question !

Enfin, à toutes celles et tous ceux qui parlent d’État modeste, de « performance » des services publics, d’efficacité, d’efficience, et de je ne sais encore quelle optimisation des services publics, les fermetures de classes, les files d’attente dans les préfectures ou la lenteur de la communication administrative apportent autant de réponses.

Depuis plusieurs années, le service public, élément décisif dans la vie de la nation, source d’efficacité économique et sociale, est attaqué, mis en cause, amoindri, au nom d’une idéologie libérale dépassée qui veut faire croire qu’une diminution du « collectif » et de la solidarité est nécessaire au bien commun !

Ce projet de loi pour 2011 s’inscrit, dans ses grandes lignes, dans la filiation des lois de finances dont nous avons pu débattre depuis 2002.

La « priorité des priorités », nous l’avons vu lors de l’examen de la loi de programmation des finances publiques, c’est la réduction des déficits publics. La belle affaire que voilà !

Comment se fait-il que, depuis 2002, toutes les lois de finances aient fait de cette réduction des déficits publics l’absolue priorité de leur mise en œuvre et que ces déficits, et la dette avec eux, n’aient cessé de croître et d’embellir depuis ?

Ce matin, le rapporteur général nous a gratifiés d’un plaidoyer, que je qualifierai d’idéologique – toujours le même ! –, en faveur d’un budget qu’il estime bon pour l’avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

L’existence de la dette, ce n’est pas de l’idéologie, c’est une réalité !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le rapporteur général, tous les ans, nous avons droit à la même rengaine !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Il s’agit de l’un de ces budgets où il y a encore moins d’argent utile, celui qui va à la santé, à l’école, à l’industrie ou au logement.

Les déficits s’accroissent d’année en année, le nombre de chômeurs également, et le problème du logement ne se résout pas.

À l’école aussi, les problèmes sont évidents, notamment dans le premier degré, au regard de l’augmentation du nombre d’élèves et de la diminution du nombre d’enseignants, et la situation est très tendue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La dette, c’est la disparition de l’indépendance nationale ! C’est une aliénation !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Le problème, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, c’est que les déficits et la dette ne viennent pas d’un excès de dépenses publiques, mais de la crise et des cadeaux faits aux plus riches et aux grands groupes, comme nous le voyons avec les 142 milliards d’euros de trésorerie dont disposent les sociétés du CAC 40 !

Joseph Stiglitz disait dernièrement que tout avait été fait « pour contourner les normes comptables et échapper aux impôts nécessaires pour financer investissements publics en infrastructures et en technologies qui portent la croissance réelle et non la croissance fantôme promise par le secteur financier ».

En guise de conclusion provisoire, le Gouvernement nous a d’ailleurs enjoint de voter la loi sur les retraites, au motif de la nécessité de sauver la retraite par répartition, et ce pour la troisième fois en moins de vingt ans !

En 1993, il fallait sauver les retraites, et ce sont les 35 heures et la croissance retrouvée de 1997 et 1998 qui ont remis les comptes à l’équilibre !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

En 2003, il fallait déjà sauver les retraites. Faute d’alternance, et d’alternative politique en découlant, 2010 a marqué la fin – provisoire, je l’espère ! – de la retraite à 60 ans, parce qu’aucune autre solution n’était admissible pour les libéraux, incapables de réduire les déficits !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Ave ce projet de loi de finances pour 2011, on nous annonce, pour la énième fois, que nous allons lutter avec détermination et efficacité contre les déficits. Ces déclarations nous laissent dubitatifs puisque les précédentes lois de finances, sous-tendues par les mêmes intentions, n’y sont pas parvenues !

Par ailleurs, nous nous demandons depuis plusieurs années quels sont les vecteurs essentiels de ce déficit public et de cette dette publique, agités comme autant d’épouvantails pour justifier des politiques d’austérité.

Cette démarche, largement inspirée par la Commission européenne, est également défendue becs et ongles par la Chancelière de La République fédérale d’Allemagne, qui sait fort bien, et de longue date, que son pays doit une bonne partie de sa force économique à la manière dont il écrase la concurrence des autres pays de l’Union, notamment sur le plan commercial.

Permettez-moi d’ailleurs de pointer, dès maintenant, l’une des limites essentielles de la politique d’austérité qu’entend mener le Gouvernement.

Alors que nous avons connu en 2008 un épisode inédit de la crise, sous la forme d’une surchauffe des secteurs financiers – un incident dont il convient de sortir ! –, l’Union européenne a décidé d’être la seule partie du monde à mener des politiques d’austérité pour enclencher de nouveau le processus de croissance.

Il n’y a qu’en Europe que l’on entend remettre les économies d’aplomb par la réduction des dépenses publiques et la limitation de la création monétaire !

À peine avions-nous débattu de la loi de programmation que le Gouverneur de la Banque centrale américaine, à la suite des résultats des élections de mi-mandat, annonçait qu’il allait mettre en circulation 600 milliards de dollars supplémentaires pour racheter une partie de la dette publique colossale de l’État fédéral américain ! Quitte à ce que tout cela pèse sur la valeur du dollar – et c’est l’architecture d’une loi de finances fondée sur un euro à parité de 1, 30 dollar qui en prend un coup ! –, car l’objectif est de relancer l’activité économique, une relance qui permettra à la valeur du billet vert d’être adossée à une production réelle de biens et de services !

On pourrait se demander, à ce stade, ce qu’attend Jean-Claude Trichet, arc-bouté sur sa crainte de l’inflation monétaire, pour agir de la même façon …

Pourquoi la Banque centrale européenne ne procède-t-elle pas à des émissions de monnaie ou d’obligations rachetant tout ou partie de la dette publique des États de l’Union, à commencer par les plus mal en point que sont l’Irlande, la Grèce, le Portugal ou l’Espagne ? Comme nous ne pouvons décemment pas demander à la présidence belge de l’Union européenne de le faire, ce serait bien la moindre des choses !

Mes chers collègues, une partie de l’origine de nos difficultés actuelles se situe probablement au niveau européen.

Cela fait en effet quelques décennies que l’Union est conçue comme une vaste zone de libre-échange, fondée sur la recherche permanente du moins-disant fiscal et social et, singulièrement, sur une harmonisation des législations nationales visant à réduire, sans cesse, les taux nominaux d’imposition des sociétés et des ménages les plus aisés, et à faire disparaître, autant que faire se peut, toute taxation supportée par l’entreprise, le capital ou le patrimoine.

La croissance des déficits publics, en ce qu’elle va bien au-delà des dépenses d’équipement de la nation – qui peuvent motiver le recours à l’emprunt, comme pour une famille qui achète une maison mais ne dispose pas immédiatement de l’argent nécessaire ! –, date du milieu des années 1980.

Avec le temps, nous avons en effet connu une dérive des comptes publics qui a ajouté au financement de l’investissement un service de la dette de plus en plus conséquent et une insuffisance des recettes de fonctionnement, tout cela conduisant au fameux effet « boule de neige » de la dette publique. Seuls les exercices budgétaires compris en 1997 et 2002 ont permis d’éviter cet effet.

À quoi tient l’insuffisance des recettes de fonctionnement, sinon aux moins-values constamment réévaluées de recettes fiscales, sous les effets conjugués des baisses des taux nominaux ? Nous sommes en effet passés de 50 % à 33, 33 % pour l’impôt sur les sociétés, et de 65 % à 40 % pour le taux marginal supérieur de l’impôt sur le revenu, par exemple. S’y ajoutent des évictions d’assiette, c’est-à-dire les niches fiscales, au sens large.

Le Conseil des prélèvements obligatoires a rendu un avis sur le sujet : 172 milliards d’euros ont été dépensés en 2009 pour alléger les cotisations sociales et les impôts des entreprises, c’est-à-dire plus que le déficit.

Pour le seul impôt sur les sociétés, les mesures d’exonération, les régimes spéciaux, les allégements temporaires et les crédits d’impôt ont coûté 106 milliards d’euros, soit plus de deux fois le rendement net de l’impôt !

Le vrai taux de l’impôt sur les sociétés, en France, n’est pas de 33, 33 %, mais de 10 %. Bien des cadres moyens dépourvus de patrimoine important aimeraient se voir appliquer un tel taux d’imposition !

C’est cette accumulation de niches fiscales plus ou moins bienvenues qui est, aujourd’hui, à la source de l’accumulation de déficits que constitue la dette publique.

Le projet de loi de finances pour 2011 a été annoncé comme celui qui doit remettre en question cette logique infernale et coûteuse, mais nous sommes vraiment très loin de ce qu’il conviendrait de faire. Nous ne sommes aucunement enclins à accepter une telle orientation.

Je n’ai pas tout à fait achevé mon propos, mais je m’interromps afin de respecter le temps de parole qui m’est imparti. Je reviendrai sur cette question lors de la discussion des amendements.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la première déclinaison de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 est bâtie, comme la loi de programmation elle-même, sur une hypothèse de croissance qui nuit à sa crédibilité.

Ce matin, Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a salué la prévision de croissance pour 2010, fondée sur les résultats avérés du deuxième trimestre 2010. Elle a même anticipé sur le troisième trimestre. Or on n’établit pas un budget en regardant dans le rétroviseur. Son enthousiasme habituel n’est donc pas de mise aujourd'hui concernant l’année 2011.

Les chiffres du troisième trimestre montrent que l’investissement a ralenti et que la croissance provient essentiellement des stocks des entreprises. Le déficit du commerce extérieur continue de peser sur la croissance. Quant à l’emploi, il est le grand oublié du présent projet de loi de finances.

En l’absence de nouveaux ressorts, la croissance est très fragile. La consommation est le seul moteur qui tienne encore le choc. Maintenir l’hypothèse d’un taux de croissance de 2 % en 2011 est irréaliste alors que l’horizon s’assombrit, particulièrement dans la zone euro. En effet, seule l’Allemagne, qui combine compétitivité, fortes exportations, reprise de la consommation et retour rapide à l’équilibre budgétaire, a tiré provisoirement son épingle du jeu.

L’évolution de la dette est très préoccupante au moment où les taux d’intérêt repartent à la hausse. La charge des intérêts devrait atteindre un pic en 2013 et culminer à 55 milliards d’euros.

À cet égard, permettez-moi de vous citer un extrait du rapport écrit de M. le rapporteur général : « Pour respecter le plafonnement en volume des dépenses de l’État, il faudra trouver la différence dans les crédits des autres missions ou dans les prélèvements sur recettes. » Tout est dit ! Cela signifie qu’à partir de 2012, ce sera vraiment l’austérité.

Après avoir aggravé les déficits, le Gouvernement a bâti son budget sur l’hypothèse d’une baisse des déficits, baisse que vous qualifiez, monsieur le ministre, d’ « historique ». Pour ma part, je dirais plutôt d’elle qu’elle est « optique », dans la mesure où elle résulte, pour l’essentiel, c’est-à-dire à hauteur de 95 %, de l’arrêt du plan de relance pour l’économie et de la sortie de l’emprunt pour les dépenses d’avenir. Vous attendez d’une croissance à 2 % un afflux mécanique de recettes, c’est-à-dire une évolution spontanée.

Côté recettes, le Gouvernement n’aime toujours pas l’impôt, mais il crée tout de même 11 millions d’euros de prélèvements et de taxes diverses. Il préfère prendre des mesures qui pèseront essentiellement sur les ménages du milieu de l’échelle, plutôt que de s’attaquer au réarmement des recettes.

Les collectivités locales, quant à elles, seront condamnées à une double peine. Alors qu’elles ont déjà perdu l’autonomie fiscale en 2010, elles perdront l’autonomie financière et verront leurs dotations financières gelées en 2011, en 2012 et en 2013. Cela signifiera moins de services publics et moins d’investissements – c’est déjà le cas pour l’année en cours ! – pour soutenir l’économie réelle.

Ce projet de loi de finances est, une fois encore, marqué par la non-remise en cause de la politique fiscale du Gouvernement. C’est sur ce sujet que j’insisterai le plus.

La crise rend pourtant insupportables les injustices accumulées depuis 2002 et la fuite en avant des dix dernières années. L’immobilisme dont vous faites preuve, monsieur le ministre, est la marque du conservatisme.

Le Président de la République nous a raconté une belle histoire à la télévision, en nous promettant une réforme fiscale pour le printemps 2011 ; cela lui évite d’assumer les erreurs commises en 2007. À peine sorti de la mise en œuvre de ses promesses électorales de 2007, il en fait de nouvelles. Encore une fois, c’est la fuite en avant…

Au final, ce projet de budget ne contient qu’une poignée de mesures ciblées sur les ménages aisés, lesquelles ne rapporteront, comme l’a indiqué M. le rapporteur général ce matin, que 500 millions d’euros en 2011. Nous sommes loin des annonces faites par le Gouvernement ! Alors qu’il avait annoncé tout au long de sa campagne de communication estivale, lors de la préparation budgétaire, une attaque massive sur les niches, il se contente aujourd’hui de toucher à quelques symboles : un peu aux stock-options, un peu aux retraites chapeaux. La tronçonneuse que nous avait promise Mme la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie s’est transformée en rabot et, pour finir, en lime à ongles !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

En attendant la loi de finances rectificative, qui interviendra au mois de juin, le Président de la République engage le débat fiscal en invoquant l’harmonisation avec l’Allemagne. C’est intéressant !

Les socialistes ont toujours réclamé une harmonisation fiscale au sein de l’Union européenne. Force est de reconnaître que l’Irlande, qui se trouve dans une situation très malheureuse, et à qui il convient de venir en aide au nom du principe de solidarité au sein de la zone euro, était, dans le passé, la championne du dumping fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Cela prouve que la recherche du moins-disant fiscal, que l’on nous a tant vanté en 2007, n’est pas la bonne solution.

Le groupe socialiste a étudié les mesures annoncées par le Président de la République au titre de l’harmonisation avec l’Allemagne. Si l’objectif est d’agir sur la compétitivité des économies, il faut examiner la fiscalité des entreprises, c’est-à-dire l’impôt économique local, l’impôt sur les sociétés, l’IS, et les cotisations sociales. C’est ce que nous avons fait.

S’agissant de l’impôt économique local, tout d’abord, Mme Lagarde nous avait dit qu’il était nécessaire de supprimer la taxe professionnelle, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

En effet, mais la démonstration n’a pas été faite que la compétitivité en était améliorée.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Du point de vue du Gouvernement, ce n’est plus le problème !

S’agissant de l’impôt sur les sociétés, ensuite, il est vrai que son taux facial, qui s’élève à 34 %, est très élevé en France. Cependant, l’accumulation des niches sur l’assiette de cet impôt en réduit fortement l’impact, et ce d’autant plus que l’entreprise concernée est grande.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

On en arrive à une situation complètement régressive. Les entreprises qui sont en haut de l’échelle, celles du CAC 40, doivent acquitter un impôt sur les sociétés dont le taux réel est de 8 %, taux qui correspond à l’IS rapporté à l’excédent d’exploitation. C’est ce que démontre, dans son rapport, le Conseil des prélèvements obligatoires.

Ces données relativisent très fortement le différentiel affiché avec nos voisins allemands, puisque le taux facial de leur IS est de 29 %. En outre, l’impôt sur les sociétés allemand n’est pas mité, comme c’est le cas en France.

S’agit-il de transférer des points de cotisation sociale dont sont redevables les entreprises sur la TVA, que certains qualifient par euphémisme de « sociale », …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

… que d’autres appellent « TVA emploi », ou, comme vous l’avez fait ce matin, monsieur le rapporteur général, « TVA anti-délocalisation » ?

Pensez-vous qu’il serait intelligent et productif, en ces temps difficiles, de comprimer le seul moteur de la croissance qui marche, à savoir la consommation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Selon nous, ce serait une initiative dangereuse.

Vous connaissez notre proposition concernant le projet de loi de finances pour 2011. Dans un premier temps, il serait plus intelligent de revenir sur la dépense fiscale que constitue la baisse de la TVA dans la restauration.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il est en effet prouvé, comme l’a confié le rapporteur général à un journal du matin, qu’elle coûte très cher.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous avons désormais suffisamment de recul sur ce sujet pour en faire le bilan : 130 000 euros l’emploi, c’est tout de même très cher !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Vous avez également déclaré, monsieur le rapporteur général, que le coût annuel de l’abaissement du taux de TVA dans la restauration représentait la valeur d’un porte-avions.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Pour notre part, nous vous proposons de supprimer cette mesure dès maintenant.

Nous avions l’occasion de nous rapprocher de l’Allemagne avec la novation fiscale dont Mme Lagarde a vanté l’introduction ce matin, à savoir une taxation bancaire systémique – que nous réclamons depuis le début de la crise financière ! –, mais nous avons pris le chemin exactement inverse.

J’ai étudié de près le système allemand de taxation bancaire. Il est fondamentalement différent du nôtre : l’assiette et l’affectation sont différentes. Surtout, et c’est là une grande différence qui est passée inaperçue, vous faites de cette taxation un impôt déductible de l’impôt sur les sociétés ! Tout est fait pour la rendre indolore, donc inefficace. La puissance du lobby bancaire a encore frappé !

Invoquer l’harmonisation avec l’Allemagne ne sert en fait qu’à justifier la suppression concomitante du bouclier fiscal, qui est devenu à l’approche des élections un véritable boulet pour le Gouvernement, et de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, au motif que ni l’un ni l’autre n’existent outre-Rhin. Le Président de la République s’était donc trompé lorsqu’il avait affirmé que l’Allemagne avait un bouclier fiscal…

Nous connaissons bien ce débat, au Sénat, et nous l’avons toujours récusé : 680 millions d’euros n’équivalent pas à 4 milliards d’euros ! Un impôt sur le patrimoine n’est pas un impôt sur le revenu !

Pour justifier le bouclier fiscal, le Gouvernement argue que nul ne doit payer en impôt plus de 50 % de ce qu’il gagne. Or il est impossible qu’un contribuable ne disposant que de revenus du travail paie l’équivalent de plus de 50 % de son revenu en impôt. Il faut en réalité posséder un patrimoine important pour bénéficier du bouclier fiscal.

Marques d’approbation sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

La suppression de ce bouclier fiscal qui exonère les plus riches de tout effort contributif n’est donc pas, pour nous, une contrepartie à une réforme de la fiscalité. Elle est un préalable.

Nous proposons d’abaisser le plafonnement des niches fiscales. Du reste, avant l’introduction du bouclier fiscal, l’ISF était plafonné. Si nous voulons procéder à une réforme du patrimoine, nous en avons les moyens. Dès lors, pourquoi attendre ? Supprimons, dès à présent, le bouclier fiscal !

La mise à jour des effets pervers de la conjonction entre bouclier et niches a conduit la majorité et le Gouvernement à proposer un plafonnement, que nous jugeons insuffisant, de ces dernières. Nous proposons de l’abaisser encore.

