La séance est ouverte à dix heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Monsieur le président, lors du scrutin public n° 44 du 13 décembre 2017 portant sur l’ensemble de la proposition de résolution présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution et relative au développement du fret ferroviaire, M. Bernard Delcros a été considéré comme votant contre, alors qu’il souhaitait voter pour.
Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution visant à pérenniser et adapter la procédure de législation en commission, présentée par M. Gérard Larcher, président du Sénat (proposition de résolution n° 98, texte de la commission n° 135, rapport n° 134).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
Monsieur le président, mes chers collègues, je suis heureux de vous présenter cette proposition de résolution préparée par M. Gérard Larcher, président du Sénat, qui vise à conforter une expérimentation dont le Sénat avait pris l’initiative : la législation en commission – une expression qui peut paraître exagérée, car c’est, bien sûr, l’assemblée tout entière qui adopte les textes de loi examinés selon cette procédure.
À cet égard, le Sénat a su innover, en sorte que, au mois de juillet dernier, lorsque le Président de la République a souhaité que cette procédure puisse être mise en œuvre dans les deux assemblées, nous n’avons pu que nous réjouir de faire ainsi école, en inspirant des réformes plus larges sur ce point.
La procédure de législation en commission a joué à six reprises, pour quatre textes de loi, dont deux textes de loi organique. Elle permet de délibérer en commission, mais publiquement et en présence d’un membre du Gouvernement, sur un certain nombre de textes.
Dans le cadre de cette procédure, chacun d’entre nous peut participer aux travaux de la commission, même s’il n’en est pas membre ; mais seuls les membres de la commission votent sur les amendements soumis à leur appréciation. Le texte élaboré par la commission est ensuite porté en séance publique, où il donne lieu à une discussion générale, mais, sauf exceptions circonscrites dans notre règlement, il ne fait pas l’objet d’amendements.
Pour apporter la garantie que cette procédure ne se généralise pas – car la règle commune doit rester, bien entendu, l’examen des amendements dans l’hémicycle –, un droit de veto est prévu. En effet, la mise en œuvre de la procédure de législation en commission est décidée par la conférence des présidents, où chaque président de groupe peut s’y opposer.
Il y a là un verrou radical pour éviter la généralisation de cette procédure extrêmement utile dans certains cas, mais qui, dans le cas de textes très importants, pourrait être préjudiciable au bon fonctionnement du Parlement et à la libre expression de chacune et de chacun d’entre nous par la défense de ses amendements dans l’hémicycle lui-même.
En outre, ce droit de veto peut être exercé par un président de groupe non seulement au moment où la conférence des présidents se prononce sur l’application à un texte donné de la procédure de législation en commission, mais aussi après la réunion de la commission au cours de laquelle le texte de la commission a été adopté.
En d’autres termes, la discussion d’un texte de loi peut démarrer dans le cadre de la procédure de législation en commission, puis reprendre son cours normal en chemin. En sorte que, si tel ou tel groupe est mécontent du texte de la commission, il aura une seconde chance après la réunion de la commission, tout étant remis en jeu devant notre assemblée. Je crois que ces garanties sont très importantes.
Certains voudraient qu’on aille plus loin – j’en ai auditionné plusieurs dans le cadre de la préparation de mon rapport –, mais il n’y aurait pas de consensus entre nous pour cela. Or, sur un sujet qui concerne chacune et chacun d’entre nous, il est bon tout de même qu’il y ait un consensus minimal.
Le projet de résolution ne sera probablement pas voté par les membres de tous les groupes, je crois que les concertations auxquelles le président du Sénat a procédé et les auditions qui ont suivi permettent de garantir ce consensus minimal sans lequel la réforme ne serait certainement pas souhaitable.
Je vous signale une innovation par rapport au système que nous avons expérimenté pendant trois ans : désormais, si vous adoptez la proposition de résolution modifiant notre règlement, nous pourrons scinder un texte en plusieurs parties, l’une examinée selon la méthode de la législation en commission, l’autre selon la voie normale, à condition bien sûr qu’elles puissent être totalement distinguées.
Nous verrons, si nous inscrivons cette possibilité dans notre règlement, dans quelle mesure elle correspondra réellement à un besoin. En tout cas, la faculté nous en serait ouverte, ce qui me paraît plutôt une bonne chose.
Telle est, monsieur le président, mes chers collègues, la réforme qui nous est proposée. Son adoption montrerait que le Sénat continue d’aller de l’avant pour moderniser ses méthodes de travail !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.
La parole est à M. Yvon Collin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Monsieur le président, monsieur le président-rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, en d’autres circonstances, l’annonce d’une proposition de modification de notre règlement précédant une réforme constitutionnelle aurait pu paraître incongrue. La logique voudrait en effet qu’on adapte le règlement aux modifications introduites par des lois constitutionnelles ou organiques, plutôt que l’inverse.
Pourtant, dans le contexte d’un affaiblissement institutionnel continu du Parlement face à l’exécutif, et à l’approche de la prochaine révision constitutionnelle, cette démarche est la bonne.
Les députés emboîtent également le pas, après la publication, hier, du compte rendu des groupes de travail sur la réforme du fonctionnement de l’Assemblée nationale. Leur proposition n° 6, intitulée : « Simplifier l’examen des textes les plus consensuels en prévoyant un examen uniquement en commission », reconnaît d’ailleurs explicitement l’avancée de la réflexion sénatoriale en la matière. Les hommages venant de cette assemblée sont suffisamment rares pour être soulignés…
C’est pourquoi nous soutenons la proposition de résolution du président Larcher, qui illustre la capacité d’initiative de la Haute Assemblée et notre volonté de prendre une part active à l’élaboration de la future réforme constitutionnelle.
Près de dix ans après la dernière modification de la Constitution et plus de vingt-cinq ans après la publication d’un rapport du Conseil d’État condamnant les « bavardages » de la loi, les critiques contre le Parlement n’ont guère évolué.
Le renforcement des commissions permanentes dans la procédure législative n’a, à l’évidence, pas permis d’en faire disparaître les causes, comme nous l’anticipions à l’époque. Je pense notamment à l’inversion de la règle à la suite de laquelle le texte examiné en séance publique est le texte adopté en commission, et non plus le texte initial.
Face aux successives tentatives de rationalisation de la procédure législative, notre position est toujours restée constante : elle consiste à rappeler le rôle déterminant joué par le Parlement en faveur des libertés et du progrès social, en particulier sous la Troisième République, une référence à laquelle nous sommes, comme vous le savez, très attachés. Je reste, à titre personnel, fermement attaché à l’idée d’un Parlement fort, contre-pouvoir nécessaire à l’exécutif, ce qui n’est pas trop le cas aujourd’hui.
Or, derrière la volonté de rationaliser l’activité parlementaire, hier en réduisant les pouvoirs d’initiative et d’amendement des parlementaires, demain en limitant peut-être leur nombre, se cache souvent un antiparlementarisme qui n’ose pas dire son nom.
Comment expliquer, sinon, que l’on continue de réduire le temps des débats parlementaires, jugés trop lents, sans réduire en même temps les délais d’adoption des décrets d’application ? De même, comment expliquer que l’on contraigne notre droit d’amendement pour lutter contre l’inflation législative, alors qu’une part considérable des articles additionnels adoptés en séance sont d’origine gouvernementale ?
Il est pourtant évident que le premier obstacle à la qualité du travail parlementaire est notre difficulté à bénéficier, au même titre que le Gouvernement, de l’expertise de l’administration. En particulier, les rapports des inspections générales nous sont quasi inaccessibles, quand bien même nous apprenons leur existence.
Dans son dernier rapport d’activité, le Conseil d’État constate également la faible qualité des études d’impact annexées aux projets de loi. Cela ne fait en réalité que confirmer que la loi organique du 15 avril 2009, relative notamment à l’application de l’article 39 de la Constitution, est inopérante.
À bien des égards, il semble que les parlementaires soient devenus les fusibles d’un régime de gouvernance qui apparaît à la croisée des chemins, condamnés à porter la responsabilité de dispositions législatives sur lesquelles ils ont de moins en moins de prise.
La procédure de législation en commission vise à lutter davantage contre les effets que contre les causes des excès du parlementarisme rationalisé : elle risque d’agir comme un cautère sur une jambe de bois…
Elle n’a pas vocation à être fréquemment utilisée, en raison du maintien du droit de veto des présidents de groupe, comme cela a été rappelé. La précision est nécessaire : il s’agit d’éviter que, à l’avenir, une majorité sénatoriale moins respectueuse que l’actuelle des droits des groupes minoritaires et d’opposition ne puisse détourner cette procédure au profit d’un passage en force.
L’ouverture de la possibilité d’appliquer l’examen en commission à des parties de texte pose également problème. Elle n’a pas été soumise à l’expérimentation, et nous considérons qu’il serait peut-être plus sage de supprimer cette faculté, dans un premier temps.
De même, les règles de publicité les plus strictes devront être effectivement appliquées à la commission, où l’essentiel des débats se tiendra, dès lors que la séance publique sera réduite à un simple rôle cérémoniel.
Conformément à l’esprit de liberté qui est l’essence du groupe du RDSE, et dont nous sommes très fiers, plusieurs amendements ont été déposés par notre collègue Joël Labbé, qui propose d’étendre nos débats à la question d’une meilleure association des citoyens à nos travaux législatifs. Quelles que soient nos positions sur le sujet, ses propositions ont le mérite de montrer que certaines attributions que l’on voudrait donner à la chambre du futur sont déjà mises en œuvre au Sénat.
En définitive, le groupe du RDSE soutient totalement la démarche de modernisation de la procédure législative, tout en restant, monsieur le président de la commission des lois, prudent sur le fond.
Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Mme Catherine Troendlé remplace M. Thani Mohamed Soilihi au fauteuil de la présidence.
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe La République En Marche.
Madame la présidente, monsieur le président et rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, nous sommes appelés à nous prononcer sur la proposition de résolution, présentée par M. le président Larcher, visant à pérenniser et adapter la procédure de législation en commission.
Il faut, dès l’abord, se féliciter de cette volonté partagée de modernisation du travail législatif.
Disons-le sans ambages : cette initiative illustre aussi la capacité réformatrice de notre institution parlementaire.
En effet, s’il est dans l’esprit du temps de construire une représentation fallacieuse de notre Haute Assemblée en l’enfermant dans une inertie conservatrice infondée, le Sénat ne doit pas prêter le flanc aux critiques qui l’accablent et qui viennent interroger, à intervalle régulier, la pertinence institutionnelle du bicamérisme français.
Notre assemblée doit tout au contraire démontrer sa capacité à pointer empiriquement ses imperfections internes éventuelles, les mêmes qui risqueraient d’entacher la crédibilité de son travail.
Cette proposition de résolution s’inscrit parfaitement dans cette démarche. Elle permet à la conférence des présidents de décider que le droit d’amendement sur un projet de loi ou une proposition de loi ou de résolution s’exercera uniquement au sein de la commission saisie au fond. Dans ce cas, cette dernière pourra accueillir les sénateurs qui n’en sont pas membres, et ses travaux seront rendus publics, comme en séance.
Les amendements adoptés par la commission saisie au fond permettront l’établissement d’un texte qui ne sera pas examiné article par article en séance, mais fera l’objet d’une présentation courte et d’explications de vote des groupes, le scrutin portant sur l’ensemble du texte uniquement, sans possibilité d’en amender le contenu.
Par ailleurs, la proposition de résolution comprend une innovation qu’il faut noter : la possibilité de n’appliquer la nouvelle procédure qu’à une partie d’un texte, sur décision de la conférence des présidents.
Quant à la séance, seuls des amendements de coordination ou tendant à assurer le respect de la Constitution ou la correction d’une erreur matérielle pourraient être présentés, si nécessaire.
Voilà pour l’essentiel. Ici, mes chers collègues, le diable ne se niche pas dans les détails.
Cette proposition de résolution nous apporte la preuve, s’il en était besoin, que la procédure d’examen décentralisé en commission peut être revalorisée sans nécessairement réduire les parlementaires à leur seule fonction de tribuns ni tomber dans l’écueil d’une rationalisation excessive de la procédure parlementaire.
Plus que jamais, il paraît opportun de poursuivre la revalorisation du rôle déjà névralgique des commissions délibérantes, amorcée par la révision constitutionnelle de 2008.
S’agissant des levées de boucliers que la résolution pourrait susciter – il y en a toujours –, au motif qu’elle porterait en germe un antiparlementarisme décomplexé, il me semble utile de rappeler que le travail en commission est une phase technique d’élaboration de la loi, permettant d’apprécier au préalable la fiabilité normative des textes, avant qu’ils ne soient soumis à l’espace de confrontation politique que nous offre la séance publique. Les deux phases, loin d’être antinomiques, sont en fait complémentaires.
C’est d’autant plus vrai que les garanties prévues par la proposition de résolution sont de nature à apaiser les débats. En effet, des garde-fous ont été institués : chaque président de groupe disposera d’un droit de veto, qu’il pourra exercer non seulement en amont, lors de la réunion de la conférence des présidents, mais également après l’adoption du texte de la commission, pour un retour à la procédure normale.
Il conviendra tout de même de veiller à la bonne application pratique de ces dispositifs. En particulier, la transposition aux différentes commissions des règles de publicité applicables à la séance doit être assurée sans tarder.
En définitive, mes chers collègues, rendons justice à notre assemblée : sans revêtir nos déclarations d’un esprit corporatiste qui serait assurément malvenu, n’hésitons pas à faire connaître la qualité du travail parlementaire accompli dans nos murs !
Cette proposition de résolution, destinée à pérenniser une pratique qui a fait ses preuves, va dans le bon sens. Apportons-lui notre soutien, tout en restant vigilants sur les difficultés pratiques qui pourraient se faire jour ultérieurement.
Le groupe La République En Marche, pour sa part, soutient ce texte !
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Madame la présidente, monsieur le président et rapporteur de la commission, mes chers collègues, en 2015, une très large majorité du Sénat a voté l’expérimentation de ce qui était alors la procédure d’examen en commission, jusqu’au 30 septembre dernier.
L’objectif d’affaiblissement du pouvoir législatif – car il vous faudra bien un jour sortir des faux-semblants et admettre que c’est de cela qu’il s’agit ! –, un objectif prôné sans ambages par le nouveau Président de la République lors de son discours de Versailles du 13 juillet dernier, n’apparaissait pas encore dans toute son ampleur.
Depuis des années, la volonté est pourtant à l’œuvre de réduire la prérogative essentielle, selon nous, du Parlement : débattre de la loi, en prenant le temps de le faire, pour que l’intervention législative ne relève pas du simple travail d’enregistrement.
Notre combat, sur les travées du groupe CRCE, a toujours visé à préserver le droit à la parole, notamment, bien entendu, celui de l’opposition, sans laquelle le mot « démocratie » se vide de son sens ; mais aussi à empêcher que les assemblées parlementaires, dont la vocation même est d’être le législateur – ou plutôt la législatrice –, ne se transforment, j’y insiste, en vulgaires chambres d’enregistrement.
Alors que se termine le débat budgétaire, moment essentiel de l’année parlementaire, peut-on sans rougir affirmer que les droits du Parlement ont été maintenus ces dernières années ?
Peut-on continuer à berner nos concitoyennes et concitoyens en leur laissant à penser que la loi de programmation des finances publiques, non seulement d’inspiration européenne, mais transcription directe des directives de la Commission de Bruxelles, le traité budgétaire signé par M. Sarkozy et Mme Merkel et validé par François Hollande et la déclinaison de cet encadrement européen dans la Constitution – l’article 40 radicalisé par la LOLF – n’ont aucune incidence sur la réalité du pouvoir parlementaire ?
Aujourd’hui, M. Macron veut impulser une nouvelle étape ; il pousse à l’accélération des débats, à la réduction de la durée de la session législative, à la législation en commission, enfin.
Faisant mine de flatter le Parlement, il vante les mérites du pouvoir de contrôle des assemblées. Mais cette petite musique, celle du comité Balladur, qui rendit ses travaux sur la réforme des institutions voilà dix ans, fait perdre de vue l’essentiel : notre système démocratique, qui puise sa source – faut-il le rappeler ? – dans l’élan révolutionnaire de 1789, la force du Contrat social de Rousseau ou L ’ Esprit des lois de Montesquieu, c’est de conférer le pouvoir législatif aux représentants du peuple !
Notre opposition constante à la Constitution de 1958 trouve sa source dans l’affirmation du pouvoir présidentiel face au pouvoir législatif. Or, depuis le constat du « coup d’État permanent » dressé par François Mitterrand, la situation s’est aggravée au détriment des assemblées. En effet, l’inflation législative, la déferlante des normes européennes mêlant technicité et réformes essentielles et la montée en puissance du Conseil constitutionnel affaiblissent année après année le pouvoir des assemblées.
La révision constitutionnelle de juillet 2008 nous a fait franchir un pas important, par exemple en instaurant le discours du Congrès de Versailles, mais surtout en s’attaquant franchement au droit d’amendement. Ainsi, c’est depuis cette révision que le crédit-temps, véritable « 49-3 parlementaire », a été instauré à l’Assemblée nationale ; depuis lors, l’élaboration des textes au Palais-Bourbon a notablement perdu de sa substance.
La qualité du travail législatif s’y est à tel point détériorée que, jusqu’à présent, le Sénat, chambre élue indirectement par un collège de moins de 170 000 électeurs – faut-il le rappeler ? –, pouvait apparaître comme le gardien d’un travail législatif sérieux et surtout pluraliste.
La proposition de résolution, sur laquelle nous reviendrons en détail avec l’examen des amendements, tend à pérenniser et développer la procédure de législation en commission. Nous sommes hostiles par principe à l’instauration d’une telle procédure, qui éloigne de la séance publique et du débat pleinement pluraliste l’examen des projets ou propositions de loi destinés à cette procédure par la conférence des présidents.
Le Sénat semble s’enorgueillir d’anticiper les réformes de M. Macron. Nous estimons au contraire que le Sénat en particulier, et le Parlement en général, scie la branche sur laquelle il est assis en limitant le débat démocratique, transparent ou pluraliste, voire en lui barrant la route.
La résolution proposée paraît au surplus confuse, avec, par exemple, la législation partielle en commission. Nous avons noté les doutes et interrogations de M. le rapporteur, qui relève lui-même les difficultés qu’il y aura à gérer cette procédure, tant les mesures techniques et politiques sont imbriquées dans les textes. Ces doutes, j’espère que M. le rapporteur en tirera toutes les conséquences au moment de voter…
M. le rapporteur s’esclaffe .
Par ailleurs, comment sera géré l’agenda du parlementaire si des commissions qui légifèrent se tiennent parallèlement à la séance publique ? Et vous vantez l’ouverture des commissions à l’ensemble des élus, …
… mais seuls ont le droit de vote les membres de la commission !
Nous entendons bien, monsieur le rapporteur, que cette procédure sera limitée aux textes les moins importants. Mais qui décidera de cela à l’avenir ?
Quant au droit de veto d’un groupe sur la mise en œuvre de cette procédure, que nous avons contribué, avec d’autres, à préserver explicitement dans le règlement de notre assemblée, il s’agit d’une garantie réelle – je vous rejoins sur ce point, monsieur le rapporteur –, mais jusqu’à quand ? Le pluralisme sera-t-il respecté, avec la réduction envisagée du nombre de parlementaires ? Que deviendront les groupes d’opposition et minoritaires dans ce futur cadre ? Qui pourra exercer le droit de veto à l’avenir ?
En 2008, l’article 44 de la Constitution a été modifié pour permettre l’exercice du droit d’amendement en commission ou en séance publique. Mais, selon le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement de l’époque, notre collègue Roger Karoutchi, cette modification visait – je vous renvoie aux explications qu’il donnait lors de la séance du 23 juin 2008 – à empêcher le dépôt en séance publique d’un amendement déjà déposé en commission et rejeté. La révision a donc été détournée de son sens pour favoriser un dangereux déni de démocratie.
Notre groupe rejettera cette nouvelle procédure, d’autant que j’ai peu de doutes sur le sort qui sera réservé à nos amendements…
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Thani Mohamed Soilihi remplace Mme Catherine Troendlé au fauteuil de la présidence.
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour le groupe Union Centriste.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, monsieur le président-rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, l’article 44 de la Constitution dispose que le droit d’amendement « s’exerce en séance ou en commission ». Avant cette révision, les tentatives de simplification de la procédure législative s’étaient heurtées au principe constitutionnel selon lequel tout parlementaire exerce son droit d’amendement en séance.
En 2015, avec la nouvelle rédaction de l’article 44, nous avons pu intégrer dans notre règlement une « procédure d’examen en commission ». Cette innovation avait pour objet de n’autoriser l’exercice du droit d’amendement qu’en commission, et non plus en séance publique, afin de réduire le temps d’examen en séance publique.
Cette procédure nous paraît intéressante. Après qu’elle eut été appliquée à quatre reprises pour six textes différents, la conférence des présidents et, au-delà, les groupes politiques ont pu en dresser le bilan. Pour ce qui est du groupe Union Centriste, nous considérons que cette procédure a bien fonctionné. Nous sommes donc favorables à sa pérennisation, ainsi qu’aux modifications procédurales proposées par le président du Sénat. Sauf erreur de ma part, cette opinion est d’ailleurs assez largement partagée sur l’ensemble des travées de cette assemblée.
C’est parce que nous croyons en cette procédure que nous souhaitons qu’il en soit fait une application plus large à l’avenir. Cela a été rappelé par le président Bas, le recours à cette procédure est soumis à l’accord de tous les présidents de groupe. En ma qualité de président du groupe Union Centriste, je suis attaché à cet aspect du dispositif. En même temps, j’entrevois une possible dérive dans l’usage de cette prérogative.
Il est important de rappeler que ce pouvoir des présidents de groupe peut s’exercer à deux moments : tout d’abord, par une opposition préalable, exprimée en conférence des présidents, au recours à la procédure de législation en commission ; ensuite, en cours de discussion, en demandant le retour à la procédure normale. Cette seconde modalité appelle une observation : la menace de revenir à la procédure normale ne pourrait-elle pas constituer un moyen de pression en vue d’obtenir telle ou telle modification du texte ?
On aurait peut-être pu envisager un droit de veto uniquement au stade de la conférence des présidents.
La réforme du règlement que nous examinons aujourd’hui est importante, et nous la soutiendrons. Néanmoins, cela ne nous empêchera pas de formuler quelques remarques de caractère plus général.
Le Président de la République a annoncé que le Gouvernement allait nous soumettre dans les semaines ou les mois à venir un projet de révision de la Constitution. Si cette réforme devait être adoptée, il est fort probable que nous aurions besoin d’actualiser notre règlement, comme cela a été le cas après la révision de 2008. Peut-être aurions-nous donc pu attendre quelques mois supplémentaires, afin d’avoir un débat global sur notre règlement, d’autant que cette question du travail en commission a été expressément mise en avant par le Président de la République.
Une autre raison aurait pu nous conduire à différer quelque peu ce débat ou à élargir le champ de cette proposition de résolution : la disparition de l’IRFM, l’indemnité représentative de frais de mandat, le 1er janvier prochain.
J’attire l’attention sur le fait que, si la procédure d’examen en commission n’est plus opérationnelle depuis le 30 novembre dernier, une autre disposition de notre règlement ne sera plus applicable au 1er janvier 2018 : les retenues sur indemnités en cas d’absences répétées. Je rappelle que l’article 23 bis du règlement prévoit que, en cas d’absence au cours d’un même trimestre de la session ordinaire à plus de la moitié des votes solennels et réunions obligatoires de commission, la retenue est égale à la totalité du montant trimestriel de l’indemnité de fonction et à la moitié du montant trimestriel de l’IRFM.
Autrement dit, notre règlement fait expressément référence à l’IRFM comme base de calcul de cette sanction : je crains donc que cette disposition ne soit plus applicable à compter du 1er janvier prochain. Même si, heureusement, la quasi-totalité des membres de cette assemblée sont présents en commission comme en séance publique, ce qui a rendu inutile de recourir à cet ultime degré de sanction, il serait souhaitable, ne serait-ce que pour la crédibilité du dispositif, que nous en tenions compte dans notre règlement….
Sourires.
Sous réserve de ces quelques observations et commentaires, et non sans avoir salué l’important travail réalisé par le président de la commission des lois, le groupe Union Centriste soutiendra la proposition de résolution qui nous est soumise aujourd’hui.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Didier Guillaume applaudit également.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour le groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, nous sommes appelés à nous prononcer sur la proposition de résolution du président du Sénat visant à pérenniser et adapter la procédure de législation en commission, la phase d’expérimentation étant parvenue à son terme.
Comme l’a indiqué notre collègue Hervé Marseille, cette expérimentation a été rendue possible par une disposition introduite par la révision constitutionnelle de 2008 et mise en application grâce à la loi organique du 15 avril 2009, qui dispose que le droit d’amendement des parlementaires « s’exerce en séance ou en commission ».
Le texte qui nous est soumis tend à pérenniser la procédure de législation en commission en introduisant de surcroît une innovation, à savoir la possibilité d’examen partiel d’un texte selon cette procédure. En effet, un certain nombre de textes comportent une partie strictement politique, qui mérite d’être débattue en séance publique, et une partie plus technique, dont l’examen pourrait se dérouler en commission.
Cette proposition de résolution vise donc à renforcer l’efficacité parlementaire. Elle doit également, selon moi, être considérée comme une occasion de renforcer l’initiative parlementaire : sachant que la discussion des propositions de loi dans le cadre des niches réservées à chaque groupe s’effectue dans un laps de temps très contraint, des textes plus fournis et plus techniques pourraient être présentés si les présidents de groupe s’accordaient pour qu’un certain nombre de propositions de loi ne soient examinées au fond qu’en commission.
On peut aussi imaginer que la législation en commission puisse être utilisée en matière de transposition de directives européennes, domaine dans lequel nous avons du retard à rattraper, ou de mise en conformité rapide de lois avec des engagements conventionnels. Il s’agit en effet parfois de textes très techniques qui, pour cette raison, ne font guère l’objet de débats en séance publique.
