Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi présentée par la présidente de la commission des affaires économiques, Mme Sophie Primas, qui a pour objet de reprendre in extenso le contenu des articles 91 et 121 de la loi ÉLAN, lesquels ont été censurés par le Conseil constitutionnel.
Mme Primas vient de rappeler les raisons l’ayant conduite à déposer cette proposition de loi, je n’y reviens donc pas. Je la remercie très sincèrement d’avoir pris une telle initiative, afin de faire en sorte que ces deux articles, que nous avons adoptés et qui ont été maintenus par la commission mixte paritaire, en lien avec nos collègues de l’Assemblée nationale, puissent, à l’issue de ce processus législatif, être définitivement votés et devenir de véritables outils, qui serviront aux bailleurs sociaux et permettront de préserver la tranquillité et la sécurité des locataires. Bien sûr, ces mesures ne seront pas suffisantes, nous le savons, une politique plus globale étant absolument nécessaire.
La proposition de loi comprend deux articles.
L’article 1er, qui reprend l’article 91 de la loi ÉLAN, pose le principe selon lequel les organismes d’HLM accordent à la police et à la gendarmerie nationales et, éventuellement, à la police municipale une autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de leurs immeubles.
La commission s’est montrée favorable à cet article, qui simplifie opportunément la procédure actuelle d’autorisation d’accès des forces de l’ordre aux parties communes des immeubles du parc social.
L’article 2 de la proposition de loi prévoit plusieurs modifications.
Tout d’abord, le premier paragraphe vise à modifier le délit d’occupation abusive des halls d’immeuble. Il tend à sanctionner un nouveau cas d’occupation abusive des parties communes. Ainsi, l’occupation en réunion des espaces communs ou des toits des immeubles, qui nuit à la tranquillité des lieux, sera punie des mêmes peines que celles actuellement prévues pour le cas d’occupation abusive des espaces communs.
En outre, la peine d’emprisonnement encourue pour le délit d’occupation abusive est aggravée et passe de six mois à un an, lorsque l’occupation est émaillée de voies de fait ou de menaces.
Le juge pourra également prononcer à titre de peine complémentaire une interdiction pour trois ans au plus de paraître dans certains lieux définis par la juridiction et dans lesquels l’infraction a été commise.
Il s’agit ainsi de reprendre en partie des modifications apportées au délit d’occupation des halls d’immeubles introduites dans la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté. Elles avaient déjà été censurées par le Conseil constitutionnel pour des motifs de forme.
Le deuxième paragraphe de l’article 2 reprend des dispositions initialement introduites par le Sénat en matière de résiliation du bail et modifiées par la commission mixte paritaire.
Le droit actuel prévoit la possibilité d’introduire une clause permettant la résiliation du bail de plein droit pour un motif résultant de troubles de voisinage constatés par une décision de justice passée en force de chose jugée. Néanmoins, cette disposition ayant été introduite en 2007, les contrats de location conclus antérieurement ne la mentionnent pas, ce qui rend plus difficile l’expulsion du locataire qui ne respecte pas son obligation d’utiliser paisiblement son logement.
Il est donc proposé que la clause permettant de résilier de plein droit le bail en cas de condamnation définitive du locataire pour troubles de voisinage soit réputée écrite dès la conclusion du contrat de bail. Les locataires seront ainsi traités de la même façon, quelle que soit la date de conclusion de leur bail.
Le dispositif a été encadré. Ainsi, le trouble de voisinage invoqué devra non seulement avoir été constaté par une décision de justice, mais aussi avoir eu lieu postérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi pour permettre le déclenchement de la clause de résiliation du bail pour les contrats en cours.
On observe de plus en plus souvent des locataires qui ne respectent pas leurs obligations, ce qui a immanquablement des répercussions sur l’ensemble de l’immeuble. Par cette proposition de loi, il s’agit d’envoyer un signal positif en direction des locataires qui respectent leurs droits et leurs devoirs et occupent paisiblement leur logement, en leur montrant que le non-respect de ses obligations par un locataire est sanctionné.
L’article 2 précise en outre que sont assimilées aux troubles de voisinage les infractions relatives au trafic de stupéfiants commises dans le logement, l’immeuble ou le groupe d’immeubles. Le contrat de bail pourra être résilié de plein droit à la demande du bailleur social, lorsque le locataire ou l’un de ses enfants mineurs sous sa responsabilité légale aura été définitivement condamné pour l’une de ces infractions commises postérieurement à la conclusion du contrat de bail.
Le Sénat avait introduit une disposition en ce sens dans le projet de loi relatif à l’égalité et à la citoyenneté. Celle-ci avait été censurée par le Conseil constitutionnel, lequel avait estimé qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.
La résiliation du bail en cas de trafic de stupéfiants va dans le bon sens. En effet, le trafic de stupéfiants est l’une des causes majeures des troubles de voisinage dans les quartiers et constitue, pour les locataires, une atteinte intolérable à la jouissance paisible de leur logement.
Face aux trafics de stupéfiants, le bailleur social est dépourvu d’outils adaptés lui permettant d’y répondre efficacement et rapidement, ce qui engendre une incompréhension des autres locataires, lesquels déplorent son inaction.
En invoquant la condamnation pénale pour trafic de stupéfiants passée en force de chose jugée pour résilier automatiquement le contrat de location, les bailleurs sociaux pourront engager plus facilement des actions à l’encontre des locataires qui nuisent à la tranquillité du voisinage par leurs agissements.
La commission des affaires économiques a ainsi adopté sans modification les deux articles de la proposition de loi.
Les nouveaux outils que nous proposons de mettre en place supposent nécessairement que toute la chaîne police-justice soit pleinement mobilisée. Lors de nos débats en commission, plusieurs d’entre nous ont souligné – ils ne manqueront certainement pas de le faire de nouveau en séance – que l’adoption de ces mesures ne constituait qu’une partie de la réponse à apporter à nos quartiers. Des politiques fortes en matière d’éducation et de prévention de la délinquance doivent également être menées. Et je ne parle pas du renforcement des moyens de la police, plus particulièrement de la police de sécurité du quotidien, et de la justice. J’espère sincèrement que le Gouvernement prendra des engagements en ce sens.
En conclusion, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cette proposition de loi.