En l’absence d’une évaluation complète des quelque 500 niches existantes, nous refusons la méthode du Gouvernement qui consiste à choisir, au fil de l’eau, ce qui est une niche et ce qui ne l’est pas. Cette vision sélective conduit à laisser galoper les plus coûteuses d’entre elles, notamment celles dont l’efficacité économique ou sociale n’est pas démontrée, et à encourager l’optimisation fiscale et les effets d’aubaine – c’est le cas du crédit d’impôt recherche ! –, au détriment des finances publiques.

Sur le fondement des travaux du Conseil des prélèvements obligatoires, nous vous proposerons une série d’amendements visant à supprimer certaines niches, afin d’en éradiquer les effets injustes et contre-productifs, ou à les aménager afin de limiter le plus possible les sources d’optimisation les plus criantes, soit du côté des ménages les plus aisés, soit du côté des entreprises. La France est effectivement le pays champion en matière de niches fiscales.

Si l’on considère l’impôt sur les sociétés, les impôts sur le patrimoine et l’impôt sur le revenu, on voit qu’ils sont tous régressifs. Pour notre part, nous souhaitons réintroduire de la progressivité, surtout sur le patrimoine, car les inégalités dans ce domaine ont explosé, en particulier depuis 2007, à la suite de l’adoption de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

De la même manière, vous avez aggravé les inégalités en multipliant les prélèvements libératoires sur les plus-values du patrimoine. S’agissant de la fiscalité du patrimoine et des plus-values, qui était flat, vous avez réduit le taux d’imposition à 18 %. Vous vous apprêtez à faire un petit effort et à le porter à 19 %, mais c’est insuffisant.

Dans ce projet de loi de finances pour 2011, vous ne revenez sur rien d’essentiel, mais vous continuez, néanmoins, à entretenir l’illusion de l’action.

Avec mes collègues du groupe socialiste, nous avons réfléchi. Nous voulons raisonner à partir des taux réels, et non des taux marginaux, assurer la légitimité d’un grand impôt sur le patrimoine, disposer d’un grand impôt sur le revenu qui renoue avec la progressivité, en finir avec les exonérations injustifiées, rééquilibrer les revenus du travail et les revenus du capital. Tels sont les fondements de la réforme fiscale que nous souhaitons engager ; ils ne devront pas être bradés.

Conscients des efforts que la France devra fournir pour retrouver son rôle moteur en Europe, nous voulons que ceux-ci soient justement répartis. Nous proposerons des mesures permettant de résoudre les difficultés et d’augmenter les marges de manœuvre budgétaires de notre pays.

Bien que vous fassiez fausse route, monsieur le ministre, vous ne parvenez pas à vous résoudre à modifier votre trajectoire. C’est pourtant votre dernier budget utile. Il faudra bien refonder un pacte fiscal avec les contribuables, ainsi qu’un contrat de confiance avec les collectivités locales.

Tels sont nos objectifs pour 2012. En attendant, nous voterons contre votre projet de budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, afin de mettre un terme à un insoutenable suspense, je vous annonce que le groupe UMP votera le présent projet de loi de finances.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Cela a été indiqué : ce projet de loi de finances est historique !

Historique, parce qu’il marque enfin le recul du déficit.

Historique, parce qu’il accompagne la sortie d’une crise économique et financière sans précédent, même si certains n’hésitent pas à s’affranchir de cette réalité.

Historique, parce que c’est un budget courageux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Nous avons évoqué les prévisions économiques. La reprise est effectivement là, même si elle est timide.

Selon les derniers chiffres connus, les prévisions du Gouvernement prévoyant un taux de croissance de 1, 5 % pour 2010 seront peut-être légèrement dépassées et la croissance demeure soutenue par la consommation des ménages, qui est restée à un bon niveau. C’est un point positif. Nous avons ainsi la démonstration que le plan de relance qui s’achève avait été bien calculé et équilibré.

L’inflation a été maîtrisée et les investissements privés des entreprises ont progressé faiblement, à hauteur de 1 %. Les exportations ont plus augmenté au premier trimestre qu’au deuxième. Quant aux fonds prêtés aux banques, dont on nous parle sans cesse, ils ont été remboursés à 80 % et ont rapporté 2, 4 milliards d’euros d’intérêts au Trésor public !

Autre point positif : les premiers signes de décrue du chômage apparaissent.

Depuis le début de l’année 2010, ce sont 60 000 emplois nets qui ont été créés. Cette décrue est évidemment trop faible. Un effort prioritaire devra être porté sur l’emploi, notamment sur l’emploi des jeunes.

En effet, monsieur le ministre, pour nous, l’insertion des jeunes dans la vie professionnelle est la première des priorités, non pas du budget, mais de notre société. Si nous ne sommes pas capables de bien insérer les jeunes de notre pays, quels qu’ils soient et quel que soit leur niveau scolaire ou universitaire, dans la vie professionnelle, nous devrons en subir des conséquences extrêmement graves au cours des prochaines décennies.

En revanche, et cela a été évoqué, il reste un point noir : le déséquilibre de notre commerce extérieur. C’est d’autant plus inquiétant que cela nous éloigne de plus en plus de notre partenaire d’outre-Rhin, dont le commerce extérieur connaît un excédent permanent.

La question de la compétitivité de notre économie est donc au cœur du débat budgétaire, et elle est primordiale. Nous devons parvenir à concilier le soutien économique et financier de nos entreprises et le retour à l’équilibre budgétaire en 2013, ce qui permettra de commencer à nous désendetter à partir de 2014.

Nous formons le vœu de revenir rapidement à la situation que nous avons connue en 2006 et en 2007. Pendant cette période, les recettes et les dépenses de l’État étaient équilibrées, et le déficit trouvait sa seule origine dans le financement des intérêts de la dette. Nous savons, compte tenu de la masse de la dette, que ces intérêts vont croître : en 2012, le financement des intérêts représentera 55 milliards d’euros. Il faudra donc réaliser un gros effort sur le reste des dépenses.

Bien entendu, les conséquences d’une telle évolution budgétaire sur la croissance sont liées à un phénomène sur lequel nous n’avons pas beaucoup de prise : la situation de l’euro par rapport aux autres monnaies.

Si l’euro continue à atteindre des sommets, du fait des bouleversements monétaires qui interviennent dans le monde, nous aurons du mal à retrouver l’équilibre de notre commerce extérieur et, par conséquent, à accélérer la reprise de l’emploi.

Voilà pourquoi, et c’est le premier bémol que je me permets d’introduire dans ce propos, il ne faut pas supprimer trop vite toutes les mesures de relance. Je pense, par exemple, à la prorogation de deux ans du régime de cession-bail, qui a été décidée par notre commission des finances, sur l’initiative de notre excellent rapporteur général, Philippe Marini. De même, il ne me paraît pas non plus nécessaire de toucher tout de suite au crédit d’impôt recherche. Ces deux éléments sont très importants pour le développement des investissements et pour la stimulation de la création des petites entreprises.

Certes, la problématique de l’articulation entre une logique économique et une logique financière se retrouvera dans les débats. Et les mêmes qui demandent une réduction du déficit réclameront évidemment le maintien d’un certain nombre de régimes privilégiés…

Prenons l’exemple du rabotage des niches fiscales, puisqu’on a évoqué tout à l’heure une « lime à ongles » ; d’ailleurs, je me demande si elle était en carton ou en métal…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Le rabotage des niches fiscales suscitera un grand nombre d’amendements, mais il est clair que le dispositif de taux réduit de TVA dans l’hôtellerie, la restauration et le bâtiment représente un coût important sur lequel nous devons réfléchir.

Le présent projet de loi de finances pour 2011 n’est pas un budget de rigueur, parce qu’il ne se caractérise pas par une hausse généralisée des prélèvements obligatoires. Notre groupe approuve ce choix.

Je vous renvoie d’ailleurs aux derniers rapports de la Cour des comptes, ainsi qu’aux déclarations de son président. Les magistrats de la rue Cambon recommandent que l’effort « porte prioritairement sur la dépense publique », dont les effets sont « plus durables » qu’une hausse des recettes. Il est très important de prendre en compte cette préconisation dans nos réflexions.

Néanmoins, monsieur le ministre, tout en vous apportant le soutien complet et unanime du groupe, je tiens à vous faire part de trois inquiétudes.

Première inquiétude : l’endettement de l’État croît à une vitesse considérable, passant d’un niveau compris entre 700 milliards et 800 milliards d’euros, voilà quelques années, à un peu plus de 1 200 milliards d’euros aujourd'hui.

À l’évidence, une telle augmentation – près de 50 % en quelques années ! – pose des problèmes non seulement de financement des intérêts, mais surtout de remboursement. J’ai noté avec un peu d’inquiétude qu’il y aurait un pic de remboursement en 2012. Cette année-là, le niveau des remboursements sera supérieur de près d’une fois et demie à celui de 2010. Par conséquent, il faudra augmenter la dette pour pouvoir rembourser les dettes précédentes !

Ma deuxième inquiétude, plus forte, concerne la faiblesse des investissements privés dans notre pays, c’est-à-dire ce qui détermine le niveau de croissance et d’emploi.

Dans la conjoncture internationale un peu troublée ou, tout au moins, tendue que nous connaissons, nous voyons bien que les ménages comme les entreprises ont un réflexe d’attentisme. Cela se traduit par une augmentation du niveau d’épargne des ménages – nous le percevons clairement au travers des chiffres de la Banque de France ! – et par une tendance des entreprises à investir au minimum. Une progression de l’investissement de 1 % n’est pas suffisante pour entraîner un taux de croissance important. À mon sens, c’est dans notre capacité à répondre à ces craintes et à cet attentisme que réside la véritable clé de l’augmentation du taux de croissance – de 1, 5 % à 2 % ou à 2, 5 %, par exemple –, au cours des prochaines années.

Dès lors, indépendamment des soucis de justice fiscale, de progressivité ou de reprise d’avantages, je pense que nous devons être extrêmement attentifs aux comportements actuels des entreprises en matière de financement de leurs investissements ; c’est la clé de notre développement !

N’oublions pas que seules les entreprises sont capables de créer de véritables emplois ; les emplois administratifs que nous pourrions créer ne sont pas durables.

Ma troisième inquiétude vous concerne directement, monsieur le ministre. Le projet de loi de finances pour 2012 sera très difficile à exécuter.

Si l’aboutissement du plan de relance nous permet de passer, en 2011, d’un niveau de déficit prévisionnel de 7, 7 % à un niveau de déficit de 6 %, il sera difficile de passer d’un taux de 6 % à 4, 5 % ou 4, 6 % l’an prochain ! Il n’y aura plus l’« effet d’aubaine » du plan de relance, et l’effort consenti sur tous les secteurs des niches fiscales et sociales sera considérable.

Aujourd’hui, il est de bon ton de nous prévaloir d’une politique budgétaire plus souple que celle des Britanniques. Or, l’année prochaine, la comparaison avec nos voisins d’outre-Manche qui, eux, ont réalisé les efforts nécessaires, risque de nous être nettement moins favorable.

C’est pourquoi il faut tenir aujourd’hui un langage de vérité, en prévision du langage de responsabilité que nous devrons tenir dans quelques mois. Il y va de notre souveraineté nationale, qui est actuellement quelque peu handicapée : à l’heure actuelle, lorsque nous empruntons sur les marchés internationaux pour boucler nos fins de mois, 70 % des souscripteurs de nos obligations assimilables du Trésor, les OAT, ou de nos bons du trésor à quatre ou cinq ans, ne sont pas des résidents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Voilà qui fait peser un risque sur notre souveraineté en matière budgétaire !

Dans ces conditions, je crois que nous devons faire très attention et éviter de nous engager trop avant. Toute réduction des emprunts sur le marché international nous permettra de revenir plus vite à l’équilibre.

Tels sont, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les éléments dont je souhaitais vous faire part à propos du présent projet de loi de finances.

Nous le voterons, car il jette les bases d’une réduction de nos déficits, s’inscrit dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 que nous venons d’adopter, et marque une action courageuse de réduction de la dépense. J’ose espérer que les remous monétaires ne troubleront pas, au cours de l’année 2011, les objectifs du Gouvernement et de la majorité qui le soutient.

Monsieur le ministre, pour toutes les raisons que je viens d’indiquer, votre projet de loi de finances me semble être le meilleur que vous pouviez présenter dans la conjoncture actuelle. C’est pourquoi nous le soutiendrons.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, cette semaine, l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, a publié l’édition 2010 de son étude intitulée France, portrait social.

Cette étude confirme et chiffre ce que nous savions déjà. D’abord, la crise économique a eu de graves répercussions sur l’emploi : en 2009, l’économie française a perdu 257 000 emplois. Ensuite, les jeunes et les seniors ont été particulièrement touchés. Enfin, la pauvreté a touché plus d’un Français sur cinq entre 2004 et 2007. Ce portrait social est alarmant. La situation de nos comptes publics l’est tout autant, comme M. le rapporteur général l’a souligné ce matin.

C’est là toute la difficulté dans laquelle nous nous trouvons. D’une part, la première des priorités consiste à améliorer la situation de nos concitoyens, en particulier les plus vulnérables d’entre eux. D’autre part, il est impératif d’assainir nos comptes publics. Il faut pour cela demander à chacun, État, collectivités territoriales, entreprises et citoyens, des efforts à la hauteur de ses moyens. Pour concilier ces deux objectifs, nos choix doivent être guidés par une exigence de justice fiscale. C’est le sens des propositions que nous soumettrons au Sénat.

Pour assainir les comptes publics, les termes de l’équation sont connus : il faut réduire les dépenses et protéger les recettes. Pour y parvenir, monsieur le ministre, vous proposez que la dépense d’État hors dette et hors pensions n’augmente pas.

Par ailleurs, en prenant en compte l’effet de la dette, des intérêts et des pensions, il faut que nous restions dans le volume de l’inflation. Nous approuvons cette double règle et nous espérons qu’elle sera respectée, contrairement à ce que nous avons constaté au terme de l’exercice 2009.

Certaines prévisions très optimistes nous amènent malheureusement à craindre que les engagements pris dans ce projet de loi de finances pour réduire le déficit ne soient difficiles à tenir.

Par exemple, en matière de dépenses sociales, le Gouvernement prévoit que les interventions de guichet n’augmenteront pas en valeur l’année prochaine. Leur coût se stabiliserait à 37, 6 milliards d’euros. Cela ne s’est jamais produit auparavant, et nous vous serions reconnaissants de nous indiquer comment cela pourrait être le cas en 2011. Voilà qui illustre la rigidité de la dépense publique et, par conséquent, le rôle que doivent jouer les recettes.

Ce levier d’action indispensable fait l’objet d’une certaine confusion : les mesures proposées par le Gouvernement consistent-elles, oui ou non, à augmenter les impôts ? Pour notre part, sans ambiguïtés et sans détours, nous affirmons que oui !

Oui, en réduisant le coût de certaines niches fiscales, le Gouvernement propose une hausse d’impôts ciblée, intelligente et indispensable ! Nous le soutenons dans cette démarche, et nous pensons qu’elle gagnerait à être pleinement assumée.

La méthode retenue permettra de ne pas nuire à la compétitivité de nos entreprises, et c’est essentiel. Dans le cas contraire, nous perdrions en emplois ce que nous gagnerions en impôt, et ce jeu à sommes nulles serait assurément perdant.

Nous soumettrons au Sénat des mesures pour corriger les dérives dont font l’objet certaines dépenses fiscales.

Nous proposerons, par exemple, d’exclure du bénéfice du crédit d’impôt recherche les établissements de crédit qui profitent indûment de ce dispositif, alors même qu’ils n’engagent pas véritablement de travaux de recherche.

Nous proposerons, également, d’augmenter la fiscalité sur les contrats d’assurance complémentaire santé non responsables, afin de préserver l’incitation à privilégier les contrats d’assurance responsables, qui contribuent à contenir les dépenses d’assurance maladie. Là encore, il s’agit de veiller à ne pas perdre en dépenses de santé ce que l’on gagnerait en fiscalité.

Nous proposerons, par ailleurs, de réduire de 10 % la dépense fiscale que constitue le taux réduit de TVA dans la restauration, en portant ce taux de 5, 5 % à 7 %. Nous ne préjugeons pas le bilan qui devra être tiré lorsque les délais fixés aux restaurateurs pour mettre en œuvre leurs engagements seront arrivés à échéance. Mais nous pensons, comme M. le rapporteur général de la commission des finances, que le « rabot » doit s’appliquer à cette niche.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Cela ne perturbera pas le comportement économique des acteurs concernés et permettra de diminuer une dépense fiscale extrêmement coûteuse.

Globalement, la réduction des dépenses nous semble indispensable, et nous pensons qu’il est nécessaire d’aller plus loin.

Tous les amendements que nous défendrons ne vont, pas pour autant, dans le sens d’une réduction des dépenses. Réduire les dépenses publiques est une nécessité. Ce n’est pas un dogme !

De façon très ciblée, proportionnée, nous proposerons également de consentir certaines dépenses ou de renoncer à les réduire, là où nous pensons qu’elles sont nécessaires. Par exemple, nous proposerons à la Haute Assemblée d’étendre le bénéfice du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTVA, aux collectivités qui construisent des maisons de santé lorsqu’elles se situent en zone de revitalisation rurale ou en territoire rural de développement prioritaire.

La règle actuelle selon laquelle seules les collectivités classées en zone déficitaire peuvent bénéficier du FCTVA est trop restrictive. Elle nuit à la lutte contre la désertification médicale, une démarche à laquelle le Sénat est très attaché. Sans étendre cet avantage fiscal à toutes les collectivités, nous proposons donc d’en faire bénéficier les territoires ruraux les plus en difficulté.

Enfin, nous défendrons plusieurs propositions pour aménager le bouclier fiscal.

À l’Assemblée nationale, le Gouvernement a indiqué qu’il ne souhaitait pas engager ce débat dans l’improvisation. Dès maintenant, permettez-moi de répondre à cet argument.

Premièrement, personne ne contestera, à tout le moins au Sénat, que le débat sur le bouclier fiscal est loin d’être nouveau. Il a en effet commencé depuis longtemps pour nous !

Deuxièmement, la crise et son impact exigent de réexaminer avec un regard nouveau certains dispositifs qui se justifiaient peut-être hier, mais doivent évoluer. Cet argument légitimait la réforme des retraites à laquelle nous avons pris une part active. Il rend aujourd’hui légitime la réforme de la fiscalité du patrimoine et, tout particulièrement, du bouclier fiscal.

Enfin, et surtout, le groupe de l’Union centriste est force de proposition sur ce sujet depuis plusieurs années. Nous constatons que notre proposition emporte de plus en plus l’adhésion de la majorité ; tant mieux !

