Intervention de Bernard Jomier

Commission des affaires sociales — Réunion du 20 novembre 2019 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Mission « direction de l'action du gouvernement - mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives mildeca » - examen du rapport pour avis

Photo de Bernard JomierBernard Jomier :

Les chiffres affichent en effet une disproportion entre les crédits de la Mildeca et ceux portés par le fonds de lutte contre les addictions : 17 millions d'un côté, 120 de l'autre. Ce n'est toutefois pas forcément inquiétant, sous réserve que l'organe chargé de coordonner la politique en la matière a les prérogatives qui lui permettent de le faire. Pour ma part, je ne mènerai pas une guerre de religion sur les financements de la Mildeca. Le problème, c'est que les plans nationaux contiennent de plus en plus de mesures, qu'aucune ligne politique n'apparaît et que les moyens pour les mettre en oeuvre ne suivent pas. Ces plans à plusieurs centaines de mesures ont été écrits par de très bons techniciens mais ils révèlent l'absence d'intérêt et de vision politique du sujet.

Sur le tabagisme, nous avons certes une bonne politique et, d'ailleurs, la consommation de tabac recule. Sur l'alcool, les choses sont plus compliquées, notamment car le chef de l'État a estimé qu'il ne fallait pas envoyer de signaux négatifs à l'industrie - du vin, en particulier. Il vient d'ailleurs de décider que n'aurait pas lieu l'initiative « Janvier sobre » : on peut certes discuter de sa pertinence, mais est-ce vraiment au chef de l'État de se mêler de telles affaires, de si bas niveau dans la hiérarchie des initiatives publiques, et pour tout dire si peu jupitériennes ? Il y a manifestement une difficulté à aborder ces questions sous l'angle de la santé publique de manière cohérente ; 20 % de personnes ne respectant pas les normes de consommation à moindre risque, c'est une proportion bien trop élevée, et qui pose d'autres problèmes de société - les violences faites aux femmes, par exemple.

S'agissant du cannabis, on continue à se mettre la tête dans le sable. Notre politique ne marche pas ! Le cannabis est une substance dangereuse pour la santé, elle est massivement consommée, et notre politique de guerre à tout prix est un échec ! Toutes les pistes peuvent être mises sur la table mais, au moins, changeons quelque chose.

Deux grands principes manquent à cette politique : intégration et déconcentration. Il faut plus d'intégration, c'est-à-dire une autorité qui la pilote vraiment, afin d'éviter la dispersion des moyens, et plus de déconcentration, car les enjeux varient selon les territoires. À Paris, nous avions mis en place une mission métropolitaine de prévention des conduites à risque, pour analyser les enjeux de dépendance, parmi lesquels figuraient les jeux vidéo. Les salles de consommation à moindre risque ne règleront pas du tout le problème des addictions, car elles s'adressent à un public désocialisé. Elles correspondent néanmoins à un besoin, à Strasbourg comme à Paris, et je crois néanmoins que d'autres ouvriront, une fois les municipales passées.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion