Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 3 mars 2020 à 14h30
Parquet européen et justice pénale spécialisée — Explications de vote sur l'ensemble

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi que nous nous apprêtons à voter soutient deux grandes ambitions, auxquelles nous ne pouvons que souscrire.

Il adapte tout d’abord la procédure pénale de notre pays à la mise en place en novembre prochain, à Luxembourg, de la nouvelle autorité judiciaire que représente le Parquet européen. Celui-ci sera compétent pour poursuivre les fraudes portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne, dont on estime, chaque année, le préjudice à plusieurs dizaines de milliards d’euros.

La coopération renforcée, qui est instituée par ce texte dans le domaine judiciaire, correspond à une demande ancienne que notre pays a lui-même impulsée et que le Sénat a ardemment défendue dans les modalités qui ont été retenues.

Cette partie du texte, plutôt consensuelle, a pu faire naître des inquiétudes quant à l’éventualité d’une disparition du juge d’instruction dans notre droit interne ou à l’ambivalence statutaire et l’indépendance du parquet. J’avais moi-même posé la question du modèle procédural applicable dans le cadre de la mise en place de ce Parquet européen.

Ces doutes et inquiétudes ont été levés et, en tout état de cause, la pratique nous révélera rapidement ses premiers enseignements.

Par ailleurs, ce texte renforce la justice pénale spécialisée, en particulier en matière d’atteintes environnementales.

Pour ce dernier type de contentieux, on relève que les poursuites sont rares et les sanctions trop légères : seules 1 % des condamnations au pénal concerneraient l’environnement. C’est pourquoi la création d’une juridiction spécialisée au sein de chacune des trente-six cours d’appel, avec des magistrats dédiés, devrait permettre de rendre des décisions plus rapides et plus efficaces.

La réponse pénale adaptée que le projet de loi met également en place par la voie d’une convention judiciaire d’intérêt public – la convention judiciaire environnementale – permettra d’obtenir une sanction plus rapide par le paiement d’une amende, d’une remise en état et, si celle-ci est impossible, d’une réparation du préjudice subi.

Ces conventions, créées par la loi Sapin II, ont déjà fait leurs preuves en matière fiscale. Il ne fait aucun doute que la rapidité avec laquelle la sanction sera rendue, laquelle peut s’élever jusqu’à 30 % du chiffre d’affaires de l’entreprise mise en cause, conjuguée à la possibilité de rendre publique cette convention, sera de nature à rendre dissuasifs ces délits.

Je me réjouis également que notre assemblée ait adopté des amendements permettant l’immobilisation d’un navire qui aurait jeté ses eaux de ballast dans les eaux territoriales, en attendant un cautionnement qui garantirait le paiement des amendes et la réparation des dommages.

Cette nouvelle justice pour l’environnement que le Gouvernement met en place va bien évidemment dans le bon sens, même si malheureusement elle ne suffira pas aujourd’hui, à l’aune des scandales environnementaux qui ont fait l’actualité planétaire, à lutter contre la criminalité environnementale. C’est pourquoi il me semble urgent d’engager des discussions à l’échelle mondiale afin qu’une réglementation internationale voie enfin le jour.

Pour conclure, le groupe La République En Marche ne peut que soutenir cette évolution majeure de la coopération européenne que représente le Parquet européen et l’adaptation du droit national à cette nouvelle institution européenne.

Mon groupe approuve également le renforcement des juridictions pénales spécialisées, dont l’objectif est assurément de raccourcir les délais et d’apporter une plus grande maîtrise de la technicité du droit applicable.

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