La preuve de cette évolution a été apportée par le Président de la République lui-même, mardi dernier : la réforme de la fiscalité du patrimoine qu’il a annoncée est si semblable à celle que nous proposons que nous osons penser que notre idée a fait son chemin.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Forts de son expérience, le groupe de l’Union centriste n’exclut pas que, comme par le passé, il se trouve quasiment seul à soutenir la proposition que présentera le président de la commission des finances, Jean Arthuis, avec plusieurs de ses collègues membres de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Tant mieux !

Dans cette hypothèse, le Sénat s’honorerait à adopter au moins une série de dispositions qui devraient, elles, faire consensus. Elles visent à rapprocher le revenu fiscal pris en compte dans le calcul du droit à restitution du revenu réel des bénéficiaires du bouclier fiscal.

Aujourd’hui, le revenu pris en compte est diminué par une série de dispositions : on exclut les primes versées au titre de l’épargne retraite individuelle, certaines plus-values immobilières, etc. Tous ces allégements n’ont aucune justification.

Le principe du bouclier fiscal est très clair : nul ne doit payer plus de 50 % de ses revenus en impôt. En s’écartant de ce principe, les dispositions que nous visons rendent choquant un dispositif qui, s’il était appliqué rigoureusement, pourrait à la limite se justifier : il permet d’éviter que l’impôt, notamment l’ISF, ne revête un caractère confiscatoire.

A minima, si le Sénat refuse d’engager immédiatement une réforme plus ambitieuse, nous proposerons de supprimer ces dispositions en attendant la réforme annoncée, ce qui ne devrait pas retarder le processus souhaité par le Président de la République, dans la mesure où ces dernières ne prendront effet qu’avec la réforme à venir…

Notre groupe tâchera donc, par ses propositions, d’assurer une juste répartition de l’effort que chacun devra consentir.

En augmentant le taux de la dernière tranche d’impôt sur le revenu, on demande à chaque contribuable d’accepter une hausse des prélèvements. Or, si rien n’est fait, les bénéficiaires du bouclier fiscal ne prendront pas part à cet effort. Nous pensons que les plus fortunés de nos concitoyens doivent y participer.

Si les PME voient certaines de leurs aides réduites, nous pensons que les grandes entreprises doivent, elles aussi, être sollicitées et que certains abus doivent cesser.

Si les collectivités sont associées à l’effort de réduction des dépenses publiques, nous pensons que l’État doit veiller à ce que les territoires fragiles soient protégés.

Voilà, mes chers collègues, l’esprit dans lequel nous abordons l’examen de ce projet de loi de finances. Bien entendu, nous prendrons toute notre part à en assurer l’adoption.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Votre discours, monsieur le ministre, comme ceux du Gouvernement et du Président de la République, tournent de façon obsessionnelle autour de la nécessité de freiner la dépense publique et de réduire le nombre de fonctionnaires.

Plus de 100 000 postes ont été supprimés depuis que votre majorité est au pouvoir. Votre objectif est clair : vous visez la réduction, voire la suppression, des services publics.

Pourtant, ces services que nous mettons à disposition de nos concitoyens sont très utiles pour la grande majorité d’entre eux, tout particulièrement dans cette période de crise.

En Europe, dites-vous, nous avons été l’un des seuls pays à avoir traversé la crise sans trop de casse. Les services publics et les politiques sociales ont servi d’« amortisseur social », pour reprendre votre terminologie.

Pourquoi donc mettre à bas ces politiques qui ont fait la preuve de leur efficacité ? Le portrait social de la France réalisé par l’INSEE l’atteste, une nouvelle fois, cette année : « Les administrations publiques redistribuent aussi une partie des recettes sous forme de prestations “en nature”. Les deux principales, en termes de budget, sont les dépenses d’éducation et les dépenses de santé. Ces prestations “en nature” […] concourent aussi à réduire les inégalités. Cette forme de redistribution est conséquente […]. Ces services publics réalisent ainsi la moitié de la réduction totale des inégalités de niveau de vie. »

Nos services publics, ceux de nos communes, de nos départements et de nos régions, jouent le même rôle ; ils atténuent les effets désastreux de votre politique.

Malgré cet élément de preuve, vous considérez que l’équivalent « argent » sous forme de services publics, qui va à ceux qui en ont le plus besoin, devrait être reversé à ceux de vos amis qui ne savent qu’en faire. En effet, vous privatisez à tout va, dans un pays où le nombre de pauvres a atteint, grâce à vous, le chiffre record de 7, 8 millions de personnes en 2008.

Vous avez, avec cynisme, accéléré ce processus depuis la rentrée.

Après avoir supprimé définitivement la taxe professionnelle, l’an dernier, sans que cela ne crée d’emplois nouveaux, vous avez entamé depuis septembre le processus de destruction de notre système de retraite par répartition en faisant voter à la hussarde le texte portant réforme des retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Vous pourrez ainsi livrer notre système de retraite au monde des assurances, qui vous est proche…

Vous avez remis en cause notre démocratie locale en faisant voter à l’arraché le projet de loi sur les collectivités.

Vous dites, monsieur le ministre, que « notre stratégie d’inflexion de la dépense, pour être efficace, doit concerner impérativement l’ensemble des acteurs publics : l’État, la sécurité sociale et les collectivités locales. » Mais vous faites surtout porter cet effort par les habitants les plus modestes de notre pays.

Comment vous croire lorsque vous osez affirmer : « Il est incontestable que tous les acteurs de la dépense publique, je dis bien tous, devront participer à cet effort » ?

Comment les élus, à qui l’on demande de faire des économies, pourraient-ils admettre et comprendre que le Président de la République, acteur de la dépense publique par excellence, se soit auto-exempté de cette règle. Après avoir commencé son quinquennat en s’augmentant de 170 %, il s’offre aujourd’hui le luxe d’un avion qui coûte à la nation 176 millions d’euros et 49 millions d’euros d’entretien à l’année.

Protestations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Comment pouvez-vous faire croire aux élus qu’il n’y a plus d’argent dans les caisses, alors que le ministère des finances distribue aux plus riches de vos amis 679 millions d’euros au titre du bouclier fiscal ? La suppression prévue de ce dispositif, mais associée à celle de l’ISF, n’indique nullement un changement d’orientation du Président de la République, mais annonce un fort risque de pertes de recettes.

Comment pouvez-vous faire croire que le pays traverse des difficultés quand une seule personne, dirigeante du numéro un du luxe, a réalisé ces jours derniers une plus-value de 18 millions d’euros en une journée, en levant un certain nombre de stock-options ? On est loin de la moralisation du capitalisme tant annoncée par le Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Les Françaises et les Français ne veulent plus de cette politique-là. Ils vous l’ont dit haut et fort, mais vous êtes restés sourds à leurs cris de colère.

C’est vous qui avez aggravé la dette en réduisant les recettes provenant des impôts des plus fortunés. En stigmatisant les collectivités locales, qui ne sont pourtant que faiblement responsables de l’endettement public – à hauteur seulement de 10 % ! –, vous voulez faire porter par les élus locaux la faillite d’une politique qui vous incombe intégralement. En considérant que les collectivités sont une charge et non une source de richesse, vous oubliez de reconnaître qu’elles figurent parmi les principaux acteurs de notre économie.

L’Observatoire des finances locales a déjà constaté un premier recul de l’investissement des collectivités de 73 % à 70 % en 2009. Ce recul se confirme pour 2010.

Les artisans et les PME qui participent économiquement à la vie locale seront ainsi les premiers touchés, en particulier ceux du bâtiment et des travaux publics.

Les élus des collectivités territoriales œuvrent pour l’intérêt général des habitants, sur la base des programmes pour la réalisation desquels ils ont été élus. Et vous voudriez leur faire exécuter vos seules orientations … Drôle de conception de la démocratie !

Les élus ne veulent plus de cette politique-là ! Ils vous l’ont dit à leur façon lors du débat sur la réforme des collectivités locales. Comme pour les retraites, vous n’entendez rien. En revanche, pour obtenir ce vote lors du débat sur la réforme des collectivités locales au Sénat, vous avez donné un spectacle pitoyable, fait de tractations de couloirs et de pressions. Vous avez fait passer ce texte aux forceps, mais il n’est toujours pas accepté pour autant.

Le projet de loi de finances que vous nous présentez n’est que la mise en musique de ces deux textes fondamentaux et destructeurs que vous souhaitez imposer aux élus locaux : la réforme de la taxe professionnelle et la réforme des collectivités locales.

En gelant les dotations de l’État, vous mettez les collectivités en difficulté. Il y a deux ans, en 2009, l’évolution était calculée sur l’inflation. Elle avait été estimée à 2, 5 % en tenant compte du PIB et des prix. En 2010, nous étions sur la moitié de l’inflation prévisionnelle ; puis, en 2011, vous décidez un taux de 0 %. Cependant, pour certaines collectivités, la baisse atteindra 5 % de leur garantie de dotation de fonctionnement.

Pourtant, l’inflation atteint 1, 6 % sur les douze derniers mois, et la barre des 2 % sera certainement atteinte en 2011.

Pour les collectivités, l’incidence sera encore plus importante puisque le « panier du maire » est environ du double.

Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, combien de communes seront touchées par cette baisse ? S’agit-il de 6 500 communes, comme l’annonce Bercy, ou de plus 20 000 communes, comme le pense l’Association des maires de France, l’AMF ?

Il y a beaucoup d’inquiétude chez les élus, qui se trouveront dans l’impossibilité de maintenir de nombreux projets. À travers cette politique de restriction, vous allez mettre à mal de nombreuses associations qui sont financées à 80 % par les collectivités territoriales et qui sont de véritables acteurs du lien social sur nos territoires.

S’agissant de la suppression de la taxe professionnelle, vous aviez proposé une clause de revoyure avant le 31 juillet 2010 pour présenter les éléments de financement de substitution. Or cette clause s’apparente à l’Arlésienne : vous en parlez abondamment, mais rien de plus !

En forçant à la baisse le pouvoir d’achat des collectivités territoriales, vous voulez placer les maires, les présidents de conseils généraux et régionaux devant cette seule alternative : augmenter les impôts locaux ou supprimer des services à la population et, par conséquent, supprimer des emplois territoriaux. Votre projet de loi de finances crée une réelle inquiétude chez l’ensemble des élus de notre pays : nous pensons qu’il est temps, au contraire, de leur rendre confiance.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous savons tous que l’exercice budgétaire n’est pas simple. Il l’est d’autant moins cette année que nous sommes toujours dans une période de tourmente internationale qui nous touche directement, même si les mesures prises dans le cadre de la relance ont permis d’atténuer le creux que nous aurions pu connaître, comme bien d’autres pays européens.

Comme toujours, chacun s’accorde sur la nécessité de faire des efforts, à condition qu’ils ne touchent que les autres. À titre personnel, je m’intéresse plus particulièrement à la mission « Outre-mer », qui doit vous être chère, monsieur le ministre, et à la mission « Sécurité civile ». J’interviendrai sur ces deux missions dans la suite du débat.

Dans mon propos de ce jour, j’insisterai sur la situation des finances des collectivités locales. Si l’État peine à établir son budget – permettez-moi, monsieur le ministre, de saluer le travail que vous avez réalisé et les grandes orientations que vous avez tracées ! –, les collectivités locales, et principalement les départements, peinent encore davantage que l’État.

L’analyse globale des budgets des collectivités territoriales montre que le bloc regroupant les communes et les intercommunalités se trouve dans une situation globalement équilibrée : le montant de leurs charges a progressé de 2 % en 2010, tout comme le montant de leurs recettes.

Les charges des départements ont progressé de façon insupportable, en raison du poids considérable des dépenses sociales : ainsi, on estime que le différentiel entre la croissance des charges et celle des recettes s’élève à 8 points ! Cette situation se traduit par un « effet de ciseaux » qui étouffe ce niveau de collectivités : dans deux ans, ou plus, seul un département conservera une faible capacité d’autofinancement.

Peut-on considérer que l’enjeu budgétaire dont nous débattons concerne seulement l’État, ou doit-on prendre en considération le devenir du niveau départemental ? Je crois savoir que l’État est bien conscient de son rôle : il a su user, à juste titre, de la décentralisation pour transférer certaines de ses compétences, mais aussi beaucoup de ses charges. Ces transferts ont joué le rôle de variable d’ajustement budgétaire : certains chiffrent cette variable en milliards d’euros. Je n’engagerai pas maintenant le débat sur ce sujet, nous saurons le faire à un autre moment.

Vous savez également, mes chers collègues, que nombre de décisions prises au niveau de l’État et du Parlement ont des conséquences sur le budget des collectivités locales. Je citerai pêle-mêle : la revalorisation des salaires, les normes, les niveaux de prestation ou les populations concernées. Le niveau centralisé oriente et décide, le niveau local assume.

M. le ministre Baroin indique, à juste titre, que l’État est, ou se veut, vertueux au niveau des finances publiques, que l’État ne souhaite pas augmenter les impôts – avec un taux de prélèvements obligatoires de 56 %, nous pouvons le comprendre ! –, que l’État ne peut plus accepter que la France soit dans le peloton de tête des prélèvements obligatoires, que l’État doit maîtriser les finances publiques et, enfin, que l’État a confirmé la stabilisation – nous dirons plutôt le gel ! – de ses concours aux collectivités locales, hors Fonds de compensation de la TVA.

Je suis en accord à 100 % avec ces propositions ! Je ne conteste pas le gel des concours aux collectivités locales : il est nécessaire, et chacun doit accomplir des efforts.

En ce qui me concerne, mon credo n’a pas varié : nous devons nous battre pour la compétitivité de nos entreprises. Je ne puis donc qu’approuver les propos tenus en ce sens par Mme Lagarde ce matin. En effet, ces entreprises sont notre richesse ; elles seules nous permettent de développer notre pays et nos territoires, et donc d’assurer notre demande sociale et environnementale. À ce titre, j’ai toujours agi pour que le département que je préside reste parmi les moins imposés et les moins dépensiers. Cependant, je m’interroge en cet instant sur l’intérêt d’être vertueux. Si j’en avais le temps, je vous démontrerais facilement que notre société a fortement tendance à pénaliser les vertueux.

Permettez-moi d’effectuer un arrêt sur image, une image pour l’instant bien sombre, que nous aurons à éclaircir au fil des jours à venir : le projet de loi de finances pour 2011, adopté très tôt ce matin par l’Assemblée nationale en première lecture, comporte, en son article 61, un mode de calcul savant, dont je suppose que moins de 1 % de ceux qui l’ont approuvé comprennent les conséquences réelles sur le plan budgétaire. Ce mode de calcul résulte d’un amendement adopté contre l’avis du Gouvernement et porte sur la répartition des sommes versées par le Fonds national de péréquation des droits de mutation à titre onéreux.

Je suis scandalisé – et je sais ne pas être le seul dans ce cas ! – par la manière dont ce sujet est traité. Elle n’est pas digne dans la forme : depuis des mois, je vois circuler des tableaux sur le sujet ; ils circulent sous le manteau et, après en avoir pris connaissance, vous apprenez qu’ils sont faux ! À titre d’exemple, entre le calcul qui relevait d’un accord sur lequel nous travaillions depuis des mois au niveau interministériel et le calcul qui semblait ressortir du vote de l’Assemblée nationale, je constate une aggravation du déséquilibre budgétaire de mon département, équivalente à 15 milliards d’euros si elle était rapportée à l’échelle du budget de l’État. Que diriez-vous, monsieur le ministre, si nous aggravions le déficit de l’État de 15 milliards d’euros dans la nuit ?

En cet instant, je vous déclare solennellement que, si nous devions en rester à cet état du texte, je voterai sans hésitation contre ce projet de loi de finances lors du vote final ! Et rien ne me fera fléchir, car personne n’est en droit de me demander de pousser la collectivité que je préside à se faire hara-kiri !

Nous avons déjà connu un désagrément particulier lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Nous souhaitions en effet que les allocations familiales versées au titre des enfants dont les départements assurent la tutelle – dans le cas de mon département, ils sont au nombre de 1 500 environ – ne soient plus versées en totalité aux familles, puisque les départements assurent 100 % des charges. Cette demande relevait de la pure logique, mais la logique est parfois absente de nos enceintes parlementaires !

Ce projet de budget, s’il est globalement satisfaisant, compte tenu de la situation que nous connaissons, aura des conséquences insupportables pour certaines collectivités locales, en raison de son article 61. Je ne pourrai donc le voter en l’état si aucune évolution n’est enregistrée sur ce point. Par ailleurs, je rappellerai qu’une modification de cet article serait sans conséquence sur l’équilibre budgétaire national.

Le Président de la République a évoqué, dans son intervention de mardi soir, la prise en charge de la dépendance, qui aura des conséquences sociétales évidentes, avec une traduction budgétaire pour les départements ; d’autres collègues en ont parlé avant moi. Il faudra apporter impérativement, au cours du premier trimestre de 2011, une réponse claire, chiffrée et bien définie dans le temps, à cette cause d’hémorragie financière pour les départements.

Aucune des réponses envisageables ne peut aujourd’hui être considérée comme étant la bonne solution. En revanche, plusieurs pistes doivent être explorées, de manière indépendante ou complémentaire. J’en citerai quatre, mais il peut en exister d’autres : la solution assurantielle, la contribution sociale généralisée, le recours sur succession ou la journée de solidarité. Cette dernière solution, qui ne retient pas véritablement l’attention aujourd’hui, est peut-être celle qui tiendra la corde dans six mois.

Lorsque la solidarité est en cause, il faudrait peut-être que chacun se sente concerné et accepte de laisser de côté ses propres égoïsmes ! Ce matin, lors de la réunion de la commission des finances qui a précédé l’ouverture de ce débat, nous avons évoqué les quatre milliards d’euros promis pour le Grand Paris. Finalement, cette somme sera trouvée, parce qu’une volonté s’exerce en ce sens au plus au niveau de l’État. Je remarque que les cent départements constatent un manque de financement dû au dérapage de leurs dépenses sociales – vieillesse, handicap, etc … – d’un montant de quatre milliards d’euros, pour lequel on leur proposera peut-être une compensation de 150 millions d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Je sais que vous travaillez en ce sens, monsieur le ministre … Mais la France ne se réduit pas à Paris ou au Grand Paris !

Monsieur le ministre, j’ai souhaité, tout en exprimant la satisfaction que m’inspire le travail que vous avez mené, vous faire part de mon insatisfaction quant à un problème que je vous demande de nous aider à résoudre, faute de quoi, je vous l’ai annoncé clairement, mon vote ne sera pas celui du groupe UMP. Pourtant, je ne voudrais pas devoir mêler ma voix à celles des groupes qui se sont exprimés juste avant moi !

Mme Lucienne Malovry, MM. Philippe Dominati et Albéric de Montgolfier applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, notre pays connaît la plus grave crise de ses finances publiques depuis l’après-guerre.