Pour autant, nous sommes tous très attachés au temps législatif, qui permet de faire prévaloir la réflexion sur l’émotion et de sécuriser les citoyens. S’il importe de pouvoir agir rapidement quand cela est nécessaire, sachant que le dispositif proposé comporte des sécurités, il convient également d’assurer, grâce à un temps législatif raisonnable, un examen approfondi de la plupart des textes. Cela correspond à la vocation du bicamérisme.
D’autres grandes démocraties, telles que l’Italie, les États-Unis ou le Royaume-Uni, ont expérimenté ce que nous nous apprêtons à mettre en œuvre. Les expériences de ces pays font apparaître que les groupes parlementaires sont capables de se mettre d’accord pour examiner un certain nombre de textes selon une procédure fast track, ce qui permet finalement une bonne négociation sur le fond des textes.
Il faudra cependant veiller à parer à certains risques : un lobbying moins transparent, une publicité moindre des débats, un risque d’inflation législative s’il est recouru trop souvent à cette procédure. Nous devrons donc être vigilants, mais l’existence de ces risques ne doit pas nous conduire à ne pas soutenir la présente initiative. En effet, les droits de l’opposition et les droits garantis par la Constitution à chaque parlementaire sont respectés. À cet égard, le droit de veto accordé aux groupes politiques est essentiel pour éviter toute dérive.
Cela a été dit, chaque président de groupe aura la possibilité de s’opposer d’emblée au recours à la législation en commission pour l’examen d’un texte ou d’exiger le retour à la procédure normale lorsque cet examen aura déjà débuté. Je crois donc que, contrairement à ce que certains ont pu dire, les droits de l’opposition se trouveront renforcés. J’ajoute que, dans tous les cas, il y aura une discussion générale, qui permettra de mettre en évidence les clivages et les oppositions politiques, et que chacun pourra déposer des amendements. Je le répète, les garde-fous mis en place garantissent l’exercice des droits de l’opposition et des droits assurés à chaque parlementaire par la Constitution.
Le groupe socialiste et républicain soutiendra cette proposition de résolution mais défendra deux amendements, visant, l’un, à allonger le délai prévu pour le dépôt des amendements, l’autre, à instaurer un parallélisme des formes entre projets de loi constitutionnelle et propositions de loi constitutionnelle, seules ces dernières pouvant, pour l’heure, être discutées selon la procédure de législation en commission. Je ne saurais terminer sans saluer le travail réalisé par le rapporteur.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
La parole est à M. Dany Wattebled, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Monsieur le président, monsieur le président-rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, dès la réforme de son règlement de 2015, le Sénat avait mis à profit les avancées de la révision constitutionnelle de 2008 relatives à l’exercice du droit d’amendement en instituant la procédure d’examen en commission, cela à titre expérimental jusqu’au 30 septembre 2017.
La proposition de résolution déposée par le président Gérard Larcher vise à pérenniser cette procédure, tout en procédant à plusieurs adaptations pour en améliorer l’efficacité.
Malgré la dénomination de « législation en commission » donnée à cette nouvelle procédure, les textes qui en feront l’objet resteront votés en séance publique, même si le droit d’amendement ne s’exercera plus qu’en commission, laquelle sera en outre le lieu de l’essentiel des débats. Ainsi, il ne s’agit pas d’un mécanisme par lequel le Sénat déléguera entièrement son pouvoir législatif à une commission, à l’image de ce qui peut exister au Sénat italien.
Si le dispositif de cette nouvelle procédure a été élaboré à partir de celui de la procédure expérimentale d’examen en commission, il en diffère toutefois en innovant sur deux points. En premier lieu, il sera possible d’appliquer la procédure de législation en commission pour une partie seulement du texte. En second lieu, la possibilité sera ouverte de présenter, dans un cadre prédéfini, des amendements en séance sur les dispositions ayant fait l’objet d’un examen en commission.
Comme pour la procédure d’examen en commission, la décision d’engager cette nouvelle procédure reviendra à la seule conférence des présidents, sur proposition du président du Sénat, du président de la commission saisie au fond, du président d’un groupe ou du Gouvernement. Dans ce cas, le droit d’amendement ne s’appliquera qu’en commission.
Par ailleurs, il est expressément prévu que cette procédure ne sera pas applicable aux projets de révision constitutionnelle, aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale.
Comme dans le cadre de la procédure d’examen en commission, le Gouvernement, le président de la commission saisie au fond et tout président de groupe politique auront la faculté de s’opposer à la mise en œuvre de la procédure de législation en commission à deux stades : lors de la réunion de la conférence des présidents qui statue sur la question, tout d’abord ; à la suite de la réunion de la commission, c’est-à-dire au vu du texte adopté par la commission, ensuite.
De plus, la proposition de résolution prévoit la possibilité de demander un retour à la procédure normale pour une partie du texte seulement, que celui-ci ait fait l’objet de la procédure de législation en commission dans son ensemble ou uniquement pour certains articles.
Concernant l’organisation et la publicité des travaux de la commission, la proposition de résolution précise que les règles de publicité et de débat en séance sont applicables à la réunion de la commission, sauf dispositions contraires, et que le Gouvernement comme tous les sénateurs peuvent y assister. Ainsi, ces dispositions systématisent l’application des règles de publicité des débats en séance et permettent à tous les sénateurs qui le souhaiteront d’assister à la réunion de la commission.
Enfin, pour ce qui concerne l’exercice du droit d’amendement en séance, à la différence de la procédure d’examen en commission, la proposition de résolution prévoit d’autoriser le dépôt de certains amendements sur les dispositions ayant fait l’objet de la procédure de législation en commission, que celle-ci se soit appliquée à l’ensemble du texte où à une partie seulement. Seront seuls recevables les amendements visant à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec les textes en vigueur ou en cours d’examen ou avec le texte en discussion ou à procéder à la correction d’une erreur matérielle.
Mes chers collègues, cette procédure simplifiée doit nous permettre d’alléger la séance publique de discussions secondaires et, par là même, de gagner du temps.
En outre, grâce à l’instauration de garde-fous, le recours à cette procédure restera l’exception et ne deviendra pas la règle. Ainsi, chaque président de groupe disposera d’un droit de veto, qui pourra être exercé lors de la réunion de la conférence des présidents, mais également après l’adoption du texte de la commission selon la nouvelle procédure ; dans ce second cas, il y aura retour à la procédure normale pour la suite des travaux.
Cette double possibilité de veto est de nature à rassurer chacun. Le groupe Les Indépendants votera cette proposition de résolution !
Applaudissements au banc des commission s .
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, pour des raisons circonstancielles, la commission des affaires économiques n’a pas eu l’occasion d’expérimenter la législation en commission dans la formule appliquée entre 2015 et 2017. Je sais néanmoins que mon prédécesseur, Jean-Claude Lenoir, l’avait envisagée favorablement.
Le président Philippe Bas vient de rappeler excellemment la réussite de cette expérience. Je tiens à dire d’emblée que le groupe Les Républicains, dans un souci constant de moderniser nos procédures, votera avec enthousiasme la proposition de résolution présentée par le président Larcher dans la rédaction retenue par la commission des lois.
Quel est à nos yeux le principal objet de ce texte ? Il est d’éviter la redondance, que nous constatons tous trop fréquemment, entre l’examen en commission et l’examen en séance publique. Les mêmes amendements sont bien souvent examinés trois fois : lors de la réunion de commission pour élaborer le texte, lors de la réunion d’examen des amendements de séance et, enfin, lors de la séance publique elle-même. D’une certaine manière, en déposant et redéposant ces amendements, nous « tentons notre chance » à chaque stade de la procédure ! Ces redondances allongent les discussions parfois inutilement : le temps gagné grâce à leur élimination nous permettra d’approfondir d’autres débats qu’il nous arrive de devoir escamoter, faute de temps.
Mais le recours à cette procédure aura aussi pour effet de valoriser notre travail législatif en commission. Il permettra de rendre publique une partie de ce travail. Il nous assurera un dialogue direct et vivant avec le Gouvernement et rendra sa solennité à la séance publique, qui pourra davantage se concentrer sur les textes que nous jugerons collectivement comme plus importants d’un point de vue politique.
Nous n’avons aucune inquiétude à nourrir quant à d’éventuelles restrictions à nos droits d’expression parlementaire. Personne ne pourra imposer qu’un texte soit discuté selon cette procédure, puisque le Gouvernement, la commission saisie au fond et, surtout, les groupes politiques pourront s’opposer à sa mise en œuvre.
Il sera également possible de revenir à la procédure ordinaire, même lorsque la législation en commission aura été engagée pour un texte. Il n’est en effet pas toujours possible d’anticiper la teneur d’un débat sur un projet de loi, son caractère plus ou moins intense ou conflictuel. Prévoir cette possibilité de retour à la procédure normale est donc extrêmement sage, et quoi de plus simple que de la faire jouer après la réunion de commission qui aura permis de comprendre qu’une séance publique de plein exercice est nécessaire ?
Dans son rapport, le président Philippe Bas précise bien que le recours à cette procédure a vocation à demeurer exceptionnel.
Lorsque le président-rapporteur de la commission des lois m’a auditionnée, je lui ai fait part de ma principale observation : la législation en commission ne doit pas être une séance publique en « modèle réduit », mais une vraie séance de commission. La proposition de résolution prévoit en effet que les règles de publicité et de débat en séance publique sont applicables à la réunion de la commission, sauf dispositions contraires. Je pense pour ma part que les règles du débat doivent s’apparenter davantage à celles du débat en commission qu’à celles de la séance publique. Le débat en commission autorise des souplesses, des prises de parole multiples, des durées d’intervention à la discrétion du président et non pas fixes, parfois des retours en arrière s’apparentant à des secondes délibérations, qui contribuent à la vitalité et la spontanéité du débat.
Pour parler clair, nous débattons en commission sans papiers préparés ; notre cœur, notre expérience et notre volonté s’y expriment plus spontanément. C’est pourquoi j’ai indiqué une préférence pour des règles de débat inspirées de celles qui sont vigueur en commission.
Sur ce point, la commission des lois apporte à mon sens la bonne réponse : il convient de ne pas importer en commission ce que Philippe Bas appelle « le formalisme, l’apparat et la rigidité de la séance publique », selon un rythme ternaire que nous apprécions tous ! Comme il le précise, le plus simple est d’appliquer les règles de la séance à titre supplétif, comme un recours quand la conduite d’un débat devient difficile.
La réussite de cette procédure dépendra également de la pratique qui sera retenue.
À cet égard, il sera à mon sens difficile de partager les textes entre parties purement « techniques » et parties que l’on pourrait qualifier de plus « sensibles », qu’il conviendrait de continuer à soumettre à un double examen en commission et en séance publique. Je pense que ce partage reposera sur des critères un peu subjectifs, certaines parties en apparence techniques pouvant se révéler plus sensibles en réalité qu’on ne l’imaginait au départ. En outre, si la commission est appelée à examiner les différentes parties dans la même journée ou demi-journée, il sera sans doute difficile de faire comprendre que la présence du Gouvernement et la publicité des travaux sont réservées aux parties les plus techniques, donc peut-être les moins importantes, du texte.
Je considère par ailleurs que maintenir la tradition sénatoriale qui laisse le Gouvernement en dehors des séances législatives à huis clos est souhaitable. C’est une question non pas de principe, mais d’efficacité : sa présence pourrait être source de redondances.
J’ai tendance à penser que nous privilégierons l’examen de textes entiers, relativement courts, car il est peu probable que nos collègues souhaiteront siéger en commission plusieurs jours et plusieurs nuits pour débattre d’un même texte.
La législation en commission pourrait aussi concerner des textes dont on peut penser qu’ils seront relativement consensuels, suscitant le dépôt de relativement peu d’amendements et peu d’affrontements, peu de discussions en tout cas, ce qui n’empêchera pas un débat vivant. C’est le cas des projets de loi de ratification d’ordonnance lorsque le Sénat aura donné son accord à l’habilitation à légiférer par ordonnance, par exemple. Le rapport de la commission des lois évoque également les textes en fin de navette, faisant l’objet d’une deuxième lecture, notamment.
Le texte voté en commission selon cette procédure fera l’objet d’un débat simplifié en séance publique. Je souhaite insister sur un point : il sera nécessaire d’appliquer très rigoureusement les règles de recevabilité des amendements de séance. Je rappelle qu’il est prévu qu’amender un texte en séance publique soit possible dans trois cas seulement : assurer le respect de la Constitution, la coordination avec d’autres textes en vigueur ou en cours de discussion ou la rectification d’erreurs matérielles. Il faudra éviter que ne soient rouverts des débats de fond de façon détournée, comme cela a pu arriver par le passé à l’Assemblée nationale, à propos d’articles pourtant « fermés » par des étapes antérieures de la discussion.
