Le Parlement a été saisi à plusieurs reprises ces dernières années de textes relatifs à la prescription, celle des crimes commis sur les mineurs, bien sûr, mais aussi le régime général de la prescription en matière pénale, qui a été réformé en 2017.
J’ai été mobilisée sur ces textes, qui sont parfois guidés par l’émotion légitime suscitée par l’impunité dont bénéficient encore bien trop d’auteurs de violences sexuelles.
Forte de ce travail et des rencontres que j’ai pu faire avec différents acteurs, tant associatifs que judiciaires, je dois dire que ma position a évolué sur la question particulière des violences sexuelles subies par les enfants.
Bien sûr, on pourra allonger la prescription jusqu’à la faire disparaître, cela ne garantira jamais à une victime qui parle vingt ou trente ans après les faits d’obtenir justice.
Il faut faire preuve d’honnêteté en la matière : que restera-t-il après un temps si long ? Quelle enquête digne de ce nom pourra être menée ? Et que ressentira la victime, qui aura enfin pu parler et qui verra son agresseur relaxé faute d’éléments suffisants ?
Ces questions, il me semble qu’il est de notre responsabilité de ne pas les éluder. Nous ne devons pas faire croire aux victimes que l’allongement de la prescription serait un remède miracle.
L’accompagnement des personnes qui parlent très longtemps après les faits me paraît être particulièrement important, et ce tout au long de la procédure. Il faut recueillir leurs plaintes dans de bonnes conditions, mais surtout les préparer à ce que la vérité judiciaire, dictée par les principes de l’État de droit, contredise la vérité intime de ce qu’elles ont vécu.
Même si je ne suis pas une spécialiste, j’ai aussi des doutes sur l’amnésie post-traumatique, puisque les experts ne sont pas d’accord entre eux sur cette question. Mme Salmona défend cette idée, mais celle-ci est largement débattue dans le monde scientifique, c’est du moins ce que j’ai pu lire.