La réduction de nos déficits et de notre endettement constitue le plus grand défi des prochaines années. Le Premier ministre a raison lorsqu’il déclare, comme il l’a fait en début de semaine, que « la priorité absolue, c’est la lutte contre les déficits et la réduction de la dépense publique ». Il est regrettable que cette priorité n’ait pas été fixée il y a trois ans, en mai 2007...

Bien entendu, je n’ignore pas la crise, ni ses conséquences sur la dégradation de nos comptes publics, mais elle n’explique pas tout. Et la Cour des comptes a clairement montré que notre déficit et notre endettement avaient commencé à se détériorer avant la crise et que ce déficit était, en grande partie, structurel.

Depuis dix ans, notre pays a perdu 100 milliards d’euros de recettes fiscales en baissant les impôts. Cette perte de recettes fiscales explique en partie les déficits et la dette, sachant que, pendant ce temps, les dépenses continuaient à augmenter d’environ 40 milliards d’euros chaque année.

La réduction des déficits publics est donc urgente et nécessaire, car une telle situation fait peser une menace réelle sur notre pays. La progression des charges d’intérêts de 5 milliards d’euros par an ôte toute marge de manœuvre budgétaire au Gouvernement. Ces charges atteindront prochainement 50 milliards d’euros, et même 55 milliards d’euros en 2012 ; plusieurs de nos collègues, appartenant aussi bien à la majorité qu’à l’opposition, ont mentionné ce chiffre que l’on ne peut passer sous silence ! Je pense également au risque de fragilisation de la signature de la France sur les marchés.

Le Gouvernement affirme, et son message est repris en chœur par la majorité, qu’il a entrepris avec ce budget une réduction historique du déficit public. Regardons les chiffres de plus près : la baisse de 60 milliards d’euros du déficit est atteinte uniquement grâce à la disparition des dépenses exceptionnelles de l’année 2010, c’est-à-dire les 35 milliards d’euros du grand emprunt, les 14 milliards d’euros du plan de relance et le moindre coût de la taxe professionnelle. L’effort de réduction du déficit par le Gouvernement se limite alors à une dizaine de milliards d’euros pour le budget de l’État, cependant que la croissance de la dépense publique se poursuivra en partie, à cause de l’augmentation du poste des charges de la dette à hauteur de 4, 5 milliards d’euros.

Ce constat signifie que, pour arriver à réduire le déficit public de 7, 7 % à 6 % du PIB, le Gouvernement a recours à des prélèvements ; qu’ils soient rebaptisés réduction de dépense fiscale, reconstitution des recettes ou augmentation d’impôts, peu importe : la réalité est là ! Certes, la reprise de croissance permettra d’encaisser des recettes nouvelles, mais la majeure partie de ces recettes sera due à la progression des prélèvements obligatoires, puisque leur taux passera de 41, 9 % à 42, 9 % du PIB en 2011.

Il ne faut pas le nier et regarder la vérité en face : en 2011, les impôts augmenteront, pesant sur les ménages et les entreprises, sous la forme d’une série de mesures qui ont pour avantage de préserver fictivement le dogme présidentiel d’une non-augmentation généralisée des impôts. Sans évoquer les réductions de niches qui sont aussi, qu’on le veuille ou non, une augmentation d’impôt, on pourrait citer l’augmentation de la dernière tranche de l’impôt sur le revenu de 40 % à 41 %, l’augmentation de la taxation des plus-values mobilières et immobilières, les taxes sur les assurances, l’augmentation de la TVA sur les offres triple play. Oui, les impôts augmentent. Mieux vaut le dire, plutôt que de le faire subrepticement en le niant !

La question qui reste alors en suspens est la suivante : comment, une fois les mesures exceptionnelles disparues, le Gouvernement pourra-t-il tenir son objectif de ramener le déficit de 6 % à 4, 6 % du PIB en 2012 ? En effet, les recettes liées à l’hypothèse de croissance annuelle de 2, 5 % en 2012, 2013 et 2014 sont incertaines, puisque le taux de croissance annuel moyen sur les dix dernières années, hors crise, s’établit à 1, 5 %. Retenir une hypothèse de cet ordre aurait été beaucoup plus raisonnable et réaliste. Je doute de la capacité du Gouvernement à prendre les mesures qui permettront à notre pays d’atteindre ce niveau de déficit, surtout à la veille de l’élection présidentielle !

Nous devrons donc faire un effort sur la dépense publique sans commune mesure avec ce qui est prévu en 2011 et faire progresser les recettes. Sinon, notre endettement dépassera les 90 % du PIB. Or, à un tel niveau d’endettement, les intérêts de la dette commencent à asphyxier le budget et les possibilités d’investissement, au point d’hypothéquer la croissance future.

Ces considérations donnent le sentiment que le Gouvernement reporte après l’élection présidentielle de 2012 les décisions nécessaires, qui demanderont du courage : elles incomberont au Président de la République nouvellement élu.

Chaque année, nous perdons du temps, et les sacrifices à consentir seront d’autant plus importants que l’on reportera les décisions qui s’imposent. Nous n’aurons plus d’autre choix que de trouver de nouvelles recettes, c’est-à-dire, pour l’exprimer en termes moins pudiques, d’augmenter les impôts et de diminuer réellement la dépense pour redresser les comptes publics. Les Français sont capables d’entendre un discours de vérité et d’accepter les réformes structurelles et les efforts, s’ils sont justement répartis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Depuis plusieurs années et, en ce qui nous concerne, bien avant la crise, nous répétons que notre pays ne peut plus indéfiniment vivre au-dessus de ses moyens, ni vivre à crédit en s’endettant toujours plus pour couvrir les dépenses de fonctionnement. Oui, l’urgence nous impose de réduire notre déficit et de revenir à l’équilibre de nos finances publiques ! C’est pourquoi, monsieur le ministre, lorsque je vous ai entendu ce matin parler de « protéger l’État-providence », mon sang s’est glacé !

Nous ne parviendrons pas à retrouver l’équilibre budgétaire sans faire un effort, à la fois, sur la réduction de la dépense, qui est prioritaire, et sur la protection des recettes.

Compte tenu de la grande rigidité des dépenses de l’État, de profondes réformes structurelles sont nécessaires si l’on souhaite réellement réduire la dépense publique et atteindre les objectifs que le Gouvernement s’est fixés à l’horizon de 2014.

Ainsi, alors que le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux est présenté comme la mesure phare de réduction des dépenses de l’État, la masse salariale de ce dernier, qui représente 31 % des dépenses, hors charges liées aux pensions et aux intérêts de la dette, a continué de progresser de 1 % par an ces trois dernières années. Il sera difficile de maîtriser les dépenses de l’État sans maîtriser sa masse salariale, ce qui doit nous amener à réfléchir à l’évolution du point d’indice et des mesures catégorielles.

Il faudra aussi aller beaucoup plus loin en matière de baisse des dépenses de fonctionnement, qui représentent 10 milliards d’euros, puisque, pour 2011, seulement 100 millions d’euros d’économies sont prévues à ce titre.

De même, les dépenses d’intervention doivent être réduites de 600 millions d’euros alors qu’elles représentent 59, 5 milliards d’euros, soit une baisse de 1 % : une goutte d’eau dans l’océan des dépenses publiques !

Enfin, si l’on veut être crédible, il faut aller beaucoup plus loin en matière de réduction des niches fiscales et sociales. La nécessaire restauration des recettes de l’État passe par la maîtrise de la dépense fiscale. Celle-ci est essentielle, car on voit bien les limites de la méthode du « rabot ». Le Gouvernement a décidé de procéder à une réduction minime d’une poignée de niches fiscales – 22 sur plus de 465 –, à hauteur de 10 %. Au final, cette mesure rapportera un peu plus de 400 millions d’euros, sur une masse représentant 75 milliards d’euros ! Ce n’est pas à la hauteur des enjeux et, à ce stade, votre rabot, monsieur le ministre, ressemble à une lime à ongles, pour reprendre l’excellente formule du rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale ! Néanmoins, cette mesure permettra au moins de stabiliser le montant des dépenses fiscales, qui n’augmentera pas de 5 milliards d’euros comme les années précédentes.

Il faut donc aller plus loin, changer d’outil en remisant la lime à ongles. La réflexion devra être menée niche par niche, en vérifiant si les dépenses sont toujours justifiées par rapport au moment de leur création, si l’évolution de la dépense est proportionnée à son utilité économique et sociale et si les retours, en termes de fiscalité directe ou indirecte, compensent le coût, afin d’éviter les effets d’aubaine.

La restauration des recettes de l’État implique également une refonte de notre fiscalité. Nous ne pouvons que nous réjouir de la volonté du Gouvernement d’ouvrir ce chantier. Une remise à plat de l’ensemble de notre fiscalité du travail et du patrimoine est en effet indispensable.

Au Sénat, le groupe de l’Union centriste et la commission des finances, par la voix de son président Jean Arthuis, militent depuis plusieurs années en ce sens, en vous proposant d’adopter un dispositif d’abord appelé « tryptique », puis rebaptisé « tétralogie ». Chaque année, il nous est répondu que ce n’est pas le bon moment…

Nous sommes bien sûr favorables à une réforme de notre système fiscal, qui devra répondre à un double objectif : l’équité fiscale et l’efficacité économique.

Notre fiscalité est d’une extrême complexité, au point d’être devenue illisible pour de nombreux Français, ce qui ouvre la porte à toutes les optimisations fiscales et renforce le sentiment d’injustice.

Cette réforme fiscale devra répondre en premier lieu à un impératif de simplification et de cohérence, et elle devra également satisfaire aux exigences de justice sociale et fiscale, ce qui n’est plus le cas de notre système fiscal aujourd’hui.

D’un côté, il y a l’ISF, qui est un mauvais impôt, car il est antiéconomique. Pour éviter que l’impôt ne soit confiscatoire, la piste qui consiste à remplacer l’ISF par une imposition sur les revenus du patrimoine me semble aller dans le sens voulu par une majorité de Français.

De l’autre, il y a le bouclier fiscal, créé pour atténuer les effets pervers de l’ISF, mais dont l’instauration a conduit à des situations d’injustice flagrante, en exonérant les bénéficiaires des plus hauts revenus des efforts qui sont demandés à tous les Français en cette période difficile. Aujourd’hui, on voit bien que ce mauvais dispositif, percé de toutes parts, n’est plus défendable ; la majorité le traîne comme un boulet.

D’ailleurs, avec la suppression du bouclier fiscal, c’est une autre mesure emblématique de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA, qui est abandonnée. Les dispositifs du « paquet fiscal » sont, les uns après les autres, remis en cause, chacun, en dernier lieu le Gouvernement, constatant leur inefficacité ; il n’en reste plus que la défiscalisation des heures supplémentaires, qui, on le sait, est une énorme usine à gaz destinée à contourner les 35 heures, et dont les économistes ont montré la totale inefficacité en matière d’emploi et le coût exorbitant pour les finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

Au final, la loi TEPA, que d’ailleurs je n’avais pas votée, aura eu pour principal effet de creuser le déficit public.

Cette refonte de la fiscalité ne saurait se limiter à la suppression pure et simple du bouclier fiscal et de l’ISF. Elle doit toucher tous les aspects de notre fiscalité : modernisation de l’imposition foncière, des droits de mutation, de l’impôt sur le revenu, de la fiscalité des revenus du patrimoine, des droits de succession… Nous devons nous fixer comme objectif de doter notre pays d’une fiscalité moderne, juste et efficace.

C’est pour cette raison que l’idée de régler cette question au détour d’une loi de finances rectificative, à six mois d’une échéance politique majeure, où la réforme fiscale sera au centre du débat public, me laisse sceptique.

Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nul ne peut ignorer aujourd’hui que nos finances publiques sont dans un état calamiteux, illustré par le présent projet de loi de finances. L’effet d’étouffoir de la dette accumulée depuis plusieurs années va peser de plus en plus lourdement sur la croissance, et l’on nous annonce que la charge de la dette passerait d’environ 40 milliards d’euros actuellement à 55 milliards d’euros en 2013.

Le creusement des déficits induits par la coupable politique des recettes conduite en France depuis 2002 est tel que notre pays se trouve aujourd’hui démuni de véritables leviers pour réamorcer un cycle vertueux de croissance.

Au travers de ce projet de budget, monsieur le ministre, vous privilégiez clairement la rigueur, aux dépens de la croissance ! Il ne semble plus être question, comme c’était le cas voilà trois ans, d’aller chercher le point de croissance supplémentaire avec les dents…

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Soyons lucides, mes chers collègues : la crise est loin d’être finie. Malgré les 5 000 milliards de dollars d’aides publiques injectés dans le système financier mondial, la situation reste très tendue. La réunion de Séoul du G 20 l’a encore souligné.

De nombreux économistes considèrent que les mesures exagérément drastiques d’austérité vont mener à une croissance anémiée et surtout très pauvre en créations d’emplois.

Si l’on en croit l’édition 2010 de France, portrait social, qui a été publiée hier par l’INSEE, la pauvreté fait tache d’huile dans notre pays. Dans ces conditions, ces choix budgétaires nous apparaissent contestables, car porteurs de risques pour nos concitoyens.

Aux États-Unis, on s’efforce en ce moment d’accompagner la reprise d’une manière très active. À l’inverse, vous supprimez le plan de relance, vous amputez les grands budgets d’intervention de l’État et vous imposez un plan de rigueur aux collectivités locales. Croyez-vous réellement qu’une économie française léthargique permettra d’assainir durablement nos finances publiques ? On a le sentiment que la croissance est laissée pour compte !

Vous me répondrez sans doute que tout cela est bien beau, mais que l’argent public est rare aujourd’hui et que l’on ne peut pas tout faire ! Mais, monsieur le ministre, comment en êtes-vous arrivés là ? Pourquoi êtes-vous contraints à des choix budgétaires aussi douloureux ? La dette publique a doublé en une décennie. Devant ce « mur de la dette », vous invoquez des choix budgétaires inéluctables. Mais à qui la faute ? Depuis 2002, la droite n’a pratiquement jamais respecté les règles budgétaires des traités européens. Pendant le cycle de croissance d’avant-crise, la France a été la seule nation – avec la Grèce – à ne pas réduire son déficit. En diminuant sciemment les recettes, vous avez laissé filer les déficits. Tous les cadeaux fiscaux ont été financés à crédit, au détriment des générations futures ! §

Chacun a en tête le rapport de la Cour des comptes, qui nous rappelle que le déficit public est foncièrement d’ordre structurel puisque, sur 120 milliards d’euros de déficit hors opérations d’investissement de 2010, 80 milliards d’euros correspondent au manque à gagner résultant des cadeaux fiscaux accordés depuis 2002.

Êtes-vous capables d’assumer devant les Français les conséquences d’une telle politique financière et fiscale ? Certes, vous en venez à reconnaître du bout des lèvres l’erreur politique majeure commise par la droite depuis 2002 en matière de recettes, et vous parlez par euphémisme de la nécessaire « reconstitution des recettes » ou de la possible remise en cause du bouclier fiscal, considéré comme un « symbole d’injustice » ! Néanmoins, cette amorce de conversion vous contraint à agir dans l’urgence, à l’aveugle, à partir d’hypothèses de croissance très peu réalistes et dans une transparence toute relative. Deux poids, deux mesures : voilà ce que comprennent nombre de nos concitoyens en voyant la teneur de vos arbitrages budgétaires.

En définitive, ce projet de loi de finances confirme l’échec de la stratégie financière et fiscale conduite depuis 2002 en France. Vous avez voulu imprégner le pays de l’idée maîtresse du libéralisme, selon laquelle, en déversant des cadeaux fiscaux sur les plus riches, l’abondance finirait par ruisseler jusqu’au plus bas de l’échelle des revenus… Force est de constater, monsieur le ministre, mes chers collègues, que rien de tel ne s’est passé depuis 2002. Alors que l’on nous annonçait une corne d’abondance, les déficits publics se sont creusés massivement, la dette s’est envolée et les inégalités se sont accentuées. On nous parlait, à propos du paquet fiscal, d’un « cocktail gagnant », formule qui avait fait florès à l’époque ! Eh bien ce fameux cocktail gagnant s’est révélé en définitive être un breuvage empoisonné.

Comment réagir, comment faire pour relancer efficacement la machine anti-chômage ?

J’estime, pour ma part, qu’obtenir un taux élevé de croissance doit constituer une priorité immédiate. Une croissance régulière de 2, 5 % à 3 % par an est indispensable pour stopper la fuite en avant dans l’endettement, relancer l’emploi et répondre aux attentes en matière d’investissements d’avenir. Le développement économique doit, à cet égard, pouvoir s’appuyer sur l’efficacité des secteurs qui échappent en tout ou partie aux marchés : je veux parler de l’éducation, de la santé, des infrastructures ou de la recherche.

L’attractivité et la compétitivité de notre pays nécessitent des infrastructures et une main-d’œuvre de qualité. À cet égard, le sondage dont les résultats ont été publiés le 11 octobre dernier par le quotidien La Tribune sous le titre « Les entreprises de croissance veulent plus d’État » ne dit rien d’autre. Cela suppose, mes chers collègues, des investissements publics importants, qu’il faut financer. De ce point de vue, vos choix budgétaires paraissent bien timorés.

La généralisation du très haut débit, par exemple, exige des sources nouvelles de financement. Les conclusions du récent rapport de notre collègue Hervé Maurey sur le financement des infrastructures à très haut débit ne trouvent hélas, dans ce projet de budget, aucun écho. Quant au schéma national des infrastructures de transports, le SNIT, d’un coût prévisionnel de 170 milliards d’euros d’ici à 2025, aucun fonds n’est pour l’heure annoncé pour le financer, alors qu’il s’agit d’un indispensable investissement d’avenir.

Sur quels acteurs s’appuyer pour mettre en œuvre cette dynamique de croissance que nous appelons de nos vœux ? Pour ma part, j’estime qu’il faut davantage faire confiance aux initiatives locales et traiter les collectivités territoriales en partenaires actifs et reconnus.

Vous savez très bien que l’autonomie fiscale n’est pas contradictoire avec l’équilibre des finances publiques de la nation. Je rappelle, à cet égard, que les collectivités territoriales n’ont contribué que très marginalement à la dégradation des équilibres financiers du secteur public, en termes tant de déficit que de dette. Dans ces conditions, pourquoi stigmatiser comme vous le faites la dépense publique locale ? L’État a pris le parti de se défausser sur les collectivités territoriales et de les installer dans la précarité financière.

Pourquoi affaiblir ainsi l’action publique locale ? L’édition d’aujourd’hui du journal Les Échos nous apprend que les investissements des collectivités territoriales ont régressé de plus de 2 % dès 2010. Qu’en sera-t-il dans les années à venir ? On peut craindre un renforcement de ce taux de décroissance, ce qui serait très inquiétant.