Enfin, une question me paraît devoir être posée, comme l’a d’ailleurs déjà fait Mme Assassi : celle de la concomitance de la législation en commission avec d’autres débats. L’actuelle procédure d’examen en commission est exclusive de la séance publique, mais autorise la tenue d’autres réunions de commission. Comme il est probable que l’application de la procédure de législation en commission impliquera de siéger plus longuement en commission, cela pourrait conduire à reléguer les réunions de certaines commissions, et même la séance publique, en soirée et la nuit, alors même que ces instances n’auraient pas pu siéger durant la journée.
À première vue, cela ne paraît pas souhaitable, mais, d’un autre côté, la législation en commission étant ouverte à tous les sénateurs, le problème de l’éventuelle simultanéité des réunions se posera pour certains de nos collègues. Il faudra donc bien organiser l’agenda des travaux du Sénat en conférence des présidents !
Pour conclure, j’aimerais souligner que cette nouvelle procédure constitue une pierre de plus ajoutée à l’édifice de la réforme que nous avons entamée en mars 2015, qui se poursuivra avec la révision constitutionnelle que souhaite le Président de la République et à laquelle le Sénat travaille déjà dans un esprit que je qualifierai non pas de « constructif », mais en tous les cas de « novateur » !
Sourires.
Dans notre République, l’Assemblée nationale n’a plus beaucoup de marges de manœuvre, le Gouvernement ne lui en laissant guère. Elle doit toujours approuver l’essentiel des projets de loi. Cela n’a rien d’indigne : la logique majoritaire est l’un des fondements de la solidité des institutions voulues par le général de Gaulle. Depuis 1958, les Français ont rarement eu à s’en plaindre. Néanmoins, la contrepartie est que nos collègues députés ont de plus en plus tendance à multiplier les ajouts de détails dans les textes, faute de pouvoir peser sur les sujets de fond.
Nous, sénateurs, devons avoir une ambition plus large. Nous fustigeons l’inflation normative : nous devons donc faire la chasse aux lois obèses, aux lois bavardes, aux lois protéiformes, et recentrer les textes sur quelques prescriptions nécessaires. Ainsi que nous avons commencé à le faire sous l’impulsion des présidents Larcher et Bas, nous devons strictement appliquer les irrecevabilités, traquer les dispositions sans lien avec les textes en discussion et celles qui ne relèvent pas du domaine de la loi. Mes chers collègues, nous devons aussi nous discipliner dans l’usage de notre droit d’amendement, cesser de redéposer sans cesse les mêmes amendements, car la législation déléguée n’aura qu’un effet restreint sur nos débats de ce point de vue.
Bref, pour éviter que ne tombent les bras des grands législateurs sous le regard desquels nous sommes constamment placés dans cet hémicycle, le Sénat se doit d’être et de demeurer le gardien exigeant de la qualité de la loi !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Grand, Bouchet et Duplomb, Mme Garriaud-Maylam, MM. Vogel, Paccaud et Magras, Mme Procaccia, MM. Bonne, de Nicolaÿ et Chatillon, Mmes F. Gerbaud, Lherbier, Lanfranchi Dorgal, Lamure et Thomas et M. Pointereau, est ainsi libellé :
Avant l’article unique
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 23 bis du Règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« … – Pour l’application des alinéas 7 et 8, la participation d’un sénateur aux travaux d’une réunion consacrée à l’examen des amendements en commission selon la procédure de législation en commission définie à l’article 47 ter est prise en compte comme une présence en commission. »
La parole est à M. Gilbert Bouchet.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Avant l’article unique
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase du 1 de l’article 28 ter du Règlement, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Aucune dérogation n’est possible dans le cadre de la procédure de législation en commission prévue au chapitre VII bis. »
La parole est à M. Yvon Collin.
Le troisième alinéa de l’article 42 de la Constitution dispose que la discussion en séance publique en première lecture ne peut intervenir dans la première assemblée saisie qu’à l’expiration d’un délai de six semaines après le dépôt du texte. Pour la seconde assemblée saisie, ce délai est de quatre semaines après la transmission du texte.
Cette règle vise à garantir que les parlementaires disposent d’un délai raisonnable pour examiner chaque projet ou proposition de loi avant sa discussion.
À ces délais s’ajoute celui que prévoit le règlement de notre assemblée, devenu absolument nécessaire depuis la réforme de 2008 et l’entrée en vigueur de la règle de l’examen du texte de la commission en séance publique.
Ce délai vise à garantir, quant à lui, que les sénateurs disposent d’un temps raisonnable d’examen du texte entre sa modification en commission et sa discussion en séance publique. L’article 28 ter du règlement le fixe à deux semaines, avec possibilité de réduction à une semaine sur décision de la conférence des présidents.
Lorsque, comme c’est souvent le cas au Sénat, le texte est transmis par l’Assemblée nationale et que cette exception est appliquée, cela signifie que le rapporteur dispose de trois semaines pour élaborer sa version du texte, tandis que les autres sénateurs, s’ils veulent modifier celui-ci en commission, ne disposent en réalité pour ce faire que de cinq jours entre la réunion de la commission, qui se tient le mercredi, et la date limite de dépôt, souvent fixée au lundi suivant.
La fenêtre d’opportunité est donc extrêmement réduite.
Chacun ici mesure les implications de cette situation du point de vue de la qualité des amendements déposés, d’autant que les sénateurs autres que le rapporteur ne disposent pas de l’appui des services de la commission.
Nous proposons donc que, dans les cas particuliers de recours à la procédure de législation en commission, la réduction du délai de deux semaines à une semaine soit rendue impossible, afin de permettre un examen serein des modifications introduites par le rapporteur et, si besoin, de pouvoir demander le retour à la procédure normale.
Cette solution a l’avantage d’améliorer la qualité du travail législatif sans accroître pour autant le temps des discussions en commission ou en séance publique. Son application profiterait tant aux membres des groupes minoritaires et d’opposition qu’à ceux du groupe majoritaire.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet excellent amendement !
Sourires.
Je suis au regret de devoir vous dire, monsieur Collin, que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Avec la procédure de législation en commission, nous entrons dans un régime de souplesse : la conférence des présidents décidera.
Vous savez bien, mon cher collègue, que les délais de six ou quatre semaines – selon qu’il s’agit de la première ou de la seconde assemblée saisie – prévus dans le cadre du parcours ordinaire d’un texte de loi « sautent » dès lors que la procédure dite accélérée est engagée.
La meilleure garantie que nous aurons le temps de procéder à un travail de fond sur les textes examinés dans le cadre de la procédure de législation en commission – ce ne seront sans doute pas les plus complexes dont nous aurons à délibérer – tient au fait que la conférence des présidents devra décider du recours à cette procédure. Je crois qu’il faut lui faire confiance, sachant que le droit de veto de chaque président de groupe garantit, de manière absolue et radicale, que l’examen en commission ouverte permettra un travail de qualité.
Je préférerais, monsieur Collin, que vous retiriez votre amendement, au bénéfice de cette explication un peu empirique.
L’amendement n° 13 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 15 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Dantec et Mme Laborde, est ainsi libellé :
Avant l’article unique
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le chapitre IV bis du Règlement, il est inséré un chapitre IV … ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV …
« Association des citoyens à l’examen des projets et des propositions de loi
« Art. 28 … – Un espace participatif destiné à recueillir l’avis de citoyens est aménagé sur le site internet du Sénat après la désignation du rapporteur par la commission saisie au fond pour l’examen d’un projet de loi ou d’une proposition de loi.
« Les principales observations ainsi collectées ainsi que les propositions d’amendements recevables en émanant sont présentées par le rapporteur lors de l’examen des amendements en commission.
« L’ensemble des participations ainsi recueillies est publié conjointement au rapport. »
II. – Le I s’applique jusqu’au 31 décembre 2019.
La parole est à M. Stéphane Artano.
Nous discutons un texte visant à simplifier la procédure législative au Sénat en favorisant le débat en commission élargie, tout en amoindrissant le poids de la séance publique. Cette dernière sera réduite à sa plus simple expression : la correction des erreurs matérielles et l’examen des amendements de coordination.
Cela aura pour effet de rendre notre travail encore plus difficilement compréhensible par nos concitoyens, à moins, évidemment, que l’on établisse un certain formalisme pour les séances de commission et que l’on accepte, enfin, qu’elles soient filmées et diffusées en direct, au même titre que la séance publique, comme cela se fait d’ailleurs déjà à l’Assemblée nationale.
Dans cet esprit, nous présentons un amendement allant dans le sens du rapprochement avec nos concitoyens, afin de les inciter à participer à nos travaux en émettant des avis et des propositions sur une plateforme dédiée sur le site du Sénat. Il existe déjà des espaces participatifs sur notre site internet. Il conviendrait toutefois d’en améliorer l’ergonomie et, surtout, de publier les résultats de ces consultations dans nos rapports, afin de pouvoir en débattre dans l’hémicycle.
Cet amendement constitue avant tout un message adressé à nos concitoyens. Nous leur manifestons notre souhait de travailler avec eux ; nous leur indiquons que nous les écoutons et sommes à leur disposition pour leur expliquer les décisions que nous prenons.
En adoptant cette disposition, le Sénat montrerait sa capacité à adapter son fonctionnement aux nouvelles attentes des citoyens, qui ne se limitent pas à l’accélération de la procédure législative.
L’amendement n° 16 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Dantec et Gabouty et Mme Laborde, est ainsi libellé :
Avant l’article unique
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le chapitre IV bis du Règlement, il est inséré un chapitre IV … ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV …
« Association des citoyens à l’examen des projets et des propositions de loi
« Art. 28 … – À la demande du rapporteur désigné par la commission saisie au fond pour l’examen d’un projet de loi ou d’une proposition de loi, un espace participatif destiné à recueillir l’avis de citoyens est aménagé sur le site internet du Sénat.
« Les principales observations ainsi collectées, et les propositions d’amendement s’en inspirant sont présentées par le rapporteur lors de la présentation de son rapport et de l’examen des amendements en commission. »
La parole est à M. Stéphane Artano.
Cet amendement de repli, très similaire au précédent, prévoit que l’espace participatif soit ouvert seulement à la demande du rapporteur. Il ne comporte plus, en outre, la mention d’une publication dans le rapport des propositions soumises par nos concitoyens.
En l’état, ce dispositif s’apparente à la pratique actuelle de la Haute Assemblée. Il s’agit donc uniquement de consacrer cette pratique dans notre règlement, sans que cela puisse perturber nos modes actuels de fonctionnement.
Toutefois, le signal que nous enverrons à nos concitoyens si cet amendement est adopté est important : le Sénat simplifie sa procédure législative, tout en incitant les citoyens à participer à ses travaux.
À regret, j’exprime un avis défavorable. Je précise « à regret », car nous aimons tous les espaces participatifs. La commission des lois y recourt d’ailleurs régulièrement : cela a été le cas pour la réforme de la justice, donc sur un sujet qui n’était pas secondaire.
Cependant, monsieur Artano, nous n’avons pas besoin d’adopter l’un de ces amendements pour faire vivre des espaces participatifs. En revanche, si nous votions l’un ou l’autre, nous commettrions une inconstitutionnalité, ce qui serait regrettable pour la Haute Assemblée…
En effet, des amendements pourraient être déposés dans le cadre des espaces participatifs dont vous proposez la mise en place et ils devraient ensuite être discutés par notre assemblée. Or une telle disposition est inconstitutionnelle : selon le principe de la démocratie représentative, nos concitoyens n’ont pas le droit d’amendement. Nous, parlementaires, représentons la Nation et, avec le Gouvernement, nous disposons du monopole de l’initiative législative.
On peut certes envisager de faire évoluer cette doctrine, mais pour cela il faudra réviser la Constitution. Un exercice de révision constitutionnelle semble précisément pouvoir s’ouvrir dans un proche avenir : profitez-en alors, mon cher collègue, pour faire progresser vos idées !
Je ne rejoins pas M. le rapporteur dans ses conclusions. De fait, la législation en commission donnera au rapporteur un pouvoir bien plus important. L’espace participatif que nous proposons d’instaurer lui permettra de se forger une vision plus large des différentes pistes d’amélioration de la loi. À l’heure actuelle, nous recevons tous des propositions d’amendement de notre entourage, de personnes expérimentées qui nous fournissent un texte tout rédigé… C’est ainsi que, parfois, un même amendement est présenté à trois, quatre ou cinq reprises en séance.
Cet espace participatif permettra une transmission directe des propositions d’amendement aux parlementaires, par courriel. Offrant à des citoyens non organisés un espace de proposition, il permettra au rapporteur de disposer d’une vision plus générale du sujet examiné. Évidemment, il ne s’agit nullement de donner un droit d’amendement aux contributeurs. Tout restera totalement sous le contrôle du rapporteur. Nous prévoyons simplement que le rapport restituera la teneur des propositions et observations déposées dans l’espace participatif.
Alors que nous nous apprêtons à donner une plus grande place au travail en commission, ce serait faire œuvre utile que de mettre cet outil complémentaire à la disposition du rapporteur. En tout cas, notre proposition n’a rien d’anticonstitutionnel, car il n’est absolument pas prévu d’accorder un droit d’amendement aux citoyens via l’espace participatif.
