Intervention de Dominique Estrosi Sassone

Commission des affaires économiques — Réunion du 4 juillet 2018 à 9h30
Projet de loi portant évolution du logement de l'aménagement et du numérique — Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Dominique Estrosi SassoneDominique Estrosi Sassone, rapporteur :

Le débat aura bien lieu mais je vous présente en amont ce que nous avons voulu modifier aux articles 46 et additionnels.

L'article 46 prévoit d'allonger la durée de décompte des logements sociaux vendus de cinq à dix ans, pour qu'ils continuent à rester dans le quota des logements sociaux. De nombreux amendements ont été déposés sur cet article ou après celui-ci pour modifier ou assouplir la loi SRU en l'adaptant aux spécificités territoriales. Je vous propose quatre amendements.

Sur les décomptes des logements sociaux vendus, je vous propose d'intégrer les logements occupés par les titulaires d'un prêt social location-accession (PSLA) pendant une durée de dix ans ainsi que les logements objets d'un bail réel solidaire. Je vous propose également de donner un avis favorable à l'amendement COM-234 de la commission des lois qui propose de décompter les places d'hébergement d'urgence conformément à ce que nous avons adopté il y a quelques jours dans le projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie.

Comme l'a montré le rapport du CGEDD, le calendrier de rattrapage de réalisation de l'objectif de 25 % de logements sociaux d'ici 2025 est irréaliste et risque de décourager les communes qui font des efforts pour construire des logements sociaux. L'écart est trop important : elles n'arrivent pas à remplir en un triennat les 50% d'objectifs restant alors qu'elles ont eu plusieurs triennats pour remplir la première moitié. Il y aura alors de plus en plus de communes carencées. De nombreux élus se demanderont à quoi bon vouloir être vertueux pour remplir les objectifs et faire des efforts financiers, si de toute façon ils vont droit dans le mur et seront sanctionnés par un arrêté de carence... Cela risque d'être contreproductif : les élus baisseront les bras et ne feront plus de logements sociaux, à la différence de ce qu'ils faisaient auparavant...

Je vous propose d'insérer deux paliers supplémentaires qui permettront de réaliser dans de bonnes conditions les objectifs de rattrapage. Point important, la réforme territoriale, en favorisant les regroupements de communes ou le développement des EPCI, a conduit de nombreuses communes à être désormais soumises aux dispositions de la loi SRU. Or ces communes qui viennent d'entrer dans le dispositif sont assujetties aux mêmes objectifs de calendrier que celles entrées en 2000 : elles devront atteindre le taux de 20 ou 25 % en 9 ans, contre 25 ans pour les autres. Cela les pénalise injustement.

Je vous propose donc d'établir un calendrier de rattrapage spécifique pour ces communes qui bénéficieront ainsi de la même durée que les communes actuelles pour réaliser leurs objectifs de construction de logements sociaux. Les communes entrantes depuis le 1er janvier 2015 pourront bénéficier du calendrier spécifique établi pour ces communes, ce qui les conduirait à respecter les objectifs en 2040. Ce serait source d'équité.

Je vous propose également deux expérimentations. La première, développée à partir de ce qui a été envisagé au moment de l'examen du projet de loi relative à l'Égalité et à la citoyenneté, permettrait aux communes ayant atteint 15% de logements sociaux et devant atteindre un taux de 25 % de logements sociaux de pouvoir conclure avec le préfet un contrat d'objectifs et de moyens qui déterminerait le nombre de triennats nécessaires pour atteindre le taux de 25 % et les objectifs de réalisation des logements locatifs sociaux que la commune s'engage à respecter pour chaque triennat. On ne supprimerait pas le taux de 25 % - je coupe court à toute caricature. Pour déterminer ses objectifs et le nombre de triennats nécessaires, la commune adoptera certains critères : le nombre de logements sociaux enregistrés sur la commune, le taux de vacance dans le parc social, la capacité de construire de tels logements en fonction de la capacité financière de la commune... Ce dispositif expérimental serait fondé sur le volontariat.

Marc-Philippe Daubresse vous proposera une seconde expérimentation pour les EPCI.

Je vous propose d'uniformiser les seuils d'application de la loi SRU en prévoyant que seront concernées uniquement les communes de plus de 3 500 habitants. Ces propositions, pragmatiques et réalistes, permettront aux maires de respecter leurs obligations de construction de logements sociaux dans de bonnes conditions. Il ne s'agit en aucun cas de les exonérer de leurs obligations. Pour redonner confiance aux élus et notamment aux maires, nous desserrons le calendrier. À travers ces deux expérimentations, nous mettrons les communes et les maires dans des conditions plus favorables. Ce pragmatisme leur apportera une bouffée d'oxygène. L'ensemble de ces mesures me paraissant équilibrées, je me prononcerai en conséquence contre l'adoption des autres propositions.

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