Les zones frontalières – certains parmi vous en sont des élus, mesdames, messieurs les sénateurs – constituent des espaces privilégiés pour le développement de la coopération entre États voisins et répondre de la manière la plus adéquate aux besoins de nos populations sur le terrain.
En favorisant la mobilité des patients et des professionnels de santé dans les régions frontalières, les coopérations développées en matière de santé visent à apporter un bénéfice concret et direct au citoyen, en lui permettant de profiter de soins de qualité au plus près de son lieu de résidence, que cela soit dans un contexte de secours d’urgence, de soins programmés ou encore de pathologies chroniques.
Dans la mesure où les soins médicaux sont une compétence nationale des États membres de l’Union européenne, des accords bilatéraux dans le domaine de la santé demeurent nécessaires, parallèlement aux dispositions européennes existantes, pour éliminer des obstacles à la circulation des patients et des professionnels.
De même, le développement des expériences de coopération entre établissements de santé, de part et d’autre de nos frontières, s’est accompagné de difficultés multiples : à titre d’exemple, on peut évoquer les barrières administratives liées aux différences d’organisation sanitaire de chaque État, ou encore les problèmes de prise en charge des patients. C’est donc pour remédier à un certain nombre de ces difficultés et mieux développer les synergies à la frontière, dans un souci d’optimisation de l’offre de soins, que la négociation d’accords-cadres de coopération sanitaire transfrontalière est nécessaire.
La coopération renforcée avec la Suisse et le Luxembourg, évoquée de longue date dans le cadre des instances de dialogue existantes – je citerai notamment le dialogue sur la coopération transfrontalière franco-suisse et la Commission intergouvernementale franco-luxembourgeoise pour le renforcement de la coopération transfrontalière –, a abouti à la négociation de ces deux accords-cadres de coopération sanitaire transfrontalière dès 2014.
S’appuyant sur l’expérience acquise aux frontières belge, allemande et espagnole, et dans un souci de répondre à la demande des acteurs locaux, ces deux accords-cadres signés avec la Suisse et le Luxembourg ont été étudiés dans un objectif de complémentarité de l’offre de soins française, en tenant compte des besoins exprimés dans le cadre de la planification hospitalière et, en aucun cas, de concurrence.
L’accord-cadre avec la Suisse a été signé en septembre 2016, celui avec le Luxembourg en novembre 2016. Ces accords concernent les zones géographiques suivantes : pour l’accord-cadre signé avec la Suisse, la région Grand Est, la région Bourgogne-Franche-Comté, chère à mon cœur, la région Auvergne-Rhône-Alpes, les cantons frontaliers de Bâle-Campagne, Bâle-Ville, Berne, Genève, Jura, Neuchâtel, Soleure, Valais et Vaud ; pour l’accord-cadre signé avec le Luxembourg, la zone frontalière entre la région Grand Est et le Grand-Duché de Luxembourg.
Ces deux accords ont trois objectifs principaux.
Il s’agit, premièrement, de permettre l’accès à des soins de qualité, tant en matière de soins d’urgence que de soins programmés ou liés à une pathologie chronique, tout comme la continuité de ces soins aux populations des bassins de vie concernés, qu’ils résident habituellement ou séjournent temporairement dans les régions frontalières visées par les accords-cadres.
Il s’agit, deuxièmement, d’organiser le remboursement des soins reçus sans autorisation préalable dans la région transfrontalière concernée, les soins hospitaliers étant déterminés en fonction des déficits et des besoins constatés de part et d’autre en matière d’offre de soins.
Il s’agit enfin, troisièmement, d’optimiser et d’organiser l’offre de soins en encourageant le partage des capacités telles que les ressources matérielles et humaines et en encourageant la mutualisation des connaissances et des pratiques entre les personnels de santé des deux pays.
Ces accords sont accompagnés de protocoles d’application qui en fixent les modalités de mise en œuvre, notamment les modalités d’intervention des professionnels de santé et des structures de soins, les modalités de prise en charge par un régime de sécurité sociale, la facturation et le paiement.
Les autorités compétentes concluent en outre des conventions locales de coopération entre les structures et les ressources sanitaires dans la zone frontalière, dans un souci de complémentarité, en fonction des déficits et des besoins constatés en matière d’offre de soins. Ces conventions cadrent les conditions et modalités d’intervention des structures de soins et des professionnels de santé. Elles pourront ainsi, par exemple, organiser l’intervention transfrontalière des secours d’urgence ou la coopération hospitalière sur certaines spécialités médicales en fonction des besoins et des déficits constatés sur la zone géographique concernée.
Enfin, pour assurer le suivi de ces accords-cadres et garantir leur bon fonctionnement, des commissions mixtes sont constituées. Elles se réunissent au minimum tous les deux ans et, en tant que de besoin, à la demande des parties. Les autorités compétentes sont chargées de produire tous les quatre ans un bilan ou rapport d’évaluation sur le fonctionnement du dispositif de coopération.
Telles sont les grandes lignes de ce projet de loi, que je tenais à vous présenter au nom du Gouvernement.