Voilà une excellente idée, si excellente qu’elle n’est pas nouvelle ! L’espace participatif est un moyen que nous utilisons assez souvent. Il a été mis en œuvre, en particulier, par la commission des lois, et j’y ai eu recours à titre personnel, à l’occasion de l’examen de la loi dite Sapin II et de la proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la justice pénale. Nous avons alors ouvert un espace participatif et je puis vous assurer que nous avons lu et analysé l’ensemble des contributions qui y ont été inscrites. Je souhaite que nos concitoyens puissent par ce biais s’initier et participer au débat parlementaire, mais je dois dire que les expériences que j’ai tentées ont tout de même débouché sur une réelle déception, tant les contributions ont été peu nombreuses.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Le chapitre VII bis du Règlement est ainsi rédigé :
« Chapitre VII bis
« Législation en commission
« Art. 47 ter
« 1. – À la demande du Président du Sénat, du président de la commission saisie au fond, du président d’un groupe ou du Gouvernement, la Conférence des Présidents peut décider que le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement sur un projet de loi ou une proposition de loi ou de résolution s’exerce uniquement en commission, dans les conditions mentionnées aux alinéas 1 et 2 de l’article 28 ter.
« 1 bis. – La procédure de législation en commission n’est pas applicable aux projets de révision constitutionnelle, aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale.
« 2. – La procédure de législation en commission ne peut être décidée en cas d’opposition du Gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou d’un président de groupe.
« 2 bis. – La procédure de législation en commission peut être décidée sur certains articles seulement d’un projet de loi ou d’une proposition de loi ou de résolution.
« 3. – Sur la proposition du président de la commission saisie au fond, la Conférence des Présidents fixe la date de la réunion consacrée à l’examen des amendements en commission et à l’établissement du texte de la commission ainsi que le délai limite pour le dépôt des amendements en commission. Elle fixe également le délai limite pour le dépôt des amendements au texte de la commission en application de l’alinéa 1 de l’article 47 quater et, lorsque la procédure de législation en commission s’applique sur certains articles seulement du texte, pour le dépôt des amendements aux autres articles du texte de la commission.
« 4. – Les sénateurs et le Gouvernement sont immédiatement informés de la date de la réunion et des délais limite.
« 5. – Le Gouvernement et l’ensemble des sénateurs peuvent participer à la réunion.
« 6. – Les règles de publicité et de débat en séance sont applicables en commission, sauf dispositions contraires du présent article.
« 7. – Seules les motions tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité et la question préalable peuvent être présentées en commission. Leur adoption entraîne le rejet du texte et le retour à la procédure normale pour sa discussion en séance.
« 8. – Sans préjudice de l’alinéa précédent, à la fin de la réunion, la commission statue sur l’ensemble du texte. Le rejet du texte entraîne le retour à la procédure normale pour sa discussion en séance.
« 9. – Le rapport de la commission comprend un compte rendu détaillé des débats en commission.
« 10. – Le retour à la procédure normale peut être demandé, le cas échéant sur certains articles seulement du texte, par le Gouvernement, le président de la commission saisie au fond ou un président de groupe, au plus tard le vendredi précédant la semaine au cours de laquelle est examiné le texte en séance, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents.
« 11. – En cas de retour à la procédure normale, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance est celui fixé en application de l’alinéa 3, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents.
« Art. 47 quater
« 1. – Sur les dispositions faisant l’objet de la procédure de législation en commission, sont seuls recevables en séance, dans les conditions fixées à l’article 50, les amendements visant à assurer le respect de la Constitution, opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d’autres textes en cours d’examen ou avec les textes en vigueur ou procéder à la correction d’une erreur matérielle.
« 2. – Lorsque la procédure de législation en commission s’applique sur certains articles seulement du texte, il ne peut être reçu en séance aucun amendement qui remettrait en cause les dispositions faisant l’objet de cette procédure.
« 3. – La commission saisie au fond est compétente pour se prononcer sur la recevabilité des amendements et des sous-amendements dans les cas prévus au présent article.
« Art. 47 quinquies
« 1. – Lorsque la procédure de législation en commission s’applique sur l’ensemble du texte, aucune des motions mentionnées à l’article 44 ne peut être présentée en séance, sauf l’exception d’irrecevabilité. Lors de la séance, le Président met aux voix l’ensemble du texte adopté par la commission. Seuls peuvent intervenir le Gouvernement, les représentants des commissions pour une durée ne pouvant excéder sept minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes chacun, ainsi qu’un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder trois minutes, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents.
« 2. – Lorsque la procédure de législation en commission s’applique sur certains articles seulement, lors de la séance, le Président met aux voix l’ensemble des articles adoptés selon cette procédure avant le vote sur l’ensemble du texte. Seuls peuvent intervenir le Gouvernement, les représentants des commissions pour une durée ne pouvant excéder cinq minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe et un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder deux minutes et demie chacun, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents. »
Mes chers collègues, je n’ai pas pris la parole dans la discussion générale et je ne la reprendrai pas au moment des explications de vote.
Je ne m’opposerai pas à l’adoption de ce texte, même s’il représente, à mes yeux, une grave remise en cause du pouvoir des parlementaires.
Je ne m’y opposerai pas parce que des garde-fous ont été prévus : le président de la commission saisie au fond et les présidents de groupe peuvent s’opposer à l’utilisation de la procédure de la législation en commission ou y mettre fin. Ce droit de veto constitue une garantie, mais vous devez être tous conscients, mes chers collègues, que dans ce système un sénateur n’aura plus le droit de vote sur un texte qu’il aura proposé s’il n’est pas membre de la commission saisie au fond, sachant que le droit d’amendement en séance publique sera fortement restreint. Nous nous apprêtons donc à voter un texte qui diminuera notre pouvoir réel…
Nous pouvons le concevoir tant que la nouvelle procédure s’appliquera pour des textes de portée limitée, mais si un jour, pour des raisons que l’on peut imaginer, une dérive apparaît, le pouvoir de chacun d’entre nous se trouvera gravement remis en cause. Il aurait fallu accorder à l’auteur du texte le droit de vote en commission. Certes, des membres de son groupe appartenant à la commission saisie au fond pourront se faire son porte-parole, mais le tropisme de ladite commission s’exercera.
Je me suis entretenu de cette question avec M. Adnot au cours des auditions auxquelles j’ai procédé.
Je reconnais bien volontiers que, dans nos débats au sein de l’hémicycle, des amendements qui ne font pas l’objet d’un avis favorable de la commission peuvent être adoptés quand l’un ou l’une d’entre nous déploie suffisamment de force de conviction pour persuader un certain nombre de collègues bienveillants de prendre part à la séance au moment opportun…
Votre observation s’inspire de votre expérience de sénateur n’appartenant à aucun groupe politique, monsieur Adnot, mais on peut voir les choses d’une autre manière. La régulation des travaux de notre assemblée repose tout de même largement sur l’existence d’une majorité et d’une opposition, et le rôle des groupes politiques est très important. De ce point de vue, l’affirmation d’une majorité a tout de même une valeur démocratique.
Vous vous exprimez en tant que sénateur n’appartenant à aucun groupe, je vous réponds en tant que président de commission : chacun est dans son rôle. Je dois dire qu’il m’est parfois arrivé de me sentir pris dans une embuscade lorsque, nuitamment, les collègues favorables à un amendement se sont soudain trouvés assez nombreux dans l’hémicycle pour le faire adopter, ce qui a pu conduire à des incohérences dans le texte en discussion.
C’est pour cette raison que, tout en reconnaissant la valeur de votre argument, je n’ai pas souhaité lui donner de traduction juridique au travers des amendements que j’ai présentés sur cette proposition de résolution.
J’admets que c’est pour vous une perte de chances, mais je ne souhaite pas que l’on puisse porter atteinte à la cohérence et à l’équilibre d’un texte en tirant parti des circonstances d’un débat pour faire adopter, parfois dans une sorte d’improvisation, un amendement qui serait contraire à la position de la commission.
L’amendement n° 19, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Nous entendons réaffirmer notre opposition de fond à la procédure de législation en commission.
À l’heure où le Président de la République exprime avec force sa volonté de réduire les pouvoirs et les droits du Parlement, il nous semble risqué de lui donner des moyens de mettre en œuvre cette politique, aux dépens de la liberté de la Haute Assemblée.
En outre, nous relevons dans la proposition de résolution des incohérences ou des approximations qui mettent en question, selon nous, la crédibilité du dispositif présenté. Vous-même avez, monsieur le rapporteur, quelques doutes à cet égard. Vous soulevez, notamment, le caractère aléatoire et parfois complexe de la délimitation entre mesures dites techniques et mesures plus politiques. La question de la recevabilité des amendements portant sur les dispositions examinées en séance publique n’est, par exemple, pas résolue de manière satisfaisante à notre avis.
Pour justifier une éventuelle extension du recours à la législation en commission, vous ouvrez à l’ensemble des sénatrices et des sénateurs la réunion de la commission saisie au fond. Mais seuls les membres de cette commission auront le droit de vote : peut-on dès lors considérer que le droit d’amendement de l’ensemble des sénatrices et des sénateurs est respecté ? La question mérite d’être débattue.
Une autre interrogation porte sur l’arbitraire de l’organisation des débats de commission, laissée à la discrétion du président ou de la présidente de celle-ci. Ce sera donc une législation à géométrie variable, sans droits préétablis pour l’opposition, en particulier. Le respect du pluralisme, alors que les petits groupes ne comptent qu’un ou deux membres dans chaque commission, est aussi loin d’être assuré.
Enfin, nous avons obtenu le rétablissement explicite du droit de veto pour les présidents de groupe. C’est une garantie, mais seulement pour aujourd’hui. Qu’adviendra-t-il demain si, du fait de la réduction du nombre de parlementaires et du maintien d’un mode de scrutin imparfait, l’opposition n’est plus représentée sous forme de groupes ? Dans la situation de recomposition politique que nous connaissons, cette hypothèse n’est pas absolument aberrante.
Toutes ces objections nous conduisent à proposer la suppression de ce projet d’instauration de la procédure de législation en commission.
Je ne conteste pas la cohérence de la position de votre groupe, monsieur Ouzoulias. Pour autant, au cours de la discussion générale, l’intérêt de cette nouvelle procédure, qui encore une fois n’est pas appelée à se substituer dans une large mesure à la procédure normale, a été clairement mis en évidence. Par ailleurs, et surtout, il ne faut pas oublier que, à tout moment, un président de groupe pourra mettre fin à l’utilisation de la procédure de législation en commission. Tout est dit !
L’avis de la commission est évidemment défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
ou de résolution
La parole est à M. Yvon Collin.
Le champ d’application de la procédure de législation en commission est une question essentielle. Fallait-il le limiter à certains types de textes dès lors que le droit de veto des présidents de groupe était consacré ?
Dans sa décision du 11 juin 2015, le Conseil constitutionnel a considéré que certains textes ne pouvaient se voir appliquer cette procédure, en raison de leur soumission à des dispositions particulières du règlement : les projets de loi constitutionnelle, les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Cela revient finalement à reconnaître que pourraient se faire jour des dérives dans l’application de cette procédure.
Dès lors qu’aucun obstacle juridique ne nous empêche de réduire un peu plus le champ d’application de la procédure de législation en commission au-delà des limites fixées par le Conseil constitutionnel, le cas particulier des résolutions mérite d’être évoqué, puisque celles-ci ne constituent pas, à proprement parler, des dispositions législatives.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Je reprends l’argument avancé à l’instant par M. Pillet : le droit de veto accordé aux présidents de groupe empêchera une application de la procédure de législation en commission qui pourrait être jugée politiquement inopportune.
L’amendement n° 4 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 2 est présenté par MM. Leconte, Sueur, Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 5 rectifié est présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Après la première occurrence du mot :
projets
insérer les mots :
et aux propositions
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l’amendement n° 2.
La proposition de résolution prévoit qu’il ne peut être recouru à la procédure de législation en commission pour les projets de révision constitutionnelle, les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Cela s’explique par le fait que ces trois types de projets de loi ne donnent pas lieu à l’élaboration d’un texte en commission.
Toutefois, afin d’assurer un parallélisme des formes entre projets de loi constitutionnelle et propositions de loi constitutionnelle, nous proposons d’élargir cette exception à ces dernières, même si en pratique, nous le reconnaissons, il est probable que le président d’un groupe demandant l’inscription d’une proposition de loi constitutionnelle à l’ordre du jour souhaitera que ce texte soit discuté en séance publique.
La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 5 rectifié.
Notre entêtement à vouloir mettre sur le même plan projets et propositions de loi constitutionnelle procède de la volonté de défendre les droits du Parlement que j’ai exprimée dans la discussion générale.
Le rééquilibrage institutionnel entre le Parlement et l’exécutif nécessite en premier lieu que les parlementaires refusent d’intérioriser les limites de la portée de leur action. Imagine-t-on quelque gouvernement que ce soit reconnaître à une proposition de loi une valeur supérieure à celle d’un projet de loi ?
Cette résistance passe par l’octroi des mêmes garanties procédurales à l’examen des textes constitutionnels, que ceux-ci soient d’origine gouvernementale ou parlementaire.
Si je l’ai fait, c’est par devoir !
