Ne faisons pas de procès à qui que ce soit en fonction de ce qu’il pense, de ce qu’il dit, voire de l’évolution de ses positions. Tout un chacun dans cet hémicycle a, à un moment ou à un autre, changé d’avis.
La commission des lois a pris une position nouvelle par rapport à la situation existante. Elle a considéré qu’il fallait protéger l’enfant mineur de zéro à dix-huit ans et que la façon la plus simple de le protéger était d’établir une présomption de culpabilité de l’auteur éventuel de l’infraction. Deux options se présentaient : soit une présomption irréfragable, soit une présomption simple. Tout le monde sait que la présomption irréfragable est inacceptable, ne serait-ce que parce qu’elle est interdite. Reste la présomption simple, qui laisse à l’auteur présumé la possibilité de se défendre, de faire valoir ses arguments et de s’exprimer sur la situation qui lui est potentiellement reprochée.
Hors changement de critères de la qualification de viol, tout l’enjeu est de savoir si la victime, au moment où elle a eu ces relations, a eu le discernement nécessaire pour avoir conscience de ce qu’elle faisait.
La solution retenue par la commission des lois présente l’intérêt de laisser au magistrat chargé de l’instruction du dossier, avec l’aide de tous les experts dont il peut s’adjoindre les services, le soin de déterminer si la jeune fille ou le jeune garçon qui a été victime d’agression savait exactement ce qu’il faisait ou en avait conscience. Le magistrat conserve la possibilité assez large de décider de la suite.
La question fondamentale qui se pose est la suivante : faut-il indiquer un âge – treize ans ou quinze ans – et prendre le risque de l’effet de seuil ? Quid de la victime qui a douze ans et neuf mois, treize ans et deux jours ou trois jours ou quatre jours, quatorze ans, etc. ? §La nature même de cette personne ne change pas en quelques semaines, de même que son discernement.
Je comprends bien que ce choix de la commission des lois, parce qu’il est nouveau, ne rassure pas, notamment ceux qui pensent que préciser un âge permet de fixer une barrière, d’établir un critère et qui trouvent cela confortable. Certes, c’est confortable, mais cela ne correspond pas nécessairement à la personnalité de la victime. C’est pour cela que, sur cette question, la commission des lois a adopté cette position.