L’objectif commun n’est-il pas de promouvoir dans notre société un développement durable réel et porteur d’avenir ? La mise en œuvre d’un plan de soutien à l’investissement local en faveur des transports collectifs, des économies d’énergie ou de l’habitat de haute qualité environnementale pourrait concourir à la réalisation de cet objectif. Au lieu de cela, ce projet de budget entérine un recul avéré, et largement dénoncé, de la décentralisation.

Mon analyse est par conséquent que la croissance exige une politique économique et budgétaire plus ambitieuse, et d’abord la confiance ; or celle-ci est, à ce jour, loin d’être au rendez-vous.

La croissance passe en outre par un effort réel de solidarité ; or votre bouclier fiscal en exonère au contraire totalement les plus riches. Vous avez ainsi créé, dans notre pays, un sentiment d’injustice très démobilisateur. Admettez-le, l’existence du bouclier fiscal est un véritable scandale au cœur de notre République.

La croissance exige, par ailleurs, une ambition européenne renouvelée, car c’est de l’Europe unie que peut venir une véritable dynamique d’investissement et les nouveaux moyens financiers nécessaires. La France reste-t-elle porteuse d’une réelle ambition européenne ? Nous aimerions en être certains.

Enfin, la croissance doit s’appuyer sur un discours de vérité et de transparence quant à l’état financier du pays. Vous devez reconnaître objectivement devant les Français les erreurs stratégiques commises depuis 2002.

En conclusion, je voudrais affirmer ma conviction que seule une autre politique budgétaire, fondée sur la justice fiscale, l’efficacité de la dépense publique et une réforme en profondeur des prélèvements obligatoires, permettra un redressement durable et équilibré de notre pays.

La situation appelle, en effet, un véritable sursaut : de la fin des années quatre-vingt-dix à aujourd’hui, la production industrielle française a reculé de 10 % et l’emploi industriel de 20 % ; la part de marché de la France dans le commerce mondial est passée de 6, 5 % à 3, 7 % ; le nombre d’entreprises exportatrices a baissé de 110 000 à 91 000, contre 245 000 en Allemagne et 200 000 en Italie ; enfin, la balance commerciale de la France est passée d’un excédent équivalent à 1 % du PIB à un déficit s’élevant à 3 % du PIB.

Les multiples causes probables de cette situation ont toutes une racine commune, à savoir l’incapacité à s’investir efficacement dans des projets d’avenir et à promouvoir un nouveau modèle de croissance. Le projet de budget pour 2011 n’apporte pas, hélas ! les réponses appropriées que l’on était en droit d’attendre. Nous ne pourrons donc le voter en l’état.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les orientations du projet de loi de finances pour 2011 se situent dans le droit fil de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, adoptée il y a quelques jours, mais que notre groupe a clairement rejetée.

À ce stade du débat, je souhaite définir les contours d’une autre orientation des politiques publiques, fondée sur une conception de la conduite des affaires et de la politique budgétaire de la nation à la mesure des enjeux de notre temps.

La persistance de la crise économique, avec ses désastreuses conséquences sociales, est une dure réalité. Depuis de nombreuses années, le budget de l’État est gravement déficitaire et la situation n’a cessé de se dégrader au fil des lois de finances successives. Ces dernières ont consacré l’abandon de fonctions essentielles de l’État et la mise en œuvre d’une baisse tendancielle des impôts prélevés sur les entreprises et sur les ménages les plus aisés.

Les systèmes fiscaux des pays développés ont un point commun : ils sont marqués par un processus de réduction des impôts sur la production, le capital, le patrimoine et les revenus en découlant. Ainsi, notre système de prélèvements obligatoires frappe lourdement les plus modestes, notamment par le biais des droits indirects, et touche de plus en plus légèrement les plus fortunés.

Sous prétexte de favoriser l’emploi et l’investissement dans les entreprises, ces politiques fiscales ont favorisé la mise en place de dispositifs de réduction de l’impôt dû par les titulaires des plus hauts revenus.

La baisse de l’impôt sur les sociétés ou la réduction de la taxe professionnelle, jusqu’à sa récente suppression, justifiées par une harmonisation fiscale européenne que personne n’exigeait, …

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

… visaient prétendument à accroître la compétitivité de nos entreprises et à empêcher les délocalisations. Force est de constater que l’ensemble de ces dispositifs ont échoué : aucun des objectifs affichés n’a été atteint.

Le nombre de chômeurs, désormais supérieur à 3 millions, est particulièrement élevé. Avec la perte de 680 000 emplois dans les dix-huit derniers mois, celui des emplois salariés a connu une baisse qui n’avait jamais été observée auparavant. Enfin, les comptes publics, comme les comptes sociaux, sont dans le rouge.

Il faut donc clairement changer de cap et passer à une autre conception de la politique fiscale et budgétaire dans ce pays, en mettant en œuvre une réforme fiscale qui permette une meilleure redistribution des revenus, fondée sur une conception juste et équilibrée des impositions.

Cependant, si la justice fiscale est nécessaire, l’efficacité des mesures fiscales et l’économie générale de notre système fiscal sont tout aussi importantes.

Taxer plus fortement les plus-values sur cessions d’actifs vise non seulement à améliorer dans l’immédiat les comptes publics, mais aussi à progresser vers une taxation identique de tous les revenus au titre de l’impôt sur le revenu, seule source d’égalité de traitement et unique moyen de désintoxiquer l’économie des pratiques purement financières qui ont créé de profondes inégalités de patrimoine dans notre pays.

Les entreprises sont confrontées aux mêmes scandaleuses inégalités de traitement. Comment mettre sur le même plan les artisans, soumis au barème de l’impôt sur le revenu, et les grandes entreprises capitalistiques qui usent et abusent du régime des groupes, en parvenant, dans certains cas, à quasiment annuler leur contribution aux dépenses publiques ?

Là encore, comment ne pas pointer que la dépense fiscale, qui rend « neutres » les choix de gestion des grands groupes, coûte plusieurs dizaines de milliards d’euros au budget de l’État, soit bien plus que les quelques centaines de millions que l’on fait mine de concéder aux artisans, aux commerçants et aux PME ?

Une véritable revue de détail de notre fiscalité s’impose donc pour redonner tout son sens à la loi de finances. Celle-ci, loin de se borner à être « présentable » aux autorités européennes, doit avant tout répondre aux exigences et aux finalités d’un budget public, c’est-à-dire servir la population, l’économie de notre pays et la société française dans son ensemble.

Selon nous, nous ne pourrons retrouver le chemin de la croissance que grâce à une dépense publique faisant une juste place à la satisfaction des besoins collectifs des populations.

Si l’on examine la situation de développement des différents pays du monde en prenant en compte non pas le produit intérieur brut, mais des indices de développement humain tels que la prévention de l’exclusion sociale, le niveau d’éducation ou l’état sanitaire, il apparaît que les pays arrivant en tête du classement sont ceux qui ont un niveau élevé de prélèvements obligatoires et de dépenses publiques. Ce sont des pays comme la Suède, la Finlande, la Norvège et le Danemark qui présentent ces caractéristiques : leurs choix de financement, en adéquation avec une large socialisation des besoins, ont permis d’atteindre un niveau supérieur de développement de la société.

Nous sommes donc clairement en faveur de la réhabilitation de la dépense publique, source de réduction des inégalités sociales et d’accroissement des possibilités de développement et de croissance de l’ensemble de l’économie et de la société.

Réfléchissons, mes chers collègues, à cette économie nord-américaine dont le handicap de croissance tient manifestement au mauvais état sanitaire d’une grande partie de la population et à la faiblesse de la formation initiale d’une large part de la jeunesse.

De même, les longues années de thatchérisme et de blairisme, en Grande-Bretagne, ont tellement maltraité le secteur de la santé publique et le système scolaire que la récession de 2008-2009 a été plus forte encore dans ce pays que chez nous. La raison en est simple : les inégalités sociales, lorsqu’elles ne sont pas corrigées par les politiques publiques, sont autant d’obstacles à la relance d’une véritable activité productive.

Réduire la dépense publique, en 2010, en 2011 et au-delà, comme vous nous y avez invités par la loi de programmation des finances publiques, c’est prendre le risque de handicaper la progression de l’ensemble de la société française.

Réformer l’impôt pour changer les comportements des agents économiques et relancer la dépense publique utile : voilà les deux orientations qui, à notre sens, peuvent faire à nouveau avancer notre pays et engendrer une croissance responsable, à même de réduire les difficultés du pays et les déficits accumulés.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que vient faire un néophyte dans la discussion de ce projet de loi de finances ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Si nous nous accordons, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, sur les conséquences de la crise mondiale pour l’économie, nous n’avons pas la même analyse des causes qui l’ont provoquée. La crise de 1929 était une dépression séculaire ; celle de 2008 ne le sera pas, car nous vivons désormais dans un climat de crise, et il est à peu près certain que d’autres crises surviendront.

On peut certes instruire le procès du Gouvernement, mais, comme l’a souligné le Premier ministre, cela fait vingt-cinq ans que nous votons des budgets en déséquilibre ! M. Marc vient de le souligner, le produit intérieur brut industriel a baissé de 10 % entre 1990 et 2007, et le nombre d’emplois industriels de 30 %, alors que nous avons connu, durant cette période, une alternance politique. S’agissant d’un problème aussi complexe, faire le procès des gouvernements successifs, qu’ils soient de droite ou de gauche, ne me paraît pas être la bonne piste ; il convient de faire preuve d’humilité et d’objectivité.

Si nous ne procédons pas à notre examen de conscience, nous continuerons pendant des années encore à analyser des budgets en déficit et à faire des procès d’intention. La véritable cause de la crise, c’est que nous avons manqué la construction européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Nous avons cru au dogme idéologique du libre-échange, du marché autorégulé, dont nous avons fait un dieu parmi les dieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Au lieu de construire l’Europe politique, l’Europe puissance, démocratiquement gouvernée, on l’a confiée au marché. Aujourd'hui, ce grand marché passoire se trouve confronté à des puissances économiques organisées, en Asie et en Amérique latine.

Plus grave encore, nous avons construit un monde financier dérégulé. Les produits dérivés, la titrisation débridée, le surendettement né d’une libéralisation financière à outrance ont contribué à substituer progressivement une économie virtuelle à l’économie réelle. Aujourd’hui, des bulles spéculatives, des masses d’argent virtuel, sous forme notamment de bad debts, ne cessent d’apparaître et de provoquer des ravages.

Un président du NASDAQ s’est révélé être un escroc international ; il a été condamné par la justice américaine à cent cinquante années de prison. Si j’avais annoncé une telle chose voilà cinquante ans, on m’aurait envoyé à l’asile !

Vouloir imputer à ce gouvernement et à des causes nationales tous les maux qui nous accablent, c’est donc faire une grave erreur de diagnostic ! C’est la raison pour laquelle je présenterai modestement trois idées, à l’heure où la France assure la présidence du G 20.

J’ai lu le rapport Stiglitz et le rapport moral sur l’argent dans le monde de la Caisse des dépôts et consignations.

Je suggère tout d’abord que les Nations unies, auxquelles on accorderait, comme aux autres institutions internationales, des pouvoirs économiques, mettent en place un « code de la route » de la mondialisation, à l’instar de ce qui existe pour lutter contre les accidents mortels sur nos routes.

Je propose ensuite de créer, au sein du FMI, un « radar » sous la forme d’un observatoire de la mondialisation. Cet outil n’existant pas aujourd’hui, chacun fait ce qu’il veut comme il le peut. D’ailleurs, le Président chinois nous l’a dit lui-même : chaque pays doit prendre ses responsabilités ! Or je pense que ces responsabilités devraient être prises collectivement.

J’émets enfin l’idée que le G20 agisse comme un véritable régulateur de la mondialisation.

Si ces trois préconisations ne sont pas mises en place, nous courons au-devant de graves mésaventures économiques, sociales, humaines, aussi. Et nous aurons beau pleurer sur notre sort national, nous aurons beau chercher des remèdes nationaux – il en existe ! –, rien n’aboutira sans recherche de solutions à l’échelon européen, à l’échelon international.

J’en viens maintenant à l’une des régions qui m’intéresse particulièrement, à savoir l’outre-mer.

Monsieur le ministre, mais je m’adresse aussi au rapporteur général et au président de la commission des finances, je dis oui au rabot ; non à la guillotine ! Quant à la lime à ongles, c’est à voir …

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Monsieur le ministre, à l’Assemblée nationale, vous avez déposé un amendement visant à geler la défiscalisation pour le secteur photovoltaïque pendant six mois. Vous justifiez cette décision par le fait qu’il y a eu des abus. Des abus ? Non, monsieur le ministre, des escroqueries ! Je peux même vous donner les noms et les adresses. Envoyez dès la semaine prochaine deux inspecteurs généraux pour les contrôler et vous pourrez récupérer la totalité de l’argent qu’ils ont volé à l’État. Le problème sera ainsi réglé.

Je ne suis pas complice de ces voleurs, qu’il s’agisse de défiscalisation ou pas ! Nous ne pouvons exister comme département français d’outre-mer que si nous jouons la carte de la loyauté, de l’honnêteté, de la sincérité et de l’efficacité dans l’utilisation de l’argent public. Mais les honnêtes gens n’ont pas à payer pour les escrocs !

Alors, suspendez la réalisation des grandes installations photovoltaïques, soit ! Demandez à une commission d’effectuer un véritable diagnostic, de dégager des solutions pour l’avenir et de rédiger un rapport, puis nous verrons ce qu’il conviendra de faire au mois de juin. En revanche, pour les petites installations, acceptez la défiscalisation sur agrément au premier euro, comme ma collègue Anne-Marie Payet et moi-même vous le proposerons.

Permettez-moi tout de même de noter que, si nous sommes dans cette situation, la faute est partagée, et l’État a sa part de responsabilité. Nous réclamons depuis huit mois au ministère que vous avez l’honneur de diriger la publication du décret concernant le watt-crête, c’est-à-dire le prix maximum du watt produit. Si ce décret avait été publié, il n’y aurait pas eu d’abus.

Vous l’avez dit vous-même quand je vous ai rencontré à Biarritz : le logement doit être sanctuarisé. Vous l’avez fait pour le logement social, et je vous en remercie, monsieur le ministre.

En revanche, pour le dispositif Scellier « DOM », les décrets ont été pris tardivement en 2010. Nous souhaiterions, ma collègue Anne-Marie Payet et moi-même, ainsi que d’autres élus de l’outre-mer – si Serge Larcher était présent, c’est une demande qu’il aurait également formulée –, que le rabot puisse être appliqué à ce dispositif - après tout, il n’y a pas de raison -, mais au 1er janvier 2011. En effet, la politique du logement intermédiaire n’a pas encore démarré.

Je terminerai sur une image pleine de promesses.

Savez-vous, mes chers collègues, et je m’adresse notamment à ceux qui vivent dans des régions de pêche maritime, que la France possède, grâce à la Réunion, à Mayotte, à l’archipel des Kerguelen et aux îles Crozet, un espace maritime pillé par les Japonais, les Coréens, les Chinois dont la surface vaut sept fois celle de la Méditerranée. Sept fois, mes chers collègues !

Qu’attend la France pour mettre en place une politique de pêche dans cette zone ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Il y a aussi les îles du canal du Mozambique !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

En effet !

Au lieu de gémir sans cesse, rendez-vous compte que nous avons là des zones de croissance, des zones d’expansion économique : plus de 700 000 tonnes de thon y sont pêchées. Or, dans le même temps, les pêcheurs de métropole se battent pour se répartir des quotas qui rétrécissent comme peau de chagrin.

Monsieur le ministre, je voterai évidemment ce projet de loi de finances. J’appartiens à une majorité, je suis donc loyal. Sachez que je n’engage pas un rapport de force avec le Gouvernement. Je suis simplement un militant qui lui apporte ses réflexions. Reste que je voudrais que vous preniez en compte nos demandes, qui, elles aussi, sont non seulement loyales, mais également justes et équitables.

Vous le savez, l’outre-mer n’a pas un nombre infini de secteurs de développement. Nous avons le logement, le photovoltaïque, l’agroalimentaire, les nouvelles technologies, le tourisme et, demain, la pêche.

Merci de faire preuve de solidarité, et elle est réciproque, entre l’outre-mer et la métropole !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l ’ Union centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures quinze.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La séance est reprise.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Bernard Angels.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme on pouvait s’y attendre, le Président de la République change de ministres, pas de politique. Ce projet de loi de finances en est la triste illustration : d’un côté, monsieur le ministre, vous affichez un optimisme que toutes les récentes études démentent ; de l’autre, vous présentez un budget de rigueur qui va fragiliser les ménages modestes et mettre à mal les services publics auxquels nos concitoyens sont si attachés. Diagnostic erroné, aveuglement idéologique : plutôt que le Gouvernement, c’est votre budget qu’il faudrait profondément remanier !

Je parlais de diagnostic erroné. C’est en effet ce qui frappe immédiatement à la lecture de votre projet de loi de finances. Vous prétendez faire voter aujourd’hui un budget « d’après crise », à tout le moins un budget de « sortie de crise ». De toute évidence, les indicateurs récemment publiés en matière d’investissement, d’exportation et de consommation ne semblent pas vous avoir alerté.

Dois-je rappeler les récentes études sur les données fondamentales de notre économie ? Si les exportations françaises ont augmenté au troisième trimestre de l’année 2010, elles ne suffisent pas pour autant à compenser le bond de 4, 1 % effectué dans le même temps par les importations. Ce solde commercial négatif a pesé sur la croissance française, contribuant, selon l’INSEE, pour moins un demi-point à la croissance du PIB de la France sur la période.

Loin de vous rassurer, ces chiffres auraient dû vous alerter, et ce d’autant plus que, du côté de l’investissement des entreprises, le contexte ne semble pas non plus au beau fixe. En effet, entre les mois de juillet et de septembre 2010, l’investissement des entreprises n’a augmenté que de 0, 5 %, après une hausse de plus du double, soit 1, 2 %, au deuxième trimestre.

Ce ralentissement, qui semble se confirmer, met en évidence la fragilité de la reprise économique française, fragilité d’ailleurs soulignée par les chiffres de la consommation des ménages. Cette dernière n’a augmenté que de 0, 6 % au troisième trimestre, et les économistes s’accordent à mettre une large part de ce résultat sur le compte de la prime à la casse, qui ne sera pas reconduite en 2011.

J’ajoute que l’indicateur de l’OCDE en ce qui concerne la France est négatif depuis mars 2010 et que le FMI et la Commission européenne anticipent une croissance moindre que celle qui est prévue par le Gouvernement.

Bref, les chiffres et les prévisions contredisent votre optimisme de façade.

Il suffit d'ailleurs de vivre au quotidien auprès de nos compatriotes pour s’en rendre compte : pour une infime minorité, la crise est déjà un lointain souvenir ; pour la majorité de nos concitoyens, elle est une réalité quotidienne. Or, sous prétexte d’en limiter les effets, les programmes de rigueur et les plans d’austérité ajoutent la crise à la crise, et aggravent un peu plus la situation sociale.

Rigueur, austérité : c’est le choix que vous avez fait. Au nom de la réduction du déficit – 3 % d’ici à 2013 –, vous allez procéder à d’inévitables coupes budgétaires et au relèvement du taux des prélèvements obligatoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Si, comme nous le pensons, la croissance en 2011 et au cours des années suivantes s’établit à un niveau moindre que celui qui est estimé dans le projet de loi de programmation des finances publiques révisé, alors c’est à tout le moins 4 milliards d’euros supplémentaires qui devront être dégagés chaque année. Qui va payer ? La réponse est dans votre projet : les ménages et les services publics seront les principales victimes, au mépris de l’efficacité économique et de la justice sociale.

Il est indéniable que les impôts vont augmenter l’année prochaine. C’était d’ailleurs tout à fait prévisible, compte tenu de votre obstination à ne pas revenir sur de nombreuses mesures fiscales qui, en plus d’être ouvertement injustes, pèsent sur nos finances publiques.

Oui, vos choix pèsent dramatiquement sur les finances du pays, et il est désormais admis que la crise n’explique qu’un tiers du déficit structurel, le reste étant imputable à la politique budgétaire et fiscale que vous avez menée au cours des trois années précédentes.

Entre 2000 et 2009, 70 milliards d’euros de recettes ont disparu des caisses de l’État, dont 15 milliards d’euros entre 2007 et 2010 du simple fait des mesures relatives à l’impôt sur le revenu, aux allégements contenus dans la loi TEPA, c'est-à-dire la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, à la TVA sur la restauration et à la taxe professionnelle.

En 2012, selon vos propres prévisions, la dette publique atteindrait 1 800 milliards d’euros, soit deux fois plus qu’en 2002. La charge des intérêts de la dette dépassera bientôt le montant du premier poste du budget de l’État, l’éducation nationale. Nos finances publiques ne sont pas soutenables, et l’orientation budgétaire que vous choisissez pour remédier au problème ne va pas dans le sens de la justice fiscale.

Disons-le clairement : les impôts augmenteront l’année prochaine, faisant des ménages les variables d’ajustement du Gouvernement en matière de réduction du déficit.

En 2011, les prélèvements obligatoires vont accuser une hausse de 20 milliards d’euros. Sur ce montant, 2 milliards d’euros sont imputables à la reprise de l’activité économique, c’est-à-dire à la reconstitution spontanée des recettes. Il reste donc 18 milliards d’euros de reconstitution volontaire, dont 10 milliards d’euros du fait de mesures nouvelles.

Ainsi, les ménages seront les premiers à contribuer à la résorption du déficit, car ils vont supporter 70 % de cet effort. À ce titre, la mesure d’augmentation de la TVA sur les offres dites « triple play » illustre bien le jeu de dupes du Gouvernement. Il ne fait aucun doute, en effet, que cette nouvelle taxe acquittée par les fournisseurs d’accès à Internet sera quasi entièrement répercutée sur le coût des abonnements des utilisateurs.

En revanche, pour les foyers fiscaux les plus favorisés, l’horizon s’éclaircit sérieusement ! Votre mansuétude à l’égard des privilégiés est presque touchante. En proposant la suppression du bouclier fiscal, vous auriez pu rétablir en partie l’équilibre, mais vous choisissez d’adosser cette mesure à une éventuelle suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF.

Il reste que, là où le bouclier fiscal coûte 600 millions d’euros chaque année, l’ISF en rapporte plus de 3 milliards. Ces deux mesures ne sont donc pas neutres et induiront un manque à gagner d’environ 2, 5 milliards d’euros chaque année.

La deuxième victime de votre politique budgétaire, ce sont les services publics et ceux qui les font vivre : les fonctionnaires.

En ne remplaçant pas un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, vous exposez notre pays à une pénurie qui ne sera pas sans conséquences sur la qualité des services publics et leur bon fonctionnement.

Et pour quel bénéfice budgétaire ? Il devait être de un milliard d’euros par an, mais s’établit aux alentours de 800 millions d’euros, dont il faut retrancher 430 millions d’euros redistribués aux fonctionnaires et encore 300 millions d’euros destinés à payer leurs heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Au final, le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux n’induira que 100 millions d’euros de dépenses en moins par an : bref, peu d’économies pour une mesure que seul explique votre aveuglement idéologique.

Le gel des dotations aux collectivités et des concours de l’État en direction de nos territoires aura également des conséquences particulièrement graves pour les services publics locaux. La part des collectivités dans l’investissement public a diminué de trois points en six ans, s’établissant, pour l’année 2009, à 70 %. Il est plus que probable que cette nouvelle coupe dans les ressources des collectivités contribuera à aggraver encore le phénomène, alors même que l’endettement des collectivités représente moins de 10 % du total de l’endettement public.

En agissant de la sorte, vous contraignez les collectivités à utiliser le seul levier qu’il leur reste, celui des hausses d’impôts. On connaît la suite : vous ne manquerez pas de les condamner, alors que vous êtes les seuls responsables.

Augmenter les prélèvements obligatoires, tailler dans les ressources des collectivités : les effets sur la consommation des ménages et l’investissement public seront à coup sûr négatifs. Si l’on ajoute à cela la fin du plan de relance, il y a de fortes chances pour que les résultats des choix politiques qui sous-tendent ce projet de loi de finances pour 2011 ne soient pas à la hauteur de vos espérances.

Serez-vous surpris si je vous dis qu’un autre projet était possible, qu’une autre politique est souhaitable ? Oui, je veux parler d’une politique consistant à s’appuyer sur les moteurs de la croissance et à en tirer profit afin de permettre à la France de sortir durablement de la crise.

Pour cela, il faudrait déjà ne pas confondre le rééquilibrage de nos comptes publics et la réduction des dépenses. Tout le monde s’accorde sur l’objectif d’efficience de nos dépenses publiques, mais faire reposer sur elles l’intégralité de l’effort de rééquilibrage budgétaire est à la fois socialement injuste et économiquement inefficace.

Agir vraiment sur les recettes, c’est faire des choix courageux, des choix ambitieux, en abrogeant le bouclier fiscal ; en taxant plus franchement les activités risquées des banques et les stock-options ; en allant plus loin dans le plafonnement des niches, la réduction de leur nombre et la simplification de leurs mécanismes. Cette seule révision aurait permis de récolter plus de 15 milliards d’euros sans avoir à pratiquer de telles coupes dans les missions du budget de l’État et, surtout, sans affaiblir la dépense publique, qui contribue largement à la relance économique.

Ces choix courageux, vous vous refusez à les faire. Vous persévérez dans l’erreur, tout en essayant de préserver, inlassablement, la situation d’un petit nombre de ménages aisés.

Une autre politique, c’est surtout une vraie ambition en faveur de l’emploi. Depuis huit ans, vous donnez l’impression de l’avoir oublié. Dois-je vous le rappeler, avant 2002, la croissance française s’établissait en moyenne à un demi-point en deçà de la croissance européenne. Entre 1997 et 2002, le gouvernement de Lionel Jospin a permis, par les politiques menées dans notre pays, de créer 400 000 emplois et de placer la France en position de leader européen en termes de croissance.

Vous avez abdiqué en matière de volontarisme économique. Le résultat est là : la croissance est en berne, le chômage augmente.

Vous l’aurez compris, selon nous, d’autres choix politiques auraient pu, auraient dû être mis en œuvre. Hélas, vous avez décidé d’inscrire votre projet de budget dans le prolongement de la politique menée depuis trois ans. Le Gouvernement a changé, pas vos orientations !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, beaucoup de choses ayant été dites excellemment par Jean-Pierre Fourcade, au nom de mon groupe, je me contenterai de vous livrer mon sentiment.

En réalité, sur le projet de loi de finances pour 2011, les orateurs de l’ensemble des groupes ont en commun deux objectifs : d’une part, la réduction des déficits ; d’autre part, la préservation ou la stimulation de l’emploi. Ce sont en effet les deux principes élémentaires lorsque l’on étudie le budget de l’État.

Pour autant, le rapporteur général de la commission des finances a très bien expliqué que les recettes nettes, cette année, ne représentaient que 70 % des dépenses nettes…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

… et que l’on constatait une amélioration. En fait, tout réside dans l’équilibre entre, d’un côté, ces recettes qu’il faut stimuler ou augmenter et, de l’autre, ces dépenses qu’il faut contenir.

Or, lorsque j’examine ce projet de budget, je reconnais que j’ai quelques difficultés à comprendre…

Tout d’abord, les recettes nouvelles proviennent pour l’essentiel de la suppression des niches fiscales, à hauteur de 10 milliards d’euros, et de quelques taxes supplémentaires, liées à l’utilisation d’Internet.

Pour ma part, monsieur le ministre, j’ai du mal à comprendre ce qu’est exactement une « niche fiscale ». Je n’ai jamais entendu l’un de vos prédécesseurs ou un rapporteur général de la commission des finances défendre devant une assemblée la création d’une niche fiscale ! En tant que parlementaire, je n’ai jamais eu le sentiment de créer une niche fiscale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

En général, j’ai voté en faveur d’incitations fiscales destinées à favoriser l’emploi ou le développement. Cependant, du jour au lendemain, le vocabulaire change, puisqu’il s’agit désormais de « réduire la dépense fiscale ». En réalité, supprimer ces « niches » revient à créer des prélèvements nouveaux à hauteur de 10 milliards d’euros, qui pèseront aussi bien sur les particuliers que sur les entrepreneurs. Mais peut-être ces mesures sont-elles nécessaires ! C’est la raison pour laquelle il est important de trouver un équilibre entre le niveau des recettes nouvelles et celui des dépenses.

Mme Lagarde l’a fort bien expliqué ce matin, l’emploi constitue bien évidemment une troisième source de recettes. Elle a défendu un projet dont la vocation est d’accélérer les effets du plan de relance, grâce à la création de 100 000 emplois nouveaux.

En réalité, seules les incitations, que nous appellerons peut-être plus tard des « niches », peuvent véritablement redonner courage et envie aux entrepreneurs, accroître la compétitivité des entreprises et permettre aux grosses PME, c'est-à-dire celles qui ont 500 salariés et plus, de se multiplier, alors qu’elles sont quasi absentes de notre économie, ce que nous regrettons lorsque nous évoquons notre commerce extérieur.

Comment ne pas avoir le sentiment d’une certaine contradiction quand on constate que l’incitation fiscale prônée hier est aujourd’hui une niche fiscale qu’il faut combattre ?

J’en viens à la « réduction » de la dépense publique.

M. le rapporteur général nous l’a expliqué, il y a non pas réduction mais bien augmentation de la dépense publique, et à hauteur de 4, 5 milliards d’euros. Simplement, c’est l’emballement de la dépense publique qu’il s’agit de contenir et de diminuer. Reste que, pour l’instant, cette dépense publique continue d’augmenter.

C’est dans cette mesure que l’équilibre fixé entre recettes et dépenses est, pour nombre de nos concitoyens, difficilement compréhensible. Ces derniers ont en effet le sentiment que l’effort prévu en matière de dépense publique est insuffisant par rapport à celui qui est demandé avec la suppression de certaines incitations fiscales. À cet égard, je nourris moi-même une certaine inquiétude.

On me répondra très certainement – certains orateurs ont d’ailleurs insisté sur ce point – que la dépense publique est contrainte.

La dette constitue en effet le premier poste de dépense. Nous l’avons héritée des nombreuses années au cours desquelles nous n’avons pas su être suffisamment attentifs à sa progression. Elle croît plus vite que les autres dépenses, avec une augmentation prévue entre 15 et 20 milliards d’euros sur les trois ou quatre prochains exercices budgétaires.

Le ministère de l’éducation nationale représente le deuxième poste de la dépense publique. Sur les 30 000 emplois qui ne seront pas renouvelés dans la fonction publique, la moitié relève de ce ministère.

Pour autant, l’étude des chiffres soulève un certain nombre de questions. La suppression de ces 15 000 postes permettra de réaliser une économie de 390 millions d’euros. Or, pour revaloriser les fonctions, conformément à l’engagement du Président de la République, 199 millions d’euros seront réengagés, si bien que le gain engendré par cette mesure n’atteindra que 160 millions d’euros environ, et ce sur une masse globale de 18 milliards d’euros !

Cet exemple illustre parfaitement la difficulté qu’il y a à tenir un engagement en la matière. Lors de l’adoption du projet de loi de finances pour 2009, M. le rapporteur général l’a rappelé, l’État prévoyait de limiter à 1 % la croissance de la dépense publique. Or, finalement, nous avions enregistré une augmentation de 2, 4 % !

Telle est la réalité de ce qui constitue le deuxième poste de dépense pour l’État, je tenais à le souligner.

Comme je l’ai dit lors d’un précédent débat d’orientation budgétaire, vous faites face, monsieur le ministre, à une difficulté insurmontable, car, s’agissant de l’État, vous réfléchissez à périmètre constant. Pour ma part, j’ai une vision bien différente de l’État.

Le Gouvernement vient de réduire le nombre de ministres, ce qui est une bonne chose. Toutefois, cette décision aurait dû trouver sa traduction budgétaire. Le périmètre de cet « État assistance » doit être réduit progressivement, afin que l’on se concentre sur les missions essentielles.

À cet égard, je prendrai l’exemple du Grand Paris, que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer.

Sachez que nous sommes l’un des seuls États au monde à proposer un service public de transport. Or, comme le démontre un rapport de la Cour des comptes paru voilà un ou deux jours, l’État est parfois moins performant que des sociétés capables, elles, de fournir le service, mais à un coût bien moindre.

Pourtant, dans ce domaine, le Gouvernement n’a pas changé de vision. Lorsque j’entends dire que ce budget est inspiré par une vision libérale, je ne comprends pas. Où est donc la vision libérale ? Pour ma part, je ne la retrouve pas ici.

En revanche, je soutiendrai bien évidemment vos efforts, monsieur le ministre, et ceux de Mme Lagarde, pour défendre un dispositif qui a été évoqué par Jean-Pierre Fourcade, à savoir le crédit d’impôt recherche en faveur des entreprises. Je suggère même qu’il soit étendu aux jeunes entreprises innovantes. Ce dispositif est essentiel, car c’est de l’entreprise que vient l’emploi.

Obéir à une vision ultralibérale, ce n’est pas se contenter de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux pour réduire la dépense publique ! Si c’était le cas, quel serait le pays au monde le plus ultralibéral ? Cuba, mes chers collègues, car, cette année, 500 000 fonctionnaires et agents de l’État ont été reversés dans le secteur concurrentiel. Or ce pays est loin de mener une politique ultralibérale, et j’en prends à témoin nos amis siégeant sur les travées de gauche de cette assemblée !

Je souhaitais donc, monsieur le ministre, attirer votre attention sur ce problème de périmètre, à mes yeux essentiel.

Il est également indispensable de préserver et de développer les mécanismes qui ont fait leur preuve, comme le crédit d’impôt recherche et les dispositifs mis en place notamment par Hervé Novelli au moment de la création de l’auto-entrepreneur.

Bien évidemment, je me réjouis de la réforme de la fiscalité, annoncée pour le prochain collectif budgétaire. En libérant les énergies sur le plan fiscal tout un maintenant un équilibre indispensable, cette réforme complétera utilement celle de la taxe professionnelle, qui avait été, elle aussi, attendue de longue date.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission, le remaniement a enfin eu lieu, et ce quelques jours avant l’examen du projet de loi de finances pour 2011. Curieusement, ceux qui, sur les bancs de la majorité, à l’Assemblée nationale, s’étaient tus jusque-là – était-ce par inquiétude ? – ont retrouvé quelques couleurs pour s’exprimer sur ce texte.

Est-ce une chance pour la Haute Assemblée si nous retrouvons aujourd’hui les mêmes ministres à la tribune ? Ce n’est pas à moi de répondre ! Quoi qu’il en soit, cela devrait nous permettre d’aller à l’essentiel.

À cet instant de la discussion générale, beaucoup de choses ont déjà été dites. Permettez-moi toutefois d’apporter ma contribution, au demeurant modeste, et j’utilise à dessein l’adjectif. En effet, ni mon intervention, ni celles, excellentes, de mes collègues du groupe socialiste, ni même peut-être celles des sénateurs de la majorité, ne modifieront ne serait-ce que d’une virgule un projet de loi de finances d’ores et déjà quasi gravé dans le marbre.

Ce qui importe, c’est la communication gouvernementale, entièrement tournée vers l’extérieur, afin de rassurer d’abord les agences de notation, et le plan triennal n’a d’ailleurs pas d’autre but. Il suffit d’observer les difficultés dans lesquelles ont été plongés nos collègues de la commission des finances.

M. le rapporteur général a d’ailleurs proposé de retenir une hypothèse de croissance moyenne du PIB de 2 %, au lieu de 2, 5 %. Et pourtant, si l’on y regarde de plus près, avec une croissance de 1, 5 % à 1, 6 %, mais un déficit de 150 milliards d’euros, l’année 2010 atteint un record inégalé sous la Ve République. Bonjour la « rilance », prônée l’année dernière par Mme Lagarde, pour ceux qui s’en souviennent encore…

Debut de section - PermalienPhoto de François Rebsamen

Nemo auditur propriam turpitudinem allegans : cet adage est fréquemment employé par les juristes. Or, à force de diminution des recettes et de hausse continue des dépenses publiques, nous en sommes malheureusement là !

Aujourd’hui, nous débattons du dernier budget du président Sarkozy, ou plutôt du dernier budget du candidat de 2007, avant de débattre l’an prochain du budget – j’espère, à titre personnel, que ce sera le dernier ! – du candidat de 2012.

Le projet de loi de finances pour 2011 est d’ailleurs significatif. Il s’agit, comme le déclarait ce matin Mme la ministre, de « rétablir des comptes publics sans compromettre la reprise ». C’est un peu la quadrature du cercle, le Gouvernement étant corseté par des contraintes idéologiques posées par le Président de la République. « Ce n’est pas un budget de rigueur », nous déclarait tout à l’heure M. le rapporteur général. J’ajouterai : sauf pour quelques-uns !

Au moment même où, reconduit dans ses fonctions, François Fillon déclarait que l’emploi, les solidarités et la sécurité relèveraient des priorités de l’exécutif, on constate, et c’est à peine croyable, que ces priorités se retrouvent bien dans le projet de loi de finances pour 2011, mais dans des missions dont les crédits sont rognés… Drôle d’ambition !

Relevons à cet égard les coupes franches du programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales » : les crédits qui lui sont affectés chutent de plus de 56 % !

Pour ce qui concerne la sécurité, le Gouvernement, non comptant de réduire les effectifs, diminue l’investissement de 19 %, ce qui en dit long sur la réalité des pratiques.