L’approche des auteurs de ces amendements est cohérente : puisque les projets de loi constitutionnelle ne peuvent pas faire l’objet de la procédure de législation en commission, pourquoi les propositions de loi constitutionnelle ne bénéficient-elles pas de la même exception ? La question est légitime.
En fait, il y a une raison relativement simple à cette différence.
Dans le cas d’un projet de révision de la Constitution émanant du Gouvernement, la commission n’adopte pas de texte et l’on examine en séance le texte gouvernemental. Cela rend absolument impossible l’application de la procédure de législation en commission.
En revanche, les propositions de loi constitutionnelle donnent bien lieu à l’établissement d’un texte par la commission. Dès lors, le recours à la procédure de législation en commission pourrait se concevoir. Toutefois, s’il peut se concevoir juridiquement, il est inconcevable sur le plan politique, cela va de soi.
Si nous voulons éviter de faire une entorse à la règle générale selon laquelle seuls sont exclus du champ d’application de la procédure de législation en commission les textes qui ne donnent pas lieu à l’établissement d’un texte par la commission, nous devons rejeter ces amendements. Cela me paraît d’autant plus souhaitable que, sinon, il faudra aussi envisager des règles spécifiques pour l’examen des résolutions portant sur le règlement ou des lois organiques, supposées très importantes. On n’en sortira pas ! Là encore, il faut se dire que la seule vraie garantie est d’ordre politique : c’est le droit de veto accordé aux présidents de groupe ! Qui imaginerait que l’on puisse réviser la Constitution en utilisant la procédure de législation en commission ? Personne !
C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir rejeter ces amendements. Ils me sont sympathiques et sont inspirés par une vision exacte de l’importance des textes constitutionnels, mais leur adoption poserait un problème de cohérence.
M. Didier Guillaume. Votre brillante argumentation, monsieur le président de la commission, m’amène à penser que vous auriez logiquement dû exprimer un avis favorable sur ces amendements !
Sourires.
M. Philippe Bas, rapporteur. C’était mon premier mouvement, mais j’ai résisté !
Sourires.
Nouveaux sourires.
Réviser la Constitution, ce n’est tout de même pas rien ! Vous objectez que si l’on suivait notre proposition, les exceptions pourraient être nombreuses, mais exclure les propositions de loi constitutionnelle du champ d’application de la procédure de législation en commission, ce n’est pas une exception comme les autres !
Certes, la conférence des présidents est souveraine et un président de groupe pourra toujours mettre son veto. Nous sommes d’accord, et c’est pourquoi nous soutenons la proposition de résolution, mais y inscrire qu’aucun texte visant à réviser la Constitution ne pourra être débattu selon la procédure de législation en commission instituerait un verrou plus solide que celui de la conférence des présidents et du droit de veto des présidents de groupe. Cela aurait une portée symbolique forte.
M. Yvon Collin. Vous avez enterré ces amendements sous les fleurs, monsieur le rapporteur
Rires.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 6 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après le mot :
constitutionnelle,
insérer les mots :
aux projets ou propositions de loi organique,
La parole est à M. Yvon Collin.
–, que notre droit constitutionnel réserve également aux lois organiques des garanties procédurales spécifiques, en lien avec leur place dans la hiérarchie des normes. Pourquoi, dès lors, les soumettre à une procédure législative si confidentielle ?
Je n’ignore pas qu’une loi organique a déjà été adoptée selon cette procédure, en vue de dématérialiser le Journal officiel, sujet sensible s’il en est… Mais peut-on, d’une expérience si précisément consensuelle, tirer la conclusion que cette procédure serait utile en matière organique ? Je ne le crois pas.
Sourires.
Sur quatre lois adoptées en application de cette procédure, deux étaient organiques, notamment la célèbre loi sur la dématérialisation du Journal officiel. Il peut arriver que des dispositions de lois organiques n’aient pas une importance universelle…
Tout à fait, ma chère collègue !
Il peut arriver, donc, que de telles dispositions, techniques, aient leur place au sein de cette procédure. Ce n’est pas la même situation que pour la Constitution, où chaque disposition est importante.
Sous le bénéfice de cette explication, peut-être accepteriez-vous de retirer votre amendement, mon cher collègue ?
L’amendement n° 6 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 7 rectifié est présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville.
L’amendement n° 20 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié.
L’alinéa 8 de la proposition de résolution ouvre la possibilité de recourir à la procédure de législation en commission pour des parties de texte également. Nous nous opposons à cette possibilité pour diverses raisons.
Tout d’abord, cette faculté n’a pas été expérimentée dans le temps imparti par la précédente résolution. Compte tenu des nombreux problèmes techniques que sa mise en œuvre est susceptible de comporter, cette expérimentation aurait pourtant été très utile, me semble-t-il.
À l’heure où nous critiquons les lois « portant diverses dispositions en matière de », qui ne sont que des agrégats de dispositions disparates visant plusieurs objectifs parfois très éloignés, il est à craindre que ce « saucissonnage » – permettez-moi cette expression –, cette fragmentation de l’examen des textes selon différentes procédures aggrave cette tendance au salmigondis !
En la matière, le Parlement n’a d’ailleurs pas de leçons à recevoir du Gouvernement. Comme l’a relevé fort justement le président Larcher, un cinquième des amendements portant articles additionnels sont en réalité d’origine gouvernementale !
Je crois que l’amélioration de la qualité de la loi passera par une plus grande cohérence de l’ensemble des dispositions intégrées à un même texte, au service d’un nombre d’objectifs restreints. Tel n’est pas l’effet escompté de l’application partielle de la procédure de législation en commission.
Enfin, l’ouverture de cette possibilité réveille nos inquiétudes de voir cette procédure utilisée de manière plus fréquente qu’elle l’a été jusqu’à présent, soit quatre fois en deux ans. On peut en effet imaginer que des dispositions jugées consensuelles soient identifiées dans chaque texte soumis au Parlement.
Si les propositions de recours partiel à cette procédure se multipliaient, les présidents de groupes devraient systématiquement procéder à un examen minutieux des dispositions en cause avant même leur inscription à l’ordre du jour, ce qui n’est pas souhaitable compte tenu des délais déjà très restreints que j’évoquais plus tôt.
La législation en commission doit demeurer une procédure exceptionnelle, appliquée à un texte dans son intégralité.
L’une des principales innovations de cette proposition de résolution, par rapport à l’expérimentation qui s’est déroulée de mai 2015 au 30 septembre 2017, est d’autoriser une législation partielle en commission.
Un même texte pourra donc être amendé pour partie en commission, pour ce qui est des dispositions jugées techniques, par la commission saisie au fond, et pour partie en séance publique pour les dispositions jugées politiques et plus fondamentales.
Vous l’aurez compris, nous sommes en total désaccord avec ce principe, auquel vous consacrez, monsieur le président Bas, une pleine page dans votre rapport – la page 37. Vous y utilisez les termes « complexe », « difficultés » et « subjective » pour montrer, sans le dire, l’imperfection du système proposé.
Une question clef est, bien entendu, le caractère aléatoire de la classification des articles jugés techniques ou non. Nous l’avons vu à l’occasion de la loi Macron, ou encore de la première loi Travail, des dispositions jugées techniques peuvent être lourdes de conséquences sociales ou économiques.
Monsieur le président, nous nous étonnons du maintien d’un dispositif qui, apparemment, ne vous convenait pas. Il s’agit pourtant ici du respect d’un droit fondamental, le droit d’amendement, qui nécessite de prendre clairement ses responsabilités.
C’est ce que nous proposons en supprimant la législation partielle en commission.
La commission a estimé qu’un peu de souplesse ne nuirait pas, car certains textes peuvent être sécables et s’inscrivent en réalité dans la tradition ancienne des projets de lois portant diverses dispositions d’ordre social ou financier, ou relatifs à la législation du travail.
Certaines mesures ne posent pas de problème politique majeur et peuvent à ce titre faire l’objet d’un examen selon la procédure législative en commission. D’autres, qui n’ont strictement rien à voir entre elles, méritent au contraire un débat très approfondi, selon la procédure ordinaire.
C’est la raison pour laquelle la commission a estimé devoir émettre un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
J’ai retenu de la discussion générale, et plus particulièrement des propos de Mme Primas, que la Haute Assemblée devait se garder des lois redondantes, obèses, bavardes, etc.
Je partage tout à fait cette volonté, mais, pour ce faire, il faut avoir une intelligence complète de la loi et ne pas remettre à des commissions le droit de porter un jugement sur des aspects que l’on estimerait a priori techniques ; c’est au contraire en séance que nous devons, lorsque c’est possible, considérer que certains articles relèvent du domaine réglementaire et doivent être repoussés. Sinon, on estime qu’il y a deux possibilités d’examen, dont l’un est réalisé par une espèce de commission, avec un rôle subalterne, qui consisterait à émettre un avis technique extrêmement simple.
Mes chers collègues, je vous incite à voter cet amendement pour éviter les dérives qui ont été identifiées par Mme Primas.
Monsieur Ouzoulias, en effet, j’ai dit tout à l’heure en séance que j’émettais un certain nombre de réserves sur le découpage des textes, compte tenu de la transformation de certains débats techniques, qui deviennent contre toute attente extrêmement sensibles.
Toutefois, dans ce cas, M. le président de la commission des lois a prévu des garde-fous, qui permettent de revenir en arrière à l’issue de l’examen en commission. Ces éléments sont suffisamment forts pour que l’expérience soit tentée dans des conditions bien précises.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
la réunion
par les mots :
l’examen des amendements et au vote
La parole est à M. Yvon Collin.
Cet amendement vise à réserver un temps de discussion préalable à l’examen d’un texte en commission par la voie de la procédure de législation en commission aux membres de la commission saisie au fond.
En effet, plusieurs d’entre nous ont souligné les limites liées à la présence systématique du Gouvernement lors de l’examen du texte en commission, qui pourrait limiter la liberté d’expression des parlementaires soutenant la majorité gouvernementale. Les pratiques varient d’ailleurs entre le Sénat et l’Assemblée nationale, où le Gouvernement assiste plus régulièrement aux réunions des commissions, afin d’asseoir le fait majoritaire.
Les travaux issus des groupes de travail de l’Assemblée nationale suggèrent de systématiser cette présence dès le stade de la commission. Nous considérons au contraire que cette évolution aurait le défaut de rendre plus opaques les travaux parlementaires et pourrait donner lieu à des réunions informelles préalables dans les couloirs, comme c’est courant, paraît-il, au Parlement européen.
Bien que le Conseil constitutionnel se soit appuyé sur la mention de la présence du Gouvernement dans sa décision relative à la dernière modification de notre règlement, sa position n’est pas claire sur le caractère obligatoire ou non de cette présence lors des réunions en commission.
Pour notre part, nous sommes favorables à l’interprétation stricte de l’article 44 de la Constitution, selon laquelle la présence du Gouvernement n’est requise que pour l’examen des amendements et le vote.
Il est important que nous donnions à la séance de la commission se réunissant selon la procédure de la législation en commission toute la solennité nécessaire, en nous inspirant des règles d’organisation de nos débats dans l’hémicycle.
Nous ne concevons pas que le débat législatif puisse se dérouler en l’absence d’un ministre dans l’hémicycle. Cette présence doit aussi être obligatoire lorsque nous légiférons en commission, ce qui est très différent d’une réunion ordinaire. D’ailleurs, si les ministres exigeaient d’être présents lors de nos réunions de commission, nous serions obligés de les recevoir. Certains s’y sont essayés, mais, après avoir fait le bilan de leur participation à ces travaux, ils n’ont pas renouvelé l’expérience !
Sourires.
S’agissant de cet exercice tout à fait particulier, la séance est publique, le Gouvernement est là et nos débats sont filmés : nous nous inspirons au maximum du travail au sein de l’hémicycle.
C’est la raison pour laquelle, mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; en effet, je serais particulièrement désolé d’avoir à confirmer l’avis défavorable de la commission.
L’amendement n° 14 rectifié est retiré.
L’amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Après les mots :
texte de la commission
insérer les mots :
, hors des horaires habituellement réservés aux réunions des commissions permanentes
La parole est à M. Yvon Collin.
Cet amendement a pour objet de souligner les limites pratiques à l’application de la procédure de législation en commission.
Cette version de la résolution prévoit en effet que tous les sénateurs pourront y assister, y compris ceux qui ne sont pas membres de la commission saisie au fond.
Il serait nécessaire de prévoir que les réunions de la commission saisie au fond se déroulent à des horaires différents de ceux qui sont habituellement réservés aux réunions des commissions permanentes, c’est-à-dire le mercredi matin, afin que tous les sénateurs puissent effectivement y participer. Il s’agit là d’une limite logistique non négligeable.
La souplesse est nécessaire. Toutefois, je vous apporte tous les apaisements nécessaires, d’autant que cette question intéresse l’ensemble de nos collègues.
En tant que membre d’une commission autre que celle qui se prononce selon la procédure de législation en commission, vous participerez aux travaux de celle-ci un mercredi matin. Votre présence aura la même valeur pour le calcul du temps de travail parlementaire que si vous aviez siégé au sein de votre propre commission.
