Monsieur le président, mes chers collègues, je suis heureux de vous présenter cette proposition de résolution préparée par M. Gérard Larcher, président du Sénat, qui vise à conforter une expérimentation dont le Sénat avait pris l’initiative : la législation en commission – une expression qui peut paraître exagérée, car c’est, bien sûr, l’assemblée tout entière qui adopte les textes de loi examinés selon cette procédure.
À cet égard, le Sénat a su innover, en sorte que, au mois de juillet dernier, lorsque le Président de la République a souhaité que cette procédure puisse être mise en œuvre dans les deux assemblées, nous n’avons pu que nous réjouir de faire ainsi école, en inspirant des réformes plus larges sur ce point.
La procédure de législation en commission a joué à six reprises, pour quatre textes de loi, dont deux textes de loi organique. Elle permet de délibérer en commission, mais publiquement et en présence d’un membre du Gouvernement, sur un certain nombre de textes.
Dans le cadre de cette procédure, chacun d’entre nous peut participer aux travaux de la commission, même s’il n’en est pas membre ; mais seuls les membres de la commission votent sur les amendements soumis à leur appréciation. Le texte élaboré par la commission est ensuite porté en séance publique, où il donne lieu à une discussion générale, mais, sauf exceptions circonscrites dans notre règlement, il ne fait pas l’objet d’amendements.
Pour apporter la garantie que cette procédure ne se généralise pas – car la règle commune doit rester, bien entendu, l’examen des amendements dans l’hémicycle –, un droit de veto est prévu. En effet, la mise en œuvre de la procédure de législation en commission est décidée par la conférence des présidents, où chaque président de groupe peut s’y opposer.
Il y a là un verrou radical pour éviter la généralisation de cette procédure extrêmement utile dans certains cas, mais qui, dans le cas de textes très importants, pourrait être préjudiciable au bon fonctionnement du Parlement et à la libre expression de chacune et de chacun d’entre nous par la défense de ses amendements dans l’hémicycle lui-même.
En outre, ce droit de veto peut être exercé par un président de groupe non seulement au moment où la conférence des présidents se prononce sur l’application à un texte donné de la procédure de législation en commission, mais aussi après la réunion de la commission au cours de laquelle le texte de la commission a été adopté.
En d’autres termes, la discussion d’un texte de loi peut démarrer dans le cadre de la procédure de législation en commission, puis reprendre son cours normal en chemin. En sorte que, si tel ou tel groupe est mécontent du texte de la commission, il aura une seconde chance après la réunion de la commission, tout étant remis en jeu devant notre assemblée. Je crois que ces garanties sont très importantes.
Certains voudraient qu’on aille plus loin – j’en ai auditionné plusieurs dans le cadre de la préparation de mon rapport –, mais il n’y aurait pas de consensus entre nous pour cela. Or, sur un sujet qui concerne chacune et chacun d’entre nous, il est bon tout de même qu’il y ait un consensus minimal.
Le projet de résolution ne sera probablement pas voté par les membres de tous les groupes, je crois que les concertations auxquelles le président du Sénat a procédé et les auditions qui ont suivi permettent de garantir ce consensus minimal sans lequel la réforme ne serait certainement pas souhaitable.
Je vous signale une innovation par rapport au système que nous avons expérimenté pendant trois ans : désormais, si vous adoptez la proposition de résolution modifiant notre règlement, nous pourrons scinder un texte en plusieurs parties, l’une examinée selon la méthode de la législation en commission, l’autre selon la voie normale, à condition bien sûr qu’elles puissent être totalement distinguées.
Nous verrons, si nous inscrivons cette possibilité dans notre règlement, dans quelle mesure elle correspondra réellement à un besoin. En tout cas, la faculté nous en serait ouverte, ce qui me paraît plutôt une bonne chose.
Telle est, monsieur le président, mes chers collègues, la réforme qui nous est proposée. Son adoption montrerait que le Sénat continue d’aller de l’avant pour moderniser ses méthodes de travail !