Et que dire de cette « riche » idée lancée par Benoist Apparu d’imposer au secteur HLM une taxe nouvelle de 2, 5 % portant uniquement sur les loyers des plus modestes ? Nous aurions pu comprendre, tout en la combattant, la logique d’une taxation de tous les loyers. Mais la création d’une taxe affectant uniquement les plus modestes de nos concitoyens ne peut pas se justifier ! Et tout cela pour alimenter le budget de l’État à hauteur de 340 millions d’euros.

Or notre commission des finances estime que ce dispositif « ne constitue pas un outil adéquat de péréquation et de mutualisation, puisqu’il frappe indistinctement et uniformément les organismes d’HLM, sans tenir compte de leur situation financière particulière », ni, surtout, des investissements qu’ils ont réalisés ces dernières années.

La commission des finances considère également que le comblement du déficit de financement des opérations de rénovation urbaine de l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, ne peut être mis deux fois à la charge des bailleurs sociaux, mais relève du budget général de l’État.

La perte qui en résultera pour les organismes d’HLM devra de toute façon être compensée, aux dépens de la production, de la réhabilitation ou du service. Quant à la nouvelle version du dispositif dont j’ai eu connaissance, elle pénaliserait tout autant les locataires. Et ce sont bien les locataires qui seront les plus visés, monsieur le ministre.

J’ai examiné plus spécifiquement les conséquences des dernières modifications apportées au projet pour l’OPAC de Dijon : elles seraient catastrophiques, puisqu’il s’agirait d’une ponction, sur trois ans, de près de 840 euros par logement pour les locataires les plus modestes.

Par ailleurs, la politique actuelle menée par le Gouvernement dans la mise en œuvre et la gestion des contrats aidés est aussi en contradiction avec les principes affichés : une diminution de leur nombre de 60 000 est prévue pour 2011.

Les structures d’insertion par l’activité économique, que vous vous connaissez sur le plan local, monsieur le ministre, accueillent et salarient chaque année plus de 65 000 personnes très éloignées de l’emploi ; elles les accompagnent et les forment afin de les soutenir sur le chemin du retour à l’emploi.

Les contrats aidés sont cependant utilisés comme variables d’ajustement pour les chiffres du chômage. Certaines de ces structures d’insertion par l’activité économique qui ont signé des conventionnements avec l’État se retrouvent dans une situation complexe qui les empêche d’atteindre les objectifs de retour à l’emploi et de lutte contre le chômage et donc de mener à bien leur mission.

S’agissant des recettes, il existe, bien sûr, des marges de manœuvre efficaces, mais elles ont été ignorées.

Elles ont été présentées par mes collègues, mais je les rappelle rapidement.

Il s’agit de supprimer la loi TEPA ; créer une tranche supérieure d’impôt sur le revenu ; réviser les bases de la fiscalité locale ; élargir le périmètre de la taxe sur les logements vacants ; rendre permanente la taxation des rémunérations variables des opérateurs de marché, c'est-à-dire leurs bonus ; supprimer les outils permettant l’optimisation fiscale, dont l’utilisation pourrait parfois être assimilée à un abus de droit tant leur caractère fictif ou leur motivation exclusivement fiscale sont nets…

C’est le sens d’amendements qui ont été déposés.

Sur ce sujet précis, l’augmentation constante du nombre et du coût des dispositifs fiscaux dérogatoires applicables aux entreprises ces dernières années témoigne, je le crois, du caractère non maîtrisé de ces mesures. Leur coût étant estimé à plus de 71 milliards d’euros en 2010, contre 19, 5 milliards d’euros en 2005.

Cette réalité, monsieur le ministre, contraste fortement avec les efforts croissants de maîtrise des dépenses budgétaires que vous prétendez engager. Et ce, alors que, dans le même temps, vous demandez des efforts aux ménages souvent les plus modestes et aux collectivités locales, ce qui – cela a été dit sur toutes les travées -, pénalisera l’investissement public.

Cette politique contraste encore plus avec votre plan de communication, qui consiste à nous dire que ce projet de loi de finances « s’inscrit dans la stratégie du Gouvernement de retour progressif à l’équilibre, stratégie qui repose elle-même sur une volonté sans faille de réduire les déficits publics ».

Les pratiques d’optimisation fiscales sont favorisées, on le sait, par la complexité de notre système. Le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires de 2007 ainsi que celui d’octobre 2010 relèvent qu’en France les difficultés demeurent, car notre pays a accumulé des retards en matière d’évaluation.

Tout est, à mon avis, affaire de volonté, et cette volonté le Gouvernement ne l’a visiblement pas pour peser sur d’autres leviers qui seraient efficaces économiquement, justes socialement et fiscalement, des leviers qui ne feraient pas porter sur les plus modestes et sur les collectivités le poids de la dette et du déficit public, alors même que le taux d’effort des uns et des autres est déjà très important.

Il n’est pas normal, Mme Bricq l’a rappelé tout à l’heure, que le taux implicite d’imposition des entreprises françaises soit en moyenne de près de 18 %, soit 16 % de moins que le taux facial, et de 8 % pour les entreprises du CAC 40.

À cet égard, les chiffres concernant l’accélération des dépenses fiscales créées depuis 2006 sont inquiétants. Voilà la réalité. Voilà les chiffres de l’attentisme et du dogmatisme politique de ce gouvernement !

Parallèlement, des comportements scandaleux sont constatés. Ils ne sont pas suffisamment combattus, je me dois de le répéter ici.

Je pense à ces géants du CAC 40, qui font, certes, honneur à la France, qui ont, certes, engrangé, d’après les journaux du matin, 42 milliards d’euros de bénéfices, en hausse de 87 % sur un an, mais dont le comportement est, pour le moins, non vertueux, puisque, en quatre ans, les effectifs des quarante groupes ont diminué de près de 40 000 personnes.

« Le transfert de dettes du privé vers la sphère publique, la crise grecque, l’attaque de notre monnaie, nous ont rappelé l’ardente nécessité de mener une politique vertueuse sur le plan de nos finances publiques. Nous devons désormais nous atteler à réduire les déficits publics ». Voilà ce que vous rappeliez, monsieur le ministre, à l’Assemblée nationale.

Mais Lao Tseu l’a dit : « Nommer n’est pas définir ». C’est déjà sans doute avoir fait une partie du chemin que de définir les problèmes et les objectifs. Mais si une partie du chemin est faite, la tâche n’est pas pour autant accomplie.

S’il y a bien un marqueur de ce gouvernement, c’est celui des grandes déclarations. La solidarité, la croissance et la justice sociale ne se décrètent pas, elles se créent. Nous vous avons proposé des pistes, de nombreuses pistes d’action en ce sens. Je n’en ai rappelé que quelques-unes.

Mais la résistance gouvernementale est intense ! Je me demande encore dans quel but. Ce n’est pas, à mon avis, dans l’intérêt général des Français. C’est pourquoi nous ne pourrons pas voter ce projet de loi de finances pour 2011.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Monsieur le ministre, parmi nos différends, nous trouvons bien évidemment le rôle des institutions publiques, et plus spécialement celui de l’État et des collectivités territoriales, ainsi que la question fiscale.

Précisément, ce soir, un constat retient tout particulièrement mon attention : alors que la fiscalité de l’État s’est modernisée, notre fiscalité locale demeure à la traîne, indépendamment du recours à la valeur ajoutée pour asseoir une part de la nouvelle contribution économique territoriale.

Nous sommes en face d’une dualité d’autant plus grave que toute une série de raisons entretiennent l’action locale. Citons, bien évidemment, en premier lieu, l’impératif de la croissance économique, les nouvelles attentes et les besoins de la population, les transferts de l’État, les déficits de celui-ci – transfert et déficit étant bien évidemment liés -, la production de normes nationales diverses, à quoi j’ajouterai la règle, tout à fait justifiée, de l’équilibre budgétaire local, les partenariats que l’État lui-même engage. Et je ne résiste pas au plaisir de citer la construction européenne, car je suis intimement convaincu que, dans les années qui viennent, nous aurons un impôt européen qui aura nécessairement des répercussions sur les collectivités territoriales.

Ma conclusion est simple : notre fiscalité locale, communale notamment, ne peut rester ce qu’elle est, pour des raisons de cohérence, de cohésion et d’efficacité.

Dans nos collectivités territoriales, indépendamment de nos efforts, il y a un risque évident de divorce entre le citoyen et le contribuable. Il prend sa source dans la complexité, l’opacité, les inégalités de notre système fiscal, le sentiment d’injustice qu’il génère et, bien sûr, le décalage qui existe entre les missions de nos collectivités et un système fiscal attardé.

Nous sommes au cœur de la confiance et de l’esprit d’entreprendre.

Il est important que nous allions à l’essentiel. C’est la raison pour laquelle, monsieur le président de la commission des finances, je vous propose, au nom de mon groupe, de prendre le temps, au cours des mois qui viennent, de consacrer une partie des travaux de notre commission à un état des lieux approfondi de notre fiscalité locale.

Je reprends, monsieur le président, une formule très juste que vous avez employée hier : « Si vous voulez réformer, mettez de la lumière ».

Ce n’est pas en perpétuant, comme nous le faisons ici, au Sénat, ou à l’Assemblée nationale, la course échevelée des amendements que nous progressons. Dresser un état des lieux, le rapport public du Conseil des prélèvements obligatoires de mai 2010 nous y invite et nous y aide en mettant en exergue des grandeurs importantes.

Globalement, le budget des collectivités territoriales représente 11 % du produit intérieur brut, soit, en 2008, 21, 8 % des dépenses publiques totales. Cette part croît ; elle n’était, en effet, que de 17 % en 1982.

Par-delà ces chiffres, et tous ceux que vous connaissez, il faut apprécier l’action et le rôle des collectivités territoriales. Ils seront d’autant plus positifs que les ressources mobilisées reposeront sur des bases modernes, justes, en adéquation avec la réalité économique d’aujourd’hui, la capacité contributive des intéressés et les besoins des territoires.

État des lieux, disais-je. Permettez-moi de citer quelques thèmes d’analyse et d’approfondissement.

La fiscalité locale représente 47, 6 % du financement des collectivités territoriales, dont 36, 8 % à la charge des contribuables locaux, le reste étant assumé par l’État, donc par les contribuables nationaux. Voilà, me semble-t-il, l’une des preuves de l’obsolescence de cette fiscalité. « Produit voté », « produit payé », « produit perçu » ne sont plus en correspondance.

Cette situation est-elle acceptable au plan de la transparence et de la responsabilité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Poser cette question n’est pas évacuer le rôle de l’État en tant que garant du pacte républicain, de l’équité et de la solidarité.

Que penser de la valeur locative ? Les évaluations de 1970 sont encore en vigueur. Ces bases, on en conviendra, ne reflètent plus la réalité du marché immobilier d’aujourd’hui. Voyons où en sont les estimations, les surestimations, les sous-estimations. Comment jouent « les éléments de confort » dans les immeubles de construction récente classés « habitations à loyer modéré » ? Pourquoi la loi de janvier 1990 prévoyant une application en 1997 n’a-t-elle pas eu de suite ? Nous savons que c’est non pas pour des raisons techniques, mais tout simplement pour des raisons de transfert.

La taxe d’habitation est un impôt spécialement français, sans équivalent dans les autres pays de l’OCDE. Que valent les différents coefficients qui ne tiennent pas compte de la capacité contributive des redevables ? Cette affirmation mérite d’être peaufinée, car nous savons qu’à partir d’un certain temps la taxe d’habitation est progressive et à partir d’un autre seuil, elle devient dégressive.

Appréhendant la taxe d’habitation, monsieur Fourcade, je ne peux pas ne pas citer ce que nous avions décidé à l’Assemblée nationale il y a déjà vingt ans : la taxe départementale sur les revenus, taxe mort-née ! J’aimerais retrouver le débat que nous eûmes à l’époque.

Les taxes foncières ont l’avantage d’être localisables, immobiles et prévisibles. Elles permettent à la collectivité de retirer le bénéfice de ses actions qui valorisent le foncier. Que penser cependant de leur assiette, de son calcul, de sa capacité à appréhender la valeur du bien concerné, de sa dynamique ? Que penser du partage individuel-collectif que les taxes foncières sont censées opérer ? Dans une période de tension économique, il est intéressant de se demander en faveur de quels accueils elles jouent : résidentiels ? industriels ?

La jeunesse de la contribution économique territoriale ne nous empêche pas d’évaluer le dispositif. Notre rapporteur général a justement mis en cause son coût.

Monsieur Marini, vous vous êtes interrogé sur le contexte de la création de cette contribution. J’ai remarqué ce matin que, sans citer, vous aviez fait allusion à cet environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Hier, notre collègue Joël Bourdin, rapporteur spécial des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », a fait des remarques pertinentes sur certaines exonérations.

Mes chers collègues, je ne m’étendrai pas sur la péréquation. C’est une nécessité. Nous connaissons les égoïsmes qu’il faut vaincre dans ce domaine. Des questions sont à poser.

La péréquation peut-elle s’accommoder d’une compensation générale à l’euro près ?

Je suis intimement convaincu que, lorsque l’on parle de la compétence « solidarité territoriale », les ressources affectées à ce titre au département ne permettent pas, aujourd’hui, une péréquation nécessaire.

C’est à partir de cette mise à plat que je vous propose, monsieur le président de la commission des finances, que nous pourrons débattre et reconstruire, en dépassant les généralités.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Elles ont politiquement, cependant, leur importance, car c’est toujours à partir de grands principes que l’on bâtit un édifice durable.

Devons-nous conserver un système fiscal local ? Je le pense, mais je sais que certains, aujourd’hui silencieux, pensent le contraire.

Quel lien ce système fiscal local doit-il avoir avec le système fiscal national ? Quelle doit être la part de la mixité ? Que peut-on attendre des redevances ? Un système fiscal local doit-il avoir une fonction redistributive ? Quel impact doit-il avoir sur l’économie ?

Je voudrais terminer sur une observation.

Nous parlons beaucoup de convergence fiscale avec l’Allemagne. Je ne souhaite pas que l’action publique nationale et locale soit victime d’une approche comparative, comptable et formelle. Il y a très certainement des convergences à opérer, y compris sur des projets économiques communs, bilatéraux ou européens.

Mais, monsieur Marini, vous avez fait, il y a quelque temps, une déclaration très juste. Je vous cite : « Le taux des prélèvements obligatoires est un agrégat trop complexe qui rend impossible toute comparaison entre les pays européens, faute d’une autorité comptable indépendante au niveau communautaire ».

Précisément, monsieur le rapporteur général, quelle est la grande différence entre la France et l’Allemagne ? L’Allemagne a conservé un secteur manufacturier, de production important. Alors que, de 2000 à 2008, la part de ce secteur dans la valeur ajoutée en Allemagne demeurait stable, aux alentours de 29 % ou 30 %, elle est passée chez nous de 22 % à 16 % sur la même période.

Toute politique de recherche et développement, toute politique d’innovation n’a de sens que si elle est en correspondance avec une politique de production.

L’Allemagne a construit un compromis social fondé sur la maîtrise des coûts salariaux et le maintien de l’emploi : la part des salaires dans la valeur ajoutée a diminué et le salaire réel par tête a baissé, alors qu’il a progressé dans le reste de la zone euro ; par ailleurs, le licenciement automatique ne fait pas partie de l’ordinaire allemand.

M. le rapporteur général de la commission des finances s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Je retrouve la décentralisation et une différence majeure entre nos deux pays : les Länder jouent un rôle déterminant en matière d’innovation, de recherche, d’exportation ; ils peuvent compter avec des entreprises moyennes très fortes, qui, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, ne sont pas nécessairement affectées par l’impôt sur les sociétés, car elles sont soumises à un type d’impôt différent.

C’est par loyauté que nous devons étudier au fond ces différents points.

La fiscalité partagée fournit 60 % des ressources des Länder et 17 % de celles des communes ; en France, nous en sommes à 6, 5 %, la moyenne des pays de l’Union européenne étant de 20 %. Cette fiscalité partagée n’empêche pas les Länder d’être confrontés à de très grandes difficultés, notamment dans le domaine de l’éducation.

Nous ne sommes pas dans l’inconnu et devant une table rase : voyez le succès de nos technopoles ! N’oublions pas non plus les collectivités territoriales qui, faisant la démonstration de leur sens de l’anticipation, investissent dans les domaines économique, social et culturel, et qui, toutes sensibilités confondues, ont fait preuve d’un grand sens civique en prenant une part très active dans le plan de relance.

Dans l’état des lieux fiscal que je propose, nous ne devons pas oublier l’usage qui est fait de la ressource.

Le Conseil des prélèvements obligatoires évoquait, dans une formule très juste, « la pertinence du prélèvement fiscal local ». J’y crois avec vous !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier chacun d’entre vous de la qualité de vos contributions, qui nourriront vertueusement le débat que nous allons avoir sur ce projet de loi de finances.

Au préalable, je dois dire que je suis frappé par la différence d’approche entre les représentants de notre majorité et ceux de l’opposition.

D’un côté, il y a ceux qui, avec notre majorité, souhaitent que la France s’engage sur la voie de l’équilibre des finances publiques en agissant vraiment, réellement.

Certes, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, nous aurons des débats et des divergences d’appréciation sur tel ou tel aspect, sur la nécessité éventuelle d’aller plus vite sur tel point, moins vite sur tel autre, mais nous partageons indiscutablement un objectif commun, à savoir l’engagement durable dans une gestion vertueuse de nos finances publiques pour atteindre l’équilibre budgétaire. Et par là j’entends non pas ce point asymptotique vers lequel on tend sans jamais l’atteindre, mais bien un objectif politique fixe qui doit mobiliser l’ensemble de la puissance publique.

Mais, d’un autre côté, il y a ceux qui, avec les représentants de l’opposition, n’ont qu’un seul projet politique : augmenter les prélèvements obligatoires pour boucher des trous.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement

Cette méthode-là, mesdames, messieurs les sénateurs, serait dangereuse pour notre économie, menaçante pour la croissance et structurellement déprimante pour les Français, qui n’en peuvent plus.

Dans les dix-huit mois, nous aurons plusieurs rendez-vous. Mais, dès à présent, ce débat fait apparaître une vraie ligne de fracture, fait émerger des choix politiques différents sur la façon de réduire nos déficits.

La hausse généralisée des impôts n’est pas une solution adaptée, car la France souffre de la dépense publique. Parmi les pays de l’Union européenne, notre pays est désormais celui où le taux de croissance des dépenses publiques par rapport à la richesse nationale est le plus élevé.

Il faut quand même avoir à l’esprit qu’un taux d’imposition trop élevé nuit au consentement à l’impôt lui-même. Au-delà d’un certain seuil apparaît en effet un point d’inflexion à partir duquel l’acte fiscal, l’acte déclaratif et la participation à travers une contribution individuelle à l’effort de redistribution sous forme de services publics, d’investissements, de prestations, de solidarité, en un mot tout ce qui constitue, de près ou de loin, directement ou indirectement, le modèle français d’État providence, peuvent ne plus être acceptés.

C’est pourquoi nous devons réfléchir très subtilement à tout ce qui touche à l’impôt et à la fiscalité.

Il y aurait une part d’irresponsabilité à faire de l’augmentation des impôts un programme politique en soi.

S’agissant de l’effort budgétaire pour 2011, j’entends certains dire que notre budget est trop dur, tandis que d’autres considèrent que nous ne réduisons pas suffisamment vite les déficits.

Ce qui est sûr, c’est que nous privilégions un redressement raisonné de nos finances publiques en excluant à la fois les coupes aveugles dans la dépense et les hausses généralisées d’impôt. Comme l’a rappelé M. Dominati, nous visons un ralentissement et non une diminution du rythme de croissance de la dépense.

Cela m’a toujours fait sourire d’entendre dire que la France engageait un plan de rigueur. Le Gouvernement n’a jamais porté ce mot en bandoulière, tout simplement parce qu’il ne correspond pas à la réalité. Il n’en demeure pas moins que, pour la première fois dans l’histoire de nos finances publiques, le taux de croissance des dépenses publiques sera stabilisé.

En d’autres termes, pour être clair, le niveau de nos dépenses sera identique à ce qu’il était l’an passé, et c’est cela, la vraie révolution. L’économie ne sera pas négligeable.

Nous avons inscrit cette politique dans la durée puisque le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit une maîtrise de l’évolution du taux de croissance de la dépense publique pour les années 2011 à 2014.

Nous avons aussi écarté les hausses généralisées d’impôt, contrairement à ce qu’ont fait nos partenaires espagnols, portugais ou britanniques à travers les plans qu’ils ont mis en place.

Je vous le redis, mesdames, messieurs les sénateurs, vous ne trouverez pas trace de la moindre augmentation des prélèvements obligatoires dans le plan français : ni hausse de la TVA, ni hausse de l’impôt sur le revenu, ni hausse de l’impôt sur les sociétés. Malgré les efforts que nous devons faire pour réduire nos déficits, c’est un choix politique que nous assumons pleinement.

Nous réduirons en 2011 de 1, 7 point de PIB le déficit public. Du jamais vu ! Personne n’a jamais fait mieux auparavant. Certes, nous n’avions jamais atteint un tel niveau de déficit dans le passé, mais, cet objectif de réduction de 40 milliards d’euros du niveau du déficit public par rapport à la richesse nationale – c'est-à-dire de 60 % – nécessite des mesures cohérentes et la définition de priorités.

J’ai bien noté, monsieur le président de la commission, cher Jean Arthuis, monsieur le rapporteur général, cher Philippe Marini, monsieur About, vos interrogations sur la maîtrise de la dépense d’intervention. Nombre de ces dépenses relèvent de dispositifs de guichet, qui connaissent spontanément une dynamique forte.

Les règles transversales fixées par le Gouvernement – moins 5 % pour l’année prochaine – permettent de contrecarrer la dynamique de ces dépenses d’intervention, et c’est grâce à cette discipline que nous parvenons à geler les dépenses de l’État en valeur, hors dettes et pensions.

Cet effort est également sans précédent : si nous avions appliqué la même règle entre 2007 et 2010, nous aurions économisé en moyenne 3 milliards d’euros supplémentaires chaque année...

Parmi ces économies, monsieur le président de la commission, il y en a une qui est liée à la mise en place d’un mécanisme de péréquation sur le secteur HLM, pour 340 millions d’euros.

C’est bien d’une économie qu’il s’agit ; elle permettra, tout en préservant l’effort de l’État en faveur de la construction de logements sociaux, d’alimenter un fonds de solidarité destiné uniquement au financement de la construction, de la réhabilitation et du renouvellement urbain à hauteur donc de 340 millions d’euros par an.

Certes, c’est un effort pour le secteur HLM, mais celui-ci connaît une situation financière dans l’ensemble confortable : il dispose en effet de 6, 5 milliards d’euros de fonds propres et bénéficie d’aides fiscales ou financières à hauteur de 4 milliards d’euros par an. Ce n’est donc pas un effort démesuré.

Nous avons eu ce débat à l’Assemblée nationale, nous l’aurons au Sénat. J’ai bien noté les propos de François Rebsamen, par ailleurs maire de Dijon, au sujet de l’OPAC de sa ville : les situations ne sont pas identiques en tout lieu, mais la mesure que nous proposons vise non pas à remplir les caisses de l’État, mais à « re-flécher » les crédits vers la construction des logements sociaux et vers l’ANRU, qui contribue largement à l’amélioration du cadre de vie grâce à la rénovation de l’habitat social.

S’agissant plus particulièrement de la réduction des niches fiscales et sociales, j’ai entendu quelques critiques ici ou là, ce qui est bien normal. Il est vrai que le Gouvernement aurait pu choisir la facilité, n’ouvrir qu’un seul front en supprimant deux ou trois des niches les plus coûteuses. Cela aurait été certes plus simple, mais certainement défavorable à notre économie.

Au final, nous avons choisi un chemin de crête, plus difficile, plus exigeant, plus propice à susciter une addition de contestations, mais, en définitive, plus juste. Je le répète, l’effort de réduction des niches fiscales et sociales a consisté en priorité à supprimer les dispositifs dont l’efficacité ou la nécessité ne sont plus démontrées ou qui sont peu conformes au principe d’égalité devant l’impôt.

Le taux réduit de TVA sur la restauration ou l’exonération des heures supplémentaires ne font pas partie de cette catégorie, contrairement à ce que peuvent penser certains. C’est la raison pour laquelle nous n’y avons pas touché.

Pour être tout à fait complet, j’ajoute que, sur cette question de la TVA dans le secteur de la restauration comme sur bien d’autres, nous avons besoin de stabilité. Il s’agit là d’une mesure récente, réclamée par certains, contestée par d’autres. Laissons à ce dispositif le temps de produire les effets vertueux auxquels, nous, nous croyons.

Quant au « rabot », il est peut-être critiquable, mais, là encore, je n’ai pas entendu de meilleure proposition dans cet hémicycle.

Contrairement à ce qu’affirment certains, les ménages ne supporteront pas à eux seuls l’effort sur les niches fiscales.

Au passage, sachez, monsieur Dominati, que j’ai lutté contre cette expression de « niche fiscale », mais j’ai échoué ! §Le terme perdure, indépendamment de la réalité : pour l’État, une niche fiscale, c’est une dépense ! C’est bien la raison pour laquelle nous agissons presque exclusivement sur les sources de dépenses au sein de l’État.

Lorsque, pour « booster » tel ou tel secteur économique, pour favoriser l’emploi dans tel ou tel secteur d’activité, l’État accorde un avantage fiscal, il choisit de ne pas prélever une ressource fiscale ; il s’agit donc d’une dépense pour lui. Un autre moyen aurait été de créer une dépense budgétaire en accordant une forme de subvention.

Plus nous serons nombreux à rappeler que les niches fiscales sont en réalité des dépenses fiscales, mieux sera comprise et acceptée leur réduction, par vous-mêmes, je le souhaite évidemment, mais aussi et surtout par une majorité de Français.

Cet effort, je le répète, a été équitablement réparti entre les ménages et les entreprises : 37 % pour les premiers, 63 % pour les secondes.

Comme l’a rappelé M. le président de la commission, toute mesure fiscale repose in fine sur les ménages, directement ou indirectement, et la répartition entre les entreprises, d’un côté, et les ménages, de l’autre, a peut-être un caractère artificiel.

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Il n’en demeure pas moins que les entreprises ont tout loisir de répercuter ou non sur l’usager ou le consommateur les mesures dont elles font l’objet.

Madame Bricq, quand on formule une prévision de croissance, on ne doit pas être habité par le doute. Il est cependant clair qu’un certain nombre de paramètres doivent être retenus pour l’établissement d’un budget.

Je persiste à penser que notre hypothèse de croissance pour l’année prochaine, à savoir 2 %, n’est pas déraisonnable. Les taux de croissance des deuxième et troisième trimestres confortent sérieusement la position du Gouvernement en la matière, puisque, sur un rythme annuel, ce taux atteint 2 %. Nous croyons à la justesse de nos prévisions.

Monsieur Marc, madame Bricq, vous affirmez que le Gouvernement conduit une politique économique récessive. Permettez-moi de vous dire que les propositions d’augmentation des impôts qu’a faites le parti socialiste dans son semblant de programme alternatif, …

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je n’ai pas eu le temps de développer : attendez les amendements !

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

… si elles étaient appliquées, auraient, pour notre économie, un effet récessif à la fois immédiat et redoutable.

Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est une erreur de vouloir apprécier les effets redistributifs d’un système en s’en tenant aux seules mesures fiscales !

Comme vous le savez, en France, la réduction des inégalités passe essentiellement par les transferts sociaux, même si l’impôt y contribue. Dans France, portrait social, l’INSEE révèle que l’effort de redistribution est supérieur de 11 points, en 2009, à ce qu’il était en 2006 pour les personnes les plus modestes. Je pense que cette donnée statistique devrait être une source d’inspiration pour tous…

J’ai déjà évoqué cette problématique au cours de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en votre présence, me semble-t-il, madame Bricq. Du fait du système de redistribution du modèle français, les 20 % des ménages les plus modestes de France voient leurs revenus annuels augmenter, passant d’environ 7 000 euros à plus de 10 000 euros, tandis que les 20 % des ménages les plus riches voient les leurs baisser, passant de 53 000 euros en moyenne à 47 000 euros.

C’est pourquoi je combattrai, en tout temps, en tous lieux et en toutes circonstances, celles et ceux qui voudront montrer que la répartition est injuste. Ce n’est pas le cas !

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Ce budget aura pour fonction de protéger ce modèle de redistribution, en demandant un effort aux citoyens, mais sans augmenter trop fortement la pression. C’est ce qui a été fait pour les retraites, ce qui est proposé pour la gestion de la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, et, donc, ce que nous avons écrit, non pas en filigrane, mais en lettres fluorescentes, dans ce projet de loi de finances pour 2011.

S’agissant des collectivités locales, beaucoup d’entre vous – Éric Doligé et Jean-Pierre Fourcade, notamment – sont montés à cette tribune pour évoquer la proposition du Gouvernement de geler les dotations de l’État.

C’est évidemment une décision importante et, je dois à la vérité de le dire, elle était attendue depuis de nombreuses années. Au vu de l’importance du volume budgétaire que représentent les transferts de l’État aux collectivités locales, il n’était effectivement pas absurde qu’à un moment donné, dans une période particulière, le Gouvernement envisage un tel gel et ses modalités.

Conformément aux conclusions de la conférence sur les déficits publics – application de la norme « zéro valeur » aux concours de l’État aux collectivités locales, soit la simple application, à ces transferts, de la règle que se donne l’État –, mais en tenant compte des messages du Comité des finances locales, nous avons retenu un gel hors fonds de compensation pour la TVA.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cela vous est profitable : vous gagnez 220 millions d’euros !

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Cela signifie en clair que nous protégeons l’investissement des collectivités et que cette mesure n’est pas de nature à altérer ou à ralentir le rythme des politiques d’investissements publics, car, comme nous le savons tous, la commande publique produite par les collectivités locales est une source de soutien à l’activité économique.

Nous avons également retenu des mesures concernant le système de péréquation, qui ont été soutenues et défendues par M. le rapporteur général et par M. le président de la commission des finances.

Le dispositif de péréquation a été abondé, au cours de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, à hauteur de 150 millions d’euros supplémentaires par rapport aux dispositions initiales. Nous aurons naturellement l’occasion d’en débattre.

Par ailleurs, monsieur Doligé, j’ai pris note de vos remarques sur l’article 61 du projet de loi, relatif à la péréquation des droits de mutation à titre onéreux. Je ne doute pas que la discussion que nous aurons à ce sujet permettra de comprendre les difficultés que vous avez exposées.

Comme vous le savez, j’ai évoqué l’abondement du fonds de péréquation, hier à l’Assemblée nationale, en réponse à une question d’actualité. J’ai relevé que, selon le rapport de la mission présidée par Bruno Durieux sur les effets de la réforme de la taxe professionnelle, le fonds mis en place soulèverait des interrogations, notamment du fait de son caractère insuffisamment redistributif.

Une somme d’environ 350 millions d’euros a été budgétée pour irriguer ce fonds, mais je reste à votre disposition, mesdames, messieurs les sénateurs, pour en rediscuter avec vous ou pour évoquer les modalités d’application de ce dispositif et son apport en termes de redistribution.

Enfin, toujours sur la question des collectivités territoriales, nous devons porter un regard attentif à la situation des départements en difficulté ; nombreux ont été ceux, parmi vous, qui ont alerté l’attention du Gouvernement sur ce sujet. J’ai présenté hier matin, en conseil des ministres, un collectif budgétaire assez dense portant notamment sur la problématique de la mise en place d’un fonds de solidarité exceptionnel, doté de 150 millions d’euros et destiné à ces départements.

Les critères retenus, me semble-t-il, sont assez objectifs, puisqu’ils portent sur la moyenne du potentiel fiscal par habitant de l’ensemble des départements et la moyenne du potentiel fiscal par habitant du département concerné, le tout dans une enveloppe généralisée. Mais je suis naturellement ouvert à la discussion sur ce sujet qui, je n’en doute pas, retiendra l’attention d’un grand nombre d’entre vous.

En matière fiscale, j’ai relevé que certains d’entre vous, comme Thierry Foucaud ou Nicole Bricq, critiquaient le taux que nous avions arrêté pour l’impôt sur les sociétés, au motif qu’il serait insuffisamment élevé, notamment par rapport à ce qui se pratique en Allemagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je n’ai pas dit cela : j’ai dit qu’il était beaucoup plus faible !

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Je vous rappelle que les prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises françaises – impôt sur les sociétés et charges sociales – sont parmi les plus élevés, en comparaison avec ceux de nos principaux partenaires économiques.

Madame Bricq, vous considérez que l’impôt sur les sociétés français est plus élevé que l’impôt sur les sociétés allemand ?

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

J’attendrai les conclusions de la Cour des comptes pour me prononcer sur le sujet. Nous savons parfaitement que le modèle allemand repose sur une assiette large et des taux faibles, tandis que le modèle français est fondé sur une assiette étroite et des taux élevés.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous proposons justement une assiette large, en supprimant les niches ! Vous ne m’avez pas écoutée !

Debut de section - Permalien
François Baroin, ministre

Si nous nous rejoignons sur ce point, comme sur d’autres, nous serons ravis de vous accueillir au sein du grand chantier de la réforme fiscale annoncée par le Président de la République.

En outre, plusieurs sénateurs se sont prononcés sur la TVA à taux réduit dans la restauration, estimant qu’elle coûterait trop cher. Je ne reviendrai pas longuement sur ce sujet, que j’ai déjà évoqué, sinon pour rappeler que la mesure est récente, qu’elle produira ses effets, mais qu’il faut un peu de temps pour pouvoir démontrer sa pertinence et justifier qu’on l’ait sollicitée au niveau européen.

Quant à la suppression de certaines niches de la défiscalisation outre-mer – je pense au photovoltaïque –, j’ai entendu la préoccupation que vous avez exprimée au nom de la justice et de l’équité, mon cher Jean-Paul Virapoullé, avec le talent, la force de conviction, mais aussi l’esprit de responsabilité que chacun vous connaît et que, pour ma part, j’ai pu apprécier voilà quelques années.

Je crois que nous avons trouvé, là encore sur un chemin de crête avec deux versants nord, une solution de compromis à l’Assemblée nationale. Je la développerai devant vous et nous en reparlerons pour voir dans quelle mesure, si nécessaire, il faut la bonifier.

Sur le crédit d'impôt recherche, j’ai noté le soutien que Jean-Pierre Fourcade, dont je salue toujours chaleureusement l’expertise solide et fameuse, et Philippe Dominati ont apporté au dispositif actuel. Je les en remercie.

Les discussions sur ce point ont été particulièrement intenses à l’Assemblée nationale et le Gouvernement a veillé à préserver cet élément essentiel d’attractivité et de compétitivité du territoire, tout en cherchant à en maîtriser le coût. Les évolutions ont préservé l’essentiel d’un dispositif qui a fait ses preuves. C’était l’objectif du Gouvernement !

En vous remerciant une fois encore, mesdames, messieurs les sénateurs, d’avoir apporté votre contribution à cette discussion budgétaire, je souhaiterais conclure mon intervention en évoquant la réforme de la fiscalité du patrimoine.

Plusieurs d’entre vous se sont exprimés sur la nécessité de revoir cette fiscalité et c’est un débat que nous avons depuis plusieurs années. Le Président de la République et le Premier ministre se sont engagés à parvenir à un résultat au cours du premier semestre de l’année prochaine.

La réforme envisagée ne pourra pas se limiter à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune et du bouclier fiscal, et aura de multiples implications. Laissons-nous donc le temps de réfléchir et de nous poser les vraies questions !

Ce sera notre objectif en 2011, sachant qu’un rendez-vous parlementaire aura lieu, sur ce sujet, vers la fin du premier semestre de l’année prochaine, à l’occasion de l’examen d’un projet de loi de finances rectificative.

Dans l’attente, soyez assurés, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, de mon engagement tout au long de la discussion budgétaire pour soutenir et améliorer, avec vous, la cohérence de ce budget pour 2011, que j’ai qualifié de responsable, tout simplement, et que je suis fier de défendre devant vous.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je rappelle que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Patrick Courtois membre du Conseil national de la sécurité routière.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je voudrais indiquer au Sénat que 446 amendements ont été déposés sur les différents articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2011. Il convient donc d’organiser nos travaux, afin que chacun puisse prendre les dispositions nécessaires.

L’an passé, nous avions travaillé le vendredi soir et le samedi. Nous avions à examiner un nombre à peu près identique d’amendements et nous devions régler l’importante question de la réforme de la taxe professionnelle.

Cette année, compte tenu du volume significatif d’amendements à traiter, je souhaite que nous puissions prévoir de poursuivre nos travaux demain soir. Nous pourrons nous abstenir de travailler samedi et dimanche. En revanche, puisque la matinée de mardi matin est consacrée aux réunions des groupes, je suggère que nous avancions suffisamment dans la nuit de lundi à mardi pour voter l’article d’équilibre mercredi soir et pour être en mesure de commencer dès jeudi matin l’examen des crédits des différentes missions.

Voilà la proposition que je fais au Sénat, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

En ce qui concerne la première partie de votre proposition, monsieur le président de la commission, vous avez satisfaction et nous siégerons vendredi soir.

En ce qui concerne la seconde partie, c'est-à-dire la nuit de lundi à mardi, nous avons peut-être encore le temps d’aviser.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au vendredi 19 novembre 2009, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (110, 2010-2011). Examen des articles de la première partie.

Rapport (111, 2010-2011) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures vingt-cinq.