Mon cher collègue, la règle est déjà posée et nous avons déjà eu l’occasion d’expérimenter cette procédure depuis trois ans. N’ayez donc aucune inquiétude, tout a été prévu : la participation aux travaux d’une commission qui légifère ne vous pénalisera pas.
Je sollicite donc le retrait de cet amendement.
Sourires.
L’amendement n° 8 rectifié est retiré.
L’amendement n° 21, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 9, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Fabien Gay.
Dans la mesure où nous avons rejeté un précédent amendement, celui-ci n’a plus d’objet.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’amendement n° 21 est retiré.
L’amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … – Chaque amendement peut être défendu pendant deux minutes et demie.
La parole est à M. Yvon Collin.
La version actuelle de la résolution prévoit que les règles de la séance publique seront respectées en commission, mais supprime dans le même temps certaines dispositions qui figuraient dans la version du texte expérimentée depuis 2015.
Il est proposé de rétablir la mention explicite du temps de parole garanti pour défendre un amendement, ce qui permet de souligner par ailleurs les limites pratiques à l’observation exacte des règles de la séance au stade de la commission.
Le travail en commission est déjà régi par des obligations de temps de parole ; simplement, le président de la commission en use avec souplesse.
D’une part, nous n’avons pas besoin de préciser de nouveau ce qui existe déjà. D’autre part, cette règle – c’est tout l’avantage de légiférer en commission – n’a pas besoin d’être opposée à chaque orateur de manière aussi rigoureuse que pendant nos travaux dans l’hémicycle. Ainsi, la législation en commission permet à un dialogue plus souple de s’instaurer.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.
Cet amendement est extrêmement important. Nous savons tous comment les choses se passent en commission, notamment lorsque nous devons traiter mille amendements à la chaîne, dans des délais très restreints.
Sourires.
Puisque les choses ne se passent pas toujours comme en commission des lois, il faut renforcer la règle.
Cet argument confirme l’utilité de notre amendement, qui vise précisément à sécuriser le travail en commission. Sinon, nous risquons des frustrations et des contentieux, bref des difficultés.
Cet amendement est satisfait par l’alinéa 6 de l’article 49 du règlement, qui prévoit que « le signataire de l’amendement dispose d’un temps de parole de deux minutes et demie pour en exposer les motifs ». Cette disposition prévue pour la séance publique sera applicable à la réunion de la commission dans le cadre de la procédure de législation en commission.
(M. Ronan Dantec sourit.) Et manifestement vous l’êtes…
M. Ronan Dantec acquiesce.
Je suis moi aussi rassuré, donc je retire cet amendement, monsieur le président.
L’amendement n° 9 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 10 rectifié est présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville.
L’amendement n° 22 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 15
Remplacer le mot :
détaillé
par le mot :
intégral
La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié.
Si la réforme proposée vise à accélérer la procédure législative, elle ne doit pas aboutir à ce que les sénateurs qui n’ont pas été présents en commission ne puissent accéder à l’intégralité des débats. Nos concitoyens doivent pouvoir, comme c’est le cas d’un examen en séance, consulter le compte rendu intégral des débats.
Le présent amendement a donc pour objet de préciser que le compte rendu des débats en commission est intégral, et non pas détaillé. Il s’agit d’un amendement très important.
Ce très important amendement a été défendu par mon collègue, monsieur le président.
Un compte rendu détaillé de nos travaux en commission existe déjà, qui va bien au-delà du compte rendu analytique de séance. Il suffit amplement à informer le public de la réalité des propos qui ont été tenus.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 23, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 15
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un compte rendu analytique est publié au plus tard le lendemain de l’examen en commission d’un texte sous le régime de la législation en commission.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Si vous me le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 24.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 24, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, et ainsi libellé :
Alinéa 16
Supprimer les mots :
, sauf décision contraire de la conférence des présidents
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
L’amendement n° 23 a pour objet de faire en sorte que le compte rendu analytique soit, comme pour la séance publique, disponible le plus rapidement possible dans le cadre de la procédure de législation en commission, en particulier de législation partielle, pour en mesurer les effets potentiels sur les dispositions conservées pour le débat en séance publique.
L’amendement n° 24 vise quant à lui à apporter une précision importante lors de notre débat. Bien évidemment, nous approuvons que le retour à la procédure normale puisse être demandé par un président ou une présidente de groupe après l’examen en commission sur le régime de la nouvelle procédure de législation.
La fin de l’alinéa visé par notre amendement évoque la possibilité d’une opposition de la conférence des présidents. Cette opposition porte-t-elle sur le principe même du retour à la procédure normale ou sur le délai durant lequel ce retour pourra être demandé ? J’espère obtenir une réponse sur ce point.
L’amendement n° 23 vise à ajouter un compte rendu analytique. Or le compte rendu détaillé suffit largement, me semble-t-il.
L’amendement n° 24 a pour objet de supprimer la possibilité, pour la conférence des présidents, de modifier la date butoir afin de demander le retour à la procédure normale. Nous avons considéré que cette mesure rigidifierait inutilement les choses, alors que toutes garanties sont déjà apportées. De plus, ce retour à la procédure normale pourra être obtenu dans des délais raisonnables.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
Il me semble que, si l’on veut effectivement sécuriser la procédure de législation en commission, il faut instaurer le plus de garanties possible.
C’est l’objet de ces amendements, qui tendent à introduire un minimum d’exigence, de transparence et de rapidité grâce à la publication d’un compte rendu analytique. Cela pourrait rassurer ceux qui doutent de l’efficacité de cette procédure et garantir à tous la transparence. Il serait donc de bon esprit, me semble-t-il, d’adopter cet amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 3, présenté par MM. Leconte, Sueur, Guillaume et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Après le mot :
normale
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
la conférence des présidents ou le Sénat fixe la date de l’examen du texte adopté par la commission en séance publique ainsi que le délai limite pour le dépôt des amendements de séance.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
En cas de retour du texte en séance publique, une rigidité trop importante affecterait dans un certain nombre de cas le délai de dépôt des amendements, qui ne dépasserait pas les quelques heures, d’après la rédaction actuelle.
C’est pourquoi cet amendement vise à rétablir un droit effectif d’amendement en séance. En outre, la décision reviendra automatiquement à la conférence des présidents : celle-ci aura la sagesse de fixer un délai raisonnable permettant d’exercer un droit d’amendement qui pourrait être menacé si nous n’adoptions pas cet amendement.
L’amendement n° 25, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Remplacer les mots :
celui fixé en application de l’alinéa 3, sauf décision contraire de
par les mots :
ouvert et fixé par
La parole est à M. Fabien Gay.
Il s’agit d’un amendement de bon sens, sur lequel nous devrions tous nous retrouver.
Il serait étonnant que le délai de dépôt d’amendements sur un texte, en cas de retour à la procédure normale à la suite de la demande du Gouvernement, du président de la commission ou d’un président de groupe, ne puisse être rouvert. Le délai de dépôt prévu à l’article 3 pour l’examen en commission ne peut être conservé, sous peine d’empêcher concrètement le dépôt de nouveaux amendements, alors que le débat a pu évoluer durant ce délai.
L’amendement n° 11 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il ne peut être inférieur à une semaine à compter de la décision de retour à la procédure normale.
La parole est à M. Yvon Collin.
Dans son discours préliminaire sur le projet de code civil, Portalis, dont la statue nous regarde, déclarait : « Les lois ne sont pas de purs actes de puissance ; ce sont des actes de sagesse, de justice et de raison ».
La qualité du droit se dégrade et aggrave l’insécurité juridique pour nos concitoyens.
Mes chers collègues, nous concevons qu’il faille simplifier les normes ou, comme le recommande le Conseil d’État, que les amendements puissent faire l’objet d’une évaluation en termes d’impact, qu’ils proviennent du Gouvernement ou du Parlement.
Toutefois, le droit d’amendement mérite d’être préservé, alors que, dans sa grande sagesse bien connue, le Sénat parvient fréquemment à améliorer la qualité des textes soumis à son examen. La Haute Assemblée ne doit pas devenir une chambre d’enregistrement.
Si la réforme proposée offre la possibilité d’un retour à la procédure normale d’examen, elle ne garantit pas que les délais seront suffisants pour permettre aux sénateurs d’amender le texte, comme cela a été rappelé par les précédents orateurs.
Le présent amendement vise à préciser que le délai de dépôt des amendements ne peut être inférieur à une semaine.
Mes chers collègues, en réalité, le problème est déjà réglé !
La conférence des présidents, quand elle décide la mise en œuvre de cette procédure, prévoit, d’une part, la date de la séance publique, qui est déjà arrêtée et réservée, et, d’autre part, la date limite pour la présentation des amendements en séance publique.
J’ai dit tout à l’heure à la tribune, d’une manière trop brève sans doute, que la possibilité d’amender le texte en séance publique survivait par exception à la règle selon laquelle le texte est adopté intégralement en commission et que l’on n’y touche plus.
Plusieurs types d’amendements pourront en effet être présentés : des amendements visant à corriger une erreur matérielle, des amendements visant à se conformer aux exigences constitutionnelles si, par malheur, le texte adopté en commission était contraire à certaines dispositions de la Constitution, et des amendements de pure coordination.
Au moment où l’on décide de la mise en œuvre de la procédure, on décide donc aussi, pour le dépôt des amendements, d’une date limite que personne, parmi nos collègues, ne pourra ignorer.
En conséquence, les dispositions qui viennent d’être présentées ne sont pas nécessaires. J’ajoute que, si ces modifications étaient adoptées, elles risqueraient de poser une lourde difficulté.
Supposons que la commission compétente se réunisse un jeudi, puis que le président de l’un des groupes demande le retour à la procédure normale. L’ordre du jour de la séance publique ayant été fixé au préalable pour la semaine suivante, on ne pourra réunir la conférence des présidents que le vendredi, voire le samedi, ce qui n’est pas dans nos usages. En pareil cas, alors qu’une procédure rapide avait été adoptée, l’adoption du texte en question pourrait être retardée de manière totalement inutile !
Mes chers collègues, mieux vaut ne pas rigidifier la procédure : nous avons déjà suffisamment de garanties quant au délai de dépôt des amendements et quant à la date de la séance.
Monsieur le rapporteur, en la matière, le mieux est l’ennemi du bien et, à mon sens, si le Sénat n’adoptait pas au moins l’un de ces trois amendements, il s’exposerait à un risque constitutionnel.
Vous le savez, l’article 10 du nouveau règlement du Sénat permettra à chaque président de groupe de demander le retour à la procédure normale.
Cette demande devra être formulée au plus tard le vendredi précédant la semaine au cours de laquelle est examiné le texte en séance. Mais on peut tout à fait imaginer que, en vertu des décisions prises par la conférence des présidents, le délai limite de dépôt des amendements soit fixé au lundi matin. En conséquence, les sénatrices et les sénateurs ne disposeront que du week-end pour exercer leur droit d’amendement.
Certes, il n’est pas dans nos usages de réunir la conférence des présidents pendant le week-end ; mais ce n’est pas non plus l’usage de laisser seulement quelques heures aux sénatrices et aux sénateurs pour amender un texte appelé en séance publique selon la procédure normale, donc de manière totalement ouverte !
Refuser ces amendements, c’est donc attaquer notre droit effectif de déposer des amendements dans tous les cas. C’est la raison pour laquelle il faut assouplir le dispositif : dans le cas de figure que j’ai mentionné, la conférence des présidents doit pouvoir fixer un nouveau délai de dépôt d’amendements. En effet, les sénateurs ne se limiteraient pas aux modifications qu’ils auraient pu apporter lors d’une simple séance de lecture du texte de la commission.
Dès lors que la procédure normale est rétablie, c’est l’ensemble du texte qui doit pouvoir être amendé. Or la rédaction que vous proposez ne le permet pas systématiquement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Après les mots :
les amendements
insérer les mots :
n’ayant pas fait l’objet d’un examen en commission, dans les conditions mentionnées à l’article 47 ter, en particulier ceux
La parole est à M. Yvon Collin.
Mes chers collègues, il convient d’accélérer la procédure législative : nous sommes tous d’accord sur ce point. Toutefois, cette réforme ne doit pas aboutir à entraver de manière excessive le droit d’amendement, qui est prévu par la Constitution et constitue la principale expression du droit d’initiative du Parlement.
Les délais d’examen des projets et des propositions de loi étant d’ores et déjà courts, il est indispensable de permettre aux parlementaires de réfléchir aux sujets traités, afin de faire avancer le débat sur les points nouveaux qui peuvent se présenter en cours de discussion.
Entre l’examen en commission et le débat en séance, la réflexion se poursuit, et souvent elle mûrit. C’est pourquoi nous proposons d’élargir le droit d’amendement en séance pour permettre l’examen des amendements qui n’ont pas été étudiés en commission.
Alors que cette discussion touche à sa fin, M. le rapporteur aura certainement un beau geste : il émettra sans doute un avis favorable !
M. Philippe Bas, rapporteur. Mon cher collègue, n’abusez pas de ma réputation de tendresse !
Sourires.
Je ne puis émettre un avis favorable sur votre amendement, et croyez bien que j’en éprouve un profond chagrin.
Nouveaux sourires.
En effet, ces dispositions videraient de toute substance la procédure de législation en commission : elles permettraient de débattre dans l’hémicycle de tous les amendements qui auraient été précédemment rejetés !
Comment voulez-vous que je puisse soutenir un tel amendement ? J’émets donc, quoiqu’avec regret, un avis défavorable.
L’amendement n° 12 rectifié est retiré.
L’amendement n° 30, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Remplacer les mots :
qui remettrait en cause les
par les mots :
portant sur l’une de ces
La parole est à Mme Éliane Assassi.
À nos yeux, les dispositions du deuxième alinéa de cet article unique limitent le droit d’amendement sur les articles examinés en séance publique dans le cadre d’une législation en commission partielle.
En effet, en vertu de ces dispositions, « il ne peut être reçu en séance aucun amendement remettant en cause les dispositions faisant l’objet de cette procédure ». Cette rédaction nous semble trop restrictive : il serait impossible de proposer la suppression d’articles en séance publique si cette suppression avait un impact sur les dispositions techniques examinées en commission.
Il paraît plus conforme à l’esprit qui semble être celui du présent texte de ne pas accepter les amendements portant sur les articles abordés en commission.
Mme Éliane Assassi s ’ exclame.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 26, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Remplacer les mots :
La commission saisie au fond
par les mots :
La direction de la Séance
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Nous estimons que l’examen de la recevabilité d’un amendement visant des articles débattus en séance publique relève de la compétence de la direction de la séance.
C’est ce service qui, selon nous, est la garante d’une cohérence en matière de recevabilité des amendements. Il ne faudrait pas que l’on évolue vers une jurisprudence à géométrie variable selon les commissions concernées !
Madame Assassi, comme vous, j’ai beaucoup d’égards pour le service de la séance…
Toutefois, je dois vous rappeler la règle en vigueur : l’appréciation de la recevabilité des amendements relève d’une instance, non pas administrative, mais politique.
Je n’en doute pas, chère collègue. Mais vous voulez précisément transmettre à une instance administrative le soin de se prononcer sur l’irrecevabilité des amendements et, ainsi, de décider s’ils doivent être débattus ou non.
Je préfère que nous conservions notre règle traditionnelle, selon laquelle la commission saisie au fond se prononce sur la recevabilité des amendements. Mieux vaut que nous gardions cette responsabilité politique !
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 27, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 23, première phrase
Remplacer les mots :
aucune des motions mentionnées à l’article 44 ne peut être présentée en séance, sauf l’exception d’irrecevabilité
par les mots :
les motions mentionnées à l’article 44 peuvent être présentées en séance
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Le dépôt des trois types de motions que constituent l’exception d’irrecevabilité, la question préalable et la motion de renvoi en commission apparaît pleinement justifié dans le cadre de la procédure de législation en commission.
Madame Assassi, vous pouvez vous opposer à l’engagement de la procédure de législation en commission lors de la conférence des présidents : vous ne voudriez tout de même pas que l’on adopte une motion d’irrecevabilité après que tous les présidents de groupe ont donné leur accord ! Ce ne serait pas cohérent. Il faut savoir ce que vous voulez.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 28 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 23, dernière phrase
Remplacer les mots :
ne pouvant excéder sept minutes
par les mots :
de sept minutes au moins
les mots :
ne pouvant excéder cinq minutes
par les mots :
de sept minutes au moins
et les mots :
ne pouvant excéder trois minutes
par les mots :
de cinq minutes au moins
La parole est à M. Fabien Gay.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, nous vous l’avouons, nous avons découvert avec étonnement que la présente proposition de résolution accompagnait la sacralisation du débat en commission d’une réduction de temps de parole au titre des explications de vote.
En effet, l’expérimentation dénommée « procédure d’examen en commission », qui a pris fin le 30 septembre dernier, instaurait des explications de vote de sept minutes pour les groupes.
Curieusement, vous nous proposez désormais de réduire ce temps de parole, alors que vous appelez de vos vœux une extension de la législation en commission… Vous ouvrez même le droit, à la conférence des présidents, de réduire encore ce temps. Les explications portant sur des articles examinés en commission dans le cadre de la législation partielle auront pourtant valeur législative.
À notre sens, cette obsession de la réduction du droit d’expression des parlementaires est inquiétante, d’autant qu’une dangereuse course à l’échalote s’est engagée, en la matière, entre le Sénat et l’Assemblée nationale. En quoi réduire presque à néant le temps de parole des parlementaires, en quoi les empêcher d’étayer leur propos par le moindre argument politique permettrait-il de renforcer la démocratie ?
De telles dispositions n’ont rien d’anodin. Je le répète, elles participent d’une vaste entreprise : l’affaiblissement des pouvoirs du Parlement au profit d’un exécutif jugé seul efficace pour agir dans un espace mondialisé.
L’amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Collin, Requier, Arnell et Artano, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 23, dernière phrase
Remplacer le mot :
sept
par le mot :
dix
II. – Alinéa 24, dernière phrase
Remplacer le mot :
cinq
par le mot :
sept
La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Mes chers collègues, la défense de cet amendement sera ma dernière tentative d’attendrir le président de la commission des lois et d’obtenir sa clémence !
Sourires.
L’article unique prévoit que, lorsque la procédure de législation en commission s’applique sur l’ensemble du texte, le Gouvernement et les représentants des commissions peuvent intervenir pour une durée maximale de sept minutes. Lorsque cette procédure ne s’applique que sur certains articles du texte, leur temps de parole est limité à cinq minutes chacun.
Ces temps de parole demeurent insuffisants compte tenu de la technicité de certains sujets. Dès lors, il convient de permettre aux intéressés de s’exprimer plus longuement.
Le présent amendement tend à rétablir les temps de parole, tels qu’ils étaient prévus dans la version de la procédure qui a fait l’objet d’une expérimentation, en les portant respectivement à dix et à sept minutes. Je suis sûr que ces dispositions vont connaître un franc succès !
Nouveaux sourires.
L’amendement n° 29, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 24, seconde phrase
Remplacer les mots :
ne pouvant excéder cinq minutes
par les mots :
de cinq minutes au moins
et les mots :
ne pouvant excéder deux minutes et demie
par les mots :
de trois minutes au moins
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Il s’agit d’un amendement de conséquence, monsieur le président. Nous le considérons donc comme défendu.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article unique est adopté.
L’amendement n° 18 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Dantec et Mme Laborde, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
pérenniser la procédure de législation en commission
par les mots :
moderniser la procédure législative
La parole est à M. Stéphane Artano.
Mes chers collègues, nous avons, à mon sens, montré notre volonté de discuter des évolutions possibles de notre fonctionnement interne, et nous continuerons de le faire lors des discussions qu’appellera bientôt la révision constitutionnelle.
Notre but doit rester d’améliorer la qualité de la loi. Or cet objectif est presque contraire à celui de légiférer plus rapidement…
Chacun sait l’influence qu’ont acquise certains groupes d’intérêts dans le processus législatif, y compris au stade de l’élaboration des textes de loi, dans les arcanes ministériels. Une meilleure association de l’autre partie de la société civile, à savoir les citoyens, pourrait aussi être envisagée plus sérieusement par le biais d’outils numériques. Ces derniers ont été évoqués au cours de ce débat. Ils sont d’ailleurs déjà employés, y compris dans nos murs.
Vous l’aurez compris, la modernisation de notre procédure législative doit également nous conduire à examiner ces perspectives. Nous ne saurions nous contenter d’évoquer la rationalisation des discussions et la limitation des temps de parole.
Pour ce qui concerne cet amendement, j’espère, moi aussi, bénéficier de la tendresse légendaire du président de la commission des lois !
Sourires.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de résolution, je donne la parole à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
Monsieur le président, mes chers collègues, vous l’avez constaté à l’instant, lors du vote de l’article unique, nous soutenons la proposition de résolution présentée par M. le président du Sénat.
Or, monsieur le rapporteur, les deux amendements que nous avons déposés en vue d’améliorer ce texte n’ont pas reçu votre soutien : à l’évidence, la relation entre la commission et les élus de notre groupe est quelque peu asymétrique…
Nous voterons quand même le présent texte. Toutefois, je vous invite, ainsi que l’ensemble de nos collègues, à profiter de cette nouvelle procédure pour renforcer l’initiative parlementaire.
J’espère que, dès le début de l’année prochaine, le Sénat verra prospérer les propositions de loi que les groupes politiques déposeront au titre de leurs niches respectives, qui auront réellement vocation à faire avancer les choses et qui ne seront pas politiquement clivantes : ainsi, nous démontrerons que cette proposition de résolution est à même de renforcer l’initiative parlementaire dans le domaine législatif. L’enjeu, c’est de faire progresser la capacité du Parlement à proposer des textes de loi et à les adopter.
J’espère que, dans ce cadre, nous pourrons bénéficier de votre appui réel, monsieur le président de la commission. Je le répète, nous avons eu l’impression de vous soutenir davantage que vous ne souteniez nos propositions d’amélioration du présent texte.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Avant tout, je tiens à saluer le travail, excellent, comme à l’accoutumée, accompli par M. le rapporteur à titre personnel et, plus largement, par la commission des lois au sujet de cette proposition de résolution.
Avec le présent texte, nous trouvons un bon point d’équilibre, et le Sénat prouve une fois de plus qu’il sait se rénover et moderniser la procédure législative.
De toute façon, nous reviendrons sur cette question d’ici à quelques mois en examinant la révision constitutionnelle, dont le champ sera sans doute encore plus large que celui du présent texte. Pour l’heure, cette proposition de résolution montre que nous pouvons moderniser notre manière de fabriquer la loi.
Enfin, je tiens à rassurer celles et ceux de nos collègues qui ont manifesté quelques réticences : un double droit de veto est prévu, aux deux moments cruciaux. La procédure de législation en commission devra être autorisée ex ante, lors de la conférence des présidents, et le travail de la commission sera sanctionné ex post.
À mon sens, ce double droit de veto offre toutes les garanties nécessaires pour que la nouvelle pratique instaurée ne donne lieu à aucune dérive. Ainsi, les élus de notre groupe voteront le présent texte. D’après ce que j’ai pu entendre, de nombreux autres sénateurs s’associeront à eux !
Je souscris pleinement aux propos de Jean-Yves Leconte. Aussi, je me contenterai d’ajouter quelques mots, pour me réjouir, à l’instar de M. Retailleau, du gage de modernité que constitue le présent texte.
Conformément à une évolution observée dans de nombreux autres parlements, cette proposition de résolution nous permet de donner davantage de place aux commissions dans le travail législatif et dans le processus d’adoption des lois.
Les garanties nécessaires existent : il suffit qu’un seul groupe s’oppose à la procédure de législation en commission pour que celle-ci ne puisse pas être mise en œuvre.
Toutefois, cette démarche ne doit pas s’inscrire dans une logique que je vois prospérer aujourd’hui : à en croire un certain nombre de déclarations, il faudrait aller plus vite, toujours plus vite, et simplifier la procédure toujours davantage. §Ainsi, il serait souhaitable que la procédure accélérée devînt la procédure de droit commun.
Monsieur le président de la commission, je dois vous le dire, je suis totalement opposé à cette idée. Le temps de la loi mérite toute l’attention, tout le travail et tout le tamis des différentes lectures : grâce à ces précautions, la loi, que nul ne peut ignorer, est peaufinée et précisée mot à mot, ligne après ligne. C’est là qu’est notre travail de législateur.
Affirmer que la précipitation serait une bonne chose, c’est nier le travail accompli par le législateur. Le temps de la loi n’est pas forcément celui de l’exécutif ; c’est le temps qu’il faut pour que la démocratie fonctionne, en donnant au Parlement tout le rôle qui est le sien, dans l’intérêt public et dans l’intérêt de la Nation.
Je tiens à remercier toutes celles et tous ceux qui ont pris part à ce débat.
Au nom du groupe du RDSE, j’ai défendu un certain nombre d’amendements. Ces dispositions ont obtenu des succès d’estime, à défaut d’être adoptées… Néanmoins, elles ont nourri le débat ; sans doute l’ont-elles enrichi ; peut-être même ont-elles permis à M. le rapporteur de donner un certain nombre de précisions à propos d’un texte somme toute complexe.
M. le rapporteur le confirme.
Mes chers collègues, je l’avoue, j’ai tué le suspense en annonçant dès la discussion générale que les membres du groupe auquel j’appartiens voteraient le présent texte : nous le voterons, bien sûr, même s’il n’a pas été amendé comme nous le souhaitions. Mais nous resterons vigilants quant à son application.
Cette proposition de résolution est un gage de modernité ; à cet égard, je m’associe aux propos de Jean-Pierre Sueur. Je le répète, l’ensemble des élus du RDSE votera le présent texte.
Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de résolution.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 45 :
Nombre de votants339Nombre de suffrages exprimés339Pour l’adoption324Contre 15Le Sénat a adopté.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
En application du premier alinéa de l’article 61 de la Constitution, la résolution que le Sénat vient d’adopter sera soumise avant sa mise en application au Conseil constitutionnel.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann.